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au 31 Mai 21 :
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Papas
Par KalySo
Gundam Wing/AC  -  Romance/Surnaturel  -  fr
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    Chapitre 8     Les chapitres     2 Reviews    
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Huitième Mois: Novembre

Huitième Mois : Novembre

Les derniers jours de congé de Réléna passèrent à une vitesse affolante. Elle n’était pas inquiète outre mesure de l’état dans lequel elle retrouverait son royaume et ses fonctions au sein de la Communauté Interspatiale, mais elle ne souhaitait pas quitter ses amis dans une situation pareille, sans compter que Duo pouvait désormais accoucher à tout moment. Elle voulait être là pour la naissance de sa filleule, autant pour soutenir son meilleur ami que pour ne pas être folle d’inquiétude à des milliers de kilomètres.

Mais elle n’avait plus le choix. Son frère l’avait appelée hier au soir pour lui rappeler qu’il n’était pas capable d’assumer ses fonctions plus longtemps, son manque de liberté commençant à lui peser et sa fiancée réclamant plus d’attention. La jeune femme avait bien failli faire une crise d’apoplexie en entendant les piètres excuses de son aîné, mais ce dernier avait raccroché rapidement, prétextant une affaire urgente. Si elle l’avait eu en face d’elle, elle l’aurait giflé, bien que cela ne soit pas forcément bien vu de sa position !

Elle était donc dans sa chambre à rassembler ses affaires lorsque le carillon résonna dans le hall. Sachant ses amis au jardin à profiter de la piscine, elle profita de cette heureuse interruption pour abandonner ses préparatifs et descendit ouvrir. Elle ne fut pas surprise de découvrir Trowa, Quatre et Wufei sur le pas de la porte, ils avaient appelé deux jours plus tôt pour prévenir qu’ils rentreraient plus tard que prévu.

"Bonjour ! Comment allez-vous ? Trowa, comment va ta jambe ?"

"Si ça ne te fait rien, Réléna, nous pourrions en discuter autour d’un bon thé", proposa Quatre, tout sourire devant la déconfiture de son amie.

Elle balbutia mais libéra finalement le passage et partit rapidement prévenir Heero et Shin qui se détendaient à l’arrière de la maison. Ils revinrent tous trois et trouvèrent le petit comité installé dans le grand salon à siroter un thé à la menthe, spécialité de Quatre.

"Bien le bonjour, les gars !" les salua le natté.

"Shin-san", le salua Quatre alors que les autres lui adressaient un signe de tête et un sourire. "Comment vas-tu ?"

"Aussi bien que possible compte tenu du caractère de mademoiselle", plaisanta-t-il en désignant son ventre. "J’ai des envies de pisser pas possible, des contractions quand je m’y attends pas et quelques crises de temps à autre, mais rien qui ne sorte de l’ordinaire."

"Je vois… Et pour Duo ?"

Toute l’attention se concentra sur lui à cette question et le silence se fit instantanément. Il s’assit entre Heero et Réléna et prit une profonde inspiration avant d’entamer les explications :

"Ca pourrait aller mieux. Il est revenu quand vous vous êtes envolés pour Amsterdam, précisa-t-il d’une voix calme, et quand Quatre a téléphoné. Il a été assez… véhément, je dirai ! Mais il commence à comprendre son erreur : il a pardonné et s’est excusé auprès d’Heero, mais il va lui falloir du temps avant d’accepter… Sans compter que les contractions le perturbent et que je vais devoir assumer l’accouchement. Comme quoi c’est toujours moi qui me tape le sale boulot !"

Il avait tenté de plaisanter, mais le ton n’était pas convaincu et personne ne fut dupe. Heero passa un bras protecteur autour de ses épaules et Quatre lui sourit de ce sourire fraternel dont il avait le secret. Décidant que le moment avait duré plus que nécessaire, Wufei intervint pour entamer le gros de la discussion de cette fin de journée :

"En ce qui concerne MacBee, l’opération s’est bien déroulée si l’on excepte l’excès de zèle de certains", tempéra-t-il en coulant un regard vers Trowa qui boitait légèrement et devait rester le plus possible assis.

Le Français lui répondit par un froncement de sourcil.

"Vous avez trouvé tout ce que vous vouliez ?" s’informa Heero, interrompant l’échange silencieux.

"Oui, mais l’analyse de toutes les pièces à conviction devrait prendre encore quelques jours et MacBee ne sera placé en garde à vue que demain. Les interrogatoires officiels ne commenceront qu’à ce moment-là", ajouta-t-il en plantant ses yeux d’onyx dans ceux de son ami Américain.

Ce dernier acquiesça, comprenant l’allusion. Le plus haut gradé des Preventers après Lady Une venait de lui accorder une entrevue avec son agresseur. Il aurait enfin sa confrontation.

La conversation varia légèrement et il fut convenu que l’entretien aurait lieu dans une semaine. Réléna déplora de ne pouvoir être là, ses responsabilités la rappelant au palais. De son côté, Wufei annonça qu’il quitterait la demeure Winner dès le lendemain matin pour rendre une courte visite à Sally qui ‘souhaite dire deux mots à son mari concernant sa désertion dès le premier mois de sa future paternité annoncée !’.

