Disclamer : Rien à moi, tout à JKR
Pour qui ? : Pour Soizic, cadox pour la remercier de tous ses dessins et de sa gentillesse *___* mais cadox empoisonné je crois. Parait que ça ne se fait pas d’offrir des Deathfics, désolée…c’est de la faute de fny ! Désolée encore é_è
Warning : Donc comme le précise le résumé, Harry est mourru, je ne sais pas du coup si on peut mettre ça en deathfic vu qu’il est mort dès le départ…bref je préfère prévenir quand même pour ceux qui n’aiment pas ça. Ce n’est pas une fic très joyeuse, mais à mon sens, il n'y a pas de quoi pleurer dans les chaumières tout de même.
Merci : A HaniPyanfar pour sa correction et à artemis et fanny (même si c’est de sa faute) pour leurs encouragements. Et un immense merci à Gevoel pour son illustration sublime qui est donc aussi un cadox pour Soizic.
J’irai …sur ta tombe
Il avait transplané directement au cimetière de Godric’s Hollow en sortant de la fête organisée par Blaise Zabini. Il aurait pu s’estimer heureux de ne pas avoir été désartibulé dans l’action mais il n’était pas en état de s’intéresser à ce léger détail. Devant lui, la lune éclairait l’entrée du cimetière. Il lança un Alohomora aux grandes portes en fer en remuant sa baguette un peu n’importe comment mais cela marcha. Décidément même saoul, il restait doué. C’était bon à savoir s’il s’en souvenait d’ici là. Les portes grincèrent dans un bruit assourdissant qui déchira le silence de la nuit et cela le fit ricaner bêtement.
Mais après avoir parcouru plusieurs allées en titubant, il n’avait plus envie de rire.
«-C’est par où cette putain de tombe ? » grogna-t-il au cœur de la nuit.
Il n’y eut aucune réponse ce qui l’énerva un peu plus.
Potter le faisait chier même dans la mort.
Il avait chaud malgré la fraîcheur de la nuit, il avait trop bu, décidément. Il ne savait vraiment pas pourquoi il était là, tout seul, dans le noir. Il n’était même pas allé à l’enterrement du balafré, alors qu’est-ce qu’il y avait de si urgent d’aller voir sa tombe, trois mois plus tard ?
Il n’était pas en état d’évaluer ses actes de toute façon. Il avait l’impression que les tombes tournaient autour de lui, le narguant. Il était déjà passé au moins trois fois devant celle de Peter Sullivan. Ce n’était pas une bonne idée de venir ici ivre.
Il n’était pas en état d’analyser ce qui était logique ou pas.
Quand il la trouva enfin, il était en train de massacrer une chanson des Mages en Nage comme seuls les ivrognes savent le faire. Voir « Harry Potter » sur le marbre blanc l’arrêta net. Ça lui coupa la chique, comme aurait dit sa grand-mère.
A présent qu’elle était là sous ses yeux, éclairée par la lune pâle, il se demanda comment il avait fait pour ne pas la repérer plus tôt. C’était la seule tombe de tout ce fichu cimetière qui était littéralement envahie par les fleurs. Même après trois mois, les fans de Potter étaient toujours aussi à fond.
Draco shoota un peu maladroitement dans les bouquets pour faire de la place et il faillit se rétamer dans l’action. Il se sentait en colère de toute cette attention même dans la mort. Il fallait toujours que Potter se fasse mousser.
Il dut approcher jusqu’à ce que son nez touche presque la pierre froide pour arriver à lire l’épitaphe sur la tombe de Celui-Qui-Avait-Vaincu-Mais-Qui-Etait-Mort. Sa vue n’était pas très bonne.
« Nous t’aimons »
C’était ce qu’il y avait de marqué et c’était tout. Ce n’était même pas mis au passé, comme si Potter n’était pas mort. Comme s’il ne faisait pas lui-même partie du passé. Sûrement un coup de Granger.
Il s’était attendu à un truc du genre « Merci à toi Ô Lumière du Monde Sorcier et bla bla bla ». Mais non, juste un « Nous t’aimons ».
Draco eut soudainement envie de détruire cette tombe avec ses propres mains mais il n’était probablement pas encore assez saoul pour se retourner les ongles sur le marbre. C’était moins con de la détruire avec la magie.
