Avant de commencer cher lecteur, je t'invite à prendre connaissance de toutes les modifications apportées au nom des personnages :
France :
Adrien Evans = Harry Potter
Pétunia Martin = Petunia Dursley
Vernon Martin = Vernon Dursley
Marcel Martin = Dudley Dursley
Allemagne :
Regulus von Schwartz = Regulus Black
Lucius Graf von Hohenfels = Lucius Malfoy
Draco Graf von Hohenfels = Draco Malfoy
Bellatrix von Seltsam = Bellatrix Lestrange
Rudolf von Seltsam = Rodolphus Lestrange
Rabastan von Seltsam = Rabastan Lestrange
Andromeda von Carrow = Andromeda Tonks
Amycus von Carrow = Amycus Carrow
Alecto von Carrow = Alecto Carrow
Thomas (Tom) Übel = Tom Jedusort
Vinzenz Crabb = Vincent Crabb
Gregor Goyle = Gregory Goyle
Rutger Davis = Roger Davis
Mikaël Ecke = Michael Corner
Royaume-Uni :
Sirius (Black) von Schwartz = Sirius Black
Et surtout, bonne lecture !
CHAPITRE I
Adrien Evans, 12 ans, mois de juin 1932, Paris, France.
Au milieu des haies des jardins du Luxembourg, caché du regard des promeneurs, Adrien pleurait doucement, mouillant sa blouse grise d’école. Recroquevillé sur lui-même il essayait de faire le moins de bruit possible, comme il en avait toujours eu l’habitude. Ce n’était pas la première fois qu’il venait ici. Il leva soudainement la tête, six heures sonnaient à l’église du Val-de-Grâce, et ces six coups sourds et puissants signifiaient le glas funèbre pour lui.
Affolé par son retard, le garçon se mit à courir du mieux qu’il le pouvait. Traversant des rangées de fleurs il sortit rapidement des jardins et s’élança dans la cohue de la circulation parisienne. Sans ménagement, il se frayait à travers la foule un chemin, jouant sans hésitation des coudes. Bientôt il déboucha sur une des grandes artères de Paris et longea les longues rangées d’immeubles haussmanniens. Autour de lui des enfants sortaient de l’étude, les fonctionnaires des ministères, et les employés quittaient leur bureau, tous souhaitant retrouver la quiétude et la félicité du foyer abandonné pour la journée. Adrien aussi se dirigeait vers l’endroit où il vivait, mais contrairement à toutes ces personnes, c’était avec le cœur gros et les larmes aux bords des yeux qu’il devait y aller. Jamais dans sa courte vie il n’avait souhaité une seule fois y rentrer car il savait pertinemment bien que jamais on ne l’y accueillerait comme un vrai membre de la famille, on le lui avait assez répété.
Bientôt les rues qu’il traversait devinrent plus familières, il arriverait bientôt à la boutique que tenait sa famille. Son oncle, Vernon Martin la dirigeait avec sa femme Pétunia, et selon les dires du premier ce serait son fils, Marcel, ses études terminées, qui reprendrait la juteuse affaire. Ce magasin, dédié à l’habillement mixte de luxe, avait été ouvert par son oncle à son retour de la guerre et depuis la petite entreprise s’était agrandie, nécessitant l’embauche de nouvelles couturières, de nouveaux employés et de nouveaux locaux. Il y a donc deux années de cela, Adrian et sa famille avaient déménagé dans un quartier bourgeois, proche de la Seine.
