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La fureur du fleuve
Par SarahCollins
Originales  -  Mystère  -  fr
24 chapitres - Complète - Rating : T (13ans et plus) Télécharger en PDF Exporter la fiction
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Le jardinier et la cuisinière

Bruce Springsteen - Mansion on the hill

3

Le jardinier et la cuisinière

La vie des morts consiste à survivre dans l'esprit des vivants. Cicéron

La famille Fitzgerald devait sa fortune aux aciéries de Charlestown mais avait fui la vue qu'elles offraient, préférant s'établir dans le quartier chic de Silver Lake. Celui-ci était aussi éloigné que possible des eaux verdâtres du fleuve où on avait trouvé le corps sans vie de Michelle Duncan.

— Je me demande comment Michelle est venue jusqu'ici, s’interrogea Matt à voix haute. C'est à l'autre bout de la ville par rapport à son quartier et elle n'avait pas de voiture. À pied, ça fait un sacré chemin.

— Elle a sans doute pris le bus, répondit l'inspecteur Becker qui conduisait.

Matt haussa un sourcil, en pensant au service de transports en communs plus que défaillant dans cette partie de la ville.

— Elle avait vraiment très envie de voir son tuteur, on dirait.

Silver Lake, un ancien village incorporé à Charlestown en 1865, constituait un véritable parc à thème inspiré de la Nouvelle-Angleterre. Les propriétés de style colonial s'étendaient sur des superficies souvent supérieures à deux ou trois hectares, entre deux collines ondoyantes.

— Vous pensez qu'on aurait dû prévenir Martin avant de venir ? demanda Matt, qui ne se sentait pas tranquille.

— Pourquoi donc ? Il vous a confié l'enquête, il doit bien s'attendre à ce qu'on interroge des gens.

La voiture franchit le pont de bois qui enjambait le vif cours d'eau traversant la résidence. La propriété Fitzgerald contenait un court de tennis, une écurie, un pré entouré de barrières blanches et quantités de chênes. La résidence familiale surplombait tout le domaine, au sommet d’une petite colline.

— Les Fitzgerald ne sont pas juste des « gens », vous le savez. Ni pour cette ville, ni pour Martin Clemmons.

Becker lui lança un regard perçant et le jeune substitut se sentit mis à nu. L'espace d'un instant, il eut l'impression que le policier connaissait ses aspirations et ses ambitions secrètes. Qu'il savait qu'il ne s'inquiétait pas seulement pour la campagne municipale de son patron mais aussi pour son propre avenir.

Comme s'il lisait dans ses pensées, il reprit d'une voix lente et mesurée :

— Peu importe les échéances électorales. Si le fils de Richard Fitzgerald a quelque chose à se reprocher – ce qui est loin d'être prouvé pour le moment – il devra en répondre et Clemmons fera le nécessaire. Il est ambitieux, comme tous ceux qui l'ont précédé à ce poste, mais jusqu’à présent, il a toujours correctement fait son boulot.

Était-ce une fausse impression ou sa dernière phrase sonnait-elle comme une mise en garde ? Mais fidèle à son habitude, le visage de Ronnie Becker était impénétrable.

Il se gara dans une cour circulaire pavée, à proximité d'une petite maison blanche. Un homme âgé jardinait, vêtu d'une salopette. Il portait une casquette à l'effigie des Yankees.

Ils descendirent de voiture et se présentèrent. Il faisait beau et chaud en ce début de mois de mai. Il se retint d'ôter sa veste de costume. Ce n'était pas professionnel.

— Bonjour. Est-ce que Richard ou Eleanor Fitzgerald sont là ? demanda Becker.

— Non, ils sont en voyage. Une croisière, je crois. Je ne suis que le jardinier en fait. Gary Jones pour vous servir. Ma femme et moi, on garde la maison jusqu'à leur retour.

— Et leur fils David, est-ce qu'il est présent ?

— Oh non, il est retourné à la fac. Il va à Sullivan Lawrence, ses parents sont très fiers de lui. Il est brillant à ce qu'on m’a dit.

— Attendez … Il est retourné à la fac ? releva Matt. Il n'y était pas ?

— Non, il était ici le week-end dernier. Il est parti dimanche, assez tôt, pour rentrer sur le campus.

Le lendemain de la découverte du corps de Michelle. Matt et Becker échangèrent un rapide coup d’œil, ce que ne manqua pas de noter le vieux jardinier.