Avec un sourire mauvais il sortit sa baguette et la pointa sur la tombe de celui qui avait pourri sa scolarité.
-« Mais t’es mort à présent ! » dit-il avec ironie. « T’es mort et je suis vivant. J’ai gagné tête de con ! »
Il se frotta les yeux, essayant de mieux voir pour bien viser mais alors qu’il allait lancer un sort de découpe, il eut une idée qui lui arracha un nouveau sourire inquiétant. Il pointa quand même sa baguette sur la pierre et grava tranquillement une épitaphe à sa façon.
« J’espère que tu pourris en enfer connard ! » trônait maintenant fièrement en dessous du pathétique « Nous t’aimons ».
Il ne cessait plus de sourire à présent. Potter faisait moins le malin, c’était sûr.
«-Hein connard ! Où que tu sois, tu fais moins le malin à présent ! » cria-t-il à la lune.
Il regarda les fleurs qu’il avait piétinées et eut un petit rire.
«-Je ne t’ai pas apporté de fleurs », constata-t-il. « Mais j’ai de quoi arroser celles que tu as déjà ».
Alors Draco sortit son pénis de son pantalon et pissa sur la tombe de Harry Potter, mort en héros en combattant le plus grand mage noir de tous les temps.
Et il fit cela en sifflotant.
°O°O°O°
Draco se réveilla avec un mal de tête carabiné.
Il ordonna à un elfe de maison de lui apporter une potion anti-gueule de bois. Bien entendu il se souvenait de ce qu’il avait fait la veille entre la soirée de Blaise et son retour chez lui. Il y pensa toute la matinée en fronçant les sourcils. Il ne regrettait pas d’avoir pissé sur la tombe de Potter. Il en avait eu envie et il n’y avait pas de toilettes dans le cimetière, donc pourquoi pas là ? Mais l’épitaphe était une erreur. Il ne savait plus exactement la façon dont il avait tourné sa phrase mais il se rappelait très bien que ça avait à voir avec l’enfer et son envie de voir Potter y séjourner.
C’était là que ça clochait.
Draco ne croyait pas à l’enfer. Pas plus qu’il ne croyait au paradis. Pour lui après la mort, il n’y avait rien. Juste le néant.
Il arrêta de penser à ça quand il décida de retourner sur la tombe à la nuit tombée pour enlever sa phrase. Il passa le reste de sa journée à travailler dans son bureau, l’esprit occupé par les chiffres qui s’étalaient sur les parchemins et qui représentaient des gallions.
Il était invité à un bal ce soir-là encore, il était invité quasiment tous les soirs quelque part. Les Sangs-Purs organisaient beaucoup de soirées en ce moment, histoire de faire oublier que la plupart d’entre eux avaient été favorables aux idéaux de Lord Voldemort – et l’étaient pour beaucoup encore -. C’était mieux pour tout le monde que la presse parle de leurs bals clinquants au luxe démesuré et non plus de leurs yeux fermés durant la guerre.
Et Draco faisait comme la plupart de ses anciens camarades Serpentards bien nés, il acceptait les invitations. Il virevoltait de fête en fête, se montrant drôle, charmant, exquis. Bref, léchant plutôt bien les culs les mieux placés en attendant patiemment le jour où ça serait son cul à lui qu’on lècherait, où il ne compterait plus les courbettes sur son passage et où sa famille tiendrait à nouveau le monde dans le creux de sa main.
Pour cela, il passait la journée à travailler d’arrache-pied pour remettre à niveau l’Empire des Malfoy. Il ne savait pas le temps que ça prendrait. Mais il avait un but qui le rendait fiévreux parfois la nuit mais qui ne quittait jamais ses pensées : redorer son nom. A même pas encore dix-neuf ans, il tissait sa toile petit à petit dans ce monde en reconstruction. Il deviendrait respecté, aimé et adulé par ses pairs. Le peuple suivrait. Ces idiots suivaient toujours au final.