Le petit garçon courait toujours se rapprochant toujours plus de sa destination, puis brusquement il stoppa sa course : Marcel et sa bande d’amis venaient de passer au coin de la rue et s’avançaient dans sa direction. Profitant du fait qu’ils ne l’avaient pas encore aperçu il se réfugia dans l’abri que lui procurait une porte cochère toute proche ; bientôt un petit groupe de jeunes garçons passa devant lui, sans le remarquer. Ce groupe était mené par Marcel, son cousin, un garçon de dix ans rondouillard et autoritaire ; tous ensemble ils se considéraient comme les maîtres du quartier et n’hésitaient pas à en venir aux poings pour défendre cette prétention. Et bien trop souvent, Adrien leur servait de cible, voilà pourquoi il souhaitait tant les éviter. Quand il fut certain que le danger était passé il sortit de sa cachette et trottina jusqu’au magasin, tout en essuyant les dernières larmes présentes sur son visage. Puis il contourna la devanture de la boutique et s’engouffra dans la porte empruntée par les employés, car il n’était pas question qu’il y entre par la double porte vitrée réservée au passage des riches clients.
Il se trouvait maintenant dans le dépôt des marchandises nouvellement arrivées au magasin, autour de lui se dressaient de grandes étagères toutes garnies de rouleaux de tissus aux couleurs chatoyantes. Il y avait aussi de nombreuses bobines de fil, des mannequins, et divers outils nécessaires à la couture. Tous ces objets formaient une cascade d’éléments éclatants qui ravissaient le regard. Cependant Adrien ne s’y attarda pas car la pièce possédait une odeur forte, due aux mordants que les teinturiers utilisaient pour fixer la couleur sur le tissu. Il y avait donc dans cette salle une perpétuelle odeur de soufre qui disparaîtrait lorsque les employés traiteraient le tissu dans l’optique d’en faire un patron sur lequel baser les futurs vêtements. Après avoir traversé une enfilade de pièces dédiées à diverses activités, Adrien se retrouva dans l’arrière salle du magasin où s’activait une foule d’employés pressés vaquant à leur tâche. Il y avait là des couturières au tablier piqueté d’aiguilles, des vendeurs à la tenue soignée et hurlant des ordres, plusieurs commis et un bruit de fond sonore important. Discret comme il était, Adrien ne s’était pas encore fait remarquer et cherchait du regard sa tante Pétunia. Entrant dans la boutique même, il la trouva derrière le comptoir, discutant avec de riches clients réglant leurs achats. Elle avait une allure frêle, renforcée par la maigreur de ses bras et son long coup. Ses cheveux bruns étaient frisés comme le voulait la mode et elle portait une robe à fleurs lui arrivant en-dessous du genou. Un moment il hésita, mais il savait que plus il attendait, plus la punition serait terrible, il lui fit donc discrètement signe. Quand elle l’eut aperçu elle vint le prendre par le bras et l’entraîna de force dans l’arrière-boutique, son visage se déformant en une hideuse expression.
« Tante Pétunia je…
_Petit imbécile ! Où étais-tu ? l’interrompit-elle. Encore en train de vagabonder n’importe où ! Retourne travailler, on réglera ça avec ton oncle ce soir. Tu ne vas pas la voler !
_Mais je…
_Pas de discussion ! Tu as déjà manqué suffisamment de travail ! »
Ceci dit, elle lui donna une taloche, lui causant une vive douleur. Puis elle s’éloigna, reprenant son masque de façade et laissant Adrien tout frissonnant de peur. Il savait ce qui allait se passer si elle prévenait son oncle, ce n’était malheureusement pas la première fois que cela arrivait. Rapidement il sortit de l’arrière-salle pour se diriger dans une pièce adjacente. Là il prit son poste : il devait effectuer diverses modifications commandées par les clients sur leurs habits, des ourlets par exemple. Depuis tout petit il était chargé de cette tâche et il ne se souvenait pas de ne l’avoir jamais fait un soir. La pile de travail était énorme aujourd’hui, il devenait de plus en plus anxieux, comment allait-il faire ? Sur son ouvrage il pleurait doucement, sans bruit. Et à chaque larme qu’il versait il détestait encore plus Pétunia, Vernon, Marcel et surtout lui-même. Il se sentait tellement inutile et sa vie était si misérable ! Il cacha ses sanglots dans son ouvrage. Si Pétunia le remarquait il était définitivement cuit. Doucement, il sortit une photo de sa poche et la posa sur ses genoux. C’était sa mère, décédée à sa naissance, aux longs cheveux roux qui lui souriait dans sa tenue d’infirmière anglaise. Adrien sourit, il savait au moins qu’une personne l’avait aimé et désiré.