— Mais pourquoi est-ce que vous me posez toutes ces questions d’abord ?

— Est-ce que vous savez pourquoi il a quitté la fac le week-end dernier ? demanda Ronnie Becker, sans tenir compte de l'interruption.

— Aucune idée … Enfin, comme je vous l'ai dit, je ne suis que le jardinier, pas son baby-sitter. Il ne se confie pas à moi et on se voit pas beaucoup. Mais il est poli le gamin.

— Et pourquoi est-il reparti ?

— Ses examens vont bientôt commencer.

Matt hocha la tête. Les examens de fin d’année se profilant, David Fitzgerald avait peut-être voulut s'offrir un dernier instant de détente avant la période stressante qui s'annonçait.

— Gary, qu'est-ce que tu fais ? s'écria quelqu’un. J'entends des voix. Tu parles encore tout seul, c'est ça ?

Une femme d'un âge respectable venait de se pencher par la fenêtre.

— Non, Susie, c'est la police.

— La police ? Mais pourquoi ? On n'a rien fait de mal, pourtant. Ou bien, c'est encore à cause des contraventions. Toi et tes excès de vitesse ...

— Mme Jones, est-ce que vous pourriez venir s'il vous plaît ? intervint Matt, un sourire amusé sur les lèvres. On a quelques questions à vous poser.

Elle sortit promptement, son tablier à fleurs solidement nouée autour de ses hanches larges. Ses cheveux argentés ramenés en un chignon lâche bouclaient sur sa nuque et ses doigts étaient encore mouillés quand elle lui serra la main.

Elle l'examina sans détour.

— Vous n'avez pas vraiment l'air d'un policier, jeune homme.

Il éclata de rire.

— En fait, je ne le suis pas, reconnut-il alors qu'à ses côtés, Becker s'autorisait un sourire. Je travaille pour le bureau du procureur mais lui, en revanche, est inspecteur de police.

— Ah, vous êtes avocat alors ?

— Oui madame.

— Figurez-vous que notre fils a commencé des études de droit mais il a laissé tomber. Ça lui prenait trop de temps entre son boulot et les cours du soir.

— Oui, la fac de droit n'est pas forcément la partie la plus enthousiasmante de la vie d'un avocat, reconnut-il poliment. En fait, nous avons des questions à propos de la soirée de samedi dernier. Est-ce que vous avez parlé à David ce soir-là ?

— Non, répondit le couple Jones, presque au même moment.

— Attendez … En fait, je ne lui ai pas parlé mais je l'ai vu. Par la fenêtre, exactement comme je vous ai vu arriver tout à l'heure. Je les ai vus descendre de voiture et rentrer dans la maison, dit Mme Jones.

— Donc, il n'était pas seul ? Est-ce qu'il était accompagné d'une fille ?

— Je ne crois pas non. En tout cas, je n'en n'ai pas vu. David ne ramène presque jamais de fille ici. Il fréquentait une gentille petite de son lycée avant d'aller à Sullivan Lawrence, mais elle est allée dans une fac différente et ils ont rompu. Remarquez, je peux le comprendre : il m'est arrivé exactement la même chose avec un de mes amours de jeunesse. Il s'appelait ….

— Susie, bougonna son mari, pendant combien de temps vas-tu me bassiner les oreilles avec cette vieille histoire ? Et puis, sans ça, on ne se serait jamais rencontré alors c'est un mal pour un bien.

— Mais je ne dis pas le contraire, protesta Mme Jones. Je faisais juste remarquer que …

— Susie, je crois que tu les ennuies.

Matt le remercia d'un sourire et poursuivit.

— Revenons-en à la soirée de samedi. Qui était avec David quand vous l'avez vu ?

— Son ami Gregory … Désolé, je ne me souviens pas de son nom de famille. Quelque chose comme Davis ou … Enfin, c'est un condisciple de l’université.

— Il est du coin ? questionna Becker.

— Non. David et lui se sont rencontrés à la fac, je crois qu'ils sont dans la même fraternité.

— Il est souvent venu ici ?

— Deux ou trois fois par an, répondit Gary Jones. Ce n'est pas énorme mais je me souviens de lui pour l'avoir croisé à quelques reprises.

— Il faut dire qu'il est très beau garçon, gloussa Susan.

Son époux leva les yeux au ciel.

— Ce n'est certainement pas pour cette raison que je l'ai remarqué, Susie.