Ce soir-là cependant, il n’arriva pas vraiment à se concentrer sur les discussions que les invités échangeaient entre eux. Pourtant Blaise venait de faire une blague plutôt drôle sur les moldus morts mais Draco n’avait même pas relevé. Il n’avait pas dansé non plus avec Daphné alors que c’était sa famille qui organisait le bal, qu’elle était ravissante et qu’elle n’attendait que ça.
A la place, il avait fixé presque sans discontinuer la très tapageuse horloge des Greengrass qui trônait dans leur non moins tapageuse salle de danse, en se demandant à quelle heure il pourrait se retirer sans paraître impoli.
Après ce qui lui sembla une éternité, mais il était en réalité à peine plus d’une heure du matin, il quitta la réception et transplana sans tarder au cimetière de Godric’s Hollow.
Cette fois-ci, la lune était voilée par des nuages. Draco dut lancer un « lumos » à sa baguette pour éclairer les lieux. La lourde porte en fer grinça une nouvelle fois mais il ne trouva plus ça très drôle. Cela paraissait simplement lugubre. Il frissonna avant de s’emmitoufler un peu plus dans son élégante cape de velours noir ornée de discrètes arabesques argentées à l’encolure. Il se demanda une nouvelle fois ce qui avait bien pu lui passer par la tête la nuit précédente. Pourquoi avait-il fallu qu’il se traîne dans un endroit aussi glauque ? Il allait effacer ce qu’il avait gravé sur la tombe de l’autre crétin et quitter les lieux rapidement.
Il ne savait plus dans quelle allée se trouvait la dépouille de Potter et il dut déchiffrer une vingtaine de noms à l’aide de sa baguette avant de repérer la bonne.
Comme la veille, il dégagea les stupides fleurs qui le gênaient, il fut pratiquement obligé de coller son visage à la pierre blanche pour bien distinguer les lettres. Il fronça les sourcils en remarquant que son petit mot avait déjà été effacé. Il aurait dû en être satisfait mais étrangement cela l’agaça.
Non, c’était bien plus fort qu’un simple agacement. Il sentait une fureur sans nom l’envahir et il n’arrivait pas à la contrôler. Qui avait osé effacer son épitaphe ? A croire que la tombe de Saint Potter était intouchable !
«-Hey ! Tu vois ça Potty ?! » s’exclama-t-il tout haut, se fichant complètement de passer pour un cinglé à ses propres oreilles. « Quelqu’un n’a pas aimé que je t’insulte ! »
Entendre sa voix aussi énervée, alors qu’il gardait ordinairement un contrôle parfait sur tout, lui arracha un bref rire nerveux. Il regarda méchamment le « Nous t’aimons » qui lui était resté bien sagement gravé dans le marbre et le trouva encore plus pitoyable que la veille.
«-Ces tarés t’aiment, hein ? » reprit-il d’une voix glaciale. « Est-ce qu’ils ont oublié tous les gens qui sont morts par TA faute ? Est-ce que tu as oublié petit connard d’enfoiré que TU as envoyé MON père en prison ? Est-ce que tu sais qu’il est en train d’y MOURIR à petit feu ? »
Draco essuya son front désagréablement moite et remarqua au passage que ses mains tremblaient. Il n’arrivait pas à croire qu’il détestait toujours Potter avec autant de force. Le balafré parvenait encore à lui faire perdre le contrôle au point qu’il se mette à parler tout seul à une foutue tombe.
«-Ce n’est pas grave » poursuivit-il ayant pris une décision. « On va te refaire une beauté Potty. Une nouvelle balafre pour ta tombe de merde. Les balafres c’est ton truc hein ? T’as toujours aimé parader avec la tienne. »
C’était faux et il le savait mais c’était ce genre de phrase qui touchait Potter avant. Et Draco voulait lui faire mal parce qu’il était furieux. Et l’inutilité de tout ça le rendait encore plus haineux parce qu’il savait que jamais plus Potter n’allait avoir mal à cause de lui. Parce qu’il était mort. Et plus rien ne pourrait jamais soulager la fureur de Draco. Parce qu’il était mort.
«-Ci-gît une merde ! » s’exclama-t-il à nouveau et il trouva cette phrase on ne peut plus véridique alors c’est ce qu’il grava juste en dessous de « Nous t’aimons ».
« -Ouais, tu pues Potter », murmura-t-il en regardant son œuvre d’un air satisfait.
