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au 31 Mai 21 :
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De la difficulté de l'abandon.
Par Corps Etranger
Originales  -  Romance/Drame  -  fr
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Kyan.
Il y'a des moments comme ça, où la vie vous prend et ne vous lâche plus d'une semelle. Vous avez beau vouloir vous en dépêtrer, vous vous débattez dans les sables mouvants d'un bonheur impossible à taire. C'était une sombre nuit de Décembre, Noël approchait et je n'arrivais pas à dormir. Mes draps étaient d'une saleté proprette, le genre de saleté que l'on a envie de garder, car elle renferme des odeurs particulières, qui vous plaisent ou non, mais qui vous rattachent au réel. Vous y retrouvez l'accent doucereux d'une ancienne cigarette, ou les prémices d'un parfum entêtant, porté au coin d'un cou, sous l'omoplate.

Je n'arrivais pas à dormir et fenêtres ouvertes, j'observais la rue d'en haut. J'avais loué une chambre de bonne en plein Paris, 600 euros de loyer si je promettais mes services et mon don pour le bricolage au gardien d'en bas. Le gardien d'en bas, il est pas mal, il n'est ni portuguais, ni espagnol, pas d'accent bizarre ni de curiosité mal placée. Le gardien d'en bas, il est plutôt grand, les cheveux bruns mal coupés, ses vêtements sentent les voyages et dans sa voix se trouve une faille sereine. De celles qu'on ne cache pas, mais qui s'impose, qui s'impose tellement que nul n'est besoin de la dissimuler sous des artifices. Le gardien d'en bas il a des mains de charpentier mais il est incapable d'enfoncer correctement un clou dans un mur. Alors parfois je l'aide, histoire d'être bien placé dans son estime, histoire que je ne vois pas de Paris que les trottoirs sales et sa soupe populaire.

Il était 22 heures sur la chaîne-hi-fi, un peu plus dans ma tête. Les boutiques sont restées ouvertes, pour les achats de dernière minute. J'ai enfilé une tenue lambda, dévaler les huit étages qui me séparaient du sol en essayant de faire le plus de bruit possible. J'aime montrer que je suis là. J'ai ouvert le portail de la cour, en remarquant que comme moi, Paris était insomniaque. On nous bassine avec New-York, Tokyo et Ibiza, mais il y'a dans les boulevards de Paris une aura particulière que je n'ai jamais trouvé ailleurs. Je viens d'un Sud où le soleil est monnaie courante, où la mer est à portée de pas. Le Sud des clichés, où l'on parle fort, où l'on arrose tout à l'huile d'olive en se noyant dans les saveurs anisées d'un pastis. Mon Sud à moi, c'est celui des chants la nuit tombée, accompagnés par les guitares flamenco, par les mains abîmées des gens du village. Mon Sud à moi, c'est ma grand-mère qui s'évente avec des prospectus pendant que l'on frappe nos pieds sur la table, devant la terrasse.

Ce soir là, Paris avait froid, mes mains avaient vite atterri dans les poches d'une veste qui m'avait coûté la peau des fesses. Pour vivre correctement, j'alternais trois petits boulots. Le matin je vendais des fringues de luxe, l'après-midi je nourrissais des gosses chez McDo et le soir on me payait pour être DJ. A force d'ambition, j'avais fini par me faire un nom dans les clubs de la capitale. Avec tout ça, je n'avais pas le temps de m'embêter avec des relations amoureuses. Ne visitaient ma chambre que des corps, dépourvus d'âme, dépourvus d'identité. J'étais bien trop pressé pour aimer. Je suis arrivé Place de la Bastille sans même m'en apercevoir, perdant mes yeux en route dans les illuminations qui rendaient les parvis et les façades moins tristes. Là, sur un petit bout de trottoir, un petit groupe de personnes jouaient de la musique en criant un espagnol relatif. J'ai soudain retrouvé dans le tintement de leurs instruments ce qui me manquait ici : la passion. Ils étaient vieux, dans l'ensemble. Il y'avait une fille, aux airs de gitane, probablement mineure, dont les jambes flottaient dans de longs jupons mordorés, et qui balançait aux visages des passants ses cheveux d'ébène. Leur musique signifiait tout ce qui me poussait à vivre encore. Au milieu de tout ce groupe, perché sur une boîte en bois, il y'avait ce mec qui portait un chapeau de paille percé un peu partout. Entre ses mains dansait un tambourin, et de ses pieds nus, ils frappaient des rythmes qui sentaient bon mon enfance. Il avait plein de cernes sous les yeux, aussi bleues que ses pupilles. Je suis resté à l'observer pendant au moins deux heures, sans bouger, appuyé contre la vitrine d'une boutique. Il ne descendait de sa boîte que pour embrasser les piétons sur la bouche. La plupart crachaient un peu plus loin. Pas envie d'être contaminé par un tzigane.

Aux alentours de minuit, ils se sont arrêtés, sous l'ordre de celui qui semblait être le plus vieux. Grosse barbe, carrure impressionnante, un sourire aussi grand que sa bouche qui pourrait m'avaler tout entier. Ils ont commencé à partir, leurs instruments sous les bras, sur le dos. Sous une impulsion inconnue, je les ai suivis. Au bout d'un petit moment, la danseuse s'est retournée, m'a observé avec un sourire vermeil. Sa peau avait la couleur du chocolat au lait.

- Qu'est-ce que tu veux, pilluelo ?

J'ai appris plus tard que pilluelo voulait dire gamin. C'est comme ça qu'il m'appelle, maintenant. J'ai arrêté ma marche lente, un peu interloqué. Dans sa voix il y'avait comme des couteaux qui m'auraient transpercer tout de suite si le regard du joueur de tambourin ne m'avait pas apaisé à la minute près où j'ai posé mes yeux sur lui. Il a poussé la danseuse, et j'ai commencé à lui parler.

- Votre musique. D'où vous venez ?
- On ne vient de nulle part. On est des voyageurs.


Il m'avait répondu avec un accent anglais. Jamais je n'aurais pu imaginer ça, tant par la couleur de sa peau que par ses vêtements. Il portait une chemise rouge retroussée aux manches et un pantalon en lin qui dévoilait ses chevilles presque féminines.

- Paris c'est pas très touristique.
- On est pas là pour ça. Les Parisiens sont friqués, c'est tout. Je m'appelle Ismael.


Il s'est approché encore un peu plus, m'a claqué deux bises sur chaque joue. Comme si j'étais de la famille.

- Et ça, c'est Ivresse.

Ismael m'a dit ça en pointant son tambourin des yeux. Ismael. Ivresse.
 
 
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