* * *

Les jours qui suivirent se passèrent dans une atmosphère silencieuse. Ceux qui étaient restés réfléchissaient à ce qui arriverait d’ici quelques jours ou bien se projetaient dans un futur calme et tranquille ou ils vivraient enfin sans soucis de quelque ordre que ce soit. Ceux qui étaient repartis reprirent leurs fonctions – précédé d’une engueulade et d’une baffe magistrale au ‘crétin qui sert de frangin’ – ou bien tentèrent de reconquérir leur femme – séjour sur le canapé forcé. Bref, la vie avait repris son cours en attente d’un petit divertissement qui ne manquerait pas d’arriver.

Evénement qui électrisait chaque jour un peu plus Heero, déjà sous pression par l’arrivée de sa fille qui approchait à grands pas et du comportement de Duo. Il ne comprenait pas vraiment toutes les implications de sa dernière apparition, mais il espérait plus que tout que cela allait s’arranger avant longtemps.

* * *

Après cinq jours à dormir sur le canapé du salon, le dos de Wufei n’aspirait plus qu’à une chose : un matelas qui n’ait pas de nom que le nom ! Ce fut donc avec une joie et un soulagement palpables qu’il passa le seuil de sa chambre de la demeure Winner. Le lit semblait le narguer, le tenter… L’allumer ! Non, ça c’était la fatigue… Se soutirant à cette proposition pourtant plus qu’alléchante, il déposa sa valise et fit demi-tour pour regagner la salle à manger où les autres l’avaient attendu pour dîner. Jetant un regard à sa montre, il se rendit alors compte qu’il était presque vingt-et-une heures.

« C’est tout de même un peu tard pour dîner, ils auraient dû commencer sans moi » pensa-t-il, un agréable pincement de cœur lui rappelant que c’était à ça que l’on reconnaissait ses amis.

La discussion allait bon train dans la salle à manger alors qu’il approchait. Les rires, les exclamations indignées et les imitations parfois cocasses lui mirent le sourire aux lèvres : il retrouvait sa famille.

Poussant la porte doucement, il ne put cependant pas faire un pas de plus que la voix autrefois cristalline et aujourd’hui doucement grave de Quatre l’accueillit :

"Wufei ! Tu en as mis du temps !" lui reprocha-t-il gentiment.

"C’est vrai ça", surenchérit l’Américain. "Je commençais à avoir faim !"

"Baka", gronda Heero en lui tapant gentiment la tête. "Un peu de retenue."

"Mais Hee-chan", supplia le natté devant le regard impitoyablement attendri du Japonais.

"Asseyons-nous", proposa Trowa qui ne souhaitait pas voir les choses dégénérer avant d’avoir rempli son estomac.

Ils s’installèrent tous autour des délicieux mets qui avaient été préparés et chacun y alla de son anecdote. Wufei leur rapporta son cours séjour chez lui, ironique et un brin embarrassé :

"Je n’ai même pas eu le temps de poser mes valises qu’elle hurlait déjà", commença-t-il. "D’après elle, je suis un irresponsable, un fou téméraire à tendance suicidaire – désolé de te piquer ton rôle, Heero – et un père indigne. Le môme est pas encore là que je suis déjà un mauvais père, fit-il en levant les yeux au ciel. Qu’est-ce que ce sera quand je serai en mission à l’autre bout du monde !"

"Ne t’en fais pas, Wufei", intervint Quatre. "Elle finira par comprendre. Et puis une grossesse dure neuf mois, tu trouveras bien un peu de temps à lui consacrer."

"Ouais, c’est pas comme si elle attendait des jumeaux non plus", lança Shin. "Et puis elle en est qu’au début, c’est vers les six mois que ça devient vraiment encombrant", ajouta-t-il en grimaçant, une main massant son ventre.

La tablée éclata de rire et ils finirent le repas. Ce ne fut qu’au dessert que le vif du sujet fut abordé.

"Au fait, où en est l’enquête", s’informa Trowa.

"Toutes les pièces à conviction ont été analysées et le réseau en grande partie démantelé", le renseigna le Chinois en faisant abstraction du regard violine vissé sur lui. "Les interrogatoires débutent demain après-midi."

Il se tourna alors vers Heero et Shin, attendant leur réaction. Le Japonais ne quittait pas des yeux son compagnon qui avait la tête baissée et le regard lointain. Il se ressaisit en quelques secondes et ancra son regard dans celui de Wufei. Il n’eut nul besoin de poser sa question, le Chinois y répondit immédiatement :

"Demain à 11h."

Le natté acquiesça et quitta la table, une vague excuse de mal de crâne franchissant ses lèvres pincées. D’un regard, Heero s’excusa à son tour et remercia Wufei avant de partir à la suite de son compagnon.