— Quand vous les avez vus, est-ce qu'ils quittaient la propriété ou y revenaient ?

— Non, ils revenaient. J'ai vu la voiture franchir le pont et se garer dans la cour. Ils étaient en train de descendre quand je les ai aperçus.

— Quelle heure était-il ? demanda Matt, de plus en plus intéressé.

— Oh, je ne suis pas sûre ... Je ne suis pas vraiment insomniaque mais quand je me couche tôt, je n'arrive jamais à dormir d'une traite alors je me lève souvent au beau milieu de la nuit. Ce n’est pas comme Gary. Il faudrait un tremblement de terre pour le réveiller !

— Il faisait complètement noir ?

— Oui. Je pense qu'il n’était pas loin de minuit.

Le substitut du procureur hocha la tête. Le docteur Lang situait le décès de Michelle entre vingt-trois heures et quatre heures le lendemain matin.

— Je suppose que vous ignorez ce que David et son ami Gregory faisaient dehors ?

— Ils ne me l'ont pas dit bien entendu – d’ailleurs, je n’ai pas posé de question – mais j'ai supposé qu'ils étaient allés danser. C'est ce que font les jeunes le samedi soir, non ? Ils vont en discothèque ? s'enquit-elle, en se tournant vers son jardinier de mari.

— Pourquoi est-ce que tu me regardes ? s'étonna Gary Jones. Je n'ai pas la moindre idée de ce que font les jeunes de nos jours.

Entre-temps, l'inspecteur Becker avait sorti une photo de la jeune Michelle. À la vue du cliché – une photo scolaire d’une banale tristesse – le cœur de Matt se serra. Toutes ces années au bureau du procureur l'avaient sans doute endurci, lui apprenant de la plus impitoyable des manières que la cloison entre la vie et la mort, entre la plus innocente des photos et celle chirurgicale d'une autopsie était mince, mais il ne pourrait jamais s'y faire. Quelque part, qu’il n’y soit toujours pas habitué le rassurait.

— Est-ce que vous avez déjà vu cette jeune fille ici ? demanda Becker.

Il ne les quittait pas du regard alors qu'ils plissaient les yeux pour regarder la photographie. Ils se la passèrent à tour de rôle puis secouèrent la tête.

— Non.

— Vous êtes certaine qu'elle n'était pas ici samedi soir ? Ou un autre jour ?

— Je n'en suis pas sûre mais je ne pense pas l'avoir vue, déclara Mme Jones en lui rendant la photographie. Elle leva les yeux et le fixa d'un regard soudain perçant. C'est la fille qui est morte la semaine dernière, n'est-ce pas ? Celle qui s'est noyée près du pont ? Je me rappelle avoir vu ça aux infos.

Becker se contenta d'un sourire sans joie et ils prirent congé du couple.

— Je pense qu'il faut qu'on parle à Martin, cette fois, dit Matt alors que la voiture s'éloignait de la propriété.

OOoOo

Quelques heures plus tard, Matt rentrait chez lui. Il habitait Washington Park, un quartier résidentiel à distance raisonnable de son travail et du lycée où avait enseigné sa femme.

Leur maison ressemblait à peu de choses près à toutes celles de leur rue. Heureusement que la relative variété des agencements permettaient de les distinguer, sinon, il aurait fini par se tromper et entrer dans la mauvaise maison, un de ces quatre, avait plaisanté Terry le jour de leur emménagement.

Cette remarque, parfaite dans sa subversion, résumait bien leurs prises de bec au sujet de leur logement. Terry, née et élevée dans les quartiers sud de Charlestown, voulait s'installer dans le South Side, quand Matt ne jurait que par les banlieues éloignées. Washington Park constituait un bon compromis entre le désir de la jeune femme de rester proche de ses racines, du modeste endroit où elle avait grandi et ce qu'elle appelait son « côté petit bourgeois ».

Il entra dans le petit vestibule. Les voix de sa fille Kayla et de sa grand-mère lui parvenaient depuis le salon alors qu'il se déchaussait.

Son ancienne belle-mère lui adressa un sourire quand il pénétra dans le salon. Les lumières étaient éteintes et seul l'écran de télévision illuminait la pièce.

— Salut Kayla ! lança-t-il à la cantonade.