Puis il transplana parce que depuis le début il n’y avait que lui et le silence.
Et ce silence allait le rendre fou.
°O°O°O°
Il se trouvait encore devant cette tombe. Ça faisait quoi… seize jours qu’il venait ici nuit après nuit. Encore une fois, on avait effacé son mot de la veille. Il avait été pourtant assez fier de son « Il était temps ! » avec la date de la mort de Potter soulignée deux fois.
Oui, ce petit con aurait dû mourir plus tôt. En fait, il n’aurait même pas dû venir au monde, la vie de Draco aurait été tellement mieux sans lui ! Mais il avait fallu qu’il se le coltine.
Draco n’avait même pas pris la peine de répondre à l’invitation de ce soir. Il ne savait plus quelle famille de coincés organisait la soirée, il s’en moquait. Il avait attendu patiemment que la nuit tombe, cherchant toute la journée ce qu’il allait bien pouvoir graver sur la pierre tombale du connard, tout en buvant quelques verres. Rien de bien méchant, juste de quoi occuper son temps.
Comme il aurait dû s’en douter, il n’avait pas trouvé la moindre phrase assez originale et blessante au fond de sa bouteille mais il ne désespérait pas d’avoir une révélation à présent qu’il se trouvait devant Potter.
C’était quand même nettement plus facile du temps où Potter lui répondait. Alors il rebondissait sur la moindre remarque du balafré, la tournait à son avantage et ses mots se faisaient incisifs, délicieusement cruels, remarquablement malveillants. Et le survivant de son cul ne baissait jamais les yeux, ne courbait jamais l’échine, il encaissait tout, en redemandant presque. Ouais, ouais, c’était le pied de voir les yeux verts se mettre à briller dangereusement. De constater jour après jour qu’il était toujours là, présent, se tenant devant lui pour lui faire face encore et encore. Avec ce regard de myope qui lui promettait silencieusement qu’il serait éternellement dans ses jambes pour le faire chier.
Draco serra les poings alors qu’une bouffée de haine l’enveloppait soudainement tel un manteau de ténèbres.
Potter lui avait fait croire qu’il serait toujours là.
Potter avait menti.
Les yeux verts ne brilleraient plus jamais parce qu’il avait finalement courbé sa putain d’échine. Il s’était écroulé. Devant un autre que lui.
A cause d’un mec qui ne savait même pas se coiffer, il se trouvait comme un con devant une tombe toutes les nuits à y déverser une haine qui ne trouvait plus aucune réponse.
Draco passa une main tremblante sur son visage et frotta ses yeux qui piquaient horriblement. Sa manche se releva dans l’opération et quand il ouvrit les paupières il vit la marque des Ténèbres sur son avant-bras. Il était toujours étonné par le contraste entre elle et sa peau si pâle. Elle lui avait toujours semblé ressortir bien plus sur lui que sur aucun autre Mangemort.
L’ancien Serpentard esquissa un sourire mauvais. Il venait de trouver ce qu’il allait faire à la jolie tombe de Harry Potter : Le-connard-qui-était-parti.
Il recula un peu, essayant de se souvenir de comment on invoquait la marque des Ténèbres. Il ne l’avait personnellement jamais fait mais ça pourrait être intéressant. Le monde était bien trop lumineux depuis que la guerre était finie. Ce soir, la tombe de Potter ne le serait pas. Il allait la faire devenir aussi sombre que ses pensées.
D’un geste précis, il bougea sa baguette et murmura le sort approprié, se rappelant son père le faire et la façon admirative et envieuse dont lui-même plus jeune l’avait regardé. Il avait quatorze ans la toute première fois qu’il l’avait vu le faire.
Potter était vivant à l’époque.
Draco s’attendait à des hurlements ou des cris d’effroi mais il n’y avait personne pour voir la marque des Ténèbres planer au dessus de cette tombe et bientôt la brume verdâtre s’évaporerait. Il était le seul témoin de son acte. Il n’y avait personne ici… Personne.
Draco sentit une nausée aussi soudaine que violente l’envahir et se courba en deux, éclaboussant la tombe du contenu de son estomac.
Il n’aurait pas dû boire autant.