Regulus von Schwarz, trente-cinq ans, mois de juin 1932, München, Deutschland
Cette réception mondaine l’insupportait. Tout autour de lui se pressait une foule dense et colorée qui ne cessait de crier, de rire et de le déranger. La nouvelle coupe de champagne qu’il vida d’un trait n’améliora pas ce sentiment et l’aggrava au contraire. Depuis la guerre il avait toujours eu l’alcool triste et chaque goutte de cette boisson lui rappelait des moments douloureux du passé, ceux qu’il voulait oublier à jamais. Il soupira, peut-être que s’il prétextait une urgence quelconque il pourrait s’esquiver.
« Regulus, mon cher. J’espère que vous appréciez la soirée. Comment allez-vous ? »
Il tourna la tête, c’était Lucius, son cousin par alliance et également l’organisateur de cette réception. Trop tard, il était cerné maintenant. Comme toujours il avait parlé de sa voix grave et élégante, celle qui dans leur jeunesse avait charmé Narcissa. Mais depuis sa mort à la naissance de leur unique fils celui-ci s’était métamorphosé, changeant du tout au tout. Il était désormais un homme froid et distant, s’enfermant dans le travail et la politique, et délaissant son fils, Draco.
« Très bien, bien qui les affaires ralentissent à cause de cette terrible crise, répondit-il prudemment.
_Je ne me fais pas de souci pour vous, vous avez toujours été un habile homme d’affaires. Quoi que ces derniers temps j’ai entendu des bruits, bien sûr infondés, sur ce qui se passe dans vos usines. On m’a dit que vous étiez très proches de vos syndicats et que vous adoptiez une politique qui pourrait paraître, comment dire, socialiste, » acheva-t-il, l’œil perçant.
Ce n’était pas la première fois que Lucius se comportait de cette manière. Toujours jaloux.
« Eh bien comme vous l’avez dit, je suis un habile homme d’affaires, loin de moi ce genre de choses. Jamais je ne mêlerai aux syndicalistes et à ces sauvages de communistes, je sais tenir ma place de patron, cingla-t-il, tout en accentuant le dernier mot pour lui rabattre le caquet.
_Vous m’en voyez rassuré, permettez-moi de vous demander de me suivre. Nous avons des affaires familiales à traiter qui relèvent de la plus haute importance, finit-il, le ton légèrement moqueur.
_Je vous en prie. Soyez mon guide. »
Sans un mot de plus les deux hommes se mirent en marche, le blond ouvrant le chemin au brun. Regulus n’avait été absolument pas déstabilisé par les propos de son cousin et restait toujours aussi calme, arborant un visage impénétrable. Il savait qu’il n’avait rien à craindre de l’autre homme, étant le plus puissant et respecté des deux. Il était en effet le chef de la famille des von Schwartz, une des plus illustres familles d’Allemagne : ses ancêtres remontaient au début du millénaire et chacun d’eux avaient accompli de grandes choses, leur nom restant gravé dans l’Histoire. Et même maintenant encore, neuf siècles plus tard, sa famille gardait l’ascendant sur toutes les autres, dont celle des Graf von Hohenfels, cela étant rendu possible par leur participation active dans l’industrie et la politique. Rien que son nom provoquait le respect et l’admiration parmi la population qui le voyait comme une légende. Voilà pourquoi les sous-entendus de Lucius ne l’effrayaient pas le moins du monde.
Regulus savait bien de quoi ils allaient parler à cette réunion de famille, ce sujet était sur toutes les bouches. Il en était d’ailleurs fatigué d’avance.
