Bon, c'est un peu de l'écriture automatique (voire complètement). Donc je suis tout-à-fait ouverte aux critiques. Je me rends compte avec désespoir que je suis un peu rouillée en ce qui concerne l'écriture. Trop de phrases, pas assez de phrases, pas les bonnes? Grand dilemne. Toute suggestion est la bienvenue=) Bonne lecture^^ ******* Elle dort alors que moi je veille. Cela fait trois nuits maintenant que je l’observe sans qu’elle le sache. Le jour nos regards s’évitent, petites lâchetés sans importance ou bien c’est son masque que je surprends, figé dans la pierre de ses joues. Les mots que l’on s’arrache ne signifient rien d’autre que notre colère secrète. Personne ne le sait, cela ne se voit pas vraiment. Mais un froid d’hiver gèle sur nos lèvres chacune de nos paroles. La rancœur peuple nos silences ; nous avons trouvé de nouveaux moyens d’être cruels mais plus rien ne nous touche. Nous sommes comme deux fantômes hantant la même maison, côte à côte mais non ensemble. Chaque rencontre est un duel et une mise en scène dont nous sommes les absents. Il n’y a plus de Lucius et Narcissa, du moins dans la lumière. Lorsqu’elle ferme les yeux je peux recréer l’illusion de nos deux identités qui s’estompent. J’ai l’impression de disparaître derrière nos masques d’indifférence. Elle dort en me tournant le dos, comme si même la nuit il fallait des barrières. J’admire la ligne que son côté dessine. On dirait une fleur alanguie, tremblant dans le silence. Il y a quelque chose de poignant dans la manière dont ses côtes se soulèvent doucement. Sa nudité est une provocation et une vengeance : elle sait que je ne la toucherai pas, bien que je la désire. Il y a l’arrondi de son épaule que le drap ne couvre pas. Il y a ses cheveux étalés sur lesquels danse un rayon de lune. Il y a sur son cou trois taches plus sombres que la peau, la marque persistante de mes doigts. Dans son sommeil son visage se transforme. Je ne reconnais pas son expression non gardée ; il y a quelque chose en elle qui tient de l’enfant et de l’ange. Les mains repliées contre sa poitrine, elle a l’air fragile. Mais je sais bien que c’est cela le mirage ; c’est lorsque je me heurte à son regard qui me renvoie le mien que je la vois vraiment. C’est une poupée aux yeux de ciel et aux lèvres peintes. Blanche comme de la porcelaine. Froide comme de la porcelaine. J’ai voulu trouver une faille. Au lieu de la briser, je me suis brûlé les doigts, et nous voilà comme deux chiens en cage à attendre la prochaine attaque. Tout aurait pu être simple, pourtant. Elle aurait pu être belle et effacée, comme l’avait été ma mère, comme elle m’était apparue le jour de nos fiançailles. J’aurais voulu vivre avec un objet d’art, une coquille vide. Je n’aurais eu aucun remords à l’enfermer dans son rôle d’apparat jusqu’à ce que quelque chose en elle meure à force de réceptions et de sentiments creux. Narcissa m’obéit ; je force le rouge sur ses joues et l’ombre sur ses paupières. Mais il y a en elle encore trop d’intensité. Derrière son visage lisse elle demeure pour moi une éternelle étrangère. Oui, elle réveille en moi ce désir de violence. Sa résistance est un défi qu’elle me lance à la face. Son indifférence est comme une armure dont elle se protège. Sa faiblesse la ferait mienne. Sa sincérité la ferait mienne. Je voudrais lui arracher l’illusion qu’elle maîtrise quoi que ce soit. Parfois j’ai envie de la frapper ; de la mettre à ma merci. La détruire serait peut-être le plus sûr moyen de la posséder. Elle a voulu découvrir mes secrets, et elle paye maintenant pour cela. Ce n’était pas ce que je désirais. Elle aurait du accepter mes absences inexpliquées, les personnes étranges qui viennent sonner à notre porte et qu’elle ne peut s’empêcher de