Il le retrouva dans leur chambre, assis sur le lit, les yeux dans le vague et les poings crispés. Sans bruit, il s’assit en tailleur derrière lui et entreprit avec une patience angélique de dénouer ses épaules tendues, ses bras contractés et ses mains crispées. Lentement, il vit son compagnon se détendre et s’appuyer contre son torse. Il cessa finalement ses massages et lui détacha les cheveux avant de laisser ses mains les aérer délicatement. Aucun murmure ne s’éleva dans la pièce, il comprenait et n’avait besoin d’aucune explication quant à la réaction de Shinigami.

Ce dernier, sentant la fatigue et le mal de dos le gagner, se dégagea sans brusquerie de l’étreinte réconfortante du brun qui l’aida tout de suite à se déshabiller et à se coucher. Heero le rejoignit quelques minutes plus tard et le laissa se couler dans ses bras, heureux autant l’un que l’autre de retrouver un peu de chaleur après le froid qui avait glacé leurs entrailles suite à l’annonce du ‘rendez-vous’.

Ils s’endormirent dans le silence le plus total que même leurs respirations ne parvinrent pas à troubler.

* * *

Le lendemain matin, le silence régnait toujours lorsqu’ils se retrouvèrent tous les cinq à la table du petit déjeuner. Seuls les couverts et les biscottes crevaient l’atmosphère glacée qui était tombée sur la maison la veille au soir.

Quatre, ayant prévu les réactions de ses amis, avait remonté ses barrières au maximum pour ne pas risquer de perdre l’équilibre mental durement acquis dans sa jeunesse après de nombreuses crises. Seules les émotions émanant de Trowa lui parvenaient, leur lien plus profond l’empêchant de bloquer totalement ce qui lui parvenait de son amant. Mais heureusement pour lui, le Français n’était que calme et sérénité, comme si ce qui se passait aujourd’hui ne le concernait pas. Intrigué, Quatre aborda le sujet une fois dans la salle de bains.

"Que crois-tu qu’il va se passer ?"

Le châtain resta pensif un instant, son pantalon sur les hanches et un bras de chemise enfilé. Il comprenait les interrogations de son ange blond, mais il n’était pas sûr que son explication soit bien prise.

"Je pense que MacBee aura la frousse de sa vie suivie d’un bon crochet du droit avant même de pouvoir dire quoi que ce soit", répondit-il doucement. "Et je crois que c’est tout ce qu’il mérite", ajouta-t-il avant que Quatre ne pense à protester. "Je ne présume pas comprendre ce que peux ressentir Duo ou Shinigami, peu importe, mais l’un comme l’autre ont vécu des épreuves difficiles qui ont mené à cette agression. Pour moi, Duo a besoin d’un exutoire, et MacBee est cet exutoire. Et compte tenu de ses antécédents, c’est tout ce qu’il mérite."

Il finit de se vêtir et tourna la tête vers Quatre qui passait sa veste de costume, un immense sourire aux lèvres.

"Tu as raison", approuva l’arabe.

Il s’approcha de son amant et noua ses bras autour de son cou, approchant ses lèvres de la bouche du Français.

"Comment tu fais pour décrypter aussi bien pareille situation sans être empathe ?" murmura-t-il à la frontière de ses lèvres.

"L’habitude, mon chéri", affirma le châtain en piquant la bouche rose d’un baiser. "L’habitude."

* * *

Les portes en verre coulissèrent et livrèrent le passage au cinq jeunes gens. Toutes les personnes présentes dans le hall cessèrent leurs conversations pour les détailler. La surprise se peignit peu à peu sur leurs visages lorsqu’ils reconnurent les anciens pilotes de Gundams, héros de la paix. Cela faisait plusieurs semaines que la rumeur circulait comme quoi ils se trouvaient dans les environs pour les problèmes de santé d’un des leurs, mais rien n’avait été dit quant au genre du problème ! Genre que chacun pouvait désormais identifié en regardant l’ancien pilote du Gundam DeathScythe.

Les quelques heureux spectateurs n’eurent cependant pas l’occasion d’extrapoler davantage que déjà, les cinq jeunes hommes s’engouffraient dans un ascenseur. Dans le réduit les conduisant au troisième sous-sol, le mieux protégé et celui soupçonné inviolable, le silence régnait toujours. D’un parce que les heures qui allaient suivre risquaient d’être plus qu’éprouvante pour eux, et de deux parce que Shinigami n’avait pas supporté les regards posés sur lui et son ventre proéminent dans le hall. On est papa poule ou on l’est pas !

Un léger tintement se fit entendre et les portes s’ouvrirent, leur ouvrant le passage sur un long couloir blanc. Il y eut un vague murmure à côté d’Heero qui ne saisit que les mots « maniaque » et « hôpital » avant que Wufei ne les invite à le suivre.

Deux minutes plus tard, ils étaient assis autour de la table dans la pièce mitoyenne de la salle d’interrogatoire. Wufei avait décidé qu’un petit breefing ne ferait de mal à personne.

"Je passe le premier", informa-t-il d’une voix qui ne permettrait aucune interruption ni objection. "En tant que plus haut gradé présent entre ces murs, vous devez m’obéir. Je réponds de vos actes tant que vous serez dans ce bâtiment. Je n’admettrai aucun écart de conduite, de la part d’aucun d’entre vous", ajouta-t-il en posant son regard sur le natté face à lui. "Si MacBee retourne à sa cellule avec ne serait-ce qu’un hématome visible, nous aurons de gros ennuis."