Ils sortirent de la longue enfilade de salons pour se diriger vers les escaliers monumentaux qu’ils montèrent sans échanger un mot. Après avoir un peu marché ils entrèrent dans un salon privé du deuxième étage. De nombreuses personnes y étaient déjà présentes, n’étant pas assises car le chef de famille n’était pas encore arrivé. Près de la cheminée de marbre se tenaient sa cousine Bellatrix ainsi que son mari Rudolf et le frère de ce dernier, Rabastan ; aux abords de la fenêtre se trouvaient les jumeaux Alecto et Amycus, ces deux-là étaient liés à sa famille par le mariage de sa cousine Andromeda avec le deuxième ; elle aussi était d’ailleurs présente, un peu en retrait, comme toujours, près de la bibliothèque ; Regulus remarqua en dernier la présence du couple von Flint, son oncle par alliance et sa tante, Dorea. Quand tous eurent remarqué son arrivé il les invita à s’assoir et ils prirent place. Depuis l’unique fauteuil de la pièce, Regulus présidait la réunion.
« Bonsoir à tous, nous sommes ici assemblés sur la requête de Lucius afin de mener à bien les affaires de la Très Noble et Très Pure famille des von Schwartz. Je vous en prie, Lucius, commencez. »
Celui-ci se releva et se racla la gorge.
« Depuis quelques années nous subissons tous les troubles qui agitent notre noble pays qu’ils soient économiques, sociaux, ou encore politiques, commença-t-il. Nous avons été entraînés dans la pente de la décadence par ceux qui ont trahi la patrie il y a de cela une décennie. Et depuis, inexorablement, nous devons rendre tribut à ceux qui nous humilient. Cette situation ne peut plus longtemps être tolérée, nous devons redresser la tête, réveiller le sang qui coule dans nos veines. »
Il fit une pause, attendant que son discours s’imprime bien sur ses auditeurs. Tous étaient d’accord avec les propos qu’il tenait. Et pour une fois Regulus devait reconnaître qu’il disait vrai. Chaque personne dans cette pièce haïssait le Diktat imposé par les puissances de l’Entente et souhaitait que le pays se redresse enfin. Il faisait partie de ces gens-là et il écrivait souvent dans les journaux conservateurs des articles du même ton. Coupant ses pensées, Lucius reprit la parole de sa voix grave et froide.
« Comme nous l’avons déjà évoqué l’Allemagne connaît en ce moment de grands changements qui vont dans cette voie. Et ces améliorations sont conduites sous le commandement d’un seul homme, celui destiné à diriger la nation allemande. Cet homme a pris conscience des éléments qui la corrompent et des problèmes qu’ils engendrent, et il va les régler. Cet homme, c’est Adolf Hitler. Notre Führer»
Un concert de protestations s’éleva à l’entente de ce nom qui chaque jour se faisait de plus en plus connaître, apparemment tout le monde n’était pas d’accord avec Lucius. Les von Flint d’abord puis dans une moindre mesure les von Carrow se faisaient particulièrement entendre.
« Voyons Lucius, il n’est qu’un agitateur de foules, un homme méprisable ! Comment peux-tu le soutenir ! » criait Friedrich von Flint
D’autres renchérissaient :
« Un homme minable, faible et autrichien ! »
« Et ses SA alors ! Aucun respect, des casseurs et des vauriens. Ses fidèles ne sont que des sauvages, recrutés parmi les ouvriers communistes et les chômeurs ! »
Soudainement Regulus se leva, et tous se turent immédiatement.
« Voyons mes amis, gardez votre calme et laissons notre ami Lucius finir, » apaisa-t-il, diplomate.
Puis il se rassit, le visage aussi impassible qu’à l’accoutumée.
« Merci Regulus, je reprends donc. Certains pensent qu’il n’est qu’un petit chef prétentieux qui bien vite sera remplacé. Il n’en n’est rien. Regardez ce qu’il a créé, chaque jour son mouvement grandit et gagne en puissance, les gens comprennent qui il est, ils savent qu’il est celui attendu. Son nom est chaque jour plus répété et partout il se répand dans notre pays. Certains diront qu’il est suivi d’une traînée de boue brune malsaine mais tout ceci n’est que passager. Quand l’ordre nouveau sera établi l’Allemagne retrouvera sa vraie grandeur ! »
Andromeda était un peu décontenancée, jamais elle n’avait vu son beau-frère si volubile et aussi fervent. Lui d’habitude si froid et méprisant semblait goûter à nouveau à cette vigueur qui l’avait animé pendant sa jeunesse. Bien sûr elle ne fit part à personne de ses remarques, elle devait se comporter comme une bonne épouse de bonne famille et rester discrète, comme son mari Amycus von Carrow le voulait.