°O°O°O°
«-C’est la dernière fois que je viens ici » annonça Draco à la tombe de Potter.
Il était agité cette nuit-là et faisait les cent pas dans l’allée du cimetière où reposait le balafré. Il s’arrêtait devant la tombe de temps en temps pour lâcher une insulte, visiblement toujours aussi en colère de se retrouver ici.
«-Merde, je devrais être chez moi ! Pas ici ! Jamais plus ici ! »
Seul le silence assourdissant lui répondait – comme toujours -. Draco pensa à sa mère qui avait organisé le bal de ce soir et au fait qu’elle comptait sur lui pour redevenir aussi attractif qu’avant. C’était la soirée des Malfoy et il était là, planté devant une connasse de tombe.
« Ce soir, c’est mon soir ! » expliqua-t-il à Potter en posant une main agacée sur sa nuque moite de fièvre. « J’attends ça depuis la fin de cette guerre ! Il y aura tout le gratin, même le ministre ! Et Greengrass va sûrement conclure une alliance avec nous !»
Il s’arrêta et se mordit la lèvre. Son regard un peu flou se posa sur les fleurs qu’il venait de faire cramer en arrivant. Il s’élevait encore une odeur de brûlé qui commençait à lui monter à la tête.
«-Je te hais ! » cria-t-il brusquement à la tombe et son cri sembla se répercuter sans fin dans le cimetière de Godric’s Hollow, lui arrachant un bref hurlement de rage. « Je devrais être en train de serrer des foutues mains et de parler de mes FIANCIAILLES et TU m’en empêches !!»
Il jeta un regard haineux à la pierre tombale. Tout ça était tellement injuste !
La stupide épitaphe « Nous t’aimons », que ses yeux avaient du mal à distinguer, semblait le narguer et il la détestait encore plus que ce cimetière, que cette allée, que cette pierre toute blanche. Les tombes étaient censées être muettes, n’était-ce pas ainsi que le disait cette expression stupide ? Alors pourquoi l’épitaphe se chuchotait à son oreille sans discontinuer. Parfois, dans son sommeil la voix railleuse du balafré lui répétait ces trois mots comme s’il s’agissait d’un sale petit secret.
«-Je ne reviendrais plus ! » cracha-t-il dans le vide. « Je t’oublierai Potter !»
Il lui sembla qu’il ressemblait plus que jamais à un gamin qui parle à haute voix pour essayer de se persuader que les monstres n’existaient pas et qu’il n’avait rien à craindre.
Draco cessa de s’agiter et sortit sa baguette. Il fallait que les choses soient claires, une dernière fois.
Les coins de ses lèvres se retroussèrent lorsqu’il déchiffra difficilement l’exécrable « Nous t’aimons » qu’il n’avait pourtant jamais osé effacer.
Cette fois encore il le laissa mais il grava en dessous :
« Moi, je te hais. »
Puis il transplana. Avec un peu de chance les invités ne seraient pas tous partis.
°O°O°O°
Il n’avait pas tenu cinq jours avant de revenir.
Cette fois-ci, la lune était pleine et Draco aussi. Plein d’alcool, de potions malsaines, de fatigue et de colère.
Il cogna son front contre la tombe de Potter en criant de rage parce qu’on avait encore enlevé son épitaphe. Sa belle cape traînait dans la boue parce qu’il avait plu toute la journée. Il se tenait à genoux sur Potter et ses yeux y voyaient encore moins que les autres fois.
«-PUTAIN ! PUTAIN ! PUTAIN ! » hurla-t-il en griffant le marbre, son front cognant contre la pierre à chacune de ses injures.
Draco était hystérique. Il revoyait les yeux verts railleurs qui se posaient sur lui du temps où ils étaient encore vivants. Du temps où la vie avait un sens. Merde, est-ce qu’il venait de ruiner la soirée des Parkinson ? Draco ne savait plus ce qu’il avait fait ce soir-là. Mais il se rappelait vaguement avoir insulté le père de Pansy parce qu’il lui avait soudainement semblé insoutenable de ne pas lui avouer qu’il le trouvait très moche. Et il supposait avoir dragué avec une certaine lourdeur et une étonnante vulgarité une des sœurs Patil parce qu’il aurait aimé tirer son coup ce soir.