Il s’arrêta, laissant le temps à ses paroles de pénétrer l’esprit troublé de ses amis. Il reprit d’un ton un brin plus calme :

"Comme vous le voyez, la salle est basique niveau équipement : un miroir sans tain, une caméra de vidéo surveillance et des micros placés un peu partout. Cependant, la caméra et les micros ne peuvent être contrôlés que depuis la pièce où nous nous trouvons, et uniquement celle-ci. Les disques sont installés dans les armoires du fond."

Il savait que ses anciens coéquipiers comprenaient pourquoi il avait choisi cette salle et pas une autre. Il espérait juste qu’elle ne les inciterait pas à braver plus que son autorité à lui.

"Des questions ? Bien. Quatre et Trowa, je vous charge de la console. Que chacun fasse selon son libre arbitre. J’y vais."

Après un dernier regard à chacun, il sortit. Quatre et Trowa se placèrent devant la console sans échanger un mot et Shinigami s’avança face à la vitre. MacBee n’avait pas encore été amené, Wufei était parti le chercher lui-même afin d’éviter les paperasseries bureaucratiques inutiles. Heero vint discrètement se placer à sa droite et lui prit la main. Le natté la serra, heureux d’avoir le soutien de son compagnon. L’angoisse avait disparu désormais. Il était serein, peut-être même plus qu’il ne l’avait jamais été.

Cinq minutes plus tard, Wufei ouvrait la porte et entrait, suivi d’un homme de stature moyenne, des cheveux blonds rasés et des yeux d’un bleu très clair qui lui faisaient un regard perçant sur son visage dur. Il affichait un air dédaigneux qui ne plut pas du tout à Heero. Ce genre d’homme était particulièrement difficile à faire parler.

« Enfin, pour le commun des mortels » ironisa-t-il en son for intérieur.

Et il n’eut presque pas tort. Après les questions habituelles auxquelles le coupable non présumé répondit sans faire la moindre difficulté, sachant pertinemment que ses geôliers connaissaient déjà les réponses, il ne fallut à Wufei que deux petites heures pour faire presque avouer MacBee qu’il était le commanditaire de la tentative d’assassinat de la présidente de la Communauté Interspatiale au mois de juillet AC 200. Ce qui dut le plus étonner le blond, c’est qu’à l’instant où les aveux allaient franchir ses lèvres, Wufei se leva et quitta la pièce sans un mot ni un regard.

Les quatre autres, ayant suivi tout l’interrogatoire depuis la pièce adjacente n’en furent pas réellement surpris. Leurs entraînements de pilote avaient eu un tronc commun, et la matière « meilleure façon de mener un interrogatoire » faisait partie de cette branche commune. Cependant ce qu’ils ne comprirent pas, c’est pourquoi Wufei permit à Shinigami de prendre la relève à ce moment-là. Heero et Quatre tentèrent bien de protester, mais la détermination de Shinigami était infaillible et ils durent s’y plier.

* * *

Contrairement à la sortie du premier, la porte n’émit aucun grincement à l’entée du second homme. Car c’était indubitablement un jeune homme, un ancien pilote de Gundam même, bien qu’il est pris un sérieux embonpoint en quatre ans. Mais ses réflexions s’arrêtèrent là. Ses yeux venaient de croiser le regard de son nouveau bourreau, et ce qu’il venait d’y voir lui fit plus peur que les pires menaces qu’avaient pues proférer le Chinois quelques instants plus tôt.

Une rage sourde brûlait dans la nuance bleutée des iris de l’autre. Et la lueur carmine qui relevait le contour de la pupille semblait appeler à la vengeance par le sang. Son sang, en l’occurrence. Une sueur froide descendit le long de sa colonne vertébrale, et de grosses gouttes se formèrent sur ses tempes. Son esprit en proie à une frayeur encore jamais égalée lui hurlait de s’enfuir, mais c’était impossible. Alors il recula, le plus loin possible de cette bête enragée qui ne voulait que sa mort. Il remonta ses jambes contre son torse et se mit à trembler, aussi apeuré qu’un enfant privé de lumière un soir de tempête.

"Tu as peur."

La voix était froide et impersonnelle. Métallique et claquante. Un coup de fouet à ses oreilles après le silence pesant qui avait envahi la pièce à l’entrée de l’homme.

"Mais sais-tu ce qu’est la véritable peur ?"

Il n’avait pas la force de le regarder dans les yeux, ses yeux étaient trop terrifiants pour être fixés. Et pourtant, il avait la vague impression que la voix s’était adoucie. Sûrement un leurre…

"La peur véritable, celle qui te cloue sur place et t’empêche même de penser, de rester rationnel, de ne serait-ce qu’envisager de réfléchir à un moyen de t’en sortir. Non, tu ne sais pas. Du moins, pas encore…"

Un léger déclic se fit entendre et il sursauta, relevant le visage vers celui de l’autre en face de lui. Un étrange sourire avait fleuri sur ses lèvres, et il n’aima pas ce sourire C’était celui d’un chasseur ayant acculé sa proie et qui se régale par avance de ce qu’il va pouvoir en déguster. Un bourdonnement frappa à ses tympans, et ses tremblements reprirent de plus belle.