Il s'attendait à ce qu'elle cesse immédiatement de regarder son film pour lui sauter dans les bras. Peine perdue. Elle tourna brièvement la tête vers lui, juste le temps de lui jeter un regard morne, digne d'une vraie ado lobotomisée. Et dire qu'elle n'avait que sept ans. Ça promettait.

Il soupira et se rendit dans la cuisine, vite rejoint par Jeannie.

Aujourd'hui encore, presque trois ans après le décès de son épouse, il avait du mal à regarder sa mère en face. Les deux femmes se ressemblaient de manière troublante et à chaque fois qu'il croisait son regard, il avait l'impression d'avoir sous les yeux le futur dont on l'avait privé.

Bien que résidant à New York, elle était d'une aide inestimable pour ce qui était d'élever sa fille tout en lui rappelant de cruelle manière ce qu'il avait perdu. Jeannie Robinson, c'était Terry dans trente ans. Sauf qu'il ne la verrait jamais ainsi, qu’elle ne l’aurait jamais l’opportunité de vieillir, de voir leur fille grandir et de devenir grand-mère à son tour.

— J'avais oublié que c'était sa soirée cinéma aujourd'hui, dit-il, plus pour se changer les idées que par réel intérêt. Qu'est-ce qu'elle a choisi comme film ?

Dora l'exploratrice, sourit-elle.

— Encore ?

— Elle l'adore. C'est un programme ludique et intéressant, ajouta Jeannie, très sérieuse.

Il leva les yeux au ciel en ouvrant le réfrigérateur. Jeannie était enseignante, comme l'avait été sa fille, mais franchement ...

— C'est abrutissant, rectifia-t-il en reniflant. Mon Dieu, cette manière qu'elle a de répéter « sac à dos, sac à dos », ça me fiche la chair de poule.

Comme souvent lorsqu'il rentrait tard le week-end, Jeannie lui avait laissé de quoi manger – un gratin de pommes de terre et du bœuf. Il la remercia d'un faible sourire.

— Matt, tout va bien ? lui demanda-t-elle, pleine de sollicitude. Vous avez l'air soucieux.

— Oui, ça va. J'ai juste eu une longue journée. Le boulot, vous savez ce que c'est ...

Elle hocha la tête et retourna dans le salon. À moitié avachie sur le canapé, Kayla répétait avec un enthousiasme débordant « Chippeur, arrête de chipper !» pendant que sa grand-mère lui caressait les cheveux.

Le sourire aux lèvres, Matt réchauffa son plat et s'assit derrière le plan de travail.

Rien de tel que sa Kayla pour lui remettre du baume au cœur. Et avec une affaire comme celle de Michelle Duncan, il en avait bien besoin.

OOoOo

Quelques heures plus tôt

Martin Clemmons revenait tout juste d'un débat à la salle des fêtes quand Matt entra dans son bureau.

Le procureur avait les yeux rivés sur des feuilles remplies de chiffres et de diagrammes. Les derniers sondages, sans doute, songea-t-il en prenant place en face de lui.

— Ça s'est bien passé ? s'enquit-il.

— Le débat oui. Mais regardez-moi ces sondages. J'ai soixante-quinze pour cent d'opinions favorables à Silver Lake et moins de vingt dans le South Side. Et ça ne décolle pas. Et vous, comment se présente votre affaire ?

— Pas mal. C'est justement pour vous en parler que je suis là.

Il lui résuma brièvement son entrevue avec Mary Abbott, la meilleure amie de Michelle.

— La police ne l'avait-elle pas interrogée juste après la mort de la petite Duncan ?

— Si, confirma-t-il. J'ai vérifié.

— Alors pourquoi ne leur a-t-elle pas dit la vérité dès le début ?

Matt grimaça.

— Je suppose qu'elle voulait se monter loyale. Tout le monde a cru que c'était un accident, donc elle n'a pas dû réaliser que c'était important.

— Il n’empêche qu’on aurait sans doute avancé plus vite si elle avait dit dès le début que Michelle n'avait jamais été chez elle ce soir-là.

Son subordonné haussa les épaules. Qui pouvait savoir ? Certes, les mensonges par omission de Mary leur avaient coûté du temps, toujours précieux dans ce genre d'affaires, mais à cette époque, la police n'enquêtait pas sur un homicide, mais une noyade accidentelle.

— Où était donc Michelle le soir de sa mort ? voulut savoir Clemmons.

— Chez son tuteur. Il l'aidait à préparer son SAT, expliqua-t-il.

