Notes : - Bien que cette fiction ait été écrite dans l’optique d’un concours, les personnages et l’univers dépeint dans cette fiction m’appartiennent intégralement. Merci de ne pas emprunter cette histoire ou l’un de ses composants sans m’en avoir parlé au préalable. -Comme dit plus haut, cette fiction a été écrite dans le cadre d’un concours, le même que celui pour lequel j’ai écris « Twinkle Twinkle little star » et « Chocolat blanc, chocolat noir. » Ce coup-ci, le thème était « un enfer de sang et de cendre »... Pour la petite histoire, j’ai trouvé l’idée à cinq heures du matin, le jour où l’on devait rendre les textes, avant de m’endormir… X3 Je ne suis pas franchement contente de ce texte, surtout la troisième partie, un peu bâclée à mon goût à cause de mon état de fatigue. Mais je me suis quand même bien amusée en l’écrivant. (D’autant plus que grâce à cette fic, j’ai pu accéder à la finale… Je vous inviterais d’ailleurs à aller visiter mon profil, dans lequel j’ai mis le lien pour aller lire l’excellente histoire de mon concurrent, qui vaut vraiment la peine d’être lue. :3) -Je m'excuse d'avance pour toutes les fautes d'orthographes qui doivent trainer, et j'espère que vous prendrez autant de plaisir à lire cette fic que j'en ai eu en l'écrivant. :D ______________________________________________________________________ Il ne faut pas (toujours) tout mettre sur le dos de Murphy Aima avait toujours eu une vision précise de l’enfer. La même vision que le commun des mortels, véhiculée par le christianisme et l’occident depuis des siècles, celle d’un endroit sous terrain où étaient envoyées les âmes des pécheurs après leur mort. C’était un lieu sombre et rougeoyant, parcourut de brasiers et de coulées de laves, où dansaient des diablotins à peau rouge, qui allaient cul nul et brandissaient des fourches pour piquer les orteils des suppliciés. Un endroit assurément charmant, qu’elle était certaine de visiter un jour, voire même s’y établir pour un temps. Mais en attendant, Aima savait aussi qu’en dehors de cette qualification commune, l’enfer pouvait prendre un tout autre aspect. Pas seulement un paysage apocalyptique et extraordinairement atroce, comme un champ de bataille où fumaient encore des carcasses éventrées, ou une ville ravagé par une catastrophe naturelle, immeubles vomissant les gravas et rescapés errant hagard dans les rues dévastées ; non, l’enfer pouvait s’appliquer à des choses beaucoup plus infimes, beaucoup plus intimes, et la moindre broutille pouvait rapidement transformer la vie d’une personne en un long calvaire insupportable. Et depuis toute petite, elle s’évertuait avec passion à déterminer ce que serait ce «petit quelque chose », pour toutes les malheureuses victimes qui croisaient son chemin. Dans leur communauté, il était courant de donner un nom symbolique à chacun des nouveaux nés, dès que l’on avait déterminé quelles seraient les futures aptitudes du nourrisson, qui n’était alors âgé que d’une petite poignée d’heures. Aima dormait encore dans son berceau à la maternité, lorsque ses prédispositions à la magie du sang furent découvertes. Aussi, sa mère, gavée depuis toute petite de traités en langues antiques, la baptisa selon le mot grec « Aima », le mot sang. Bien entendu, cela lui avait valu à l’école de nombreuses erreurs de la part de ses professeurs et de ses camarades, et cela la poursuivait même encore dans sa vie administrative ; nombreux étaient ceux qui pensaient qu’elle s’appelait Emma, ou qui se trompaient d’orthographe. Pourtant, elle, elle ne s’estimait pas mal lotie. Sa propre mère, maîtresse des potions, se nommait Belladone, et elle avait même une cousine succube qui se nommait Chasteté. Aujourd’hui une splendide jeune fille d’une vingtaine d’années, Aima prenait son rôle très à cœur. Anéantir la vie des autres était une tâche jouissive mais compliquée, qui nécessitait beaucoup de pratique. Toutefois, elle était sorcière de sang, ce qui lui rendait le travail beaucoup plus aisé par rapport à d’autres, et possédait en plus une intuition féminine particulièrement développée. Elle devinait par exemple qu’en ensorcelant la petite vieille qu’elle croisait un matin en allant faire les courses, pour qu’elle décède dans la soirée d’un caillot de sang dans le cœur, elle plongerait ses nombreux descendant dans un deuil affligé puis dans des guerres de successions qui sépareraient à jamais la famille en trois branches ennemies. Sur le jogger qui passait tous les matins devant ses fenêtres, elle vaporisait discrètement une poudre qui le rendrait peu à peu