Quant au susdit époux il était furieux, jamais les membres de la Très Pure famille Schwartz ne s’allieraient avec ce genre d’individu sorti de nulle part. Il ferait tout pour que cela n’arrive jamais.
« Si je comprends bien, tu veux que l’on rejoigne cet homme et qu’on le soutienne ? demanda un Friedrich von Flint, très sceptique.
_Tout à fait. Je veux que la famille Schwartz apporte son soutien et son dévouement à notre nouveau guide, confirma Lucius.
_Jamais ! » tempêta Rabastan.
Soudain, la voix de bébé de Bellatrix s’éleva pour la première fois. Cette dernière pour la réception s’était vêtue d’une robe cylindrique en vogue et s’était parée de très nombreux bijoux qui étincelaient sous la lumière du lustre.
« J’ai rencontré cet homme. Il est fascinant, dans tout ce qu’il dit. On sent que quelque chose émane de lui. Il m’a comme… convertie. Oui il m’a montré le vrai chemin, je sais intimement au fond de moi que c’est notre Führer…
_Enfin Bellatrix, reprenez-vous ma chère ! Tout d’abord, pourquoi nous mêlerions-nous à ces gens ? la sermonna la volumineuse Frau von Flint.
_Vous ne comprenez pas. Il faut le voir quand il parle… Ses discours vous convaincront. J’en suis sûre. Je sens que très prochainement il…
_Taisez-vous ! Avez-vous vu quel sang coule dans ses veines ? C’est un malpropre, un prolétaire ! cria une Alecto furieuse.
_Comment osez-vous vous en prendre à ma femme ! Notre Führer n’est en aucun cas un plébéien gauchiste ! Répondit Rodolphus von Seltsam, le visage très rouge.
_Vous êtes donc alors avec eux ! Ces nazis ! répondit la voix méprisante de Rabastan. Contrairement à son frère il ne semblait pas être d’accord avec les propos de Lucius. Jamais nos familles ne se soumettront au premier individu venu de nulle part. Nous sommes fiers de nos lignées et de nos ancêtres !
_Allons, allons, calmez-vous tous. Vous êtes ridicules à vous époumoner comme le premier roturier venu, déclara la voix froide du mari de Narcissa. Adolf Hitler sait pertinemment bien que nous sommes la quintessence du sang aryen. Dans le nouveau Reich il nous offrira une place de choix, parmi les privilégiés, comme notre naissance le veut. Dans ce nouveau régime nous serons toujours les dirigeants. »
Andromeda comprit alors les véritables intentions de Lucius : celui-ci voulait le pouvoir et si cela passait par les nazis et bien tant pis. Toute cette mise en scène, ce discours grandiloquent n’avait qu’un but : gagner les faveurs des membres de la famille Black pour que Regulus soit contraint d’abdiquer et de suivre les nazis. Ceux-ci, satisfaits du geste de Lucius lui donnerait alors une très bonne position qui dépasserait même celle de son cousin par alliance, Regulus, qu’il jalousait pour son poste de chef de famille. En vérité, Lucius faisait tout cela par pur opportunisme.
« Il suffit Lucius, intervint Regulus. Nous n’en ferons pas ainsi. Je défends à quiconque de s’associer avec ce parti. Nous verrons la suite des événements, si les députés nazis remportent les prochaines élections législatives je réviserai peut-être mon jugement, commanda-t-il.
_Mais, mais… balbutia la voix aigüe de Bellatrix.
