A Elwyn, avec qui j'ai semble-t-il une muse commune, et qui m'a rappelé qu'écrire n'était pas une option mais une nécessité absolue. Je sais que ce texte n'est pas transcendant, mais il est plus de minuit et je l'ai écrit entre deux lignes de philosophie...Donc un peu d'indulgence? Prenez ça comme une tentative de résistance face à l'oppression professorale^^ C'est certainement horriblement mélo (grrr, j'aime pas ça...), mais là je suis trop crevée pour m'en rendre compte. Il est probable que demain j'aurais soudainement la révélation de ce que j'ai osé commettre et que je me précipiterai pour supprimer cette abomination. On verra bien... Bonne lecture quand même, après tous ces avertissements! ***** J’aime ces matins de molle langueur. Il fait encore sombre, mais plus vraiment noir. La nuit a passé. Un rayon paresseux se glisse sous le rideau et donne à la chambre un début de réalité. C’est un jour gris, un jour de décembre. Dehors, il n’y a pas de chaleur, seulement une lumière maladive. Peut-être de la neige, aussi. Blanche et pure sur les toits, comme du coton. Il faudrait aller voir. Plus tard. Les membres sont lourds, assoupis. La chaleur des couvertures est un asile dont il paraît absurde de s’extraire. Les sensations sont douces, tandis que l’esprit flotte quelque part à mi chemin des rêves, mal assuré. Il suffirait d’un bruit soudain pour tout briser, et ce serait le réveil. Mais il ne vient pas. Il n’y a que ta respiration tranquille qui me berce, tout près de mon visage, la chaleur de ta peau qui ne fait qu’effleurer la mienne. Tout est bien, paisible. Rester à la lisière des songes, encore un peu. Mais c’est déjà trop tard, la conscience revient à pas feutrés. Il faut quitter l’ailleurs. Je résiste, mais ce n’est plus que simulacre, alors je cède. Je quitte l’abri de mes paupières. La lumière a gagné depuis tout à l’heure. Les meubles se dessinent, les ombres s’allongent. Pas encore de couleur, mais cela ne saurait tarder. Ce n’est plus qu’une question de minutes, et ce sera vraiment le jour. Je profite de ces instants volés au matin, aux autres qui dorment. Tu remues à côté de moi. Lentement, tu plies une jambe, le drap crisse et se froisse. Tes sourcils se froncent, puis tu redeviens impassible. Visage lunaire. Dans tes cheveux s’attarde cette odeur de ville et de pluie. On dirait une fleur alanguie. J’étends la main et repousse une mèche noire qui te barrait le front. Tu soupires. A ton tour, tu luttes pour sortir de l’eau noire des rêves. Je t’observe, longuement. Tes yeux roulent sous tes paupières. Il suffirait de si peu…Je joue avec toi. Ma main te frôle, doigts rêches contre peau lisse, dans d’irritantes caresses. Je crée le manque. Ta bouche d’enfant gâtée se tord en une moue boudeuse, tu laisses même échapper une plainte. J’aime quand tu te perds dans mon toucher, quand ta jolie tête arrête de réfléchir. Instants trop rares où tu es à moi. Mais cela ne peut pas durer. Tu ouvres les yeux, et c’est à nouveau ce regard fixe et bleu derrière lequel tu te protèges. Je me demande à quel point j’étais maître du jeu. Pas le moindre trouble sur ton visage, aucune trace de ce sentiment de perte qu’on éprouve lorsqu’on est tiré du sommeil. Peut-être que c’est toi qui me regardais dormir…Tes lèvres s’étirent en un sourire énigmatique. Le masque est en place, à nouveau, et j’aurais presque envie de te frapper. Si seulement tu pouvais dormir encore un peu, maintenir l’illusion. Le jour est levé, maintenant, mais tu ne fais pas mine de te lever. Tu te pelotonnes davantage. Le drap se referme sur toi, ne laissant aucun centimètre de peau visible, dessinant la frontière entre nos deux corps. Ton expression me défie d’approcher. Tu sais que je le ferai, pour combler la brèche. Mais je suspends mon geste, ma main levée entre nos deux visages. J’hésite. Un éclair d’incompréhension file dans tes yeux, puis ils se font durs comme des pierres. Tu me devines, mais c’est que je ne fais aucun effort pour le cacher. Je veux plus que ces moments d’incandescence, nuits d’oubli et caresses faciles. Le matin me rend mélancolique. Aucun mot n’est prononcé, mais le silence est éloquent. Trop même, car c’est toi qui t’approches. Il n’y a pas de douceur dans ton baiser, seulement du poison. Je me laisse faire, tu mènes la danse. Je sais bien maintenant que cela ne suffira pas. Les gestes sont maladroits, les souffles rapides. Chaque contact est une brûlure, et bientôt il n’y a plus que la sensation de nos cœurs qui battent l’un contre l’autre. On se perd dans un mirage. Dehors il neige. Dans un coin de la pièce, un bouquet fané laisse échapper des parfums évanescents. |