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Katiouchka II
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Claimer : tout à moi. Rating : K+, peut être… Note : Bonjour. Voici la suite des « Orgues de Staline ». Je n’avais pas du tout prévu d’en faire une à la base, mais l’ambiance s’y prête finalement assez bien. Bonne lecture. Ce texte est entièrement dédié à mes parents. Une autre guerre en Crimée (Katiouchka II) C’est un endroit hors du temps. Elle ne sait pas vraiment comment elle est arrivée là, simplement, ça lui semblait la chose à faire. Elle ne sait pas vraiment où elle est. Les dalles de marbre sont un peu ébréchées sur les bords, et en baissant légèrement les yeux elle peut distinguer quelques herbes folles qui poussent entre les pierres disjointes par l’usure. La pierre est blanche, veinée de gris clair – peut-être que ce n’est pas du marbre, finalement, à vrai dire elle s’en moque un peu. C’est de la même couleur que le ciel au-dessus d’elle et qu’elle peut apercevoir au travers de la verrière, d’une luminosité à peine assourdie par quelques nuages bas à l’horizon. C’est au bord de la mer – un peu plus loin, et malgré l’épaisseur des vitres poussiéreuses, elle peut entendre le ressac des vagues s’écraser contre les falaises de calcaire. Le vent souffle fort et elle peut presque sentir son rugissement sur la peau nue de ses bras – elle frissonne imperceptiblement quand une bourrasque cogne un peu plus fort sur les cadres de fer forgé qui relient les fenêtres de la verrière. Elle n’entend rien d’autre que le bruit du vent et des vagues, et le son même de ses pas semble étouffé sur les herbes folles. Il y a un piano sur sa gauche, un peu de guingois sur les dalles irrégulières à l’autre bout du jardin d’hiver. En bois blanc, poussiéreux lui aussi comme le reste de cet endroit abandonné. Le velours gris qui tend le petit banc est élimé comme s’il avait été râpé consciencieusement durant des années – peut-être que c’est le cas. Elle se demande vaguement comment un tel instrument a pu être déposé ici : il n’est sûrement plus accordé depuis longtemps. Pourtant, lorsqu’elle s’assied face au clavier et qu’elle caresse du bout des doigts les touches d’ivoire à peine jauni par le temps, elle peut presque sentir s’élever dans l’air une mélodie familière. Une petite musique entêtante dans l’atmosphère confinée de ce jardin perdu au milieu de nulle part, et qui lui vrille le cerveau aussi sûrement qu’un scalpel. Ses doigts sont hésitants sur les touches, mais la mélodie revient peu à peu et les notes s’égrènent doucement, en contrepoint aigrelet du vent marin qui rugit toujours contre les vitres. Le piano – il lui semble soudain qu’il appartient à quelqu’un qu’elle a connu. Autrefois, dans un autre monde. Presque une autre vie. Peut-être était-ce sa mère, cette femme dont elle a oublié le visage. Ou peut-être était-ce elle-même. (…) C’est une ville morte – une ville fantôme où la végétation hésite encore à reprendre ses droits et dispute à la pierre quelques pans de murs fissurés. Les rues droites courent en pente douce vers la mer, là où il y a une petite crique dissimulée entres les rochers et les falaises avoisinantes. Le vent soulève la poussière en bourrasques grises qui recouvrent jusqu’aux toits des maisons. C’est comme si quelqu’un avait décidé de repeindre le monde en noir et blanc. C’est une ville abandonnée au temps – trop isolée peut-être pour en faire un de ces lieux de villégiature réservés aux membres éminents du Parti. Trop désuète, aussi. Sûrement. Il n’y a pas la moindre trace de vie ici, pas même un chien errant qui se serait égaré entre les ruines de ses faubourgs. Les poubelles sont vides, même le verre des fenêtres brisées a été balayé. Le seul bruit qu’on entend est toujours celui du vent, et de la mer en contrebas. Katiouchka s’avance le long des murs aveugles, silencieuse comme un spectre. Plus bas, juste un peu plus bas, il y a la plage, et ses souvenirs. Peut-être. (…) Ses chaussures gisent un peu plus haut, abandonnées sur le sable grossier près des rochers. La grève est déserte, si bien cachée du monde extérieur qu’elle a l’impression qu’elle pourrait être le dernier être vivant sur ce coin de terre. Même le cri des oiseaux marins ne parvient pas à ses oreilles ; il n’y a pas de coquillages, pas de crabes, à peine quelques algues brunâtres échouées sur le rivage – mais peut-être est-ce le vent qui lui rabat les cheveux sur le visage et l’empêche de voir correctement. Elle regrette un peu le temps où les infirmières les lui coupaient si court qu’elle n’avait plus besoin de se coiffer. Elle les a laissé pousser depuis qu’elle est partie. Il y a six mois, ou il y a six ans – elle a oublié. Lorsque les vagues froides et salées viennent lécher ses chevilles nues, Katiouchka ne s’arrête pas de marcher. Elle fixe l’horizon, là où le gris du ciel se confond avec le gris de la mer, et pense qu’elle pourrait rester là jusqu’à la fin du monde. |
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Par Bookineuse le 23 Avr.. 10 - 22:57 :
Chapitre 5
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Bonjour !