Un éclat de lumière agressa ses pupilles déjà rétractées par la peur. Une lame de couteau se matérialisa dans son champ de vision et il eut à peine le temps de réaliser sa présence qu’elle appuyait dangereusement fort du côté de sa carotide.

"Sais-tu l’effet que ça fait de sentir une lame comme celle-ci te transpercer la peau ? Rompre les couches successives de l’épiderme, éclater les petits vaisseaux, perforer la paroi abdominale et balayer les organes… Le pire, ce n’est pas la douleur, non… C’est l’impression soudaine d’être un ballon de baudruche qui se dégonfle !"

L’ironie transparaissait et un rire léger s’éleva dans la pièce exiguë. Son sang se glaça dans ses veines et il se demanda vaguement si sa carotide était toujours aussi vulnérable une fois transformée en bâtonnet gelé.

"Tu sais, j’ai bien envie de tenter l’expérience… Sur toi bien sûr ! Moi je connais déjà : la guerre, les combats, tout ça m’a donné mon compte en matière de plantage… Mais toi, tu as bien failli m’avoir."

Il frissonna de nouveau, la folie perçant lentement dans la voix ne lui disant rien qui vaille. Il l’avait poignardé ? Mais quand ? Où ? Il n’avait jamais rencontré cet homme de sa vie… Ils étaient loin d’avoir les mêmes centres d’intérêt.

"Tu ne te rappelles pas… Oh ce n’est pas grave, moi je m’en rappelle parfaitement ! 25 juillet AC 200. Palais royal de Sank. Tentative d’assassinat de la présidente de la Communauté Interspatiale. Echec lamentable. Le tireur est déjà mort au moment où il devrait faire son boulot. Tout ceci n’était qu’un piège en réalité ! Un piège pour nous mettre la main dessus, car le plus grand symbole de la paix après Réléna Peacecraft, ce sont les anciens pilotes de Gundam ! Tentative de fuite… Mais je suis là, sur ton chemin à ce moment-là. Et que fais-tu ?"

La folie glacée avec laquelle s’exprimait son geôlier était encore pire que la pression de la lame sur sa gorge. Et malgré ça, malgré la peur qui paralysait son cerveau et le moindre de ses muscles, il se souvint.

Et il avoua.

* * *

Le retour se fit dans le silence le plus complet. L’interrogatoire pour le moins étrange qui venait d’avoir lieu avait certes permis de démanteler le plus grand réseau d’opposition armée de ces deux dernières années, mais l’impact psychologique sur l’un des protagonistes n’était pas encore déterminé.

Wufei avait pris le volant et il sentait que l’atmosphère qui régnait dans l’habitacle ne tarderait pas à lui renouer les épaules. En temps de guerre, il n’avait que rarement prêté attention à l’ambiance de groupe : ils n’avaient réellement été tous ensembles qu’une seule fois, ne se voyant le reste du temps que par deux ou trois ; il s’arrangeait alors pour se retrouver seul, aussi bien en mission qu’en repos. Mais après l’affaire Mariemaia, il avait pris conscience qu’il ne pouvait pas ignorer ses coéquipiers, car eux seuls pouvaient comprendre ses interrogations, ses doutes quant à l’avenir, ses cauchemars face aux souvenirs, et son angoisse devant sa culpabilité. Ils avaient alors pris l’habitude de se voir, de passer quelques jours chez les uns ou les autres, de passer les dimanche chez Trowa et Quatre. Ensuite, la relation des deux premiers pilotes avait évolué et Wufei s’était rapproché de Sally. En moins d’un an, il s’était reconstitué une famille.

Aujourd’hui, il ne pouvait imaginer sa vie sans ses anciens frères d’arme devenus des amis plus que précieux. Et la situation actuelle, sans le perturber, ébranlait leur relative tranquillité. Sans compter la grossesse de Sally, celle de Duo semblait presque surnaturelle et la prise de contrôle de Shinigami remettait en question les bases de leur amitié. Mais pour le moment, la détresse psychologique de l’Américain entraînait un silence glacial et oppressant que rien ne semblait capable de briser.

Wufei se reconcentra sur sa conduite. Dans moins d’un quart d’heure ils seraient de retour à la demeure Winner, et il sentait qu’une séance de méditation ne serait pas de refus.

* * *

La voiture était à peine arrêtée qu’il s’éjecta de son siège aussi vite que son ventre rebondi le lui permettait. Il ignora les appels de Heero et de Quatre, ainsi que les jurons de Wufei ou le silence réprobateur de Trowa et monta les escaliers quatre à quatre. Il ne ralentit qu’une fois dans sa chambre.

De nouveau, cette impression d’être en dehors de son corps, de voir mais de ne pas contrôler, de subir encore et toujours. Il se planta directement devant le miroir et ne fut même pas surpris de constater que ses iris avaient perdu leurs paillettes et viraient du rouge vers le bleu. Il sentit confusément que cette fois-ci, il ne pourrait plus reculer, que l’heure des aveux était arrivée et que leur précédente dispute, dix jours auparavant, n’avait été qu’un prélude à celle s’annonçant.