_Ma décision est prise, vous pouvez disposer. »
La réunion de famille était terminée. Peu à peu ses membres sortirent du petit salon pour rejoindre le rez-de-chaussée. Lucius avait le regard sombre et le chef de famille savait que ce n’était qu’une question de temps avant que celui-ci ne s’affiche publiquement avec les nazis, il avait déjà entendu dire que ce dernier avait fait enrôlé son fils dans les Jeunesses Hitlériennes et que celui-ci s’y plaisait très bien. Regulus les salua tous et discuta quelques minutes avec certains. Il remarqua au passage l’air profondément malheureux de sa cousine Andromeda. Enfin lui aussi quitta la pièce puis la réception mondaine, fatigué des nouveaux problèmes qui lui tombaient sur les bras. Après ses ouvriers qui risquaient d’être licenciés et qu’il voulait à tout prix garder se rajoutaient ces complications familiales et politiques.
Draco Graf von Hohenfels, 14 ans, mois de juin 1932, München, Deutschland
Draco passa un dernier coup de peigne dans ses cheveux platine gominés puis s’avança vers son miroir. Celui-ci lui renvoyait l’image d’une autre personne : il avait l’air d’un homme, celui qu’il voulait être. Dans son uniforme flambant neuf des Jeunesses Hitlériennes il se sentait puissant. Son père, une fois n’est pas coutume, le lui avait offert pour son anniversaire et l’avait enjoint à s’y enrôler. Ce qu’il avait fait avec grand plaisir. Il faisait désormais partie de la cellule de sa ville et se préparait pour s’y rendre. Sa tenue était composé d’un court short brun serré à la taille par une ceinture de cuir, d’une chemine beige munie de nombreuses poches et d’un foulard brun noué autour de son cou. En complément il avait à sa ceinture, soigneusement rangé et nettoyé, le poignard donné à tout garçon des Jeunesses Hitlériennes où était gravée la devise de l’organisation, Blut und Ehre ! Sang et Honneur.
Avec précipitation il sortit de sa chambre puis du manoir des Graf von Hohenfels pour rejoindre les rues bouillonnantes d’activités de Munich. Sur pratiquement chaque mur s’étalaient de grandes affiches électorales vantant les mérites de tel ou tel parti. Draco passait avec fierté devant celles qui représentaient le chef du parti nazi, Hitler. Il avait la conviction intime que ce serait lui le grand gagnant de toutes ces magouilles politiques et son père lui avait confirmé cette hypothèse. Son avènement était imminent.
Bientôt il fut devant le QG de la cellule des Hitlerjugend de Munich. De nombreux garçons plus ou moins âgés y attendaient. Il fit signe à quelques amis puis vint à la rencontre de son chef d’unité, Thomas Übel pour lui signaler sa présence. Puis il se fondit dans le groupe cherchant ses connaissances qu’il trouva rapidement. Il y avait là Vinzenz Crabb, Gregor Goyle, Rutger Davis et Mikaël Ecke. Tous faisaient également partie du prestigieux Gymnasium où il étudiait et les deux premiers étaient mêmes dans sa classe. Tous ensembles ils étaient fiers d’être le fer de lance de la jeunesse aryenne allemande.
« Eh bien, que se passe-t-il ? Pourquoi il y a-t-il autant de monde réuni ? demanda Rutger.
_Aucune idée, l’informa Mikaël. Apparemment ils ont une grande nouvelle à nous annoncer. »
Draco était impatient de la connaître ; se mobiliseraient-ils pour les élections, iraient-ils casser du rouge ? Toutes ces perspectives étaient très alléchantes. A chaque réunion, les Jeunesses Hitlériennes travaillaient dur physiquement pour accroître le potentiel de combat des futurs soldats du Reich. Ils recevaient aussi de nombreuses leçons à propos de la doctrine nazie, chose essentielle par-dessus tout. Ils étaient une organisation paramilitaire de jeunesse.
Brusquement les discussions se turent. Thomas Übel venait de leur intimer le silence. Chacun se mit au garde-à-vous et en rangs, le tout en claquant des talons comme les soldats devant leur officier.