— Vous avez pu lui parler ? Est-ce qu'on est sûr et certain qu'elle est arrivée chez lui ?

— À quoi est-ce que vous pensez ? Une mauvaise rencontre en chemin ?

Clemmons ôta ses lunettes et s'essuya les yeux. Il avait l'air très las et en manque de sommeil.

— Quelque chose comme ça, oui. Je ne sais pas trop, Matt. Vous avez l'air de beaucoup tâtonner, non ?

— Oh, répondit-il d'un ton dégagé, plus tant que ça. Becker et moi, on est allé chez les Fitzgerald et figurez-vous ...

Son patron leva la main, les sourcils froncés.

— Les Fitzgerald ? s'exclama-t-il. Mais enfin, bonté divine, qu'est-ce qu'ils ont à voir avec toute cette histoire ?

— David Fitzgerald est – était – le tuteur de Michelle, se contenta de répondre le substitut du procureur. Et d'après Mary Abbott, c'est chez lui qu'elle se rendait le soir de sa mort.

Cela laissa son voix son patron. Celui-ci, visiblement préoccupé, resta silencieux une bonne minute avant de reprendre la parole.

— Est-ce que vous êtes vraiment sûr que Michelle est arrivée chez les Fitzgerald ?

— Personne ne l'a vue là-bas, reconnut Matt avec une certaine réticence. Mais la cuisinière de la famille m'a dit que David était bien présent cette fameuse soirée. Et qu'il est reparti sur le campus avec un ami le lendemain de sa mort.

Chacun des traits du visage de Martin indiquait qu'il n'était pas ravi d'apprendre sa visite chez les Fitzgerald mais il le laissa continuer.

— La cuisinière Mme Jones les a vus revenir, son copain et lui, plutôt tard. Je sais, ce que vous allez dire, déclara-t-il, anticipant la prochaine objection. Ça ne prouve rien. Fitzgerald et son ami étaient sans doute sortis faire la fête, ils n'ont peut-être même pas vu Michelle Duncan le soir de sa mort … mais je pense qu'il vaut mieux s'en assurer.

Il savait que Martin Clemmons préférerait se jeter dans l'Hudson plutôt que d'importuner sans raison Richard Fitzgerald, dont les donations et celles de ses riches amis s'élevaient à plusieurs dizaines de milliers de dollars. Le puissant industriel avait d'autre part contribué à financer un dîner, lui permettant de récolter 45 000 dollars supplémentaires.

— Pour l'instant, les Fitzgerald ne sont pas au courant, crut-il bon d'ajouter. Ni David, ni ses parents n'étaient présents aujourd'hui. Richard et Eleanor sont en croisière.

Clemmons balaya l'argument d'un revers impatient de la main.

— Leurs employés les auront prévenus. Surtout si vous avez mentionné Michelle Duncan devant eux.

— Peut-être qu'ils essaieront de le faire, corrigea-t-il, mais n'oubliez pas que les Fitzgerald se trouvent au beau milieu de l'océan. On a un peu d'avance sur eux pour le moment.

— Avec Internet et tous les moyens de communication modernes, ils seront prévenus bien assez tôt, objecta Clemmons qui ferma brièvement les yeux, comme pour se protéger des ennuis qu'il pressentait déjà.

— Raison de plus pour se dépêcher d'aller interroger David Fitzgerald. On a encore une petite chance de le prendre par surprise.

Martin laissa une longue minute s'écouler avant de hocher la tête une fois.

— Vous irez lui parler lundi, sur le campus de sa fac, décréta-t-il.

Secrètement soulagé, Matt acquiesça et prit congé. Il était content d'avoir obtenu gain de cause mais ne pouvait se départir d'une étrange impression. Pourquoi Clemmons souhaitait-il attendre lundi pour l'interrogatoire quand il savait que Matt et l'inspecteur Becker étaient prêts à le mener dès le lendemain ? Etait-ce pour pouvoir, malgré tout, prévenir Richard Fitzgerald de la direction que prenait leur enquête et conserver le contrôle des opérations ?

Alors qu'il regagnait son bureau, les paroles de Ronnie Becker lui revinrent en mémoire. « Il est ambitieux, comme tous ceux qui l'ont précédé à ce poste, mais il a toujours correctement fait son boulot », lui avait confié le policier sur le chemin de la propriété des Fitzgerald.

Matt espérait ardemment qu'il ait raison.

 
 
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