Pourtant, Duo avait pardonné à Heero, s’était excusé de sa perte de confiance. Il avait alors pensé que tout était réglé jusqu’à l’arrivée de la petite, mais le regard qu’il devinait dans le miroir lui soutenait le contraire et il s’apprêta à affronter la colère de son double.

Elle éclata comme un orage en plein été : forte et dévastatrice, et il sut qu’il n’échapperait pas à la case ‘explications’.

"Pourquoi t’as fait ça ?"

Une fois de plus, il n’eut pas le temps de répondre que Duo enchaînait :

"Depuis quand tu te permets de m’enfermer de la sorte ? C’est moi qui ai toujours eu le contrôle ! Comment as-tu osé ! De quel droit t’es-tu permis de faire une chose pareille ! J’ai compris mes erreurs et je me suis excusé, et toi tu m’enfermes encore ! Pourquoi t’as fait ça !"

"J’ai fait ça pour toi !"

Sa réponse avait fusé avant même qu’il n’ait le temps d’y penser. Les yeux mauves parurent surpris de cette subite prise de parole. Duo voulut rétorquer, mais pour une fois Shinigami ne lui en laissa pas le temps :

"J’ai toujours tout fait pour toi ! Et aujourd’hui, non seulement je le fais pour toi, mais aussi pour Heero et Laora ! Tu crois que ça lui a plu à Heero de savoir que tu n’avais plus confiance en lui ? Que tu avais voulu abandonner ? Que même la petite ne t’aurait pas retenu ? Tu lui avais pourtant dit que tu l’aurais, avec ou sans lui, mais comment pourrait-il l’avoir sans toi ! Il a bien fallu que j’intervienne, non seulement pour te sauver toi à l’hôpital, mais aussi pour sauver ta vie, ton mariage et ta fille ! Comme d’habitude, je t’ai protégé, et tout ce que tu trouves pour me remercier c’est de vouloir me faire disparaître au péril de ta vie que j’ai sauvée un nombre incalculable de fois ! Si j’avais su, tu serais mort il y a bien longtemps sur L2 et je ne serai pas là à me prendre la tête pour un mec qui n’est pas fichu d’être reconnaissant !"

Il reprit sa respiration, sa tirade l’ayant épuisé. Sondant rapidement ses réserves d’énergie, il sentit qu’il ne tarderait pas à passer dans le rouge. Mais ça n’avait plus d’importance : il avait tout balancé, tout avoué et maintenant il ne souhaitait plus que s’endormir. Peu importerait où il se réveillerait, du moment que les choses étaient claires. Bien sûr, il regretterait Heero et Laora, mais il avait le sentiment d’avoir enfin accompli ce pour quoi il avait été mis dans ce corps, la raison de son existence.

"Je n’avais jamais réalisé, commença la voix hésitante de Duo en le sortant de ses pensées, que c’était aussi éprouvant pour toi… Mais si je t’enfermais, c’était parce que le peu de fois où tu sortais de ton propre chef, je ne me rappelais de rien… Et quand je découvrais ce que tu avais fait, je prenais peur… Peur que tu ne nous fasses du mal, autant à toi et moi qu’aux autres…"

"Jamais je ne les aurai blessés, ils comptent trop pour toi", murmura Shinigami.

"Je sais, mais j’ai joué l’autruche : c’est tellement plus facile !" ironisa Duo. "Quand tout a commencé avec Heero, j’ai cru un instant que tu tenterais de t’immiscer, mais tu n’as rien fait. Par mesure de précaution, je t’ai enfermé. Je n’aurais pas dû, je suis désolé… Quand j’ai eu mes absences, j’ai cru que tu cherchais à prendre le contrôle, que tu étais jaloux, alors il a fallu que je trouve une solution. Et une fois à l’hôpital, même si je les aime plus que ma propre vie, je n’ai pas eu le courage de les mettre face à toi et j’ai cherché à nous faire disparaître."

L’aveu lui fit mal, mais il savait que si cela ne sortait pas maintenant, il ne serait jamais tranquille avec lui-même et son autre lui jusqu’à la fin de leur vie. Oui, il avait abandonné. Oui, il avait cherché la mort. Oui, il avait voulu mourir pour le tuer avec lui. Mais aujourd’hui il regrettait amèrement sa lâcheté et en payait les conséquences. Et il assumait entièrement.

"Je ne sortais pas vraiment de mon propre chef", reprit Shinigami, penaud. "La grossesse a provoqué un dérèglement hormonal qui a affaibli tes barrières. C’est comme ça que j’ai pu faire quelques apparitions, mais jamais plus de quelques minutes, je n’étais pas assez fort. Après tous ces mois à être enfermé, je n’arrivais pas à contrôler ton corps et je perdais rapidement mes moyens. J’aurai dû essayer de te parler, mais ma colère, mon désir de vengeance obscurcissaient mon jugement, et je me doutais que tu ne voudrais rien entendre."

"C’est le moins qu’on puisse dire", fit Duo en rigolant.