« Jeunes hommes, j’ai une grande nouvelle à vous annoncer. Une nouvelle qui ravira tous les cœurs courageux qui chaque jour battent d’impatience de servir la nation allemande. Il fit une pause puis reprit : le 1er et deux d’octobre nous nous rendrons à la Journée impériale de la Jeunesse à Postdam en présence d’Adolf Hitler ! »
Un concert de cris de joie s’éleva. Défiler devant le Führer ! Cela lui semblait être le plus beau jour de sa vie ! Chaque personne avait le sourire aux lèvres et bien qu’ils n’osassent pas quitter leurs rangs ils sentaient tous l’excitation les parcourir. Quel honneur c’était ! Jamais dans ses plus beaux rêves Draco n’avait rêvé d’une chose pareille.
« Ce sera l’occasion de montrer à tous les ennemis de l’Allemagne que jamais la jeunesse ne leur laissera corrompre notre pays ! Heil Hitler ! »
« Heil Hitler ! » répétèrent-ils.
« Heil Hitler ! »
« Heil Hitler ! »
« Heil Hitler ! »
C’était dans ces deux mots que toute leur joie et leur bonheur s’exprimaient. Et chaque fois ils les répétaient toujours plus forts, toujours plus convaincus. Leurs hurlements fanatiques s’élevaient hauts dans l’air et parvenaient à une bonne partie de Münich. Draco avait fermé ses yeux et le bras levé il répétait encore et encore cette devise.
« Heil Hitler ! »
« Heil Hitler ! »
« Heil Hitler ! »
Il avait l’impression d’entrer en communion avec tous ses camarades, de faire partie d’un mouvement. Il n’avait jamais été aussi heureux de sa vie et il rouvrit ses yeux, des larmes perlant au coin de ses paupières, pour voir tous ses camarades lever dans le ciel le drapeau nazi, baigné par la lumière divine du soleil.
Remus Lupin, mois de juin 1932, 19 ans, London, United Kingdom.
Remus traînait des pieds, ne sachant où aller. Ce matin-là il était déjà allé voir les docks pour y chercher du travail, sans succès. Cela faisait depuis plus d’une semaine qu’il avait décroché son dernier boulot et il se demandait bien comment il allait payer sa logeuse. Plus la crise s’installait et plus il désespérait. Il y quatre ans le port de Londres tournait à plein et il gagnait correctement sa vie en tant que docker pour une entreprise spécialisée dans la fourrure de loup. Mais dès 1931, l’entreprise avait mis la clé sous la porte après avoir périclité pendant de nombreux mois. Et depuis il se retrouvait sans emploi fixe, enchaînant des boulots minables et précaires. Il soupira.
« Excusez-moi. »
Il se retourna, un homme aux cheveux noirs et épais venait de l’interpeller. Il était grand, beau et avait les yeux bleus. Et à en juger par le luxe ostentatoire de ses vêtements, il n’avait sûrement pas sa place dans ces docks crasseux et minables. Il avait d’ailleurs l’air mal à l’aise et il triturait maladroitement ses gants de soie blanche.
« Je peux vous aider ? demanda calmement Remus.
_Eh bien je recherche les entrepôts de la Potter Company, sauriez-vous pas hasard où ils se trouvent ? Si vous m’y emmenez je vous paierais, » rajouta-t-il peu rassuré par l’ambiance de l’endroit où il se trouvait.
Monsieur le Lord qui tend la main au petit prolétaire… pensa-t-il sarcastiquement.
« Quelle branche ? »
L’entreprise possédait en effet de nombreuses succursales et des comptoirs installés aux quatre coins du monde. Par conséquent elle avait de nombreux entrepôts à Londres, ville où était situé le siège de la compagnie.
« Américaine. »
Remus se retint de sourire, l’honnête Lord était en fait un petit contrebandier. Tout le monde savait dans le bas Londres que toute la marchandise sortant de cette branche n’était que de l’alcool, encore et encore, à destination des Etats-Unis où sévissait la Prohibition. L’entreprise Potter était connue pour être une de seules à faire du profit en ces temps de crise. Des profiteurs.