anémique, et lui interdirait à jamais la pratique du sport qu’il chérissait tant. Parfois, cela ne tenait qu’à des détails plus insignifiants, pas un changement important dans la vie d’une personne, seulement quelques jours, semaines, voire quelques mois d’angoisse profonde, avant un possible retour à la normale. Cela dépendait de ses envies, du travail que ses études de sociologies lui demandaient de fournir… Et à vrai dire, ce qu’elle préférait par-dessus tout, c’était jouer avec les menstruations de toutes les femmes qui avaient le malheur de croiser son chemin. Il n’y avait rien de plus plaisant qu’une fille pliée de douleur au fond de son lit, une protection au fond de sa culotte pour retenir le flot de ketchup entre ses cuisses, le jour même où elle devait avoir son premier rencard avec l’homme de sa vie. Rien n’était plus agréable que le visage ravagé de terreur d’une femme, qui constatait avec horreur que ses règles n’arrivaient toujours pas, alors même qu’elle avait passé une nuit endiablée –et sans protection- avec son compagnon deux semaines plus tôt. Aucune chose ne surpasserait jamais le stress d’une femme qui réalisait qu’elle avait ses règles lors d’une sortie entre copines, qui n’avait sous la main aucune précaution, ni serviette ni tampon, et avait ce jour là sorti du placard son tout nouveau pantalon blanc. Des moments de terreur journaliers, un enfer au quotidien, qui transformait la vie de la plus heureuse des femmes en un long tourment ensanglanté. C’était tellement jouissif, tellement satisfaisant de se savoir responsable du malheur des autres… Oui, vraiment, Aima adorait cette mission, n’aurait changé son statut de sorcière pour rien au monde. Parce qu’il était beaucoup plus plaisant d’être du côté des bourreaux que de celui des victimes. Même si un jour, elle se rendit bien compte que tout ce qu’elle avait vécu, tout le plaisir qu’elle avait pris à rendre infernale la vie des autres, n’était juste qu’un infime échantillon de ce que l’on pouvait faire en réalité. Il avait fallu qu’elle le rencontre, pour comprendre cela et saisir l’ampleur de toutes les joies auxquelles elle n’avait pas encore gouté. Tout ce qu’elle avait manqué ne lui était apparu que lors de sa première rencontre avec l’homme de sa vie… Aima l’aperçut à la terrasse d’un café, par un bel après midi de printemps. Il avait l’air d’être un jeune touriste nordique, diablement séduisant avec sa peau pâle et ses courts cheveux blonds. Il griffonnait vaguement quelque chose sur un grand cahier, une tasse de café posée devant lui. Aima l’avait discrètement observé par-dessus ses lunettes de soleil, avant de décider de sauter le pas. Elle vit tout de suite en lui la personne idéale pour tester un nouveau sortilège de sa composition, un enchantement qui recouvrirait le corps d’une personne d’hématomes, et ce pendant plusieurs semaines. Mais pour cela, il lui fallait s’approcher de lui, lui tenir le poignet, pour graver en lui les stigmates du sort. Rejetant en arrière sa crinière de boucles noires, Aima s’approcha de lui d’une démarche souple mais décidée, celle d’une femme fière et consciente de ses charmes, à la fois inaccessible et toute proche. Elle n’avait pas du grec que le prénom ; elle avait les yeux de braises et la peau halée des méditerranéennes typiques, une grâce exotique dans ses vêtements blancs, les formes généreuses des déesses antiques –quoiqu’elle fut peut-être un peu trop grande et osseuse. De même, il était important pour le genre de métier qu’elle pratiquait, d’avoir une très bonne présentation et un air avenant. Bien qu’Aima avouait souvent adorer trainer en survêtement, elle savait être élégante, et ce jour là, elle était vêtue de manière très amène. Pourtant, il ne lui adressa même pas un regard, lorsqu’elle s’arrêta devant lui et retira dans un geste calculé ses lunettes de soleil. C’est à peine s’il sembla remarquer sa présence, absorbé par l’écriture frénétique d’un texte sur son calepin. Elle dut se racler la gorge pour qu’il daigne enfin lever la tête, poser sur elle ses deux yeux gris, gris comme l’acier, gris comme la cendre. Elle ne put s’empêcher de frissonner à cause de ce regard scrutateur, elle qui était pourtant une sorcière aguerrie malgré son jeune âge. -Vous cherchez quelque chose ? S’enquit-il d’une voix légèrement agacée. Rassérénée, elle sourit de toutes ses dents et s’assit en face du jeune homme, sans même lui laisser le temps d’émettre la moindre protestation. Elle croisa ses longues jambes et lui lança un regard d’une charmeuse insolence. - Pas vraiment. A vrai dire, je