Ils rirent quelques instants avant qu’un silence agréable ne s’installe. Ils se fixèrent quelques minutes puis Shinigami reprit :

"Je suis désolé, sincèrement."

"Moi aussi", répondit Duo en échos.

"Bien, maintenant que les choses sont claires, je vais faire un petit somme, mes batteries sont dans le rouge depuis plus de trois minutes", avoua l’entité en grimaçant.

"Oui, et les miennes ne sont pas mieux. Faudrait pas que… Laora, c’est ça ?... En pâtisse, n’est-ce pas ?"

"Ouais, allez, à la sieste !"

Ils se jetèrent de concert sur le lit et gigotèrent jusqu’à ce que la position plaise à chacun. Ils étaient heureux d’avoir enfin réglé leurs comptes, mais le plus dur restait encore à faire : mener leur grossesse à terme.

"Au fait", fit Duo juste avant de sombrer, "c’est un très beau prénom Laora…"

* * *

Heero était plus qu’exaspéré. Que Shinigami ait besoin de s’isoler un peu après le début de journée qu’ils avaient vécu, il pouvait le comprendre. Mais qu’il reste enfermé dans leur chambre tout le reste de l’après-midi, il en était hors de question. Il n’avait même pas déjeuné ! Le brun voulait bien être compréhensif, mais il ne fallait pas pousser le bouchon un peu trop loin, non plus.

Sourd aux arguments de ses amis, il monta les escaliers et entra en force dans la chambre. Il avait bien l’intention de lui faire passer cette envie de bouder qui le prenait de plus en plus souvent.

"Allez, debout !" s’exclama-t-il. "Y en a marre de tes crises d’adolescent en retard, tu descends manger maintenant sinon je…"

"Sinon tu quoi, Hee-chan ?"

Il s’arrêta, coupé dans son élan par la voix et l’expression du natté. Enfin, il le retrouvait ! Pas en colère, pas triste ni apeuré, juste lui. Duo Maxwell-Yuy. Les yeux encore embrumés de sommeil et la joue froissée par le pli de l’oreiller, mais c’était bel et bien lui. Il le regarda se frotter les yeux avec ses poings comme un petit garçon, s’étirer et ramener sa natte sous son nez pour juger de la gravité des dégâts engendrés par sa sieste. C’était forcément lui. Ca ne pouvait pas en être autrement.

"Duo ? C’est bien toi ?"

Le doute subsiste toujours tant qu’on n’a pas de confirmation. Alors rien ne coûte de demander. Il le regarda se lever doucement, une main sous son ventre dans le vain espoir de l’alléger, il l’observa chausser ses charentaises et tirer un peu sur son tee-shirt pour le défroisser. Il examina sa démarche lorsqu’il s’avança vers lui, et il ne reconnut pas l’aisance avec laquelle se déplaçait Shinigami malgré l’élément proéminent sur le devant. Alors il eut confirmation avant même l’acquiescement.

"Oui c’est moi Hee-chan. On y va ? Je meurs de faim !"

Il lui saisit le bras et l’entraîna dans le couloir. Trop abasourdi par son bonheur, Heero ne parvint à réagir qu’une fois arrivés en haut des escaliers. Il ceintura alors précautionneusement l’Américain et le serra contre lui, respirant l’odeur de ses cheveux, s’imprégnant de leur parfum qui n’avait pas changé. Et pourtant, quelque part il y avait une fragrance qui était revenue et qui lui avait inconsciemment manqué. La fragrance de Duo.

"Ne me laisse plus, baka", lui intima-t-il.

"Je n’en ai pas l’intention, Hee-chan", le rassura le châtain en accentuant ses paroles dune caresses sur le dos de sa main.

* * *

La fin d’après-midi se déroula sans encombre, et personne ne revit Shinigami de la journée. Au moment de se coucher, Heero eut tout de même un léger doute et il en fit part à Duo, n’ayan pas eu le temps de se pencher dessus plus tôt.

"Où est Shin-san ?"

Si Duo parut surpris de la question, il n’en laissa rien paraître et se coucha tout en répondant :

"Il se repose. Nous avons eu des explications un peu… houleuses, et nos batteries étaient à plat. Mais il lui faut plus de temps que moi étant donné qu’il a contrôlé notre corps pendant trois mois non-stop sans y être habitué. Et n’étant pas un prisonnier facile, il se fatiguait très vite à me retenir."

"Très bien", approuva le brun. "Et pour après ?"

"Après quoi ?" demanda Duo, cette fois visiblement surpris.

"Que va-t-il devenir après l’accouchement ? Il paraît que ce sera à lui de l’assumer…"

"De ça, rien n’est moins sûr", contra l’Américain. "En revanche ce qui est certain, c’est que nous cohabiterons toujours et ce jusqu’à la fin de notre vie. Je ne peux pas le supprimer au péril de ma vie et me tuer au péril de la sienne serait d’un égoïsme sans borne. Il dit qu’il a une solution, mais que nous ne pourrons envisager de la mettre en pratique qu’après la naissance de Laora."