Il avait passé les cinq derniers jours à boire et à consommer des potions plus ou moins prohibées parce que les gens de pouvoir n’aimaient pas quand les autres gens pouvaient rêver éveillés. Certaines lois étaient bien trop stupides ! Mais depuis quelques semaines maintenant, il s’en fichait des lois et du pouvoir.
Pourquoi avait-on encore viré ce qu’il avait mis sur cette connasse de tombe ? Il avait mal au front et aux mains. Ses genoux étaient glacés. Comme son âme.
Il ferma les yeux, essayant de s’obliger à respirer calmement. Mais prendre des potions pour planer avait finalement été une mauvaise idée parce que maintenant il ne pouvait plus fermer les yeux sans revoir Potter. Et c’était la pire chose au monde que de l’avoir dans sa tête. De le voir le regarder avec ce mépris, avec ce petit air supérieur. Est-ce que Potter avait vraiment les cheveux aussi désordonnés ? Est-ce que ses yeux verts étaient aussi merveilleux ? Est-ce que son sourire faisait autant souffrir ? Draco ne se souvenait pas que le sourire de Potter déchirait le cœur des gens du temps de son vivant. Mais il lui faisait cet effet à lui lorsqu’il fermait les paupières.
Il gémit contre la tombe, trop fatigué pour ouvrir les yeux même si Potter allait le rendre cinglé. Il était épuisé de s’obliger ainsi à rester éveillé et pourtant il avait continué à prendre les potions avec une constance plutôt épatante pour quelqu’un dans son état.
Peut-être qu’il devenait fou.
Il ouvrit les yeux avec un effort surhumain. Ils semblaient le brûler derrière ses paupières. Les mots « Va te faire foutre ! » se gravèrent sur la pierre tombale lentement au même rythme qu’il bougeait sa baguette.
La tombe en face de lui sembla le narguer dans sa folie. Draco eut un sourire douloureux avant de commencer son ultime profanation.
°O°O°O°
Un léger coup de pied dans les côtes réveilla Draco.
« -Questcequecest ? » baragouina-t-il avant de grimacer parce que son dos lui faisait un mal de chien. A croire qu’il avait dormi sur de la pierre.
La personne qui venait de le réveiller ne lui répondit pas et Draco l’entendit prononcer un sort de nettoyage et un autre sort de restitution. L’héritier des Malfoy leva les yeux, remarquant que le jour se levait à peine et qu’il avait en effet roupillé sur de la pierre.
Il frissonna en se rendant compte qu’il était allongé sur la tombe de Potter.
«-C’est bien que tu viennes rendre visite à Harry, Malfoy. Mais parfois tu vas un peu loin. Ta braguette est encore ouverte. »
Draco se redressa et cacha son sexe avec ses mains. Weasley – puisque c’était lui - poussa négligemment ses jambes pour remettre les fleurs en place. Il sembla à Draco que cela faisait une éternité qu’il n’avait pas vu ce type et il devait avoir l’air d’un hibou à le fixer ainsi.
«-Je…c’est toi qui viens nettoyer la tombe à chaque fois ? »
Weasley haussa les épaules et posa finalement ses yeux sur lui. Son expression était neutre et Draco se demanda depuis quand le miséreux savait maîtriser ses émotions. Il vieillissait comprit Draco. Comme lui. Comme tout le monde. Tout le monde sauf Potter. Potter était désormais éternellement jeune. Cette pensée fit trembler l’ancien Serpentard de la tête aux pieds. Cela lui sembla effroyable de savoir qu’il allait vieillir sans lui.
«-Plein de gens viennent sur cette tombe dans la journée » expliqua-t-il. « Je ne peux pas vraiment y laisser tes injures.
-Tu…tu ne vas pas me frapper ? »
Le rouquin eut un léger sourire et cette fois son regard se posa sur la tombe. Draco se demanda si toute cette discussion était vraiment réelle.
