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La compagne
Par Mika
Originales  -  Angoisse  -  fr
One Shot - Rating : K (Tout public) Télécharger en PDF Exporter la fiction
    Chapitre 1     1 Review    
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Elle est là, tapie dans l’obscurité, cachée dans l’ombre opaque du mur. Je sens sa présence purulente. Elle me fixe de ses yeux aveugles guettant un moment de faiblesse.

 

La fièvre monte. Sur mon front et dans mon dos la sueur froide suppure par tous les pores de ma peau et imprègne le tissu élimé de la robe de chambre. Assis dans mon vieux fauteuil j’attends. Mes yeux rougis par la fatigue fixent l’espace entre la commode en bois et le mur jauni par le temps. Je sais qu’elle se terre là, rampante et gluante attendant que je baisse la garde.

 

Depuis longtemps je sais qu’elle m’accompagne. A vrai dire j’ai commencé à deviner sa présence insidieuse le jour où le médecin m’a annoncé la mauvaise nouvelle. Le jour où ma compagne de toujours m’a quitté. Le jour où j’ai perdu mon boulot. Son apparition a coïncidé avec mon déclin et depuis sa présence s’est faite de plus en plus pernicieuse.

 

Jusqu’à ce soir !

 

Jamais auparavant je ne l’ai sentie si proche, si prête à se dévoiler.

Je l’ai déjà entraperçue par le passé, lors d’épisodes fiévreux qui me laissaient paralysé sur mon lit ! Elle venait m’effleurer les bras les jambes de son souffle glacial sans me montrer son visage immonde. Cette odeur de pourriture et de maladie m’emplissait les narines et me faisait hoqueter de dégoût. Mais chaque fois elle repartait, ne laissant de son passage que ces relents morbides de moisissure et de décomposition.

 

Et ce soir elle est là ! Pour de bon ! Elle m’attend et ne veut plus repartir comme si son heure était enfin venue ! Recroquevillée dans ce coin d’ombre elle patiente sagement pendant que je m’affaiblit d’heure en heure dans cette pièce dont même les murs suintent d’une souffrance humide et froide. Il n’y a plus dans ces lieux que des souvenirs poussiéreux d’une vie perdue. Ma vie. Celle que je sens s’échapper peu à peu tandis qu’elle me regarde fixement.

 

Mes dents commencent à claquer. Je grelotte. Dans les ténèbres insondables du meuble il me semble voire sa silhouette opaque remuer. L’air devient glacial.

 

Glacial comme ces matins d’hiver où un givre étincelant recouvrait le parc où nous aimions nous promener main dans la main. Comme ils sont loin ses souvenirs. Comme elle est loin maintenant ! Mais comme sa trahison m’a blessé aussi ! Elle m’a laissé choir lorsque j’avais le plus besoin d’elle. Comme si elle avait refusé que je sois son fardeau…

 

Aaah ! Des pointes transpercent ma poitrine à chaque inspiration ! Je serre mes bras sur mon torse squelettique. Comme j’ai froid et comme j’ai mal. Simplement respirer n’est plus que douleur !

 

L’air devient mélasse. Des tâches sombres apparaissent sur les murs et s’accroissent comme une moisissure géante avalant la tapisserie jaunie de son noir profond et fétide. La tête me tourne. Ma respiration se fait haletante. Mes membres se tétanisent. Os et muscles se mêlent et se soudent en une masse froide et inerte. Autour de moi les ténèbres rongent les meubles vieillis, le parquet grinçant, étouffent la lampe de chevet ultime lueur chaude qui s’éteint comme une vieille braise à bout de souffle.

 

Le noir. Le noir total. Silencieux et glacial. Ma respiration sifflante et saccadée comme seul repère.

 

Elle bouge ! Elle est sortie de son repère. Je l’entends glisser sur le sol dans un bruit de succion écoeurant, se traîne jusqu’à mon fauteuil. Elle me tâte, parcourt mes membres paralysés du bout de ses doigts. Caresses glaciales et écoeurantes. Elle me tourne autour, m’effleurant de son obscurité maladive. Rapidement les attouchements légers se transforment en une exploration minutieuse. Ses doigts s’insinuent partout, parcourent mon corps tétanisé, explorant chaque parcelle de ma peau moite et froide. Son odeur putride est plus forte que jamais. Elle est rugueuse, avide… Elle me recouvre de sa puanteur comme si milles mains impatientes m’étreignaient et me recouvraient. Son souffle ! je sens son souffle sur mon cou. Sa douce respiration est brûlante ! Elle remonte sur mon visage. Ses doigts froids caressent mes lèvres, mes yeux. Elle m’ouvre la bouche. Elle…

 
     
     
 
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