Auteur : Lady Rose

Note : Premier chapitre d'un Two-shot sur lequel j'avais pas mal bossé,écrit à l'occasion d'un concours d'écriture entre amateurs.

J'attend toujours les résultats,huhu.

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Ses pieds s'enfoncèrent dans l'herbe moelleuse,et elle enfonça ses orteils dans la mousse verte à souhait.Elle s'accroupit et se pencha en avant jusqu'à ce que le bout de son nez effleure la surface de l'eau - scintillante en cette journée dorée d'automne -,produisant ainsi de petits cercles concentriques.Le soleil couchant perce à travers les frondaisons des arbres et nimbe leurs feuilles de milles couleurs chaudes.Les lucioles s'ébattent,pincent avec curiosité ses joues,se nichent dans ses cheveux,comme autant d'étoiles - encore naissantes à cette heure de la soirée - qui déborderaient du ciel.

  Lili était à présent allongée dans le parterre herbeux et fleuri qui poussait au pourtour de l'étrange lac d'Argent,et son regard restait fixé sur un point lointain,tout au fond des eaux.Elle avait le menton croisé sur ses bras et sa frimousse se tordait dans des moues d'impatience.La tentation était trop grande pour une enfant de son âge,alors,n'y tenant plus,elle s'avança et plongea son visage constellé de taches de rousseur dans l'étendue aquatique qui l'intriguait tant.Le lac la happa si vite qu'elle se cogna les genoux contre sa rive et qu'un grand frisson la parcourut à l'impact de l'eau glaciale.

  Lili ouvrit grand les yeux.Au départ,elle voulait juste nager,même si ses parents le lui avaient interdit.Et puis,ça faisait classe de se baigner dans le lac d'Argent !

  Mais voilà,elle flottait dans un univers vaseux,,elle avait peine à nager et ses bras et ses jambes pédalaient dans le vide.Elle retenait sa respiration tant bien que mal et avait peur de ne pas retrouver le chemin qui menait à l'air libre étant donné qu'elle ne voyait rien.Elle commençait à avoir peur et remuait plus frénétiquement ses membres quand soudain,ses oreilles décelèrent un son.Au début,ils grésillait,montait et descendait dans les aiguës,comme une radio qu'on règle,puis,il se fit nette et explosa littéralement dans l'espace qui se déployait autour du frêle corps de Lili.Elle avait l'impression ne plus être dans l'eau mais dans un son,unique et immense à la fois,et ses modulations et variations étaient comme des vagues qui la caressaient.

  Un chant.C'était un chant.Merveilleux,la mélodie évoluait sans cesse,tantôt saccadées et rythmées comme le lourd tic-tac du balancier d’une vieille horloge, tantôt coulantes et fluides comme un serpent qui se glisserait entre deux ombres. La voix qui se faisait entendre et écouter à travers tout le lac - Lili était persuadé que les poissons,où qu'ils soient,étaient eux aussi tombés en transe,comme elle - chantait l’admiration et le mépris, la haine et l’amour, l’émerveillement et le dégoût, le calme et la violence, les droites et les courbes, le rien et le tout. Cette mélopée envoûtante qui lui était inconnue était un hymne à la mer,à l'univers aquatique,à l'eau tout simplement.Lili comprit que si elle voulait s'en sortir elle devait se diriger vers ce chant,alors elle barbota le plus rapidement qu'elle put dans la direction d'où elle pensait que provenait le voix,troublée par le fait que justement cette voix semblait n'avoir ni commencement ni fin et être partout et nulle part à la fois.

  Puis,sans prévenir,d'un seul coup,le chant s'arrêta, si soudainement que dans l’eau fraîche les notes restèrent en suspens, telles des partitions à peine esquissées dans le vide par un compositeur fou.Lili regarda à droite à gauche,toujours aveugle,toujours perdue.Quelque chose entra soudainement en contact avec son visage et cria,mais seules des bulles se glissèrent entre ses lèvres froides.

- Tu seras aveugle et muette tant que ton corps ne sera pas adapté au milieu aquatique,dit une voix,que Lili reconnut comme La voix.

Et sans prévenir,quelque chose de lourd et pâteux entra dans sa bouche et força la barrière de ses dents,emplit sa gorge et la brûla.Au même instant,une chose qui semblait être des ongles acérés lui crevait les yeux dans une douleur insupportable,mais quand elle voulut hurler,une nouvelle fois elle n'émit que des sons emprisonnés dans des bulles.Quand la souffrance reflua et qu'à nouveau seule sa langue occupait l'espace de sa bouche,elle plaqua ses mains contre ces yeux,certaines qu'ils saignaient abondamment et qu'elle ne pourrait plus jamais voir.Des doigts enserrèrent alors les siens avec douceur mais fermeté,dégageant son regard,et elle fut surprise de constater que non seulement elle pouvait encore regarder,mais qu'elle le faisait encore mieux qu'avant,avec plus de netteté,et qu'enfin un paysage était apparu.Elle s'émerveilla de voir les couleurs qui chatoyaient,autant sur les poissons dont les formes et les tailles différaient étonnamment  que sur le corail et les diverses plantes aquatiques qui jonchaient sols et falaises sous-marines.Des tentacules florales ondulaient mollement au gré des courants et qu'une mousse verdâtre s'étendait sous leurs pieds,à l'instar de celle qui jonchait la terre,là-haut.

  C'est lorsqu'elle pensa ça que Lili se rendit compte qu'elle n'avait plus de pieds,ni de vêtement.A partir de ses hanches de petite fille remuait lentement une nageoire aux reflets roux,presque sanguins,qui rappelait sa chevelure mais aussi les couleurs que diffusait dans l'atmosphère le soleil lorsqu'il se chait peu à peu derrière l'horizon.Ses mains étaient palmées et sa poitrine inexistante nue.Elle releva la tête vers la sirène - car elle son cerveau d'enfant avait pour acquis que les créatures qui vivaient dans l'eau étaient des sirènes - et vit qu'à son instar,une membrane fine s'étirait entre ses longs doigts aux ongles pointus et que ses seins étaient découverts,en toute impudeur.Mais une masse de cheveux d'une couleur de lune gibbeuse les camouflait partiellement.Des mèches de cette crinière folâtraient follement autour de sa taille,de son bassin large de femme,de sa nageoire dont les écailles semblaient avoir été tissées avec un fil d'argent.Sa peau même était laiteuse,et il émanait d'elle une aura opaline.Aussi,lorsque Lili la questionna sur son identité - effectivement,en plus de voir parfaitement,elle parlait parfaitement avec une clarté inouïe -,elle ne fut pas surprise par la réponse qu'elle obtint.

- Je suis Argent.

La nappe à carreaux rouges,traditionnelle,est au fond du panier.La vaisselle et les plats dont il ne reste que quelques miettes,aussi.Tout est bon pour partir.Rien n'a été oublié.

Sauf une seule et unique chose.

- Lili,où es-tu ?