«-Honnêtement, parfois j’aimerais bien l’insulter aussi pour nous avoir laissé mais tu as toujours été plus doué que moi pour ce genre de choses. Tu sais, il râlait souvent contre toi mais il le faisait avec tant de passion. Il était tellement vivant quand il s’opposait à toi… »
La voix de Weasley s’arrêta brusquement. Draco vit avec horreur le regard bleu vaciller. Il refusait tout bonnement de voir la belette se mettre à brailler. Il se releva brusquement et en profita pour se tourner et se rhabiller. Merde, il avait vraiment fait n’importe quoi hier et sa tête l’élançait violemment. Mais Weasley sembla heureusement se reprendre et il ne se mit pas à sangloter, il n’eut même pas le moindre reniflement.
«-Je dois rentrer » annonça Draco de sa voix traînante.
Il chercha vainement une insulte à lui lancer mais son cerveau était bien trop hors de portée alors il lâcha l’affaire. Il voulait partir d’ici. Il avait mal aux mains, à la tête. Il avait froid.
«-Bien sûr » acquiesça Weasley qui ne le regardait déjà plus. « Tu sais, tu devrais venir ici en plein jour. C’est plutôt charmant comme endroit. »
Draco frissonna. Depuis qu’il s’était réveillé il n’avait pas tourné une seule fois les yeux vers la tombe. Cet endroit n’était pas charmant. Il était glauque et empli de souffrance. Il ne pouvait pas être charmant.
Et puis Potter avait toujours eu des goûts de chiottes.
Il ferma les paupières, attrapa sa baguette, se concentra du mieux qu’il put et transplana chez lui.
« Tu devrais venir en plein jour », avait dit Weasley et cette phrase ne quittait déjà plus son esprit.
Draco se rendit compte alors qu’il aurait préféré que ce connard de miséreux le frappe.
°O°O°O°
Il ne buvait presque plus, même s’il restait des exceptions quand ses souvenirs ne voulaient pas le lâcher. Il ne prenait plus de potions louches, ayant décidé de ne plus rêver. Les rêves pouvaient être bien trop dangereux.
Il aurait dû faire ses excuses à la bonne société sorcière mais il s’était rendu compte que ça ne l’intéressait plus de s’écraser devant eux. Il y avait d’autres moyens de redorer le nom des Malfoy. Bien plus longs évidemment mais il ne devrait rien à personne. A part à lui-même.
Il se sentait courageux, lui qui avait toujours été plus ou moins lâche et c’était une impression plutôt plaisante.
Il ne s’était plus rendu sur la tombe de Potter en pleine nuit depuis qu’il s’était branlé dessus, cela allait faire près de cinq ans bientôt. Il n’avait plus jamais écrit sur le marbre blanc.
Il y retournait de jour, pas souvent, juste quand il sentait son courage l’abandonner et ses résolutions s’effriter. Après, ça allait mieux, il ne se l’expliquait pas vraiment.
Il ne trouvait pas l’endroit charmant. Weasley aussi avait des goûts de chiottes.
Comme toujours quand il y allait, il se retrouvait le nez quasiment collé à la pierre tombale pour pouvoir la lire. Pourtant il la connaissait par cœur.
Il n’avait jamais eu une vue défaillante.
Mais quand on pleurait, on y voyait flou. C’était chiant mais c’était comme ça.
Il passait souvent son doigt sur son nom, retraçant chaque lettre doucement, laissant les aspérités de l’écriture faire frémir la pulpe de ses doigts.
Puis son doigt suivait sa date de naissance et celle de sa mort. Les chiffres du garçon-qui-ne-vieillirait-jamais. En tous cas pas dans les souvenirs de Draco.
Ses doigts avaient tant caressé ces lettres qu’ils reconnaissaient chaque creux par cœur.
Il n’avait plus jamais écrit sur la tombe de Potter.
Il y avait déjà le « Nous t’aimons ».
Ce n’était même pas au passé. Parce que les sentiments ne meurent pas avec les gens.
Il le savait à présent et quand sa main retraçait l’épitaphe il trouvait cela correct. Et le manque que Draco avait de lui devenait un peu plus supportable.
Il n’y avait rien besoin de rajouter.
Fin
Voiloum, merci d’avoir lu cette histoire.
Bisous à Soiz qui roxxouille o/ et encore joyeux anniversaire :D (désolée pour le OS pas super joyeux !)
A plous
Artoung |