Une nuit de décembre, la nuit de Noël. Il neige, tout le monde fête cette fête en famille autour d'une bûche ou d'un feu de bois, tout le monde s'amuse, tous les enfants attentent impatiemment la venue du Père Noël et tout le monde est heureux.

Tout le monde ? Non.

Une jeune fille marche dehors, dans la neige épaisse et le froid glacial. Une jeune fille d'environ 15 ans. Ses cheveux châtains coiffés à la va-vite volent au vent et sont pleins de flocons de neige. Elle n'est pas très vêtue pour une nuit d'hiver, une légère veste verte, un jogging gris troué aux genoux et des Van's blanches usées composent sa tenue. Elle porte une planche de skateboard de son bras gauche et, les écouteurs noirs enfoncés dans ses oreilles, elle écoute : "Une Vie Pour Rien" du groupe AqMe.

Les mains dans les poches et les pieds raclant le sol, elle avance, sûre de sa destination. Elle marche, encore et toujours dans cette neige de plus en plus dense, elle marche, marquant une distance de plus en plus grande entre elle et son ancienne vie. Cette vie qui aurait du s'arrêter il y a de ça un an, au lieu de celle d'un autre. Il lui a sauvé la vie, aux dépends de la sienne. Il est mort, pour elle. Mais elle ne peut vivre sans lui, elle avance donc, se rapprochant de plus en plus de lui à chaque pas.

Elle entre dans le cimetière où il est enterré depuis un an aujourd'hui.

Elle s'approche de sa tombe et lève enfin la tête. Une larme descend le long de sa joue noircie par le maquillage coulé. Ses yeux noisette cernés de noirs n'expriment plus que de la souffrance.

Elle s'agenouille sur la tombe de ce garçon dont le bleu azur s'était éteint, celui qui l'a sauvée, celui qui l'a poussée sur le trottoir avant de se retrouver sous les roues du bus, celui qu'elle aimait.

Elle s'assied en tailleur dans la neige, pose son skateboard et sort un couteau de sa poche.

Elle porte le couteau à son poignet droit et presse sur ses veines jusqu'à les percer, elle recommence ensuite avec le poignet gauche.

Elle enlève sa veste et la jette dans la neige.

La jeune fille s'allonge devant la pierre tombale et tend les bras en croix.

Le sang rouge brise la blancheur du sol enneigé tandis que son souffle froid, blanc comme la neige, se marie avec ses lèvres bleuies par le climat hivernal.

Bientôt, la lumière qui animait les noisettes de ses iris s'éteint.

Elle sourit et ferme les paupières tandis que la triste balade de Panik, intitulée "Alles Endet Hier" résonne dans ses oreilles.