vous ai vu tout seul sur cette terrasse, et j’ai trouvé dommage qu’un bel homme comme vous soit sans compagnie. Il ne cilla pas, et elle comprit qu’elle devait faire vite. Cet homme était complètement indifférent à ses charmes physiques, pour une raison ou une autre. Peut-être préférait-il les blondes, peut-être était-il gay, elle n’en avait cure ; tout ce qu’elle voulait, c’était effleurer ce morceau blanc de peau qu’elle voyait dépasser, sous la manche de sa veste en jean. Son sortilège serait alors lancé, et elle n’aurait plus qu’à savourer la joie des méfaits accomplis. Peut-être serait-il harcelé dans son entourage, à propos de toutes les ecchymoses qui apparaitraient sur son anatomie si agréable ? On l’accuserait de s’être bagarré, d’avoir agressé quelqu’un ? Il serait renvoyé de son travail, quitté par sa copine, ou au contraire, couvé d’attentions écœurantes, jusqu’à ce que ses nerfs s’épuisent et qu’une dispute éclate ? Son sang de sorcière bouillonnait d’excitation, à l’idée de toutes les délectables contrariétés qui peupleraient bientôt la vie de ce séduisant étranger. L’occasion de l’ensorceler se présenta d’ailleurs rapidement. Agacé, sa belle victime inconnue fit claquer son carnet, disparaître son stylo dans son sac à dos, et déposa quelques pièces à côté de la tasse de café vide. Il comptait visiblement disparaître au plus vite, sans doute pour retrouver la douce quiétude que seule procurait la solitude. - Désolé, mais vous arrivez trop tard, j’ai déjà terminé. Il se leva sur ces mots, le visage fermé, bien décidé à s’éloigner de cette enquiquineuse. Le moment arrivait, si bien qu’elle sentait chaque fibre de son corps frémir d’anticipation et de satisfaction. - Attendez ! s’écria celle-ci en bondissant de sa chaise, lui saisissant le poignet au vol pour le forcer à s’arrêter. Il se produisit alors quelque chose d’étrange. Aima aurait dû sentir le courant de la magie la traverser et s’incruster dans sa victime, scellant ainsi le sortilège qu’elle souhaitait lui lancer. Mais ceci n’arriva pas, et elle sentit au contraire l’énergie lui revenir, comme renvoyée par un miroir invisible. Au même instant, l’inconnu sursauta vivement, et derrière eux, quelqu’un poussa une exclamation sonore. Un jeune homme venait de faire tomber de la cendre de cigarette sur son pantalon flambant neuf. Il fit de grands mouvements de bras, déstabilisant un serveur qui passait derrière lui et s’effondra sur une table en fer forgé, dans un atroce craquement. Aima comprit en un dixième de seconde pourquoi son sortilège n’avait pas fonctionné, que le jeune homme avait échappé à son enchantement, et pour cause. Elle lâcha doucement le poignet de son ancienne future victime, lui souriant avec une réelle joie. Lui aussi avait comprit, mais restait immobile, visiblement décontenancé. Il était impossible d’exercer son art sur un autre membre de la communauté. Qu’on soit sorcier, loup garou, vampire ou succube, il existait une barrière, une protection, qui empêchait un envoûtement ou une morsure impromptue. - Mage de feu ? Souffla-t-elle en plongeant son regard charbonneux dans les deux billes de cendres du jeune homme. Il hocha doucement la tête, tandis que derrière eux, les gens se mettaient à crier et s’affolaient autour du serveur gémissant. Celui-ci ne le savait pas encore, mais il avait la jambe cassée, et ne pourrait se rendre au concert de son groupe préféré qu’il attendait depuis des mois. - Je m’appelle Ash, répondit doucement le jeune homme en hochant la tête. Cendre. La poitrine d’Aima se gonfla d’enthousiasme et d’émerveillement. Elle n’était nullement déçue de ne pas avoir pu tester son nouveau sort, bien au contraire. Elle avait gagné bien plus en échange. -Comment avez-vous su que ça se passerait ainsi ? demanda-t-elle avec exaltation, les joues rosées par le plaisir. Qu’à cause de cette cigarette… Ash haussa vaguement les épaules, ressortit le cahier qu’il avait engouffré dans son sac à dos. La chose qu’elle l’avait vu écrire n’était pas un texte mais un enchantement qu’elle connaissait un peu, un sortilège anodin destiné à pourrir la vie-et la garde robe- des fumeurs de cigarettes. Mais entre les runes entrelacées et les mots en langue ancienne, des chiffres et des symboles mathématiques étranges soudaient entre elles les lettres mystiques. - Je suis étudiant en science physique, lança-t-il d’une voix neutre. Simple calcul mathématique. Elle percevait bien à travers son masque d’indifférence que lui aussi, était intrigué par la jeune femme. Les rencontres entre gens de la communauté étaient rares. Ils