Mon premier texte ! Le premier que j'aie jamais écrit ! A part les rédacs et les disserts bien sûr !
Ce texte a été écrit par une nuit blanche, de violent orage (celui de la nuit du 4 au 5 novembre, pour ceux qui l'ont senti passer), alors que j'étais devant la cheminée. J'ai d'abord simplement voulu décrire le feu, puis c'est devenu une toute autre histoire.
Bonne lecture :)
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Ce feu de cheminée me rentre dans la peau. Je l'observe, je le scrute, je le vois s'agiter devant moi. Je la sens, cette odeur de barbecue sur la plage, cette odeur qui me ramène à mes campings sous les étoiles. Petit à petit, je me laisse envahir par cette chaleur qui se dégage, qui me pousse à me rapprocher, mais qui me tient à distance. Malgré la douleur possible, la brûlure imminente, je tâte de mes mains; un peu plus près les doigts deviennent comme la braise en moi, ils me hurlent leur mal. Mais la douleur est trop agréable à ce stade. Je suis, ici, assis, tout entier hypnotisé, immobile, attiré par cette vision, ces flammes étincelantes, dorées, voluptueuses, résonnant en moi telles des sirènes dans la nuit noire.
Mais rien ne dure: La flamme va bientôt s'éteindre, je la vois petit à petit rendre l'âme. A présent les braises encore rouges et encore nombreuses ne sont plus que les vestiges d'un désir consommé qui crépitent encore, qui sont encore chauds et fumants. Sans moi, ce feu n'est rien, il n'a ni les moyens d'exister, ni aucune raison d'exister. Il faut que je l'aide à s'en sortir. Il est temps d'y remettre du bois.
Ma première tentative est un échec. Cuisant. Sa flamme éteinte ne revient pas, malgré mes efforts, le bois est trop vert, le positionnement est mauvais, rien n'aide la chaleur à se recréer. Avec un peu de temps et de patience, sous cette nuit froide, je réchauffe ses ardeurs. Le bois que j'y ai mis à la place est bien plus propice à une ardente combustion, les bûches sont bien mieux placées, stratégiquement, là où le feu va venir grignoter la matière. Ce qui fût vivant puis mort sous la force de l'homme, l'homme va lui donner une deuxième et dernière vie, une sortie haute en couleurs ! Je souffle sur les braises. D'abord d'un rouge pâle, elles semblent s'illuminer, reprendre vie, enfin; le rouge devient éclatant, vibrant. Il pulse, je sens des dizaines de cœurs battre à nouveau, doucement d'abord, puis de plus en plus fort, ça crépite. De la fumée blanche commence à se dégager de ses entrailles, l'odeur revient; on est presque prêts à faire le grand show. Un dernier coup de mes poumons pour lui insuffler ma vie, un dernier massage cardiaque, et d'un coup, la patiente se relève, la flamme sursaute; je tombe en arrière. Repartie ainsi, elle va pouvoir durer quelque temps. Je vais pouvoir enfin la revivre, l'observer à nouveau, en profiter. Je me tourne, je la laisse réchauffer mon dos, exactement là où j'en ai besoin, entre les omoplates. Sa caresse m'est douce et réconfortante. Son attraction irrésistible. Ma faim d'elle, insatiable. Je la laisse me gouverner, je m'y soumets. Je peux presque sentir ses mains sur mes épaules, près de mon cou; mais il n'y a aucun contact, qu’une simple sensation. Facile après tout d'être attiré par une chose qu'on a soi-même créée. La vie prend finalement un sens, elle en devient simple : il suffit de mettre du bois dans la cheminée pour se sentir bien. Mais ce n'est qu'illusion, rien de tout cela n'est vrai, il n’y a aucun contact, qu’une simple sensation. Sa rage consommatrice ne s'épuisera jamais, il lui faudra toujours plus de bois; elle détruira tout, ou se détruira elle-même. La vie n'est jamais aussi simple.
Ma quête de la flamme absolue commence alors. J'espère trouver la flamme qui ne brûle pas trop fort, pour ne pas tout prendre d'un coup – mais qui brûle assez pour rester vivante et grandir. J'aimerais qu'elle soit bien stable, dansante, sans frénésie, sans l'agitation précoce d'une adolescente. Je la veux permanente, jamais ternie par le temps, ni usée par les chemins qu'elle emprunte. Je veux qu'elle me réchauffe, mais qu'elle ne me brûle pas. Je l'imagine avoir une odeur de jasmin, ou bien celle d'un grand parfum. J'approche le canapé, je m’y allonge. Passent les minutes, la flamme parfaite ne vient pas. L'attente se fait longue, interminable. La recherche se transforme en observation, l'observation en ennui, l'ennui en désintérêt. Les minutes paraissent des heures. Je me sens vieillir, mes traits sont tirés. Puis, de nulle part, alors que j'allais abandonner, une belle flamme rougeoyante sort de nulle part. Elle se met à danser avec grâce devant moi, à me parler doucement, regarde, j'ai été faite pour toi, je suis ta flamme. Elle m'aime passionnément, cette flamme. Elle est joyeuse, elle ne se complique jamais. Mais d'un coup, elle s'éteint. Celle qui était là pour moi n'est plus. Ne reste que la vague odeur d'un grand parfum. Ça ne pouvait pas durer, elle était trop belle. Une illusion de plus dans cette cheminée.
Je me rallonge dans mon canapé, déterminé à m'endormir avant elle, pour ne pas voir sa flamme s'étioler à nouveau. Je tire une couverture à moi. J'ai chaud. Je suis bien. J'ai vu la perfection ce soir. Je suis heureux. Je peux m'endormir en paix, enfin.
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