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au 31 Mai 21 :
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Murmure
Par Asinastra
Originales  -  Action/Aventure/Surnaturel  -  fr
3 chapitres - Rating : K+ (10ans et plus) Télécharger en PDF Exporter la fiction
    Chapitre 1     Les chapitres     3 Reviews    
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Le Cri de l'Argent.

Se concentrer, ne pas perdre le contrôle, ne pas éclater en sanglots ou se mettre dans une rage folle.

Tel était son quotidien.

Il allait falloir qu'il sorte, une fois de plus, pour manger. Une action banale pour qui n'Entends pas tout, du Son soyeux du velours contre la peau d'une femme au Rugissement de l'acier froid du coûteau contre son fourreau.

Il ne travaillait pas, il n'en avait pas la force morale, ne mangeait pas à sa faim, n'avait pas ou très peu de connaissances, n'avait aucune distraction.

Il se contentait de vivre, au jour le jour, de gagner quelques pièces dans des jeux de hasard ou grâce à de menus travaux que personne ne souhaitait effectuer de ses propres mains. Comme il lui aurait été facile d'entamer une carrière de voleur ou d'assassin! Ouvrir une porte verrouillée? Aucune difficulté, il Ecouterait les cliquetis du mécanisme si compliqué pour un homme normal. Savoir si une pièce était vide? Il lui suffirait de fermer les yeux.

Ce soi-disant Don n'était qu'un fléau, une tare qui l'empêchait de voir les merveilles du monde. " Apprends à te maîtriser, utilise ton Ouïe comme une arme." Qu'Il était comique! Ce n'était pas lui qui subissait les assauts réguliers des coups frappés à une porte, de deux mains qui s'entrechoquaient pour se joindre à une salve d'applaudissements, des Bruits de mastication que faisait un convive à une table. Ses pensées n'étaient que Silence, et pour pouvoir parler à quelqu'un, il devait faire un effort considérable de concentration.

"Il y en a d'autres comme toi, tu les rencontreras quand viendras le moment où tu devras servir le monde."

Que de belles paroles, de promesses de destinée glorieuse, pour une vie misérable de reclu, d'homme qui souhaiterait plus que tout au monde être Sourd.

Son seul ami était le Silence, il ne pouvait converser réellement qu'avec lui. Car le Silence n'était pas une absence de Son, bien au contraire. Il recelait tellement de savoir, de paix, de joie! Il contenait les rires des enfants, les chuchottements d'un amant, les songes du poète. Le Silence ne prenait pas en son sein les bruits acides et désagréables, seulement ceux qui, portés par le vent, méritaient d'être Entendus. Il était chez lui, isolé par d'épaisses couches de tissus des sons de la rue, et écoutait ce que le Silence lui apportait en se faufilant à travers les mailles des étoffes.

* Aujourd'hui, la Cité est calme.* pensa-t-il.

Mais un mot lui parvint de plus loin encore, un mot prononcé avec tellement de tendresse et de reconnaissance, qu'il crut un instant qu'il lui était destiné. Il le Répéta. Oui, il parla, de sa voix fluette mais rauque, jamais utilisée ou presque. Entendre rendait muet.

-Norilinn...

Un souffle, ce n'était qu'un souffle, il n'y avait pas de voix.

Etait-ce un homme ou une femme qui l'avait prononcé?

Il voulait savoir, à tout prix.

 

Il sortit dehors, sa peau blême tranchant sur la couleur de celles, tannées par des heures passées au soleil, des artisans. Il ne courut pas, de peur que le claquement sec des pavés ne se répercute comme une onde vengeresse dans son corps. Il ne savait pas où aller, ni même qui il cherchait, mais il arpentait la Cité comme il pouvait, se frayant un chemin tortueux parmis les passants.

Il commençait à croire qu'il avait rêvé. Découragé, il s'arrêta quelques instants à l'ombre d'un saule au milieu de la Grande Place. C'était le centre névralgique de la Cité.