Heero acquiesça sans un mot et se coucha aux côtés de son compagnon enfin retrouvé. Ils n’avaient pas reparlé de sa volontaire disparition, mais rien n’était plus à dire, le double de l’un ayant transmis ses sentiments à l’autre. Ils s’étaient mutuellement compris et pouvaient repartir sur de nouvelles bases.

* * *

Deux jours plus tard, Duo était toujours aux commandes et Shinigami toujours au pays de Morphée. Il avait été décidé la veille que Heero, Trowa et Quatre iraient faire les achats nécessaires à la petite et à son père dès la sortie de la maternité pendant que Wufei resterait avec l’Américain si jamais il arrivait quelque chose. Et comme avait dit Duo, ça lui ferait les pieds !

Les trois compagnons partirent dans le milieu de la matinée. En ce mercredi après-midi, les magasins étaient bondés d’adolescentes et de mères au foyer qui, profitant que les enfants participaient à diverses activités sportives ou culturelles, sortaient tranquillement flâner dans les rues du centre-ville et les centre commerciaux.

Ayant pourtant déjà participé à ce genre d’épreuves, Heero avait été loin de se douter que Quatre raffolait autant voire plus que Duo du shopping. Et à la tête que faisait Trowa, cela faisait bien longtemps qu’il s’était résigné. A l’heure du déjeuner, n’ayant pas fait qu’un tiers de leurs achats, ils déjeunèrent rapidement dans une petite cafétéria et reprirent leurs emplettes jusqu’en milieu d’après-midi. Il était presque seize heures trente lorsqu’ils revinrent enfin à la demeure Winner.

* * *

Quatre ouvrit la porte, une dizaine des sacs dans chaque main et suivi par les deux brun qui soutenaient chacun une extrémité d’un grand carton.

"Posez-le contre le mur, je vais demander à ce qu’on aille décharger ce qu’il reste. J’espère qu’on n’a rien oublié…"

"Ya pas de risque", rétorqua Trowa.

"Vu le nombre de sacs et de petits plus que tu as tenu prendre, je suis certain que Laora sera habillée pour les six prochaines années au moins", plaisanta Heero.

"Oui, mais tu sais ça grandit très vite ces petites bêtes-là", argumenta-t-il le jeune chef d’entreprise. "En moins de temps qu’il n’en faut pour y penser, pouf ! Elle passe son examen interspatial et conduit la navette familiale !"

"On n’en est pas encore là, Quatre", dit Heero d’une voix douce et amusée. "Mais c’est gentil de te soucier d’elle à ce point."

"C’est normal, c’est ma filleule préférée !"

Ils se sourirent avant que Trowa ne fasse judicieusement remarquer que le principal intéressé par les achats n’avait pas encore daigné montrer le bout de sa natte.

"Il est peut-être encore fatigué et se repose dans sa chambre", suggéra le blond.

"Wufei serait au moins venu nous le dire", contra Trowa.

"Sauf s’ils sont à l’arrière", rappela l’arabe. "Tu sais bien que sur la terrasse on n’entend rien."

Sentant un vague malaise lui vriller l’estomac, Heero se rendit dans leur chambre, plantant dans l’entrée ses deux amis. Mais personne ne se reposait sur le matelas et il redescendit à la cuisine. Personne non plus. Un peu plus inquiet que ce qu’il n’aurait admis, le Japonais traversa le salon vers la terrasse, espérant de toutes ses forces trouver son compagnon sur un des transats. Mais non. Il fit demi-tour et repassa par la pièce de repos. Et c’est là qu’il le vit.

Son soulagement nu fut cependant que de courte durée lorsqu’il détailla le langage corporel du châtain. Il était raide, le dos aussi droite qu’une planche en bois et même sa respiration semblait difficile. Subrepticement, des frissons agitaient ses épaules mais il n’avait aucun autre mouvement. Inquiet, Heero s’avança en l’appelant. Il n’eut pas de réponse mais Duo tourna la tête vers lui. Ses lèves étaient crispées et un fin voile de sueur recouvrait son front.

"Duo ? Que se passe-t-il ? Où est Wufei ?"

Il inspira difficilement et répondit :

"Les Prev’ l’ont appelé il y a une heure. MacBee est transféré et ils ont besoin de lui pour régler les détails."

Il reprit sa respiration et la bloqua, ses yeux fermés. Un autre frisson le secoua et il souffla avant de refixer son regard à celui de Heero.

"Qu’y a-t-il Duo-kun ? Tu m’inquiètes…"

"Hee-chan", commença Duo d’un voix douce comme s’il parlait à un enfant qu’il avait peur d’effrayer, "ça va faire une demi heure que j’ai des contractions toutes les deux minutes…"

Cette fois-ci ce fut au tour d’Heero d’être parcouru par un long frisson. Il n’aurait su dire si c’était de peur ou d’excitation, mais il sentit la coulée de sueur froide qui allait avec. Il attendit cependant que Duo ait terminé pour agir.

"… Et je pense qu’il va falloir mettre de côté quelques règles du code de la route si tu ne veux pas que j’accouche dans la voiture !"

Tsuzuku

 

Achevée le 24 août 2005.

 
 
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