Note de début : Non, cette fois -ci pas de note =D Voici la suite de la fic. Rendez-vous en bas de page ! Bonne lecture ! ____________ Le soir même, cinq heures trente-six. J’étais sur une plage. Enfin, cette plage… celle où je l’ai rencontrée. J’avais mon crayon à la main et ma pochette de dessin dans l’autre. Assise sur une pierre plate, je dessinais vaguement un paysage de dunes, la mer houleuse, le vent, sur mon papier. Un cri, trop grave pour appartenir à une mouette, et des éclats de rire me parvinrent. Je regardai autour de moi et aperçus au loin un groupe de gens qui s’approchaient de la longue bande de sable. Une fille était allée plus loin qu’eux et avait marché dans l’eau froide, ce qui expliquait les cris. Une autre la rejoignit, et brusquement je distinguai les traits de son visage ; ils étaient certes magnifiques, mais je ne parvenais pas à saisir ce qui les rendait si spéciaux. Je m’empressai sur ma feuille, dessinant les contours de sa bouche fine, l’arrête de son nez fin, sa mâchoire saillante… Je n’avais même plus besoin de lever les yeux : ses traits étaient gravés pour toujours dans mon crâne. Je venais de finir ses paupières (qui j’avais ombrées pour rendre hommage à leur magnifique violet), quand une voix me surprit. « Salut ! -B… Bonjour, soufflais-je, sidérée qu’une fille telle qu’elle eût put me remarquer. -C’est moi que tu dessines ? s’enquit-elle, les yeux attirés par ma planche à dessin. -Je plaide coupable », répondis-je en levant les mains. Elle rit, et son rire se fondit avec un naturel déconcertant dans les bruits de vent et de la mer. « Tu dessines vachement bien ! » lâcha-t-elle, impressionnée par mon esquisse. Je haussais les épaules. « Mais… je n’ai pas d’yeux », constata-t-elle, son rire résonnant à nouveau. Fascinée, je lui ajoutais des prunelles ; malheureusement, j’allais trop vite en besogne : son regard était bien trop froid. Je grognais, déçue. Elle saisit le dessin et annonça : « Magnifique. Il est fini, comme ça. Il est vraiment très beau. -Tu trouves ? demandais-je, toujours aussi déçue. -Oui, m’assura-t-elle en me décochant un sourire qui me transperça un peu plus. Mais je ne me suis pas présentée, je faillis à tous mes devoirs ! Mon nom est Hörver, N… » Je me réveille à nouveau, haletante. J’ai failli rêver son prénom… j’y crois à peine. Je pourrais continuer ce rêve toute éveillée, car il n’est ni plus ni moins qu’un souvenir. Notre première rencontre. Mon cœur se pince, trop régulièrement pour que ce soit le signe d’un émotion violente. Rapidement, je prends mes médicaments contre l’asthme. Je me calme enfin. Par la suite de cette rencontre, nous nous sommes revues plusieurs fois, et elle m’a présentée à mes amis actuels, dont Evy. Plus tard, elle m’a avoué qu’elle recherchait un logement, et nous avons cohabité. Un mois plus tard, d’un commun accord, nous avons décidé qu’il était inutile qu’elle paie un loyer… Je peux même revoir son arrivée ici. Son seul bagage était une boîte noire, et lorsqu’elle l’a ouverte, j’ai vu de l’or… De l’or façonné jazz, en forme de tube tordu. Un saxophone. « C’est un instrument magnifique ! ai-je lâché. -N’est ce pas ? répondit elle, les yeux brillants comme une jeune amoureuse. C’est un alto. Tu veux l’essayer ? -Je… j’ai peur de mal faire. Je suis assez maladroite, ai-je bredouillé. -Ne t’inquiète pas, c’est comme tenir un bébé… Voilà. Mets ta bouche ici, et souffle de toutes tes forces mais en pinçant les lèvres. » Je m’exécutai et un son, vite cassé, sortit de l’engin. « Doucement ! dit-elle, l’air halluciné ; puis elle explosa de rire. D’habitude les débutants ne soufflent pas assez fort, mais toi… Je pense qu’il te faudrait un ténor. » Ce fut ma première leçon. Elle passa toutes ses économies dans un saxophone ténor alors que je pensais qu’elle avait abandonné l’idée de me faire jouer, et elle me l’offrit. Bien d’autres leçons suivirent, et, à deux, nous montâmes bientôt des grands classiques de jazz. Nous trouvâmes un Big Band et rapidement je pus quitter mon travail de garagiste pour vivre de notre musique. Grâce à elle. Il faut que je cesse de penser à tout cela. Elle est morte, le rêve est fini, comme la plupart des rêves qui ont une fin. Je me sens brusquement coupable. Si je ne m’étais pas autant lancée dans l’apprentissage du saxophone et dans le Band, j’aurais remarqué qu’elle avait cessé de s’alimenter, qu’elle maigrissait. Parfois je regrette qu’elle m’ait connue. Il aurait mieux valu pour elle qu’elle partage sa vie avec quelqu’un de moins égoïste, elle serait sûrement en vie et heureuse aujourd’hui. Et moi je n’aurais jamais connu cette douleur qui m’habite depuis deux ans et qui ne semble pas vouloir s’atténuer. J’arrête donc de penser à cette triste comédie et je vais sous la douche, car je me suis aperçu d’une chose il y a de cela un an : même si la vie semble s’arrêter à l’intérieur, elle continue à l’extérieur. Voiiilà, fin de la deuxième partie, oui je sais c'est minuscule mais je ne le voyais pas autrement. Il faut que je finisse le découpage des autres chapitres (il y en aura maximum 4), mais elle arrivera relativement vite. Bisous et à bientôt ! Yuki |