Un jeune garçon s'était établi avec une table tapissée d'un tissu vert et ras où étaient posés trois gobelets de bois, et avait créé un attroupement respectable. Son sourire malin face à son adversaire faisait plaisir à regarder. Mais pas à Ecouter. Les rires tonitruants ou discrets des gens étaient omniprésents autour du garçon, et il lui était difficile de s'approcher sans craquer.

Il parvint à faire partie des prochains candidats au jeu: retrouver sous quel gobelet se cachait la pièce d'or que lançait l'enfant en l'air, victorieux tour après tour.

Un autre passant succéda au perdant, et partit tout aussi penaud que le précédent: sans la pièce, et dépouillé d'une somme importante en nature. N'ayant pas un sou, il avait joué ses mocassins. Très mauvaise idée. Plusieurs habitants de la Cité défilèrent, et le gamin se jouait d'eux avec beaucoup d'habileté, créant un balet avec trois gobelets et dix doigts.

 

Il n'avait pas besoin de regarder les gobelets pour savoir où se trouvait la pièce. Il suffisait d'Ecouter. Un tintement par-ci, un chuchottis par-là.

-Alors, Messire, lequel choisissez-vous? Si vous gagnez, je double votre mise!

L'empressement de la foule était palpable. Etait-il celui qui parviendrait à détrôner le garçonnet?

- A gauche.

La mine de l'enfant se changea en une expression déconfite, fugace. La petite pièce était là. Une clameur s'éleva de la foule, pour le faire souffrir encore davantage.

-Bien...un coup de chance, sans doute! Allez, réessayez! Je vous garantis que vous perdrez, cette fois.

Le petit tour recommença, il gagna, quatre fois de suite. Le groupe de passants désenflait à vue d'oeil. L'enfant gagnait sans doute sa croûte uniquement grâce à son petit tour, et il ne voulait pas le priver de son gagne-pain.

Il allait s'en aller, lorsqu'une nouvelle arrivante fendit la foule, s'attirant des grognements et des regards courroucés. De haute stature, vêtue comme une voyageuse, ses traits dépourvus d'animosité mais d'une froideur inquiétante, elle inspirait à la foi méfiance et sûreté.

Elle s'approcha de l'oreille du garçon et lui chuchotta quelques mots. Ce dernier réagit au quart de tour, ses yeux pétillant d'un éclat nouveau, et lui céda la place derrière la table.

Calme, elle le regarda, et ses pupilles l'incitèrent étrangement à continuer de jouer.

-Si je gagne ce coup, tu rends tous tes gains au gamin.

Surpis, il hésita; il avait gagné de quoi se nourrir pendant plusieurs jours d'affilée. Il n'allait pas se démonter pour autant! Il acquiesca sans dire un mot. Il se moquait de la rumeur qui parcourait la foule.

La femme mélangea les gobelets. Beaucoup trop rapidement. Un regard humain n'aurait même pas put suivre.

Il paniqua. La pièce Criait trop, il ne parvenait plus à l'Entendre. Ses traits s'étirèrent. Il allait perdre.

Le chuintement feutré du tissu s'interrompit, lui laissant le choix du hasard. Une chance sur trois.

L'expression de l'inconnue acheva de le déstabiliser: elle arborait un sourire victorieux, elle savait déjà qui d'eux deux allait vaincre l'autre. Le regard qu'elle lui jeta vrillait le monde autour de lui: il n'y avait plus que son choix et ces deux prunelles qui semblaient tout savoir à l'avance.

-Droite.

Le gobelet s'abaissa comme une guillotine. Vide.

Dans un souffle, la jeune femme triompha.

-Perdu.

Un souffle...tellement familier...

Il réalisa trop tard. Elle était déjà partie. Pressé, il déversa le contenu de ses poches dans les mains du garçon, et partit à la poursuite de l'inconnue.

Murmure?

 
 
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