n’étaient pas nombreux, par rapport aux milliards de mortels qui peuplaient la terre, et généralement, dans une même région, tout le monde se connaissait. De fait, rencontrer un étranger était rare, si bien que souvent, les membres formaient une grande famille et se connaissaient tous trop bien pour se marier entre eux. Le propre père d’Aima était un simple mortel, en rien au courant des activités de sa femme, de sa fille, de la quasi-totalité de toute sa belle famille et de leurs amis proches. - Je m’appelle Aima, annonça-t-elle sans se défaire de son sourire. Vous venez d’arriver dans le coin, non ? Il acquiesça doucement et l’espace d’une seconde, elle put voir flotter l’ombre d’un sourire sur le visage glacé du mage. Ils partirent une poignée de minutes plus tard, bras-dessus bras-dessous, prendre un autre café un peu plus loin dans la ville. Et ils ne se quittèrent plus jamais. Le caractère inflexible de Ash ne tarda pas à succomber aux avances poussées d’Aima, d’être séduit par son caractère bien trempé et son amour de la souffrance humaine. Elle, elle avait trouvé en lui son modèle, son âme sœur ; le blond était doué, très doué, parvenait à l’aide de ses capacités magiques et de sa réflexion à mettre au point des plans quasiment parfait. Et surtout, sous ses airs impénétrables et impassibles, presque autant qu’Aima, il adorait pourrir la vie des gens. La jeune sorcière apprit vite que bien qu’étant un mage de feu, caste rare et particulièrement puissante, Ash n’aimait pas spécialement les flammes et les déflagrations dévastatrices. Non, comme son nom l’indiquait, il préférait les cendres, les braises, l’état où, une fois le feu éteint, tout était recouvert d’une couche grise et blanche, presque aussi pure que de la neige. Ses plus beaux chefs-d’œuvre étaient quelques éruptions volcaniques particulièrement meurtrières, qu’il avait réussi à provoquer en utilisant un sortilège trouvé sur un pan de mur encore intact des ruines de Pompéi. La lave n’avaient fait quasiment aucun dégât ; la cendre avait étouffé la région pendant des jours, tuant hommes, bêtes et végétaux à des kilomètres et des kilomètres à la ronde. Mais en réalité, la mort ne l’attirait pas plus que ça ; il préférait bien mieux détruire les choses purement matérielles et savourer ensuite la souffrance plus ou moins forte que leurs pertes provoquaient chez les vivants. Il aimait faire flamber les bâtiments importants, les documents précieux, en somme, toutes les choses qui étaient susceptibles de laisser de belles braises rougeoyantes et des cendres blanches. Aima remarqua bien vite l’éclat qui brillait dans ses yeux gris, lorsqu’il voyait des personnes éplorées devant les ruines encore fumantes de ce qui fut leur maison, des centaines d’individus se lamenter à cause de l’incendie d’une bibliothèque, des hectares de forêts et de pans de montagnes se consumer comme de simples feuilles de papier sous les yeux hagards des autochtones. . Ils aimaient tous les deux l’enfer pour ce qu’il avait de désagréable et de pénible, plutôt que pour son aspect atroce et choquant. Toutefois, ils éprouvaient dans leurs sentiments quelques divergences ; si Aima appréciait le petit, l’infime, Ash aimait l’énorme, le spectaculaire. Mais bien vite, ils apprirent à échanger l’un et l’autre leurs passions communes, leurs points de vue. Ils passèrent des heures enfermés dans leurs laboratoires respectifs, pour échanger des idées, mettre au point à deux de sanglants embrasements ou au contraire, calculer de toutes petites misères pour se détendre l’esprit et torturer de stress celui des autres. Bien vite, leur couple se fit connaître dans la communauté, et leurs familles les félicitèrent longtemps pour cette union si symbiotique qui semblait s’être nouée, entre la pulpeuse sorcière et le mage si placide. Ils terminèrent rapidement leurs études, qui servaient d’ailleurs plus à perfectionner leurs arts qu’à obtenir un réel métier. Les gens de la communauté n’avaient pas besoin de travailler, leurs talents suffisaient à subvenir à leur besoin. Alors ils partirent, voyagèrent tous les deux, autant pour améliorer leurs magies que pour remplir leur mission et satisfaire leur envie de causer le mal au quotidien. Et tous les deux, ils prenaient un malin plaisir à faire de la vie des autres un véritable enfer, un enfer de sang et de cendre. ooo Je vous remercie énormément d’avoir lu jusqu’ici. N’hésitez pas à me laisser une review, ou même à m’envoyer un mail, pour me faire part de la moindre chose qui vous passerait par la tête. A très bientôt, j’espère. :3 |