Et malgré son dégoût d’être associé à de telles personnes, Remus pensait au pourboire qu’il aurait s’il s’exécutait. Il n’imaginait que trop bien le repas qu’il pourrait enfin prendre, après trois jours l’estomac vide. Alors il se décida.
« Suivez-moi. »
Pendant ce temps Sirius était ravi, après avoir tant hésité à demander son chemin à un inconnu il tombait sur une personne qui allait l’aider. Il se souvenait encore de toutes les recommandations de son meilleur ami James à propos des ouvriers et autres prolétaires : Jamais Sirius ! Tous des communistes, des dégénérés et des républicains ! Ils chercheront toujours à t’avoir, à te voler, ils mentent comme ils respirent. Ne leur fais jamais confiance !
L’homme en face de lui n’inspirait en effet pas vraiment la sympathie. Complètement dépenaillé et vêtu d’habits sales usés jusqu’à la corde, son allure de misère ne le mettait pas vraiment en valeur. Sur son visage était gravé un air de perpétuel épuisement. Un chômeur, comprit-il. Pourtant il avait envie de lui accorder sa confiance ; c’était la vue de ses yeux dorés et remplis de douceur qui l’avait décidé à l’aborder. Tant pis pour les conséquences, il avait toujours foncé dans le tas.
Les deux hommes si différents marchaient d’un bon pas, Remus menant le duo. Ils cheminaient à travers les dédales obscurs des docks. Partout des caisses innombrables de marchandises et des cordages où plusieurs fois Sirius se prit les pieds. On pouvait noter néanmoins de nombreux quais et docks déserts, cela dû à la baisse d’activités du port. Bientôt ils arrivèrent en vue de grands entrepôts gris comme l’acier. C’était là.
Sirius se sentait tout étrange en la présence de l’autre homme, et désirait sans savoir pourquoi acquérir sa sympathie. C’était comme lorsqu’on lui présentait une personne inconnue, il voulait lui plaire. Il se sentait si maladroit, comme s’il était redevenu le petit garçon craintif devant les amis prestigieux de ses parents. Le pire était les yeux de l’autre homme, dorés, qu’il avait l’impression de voir partout. Dès le moment où il les avait croisés ils s’étaient imprimés à jamais dans son esprit.
« Vous y êtes milord, dit Remus, en le coupant dans ses pensées.
_Merci beaucoup. Je… tenez, » dit-il, en lui fourrant dans les mains une liasse de billets.
Il était complètement désorienté, comment devait-il agir avec l’autre homme ? Que lui arrivait-il ? Pourquoi se posait-il ce genre de questions ? Il ne savait même plus ce qu’il faisait car il venait en effet de lui donner presque tout le contenu de son portefeuille.
L’autre homme sans un mot s’était retourné et s’éloignait à grandes enjambées.
Mais quel crétin. Remus était ravi, il venait de gagner plus qu’en dix mois de travail. Avec tout cet argent il pourrait enfin payer son logement et améliorer son quotidien, et peut-être même, il se plaisait à l’imaginer, atteindre la fin de la crise. Des pigeons pareils, on n’en croisait pas tous les jours. Lui, un contrebandier ? Il avait tout de suite plus de mal à l’imaginer en homme d’affaires rusé et efficace. Tout de façon il s’en fichait, il ne le reverrait jamais. Et tant mieux d’ailleurs.
Pendant ce temps, Sirius était toujours planté au même endroit, complètement perdu.
Ca y est, je ne le reverrai plus. Jamais, pensa-t-il, complètement déboussolé. Il faut que je me reprenne, voyons ! Et sur ce, il tourna lui aussi le dos à l’autre homme, essayant tant bien que mal de chasser ces pensées.
Fin du chapitre I
Que dire ? Ce n'est pas courant ce genre de fanfictions... c'est pour cela que j'ai d'autant plus besoin de vos reviews et de votre avis !
Enna
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