toiser de ses grands yeux gris. Elle n’avait pas à savoir. Après chaque disparition, je lui aurais caché le sang sur mes habits, la démence qui courait dans mes veines, mes cauchemars parfois au plus profond de la nuit. Pandore a ouvert la boîte qui aurait du demeurer close. C’est de sa faute. C’était un mauvais moment. En moi s’attardait l’écho des morts et des souffrances causées. Volonté d’anéantissement qui résonnait à mes oreilles. Il me fallait quelque chose à briser, contempler les éclats sur le sol et savoir que c’était moi. Elle n’aurait pas du se trouver là, alors que mon corps tremblait sous la force d’instincts obscurs et inavouables. J’étais encore en noir quand elle a ouvert la porte. Elle se tenait dans l’embrasure, l’air un peu surpris. Sans peur, sans crainte, la tête penchée ; elle ne prenait pas garde à ma colère. Par sa seule présence elle remuait la vase de ce qui devait rester enfoui. Je me suis senti nu devant son regard. Elle souffle en moi une faiblesse que je ne me connaissais pas. Je l’ai prise à la gorge, plaquée contre le mur ; mes doigts s’enfonçaient dans sa chair et j’aurais voulu avoir des ongles pour percer la peau. Je me suis contenté de meurtrir. Le sang ne coulait pas. Je ne ressentais rien ; même la rage s’engourdissait. Elle aurait pu crier et se débattre, je ne l’aurais pas entendue. Ce n’était plus vraiment d’elle qu’il s’agissait ; seulement d’un corps qui imposait à un autre corps sa brutalité maladive. Je me nourrissais de violence. J’ai regardé sans les voir les émotions défiler. Stupeur. Effroi. Et puis… un sourire. Les sourires de Narcissa sont toujours étranges. Celui-ci était comme la corde tendue d’un instrument de musique qui porte en elle la double promesse d’une note et d’une rupture. Chacun de ses traits semblait une contradiction. Ses lèvres s’étiraient comme si elle l’avait toujours su ; au coin de sa bouche il y avait du dédain et un fantôme de bravade. Mais dans ses yeux quelque chose tremblait comme du cristal, l’attente d’un coup qui ne venait pas. Elle aurait sagement fermé ses paupières devant mes gestes sauvages, consolant sa peur tapie au plus profond d’elle-même du savoir que ce serait bientôt fini. Elle se serait mordue l’intérieur des joues pour ne pas pleurer. Il y aurait toujours eu ce sourire, un peu plus crispé, un peu plus amer, qu’elle m’aurait adressé par-delà sa déception. Je l’ai lâchée. Elle est restée immobile contre la bibliothèque, droite comme un soldat pendant que je quittais la pièce. Je ne sais pas la suite, j’ai seulement le souvenir d’une brûlure d’alcool cautérisant mes pensées. Je voudrais effacer ces trois derniers jours où les silences ont constitué des gouffres. Elle dort à côté de moi et se débat au milieu de ses rêves. Ses mains se crispent sur les draps comme si elle avait peur de sombrer. J’écoute un moment sa respiration qui se presse à ses lèvres. Je ne sais pas à quoi elle pense. Il y a en moi l’impulsion étrange de la toucher. Je suspends mon geste au milieu de nos deux corps. J’aimerais croire que mon simple contact éloignerait les cauchemars. Sous ma paume je sentirais sa chair palpiter, de plus en plus doucement. Je serrerais un peu son épaule et elle s’abandonnerait tout contre moi, peau contre peau, nos deux chaleurs réunies. Mais peut-être se raidira-t-elle. Ses muscles pétrifiés contre ma présence. Peut-être trouvera-t-elle même au milieu de ses visions le moyen de me repousser. Peut-être, je ne veux pas savoir. Quelque chose se durcit en moi et je retire ma main. Je la regarder lutter contre elle-même là où je ne peux l’atteindre. Pour un peu je tirerais les draps pour qu’elle ait encore plus froid. Autour de nous la nuit est immobile et écoute Les battements de nos cœurs. |