J'aime beaucoup ton recueil, ça m'évoque plein de choses...
Tout d'abord ces formidables livres illustrés pour enfants (et plus grands !) que j'admire (Misstigri et d'autres dont je ne connais pas le nom ni l'auteur).
Le premier texte me rappelle un superbe dessin animé, 'Kerity, La maison des contes'pour l'évocation des contes et de leurs personnages.
Cette lecture m'inspire, on ressent vraiment ce que tu veux dire, le titre est admirablement trouvé, Princesse(s)... On les imagine, tes petites femmes solitaires et un peu folles, d'un trait incroyablement clair : petites bonnes femmes bariolées ou ivoires en haut de leur tour de cristal...
Tous les sujets abordés ont trouvé écho,
'Le royaume de papier' car, comme Apocalyptique, ça me donne envie de m'enfermer dans tous ces contes,
'Katiouchka', les deux textes, pour l'expression de la solitude,
'Annie' pour celle de la folie "douce",
et le quatrième pour les sourires qui masquent les vrais sentiments.
Ton écriture est fluide, les répititions structurent le texte de façon agréable, le vocabulaire est aérien.
C'est l'une des premières fois que je lis des Originales et je pense continuer ces lectures réellement agréables !
Merci pour ces cinq textes, et à bientôt pour la suite ! |
Par Apocalyptique le 12 Nov.. 08 - 21:34 :
Chapitre 5
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Ces textes sont magnifiques. On y ressent l'émotion et la confusion des personne, c'en est troublant. =')
J'ai surtout aimé le premier... Surement parce que je rêve de faire un truc pareil >_<
Vraiment, c'est superbe =) |
Par Myschka le 29 Janv.. 08 - 22:06 :
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Chris : pour le chapitre 3, oui, il y a bien trois personnes qui sont citées dans la lettre, la narratrice, et deux personnages imaginaires - il y a un peu de schizophrénie là-dedans. Et effectivement c'est confus -_-' Argh, merci pour la répétition, je n'avais pas fait attention >_<
Pour le chapitre 4, tu as vu juste, j'ai utilisé les répétitions pour essayer d'appuyer le propos de la narratrice. Je crois qu'elle souffre un peu du syndrome de l'imposteur.
Pour le chapitre 5, j'avoue que je ne sais pas encore tout à fait. Katiouchka commence à prendre un peu d'importance mais je n'arrive pas encore à déterminer si ce qu'elle voit est le reflet de la réalité ou si elle est déjà trop perdue dans son esprit. Ca viendra probablement avec le prochain drabble que j'écrirai sur elle.
Merci en tout cas :) |
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L'alcool, c'est mal. En même temps l'eau ça fait rouiller, alors c'est pas comme si on avait le choix, hein. |
Par ChrisTais le 29 Janv.. 08 - 19:52 :
Chapitre 5
Chapitre 5
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Je n'arrive toujours pas à déterminer, après ce second chapitre si le monde de Katiouchka est réel où non. Il est tellement confus et vide, comme sa mémoire. |
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Dealeuse de lignes. |
Par ChrisTais le 29 Janv.. 08 - 19:47 :
Chapitre 4
Chapitre 3
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Toutes mes excuses Myschka, je ne maitrîse pas encore le truc. Je viens de laisser une review pour le chap 3 dans le 4.
Je vais donc laisser ma review du 4 dans la chap 3, pardon ! ^^;
Bizarrement ce qui me plaît dans ce chapitre...4, c'est la forme. J'aime bien tes répétitions ici parce qu'elles forment une litanie. Comme si c'était le seul moyen de leur donner une existence réelle. |
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Dealeuse de lignes. |
Par ChrisTais le 29 Janv.. 08 - 19:39 :
Chapitre 3
Chapitre 4
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J'aime bien cette série, pourtant je l'avoue ce chapitre là me laisse confuse.
Je l'ai relu plusieurs fois et je suis toujours paumée. Pas que ton texte soit incompréhensible mais peut-être que je n'ai pas tout suivi, que je ne peux pas comprendre.
La lettre me laisse à penser qu'il y a trois personnes qui sont citées.
Ce texte ressemble à une lutte, presque perdue d'avance. On dirait un renoncement.
J'y reviendrai sûrement. ^__^
Je ne vais pas partir sans faire ma chieuse, je crois qu'il y a au début du chapitre une répétition qui n'était pas forcément voulues, contrairement aux autres :
- Je sais. Elle qui souhaitait TANT avoir la paix…
- Oui. Elle qui voulait TANT dormir…
Un petit "tellement" ferait bien l'affaire, je crois. Et je n'ai même pas regardé le dico des synonymes ! ^^ |
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Dealeuse de lignes. |
Par Myschka le 11 Janv.. 08 - 07:54 :
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Alecto : merci beaucoup pour ta review, je suis très heureuse que ça te plaise...à vrai dire j'écris sur les Princesses assez rarement, l'inspiration ne vient pas facilement pour ces thèmes, ou alors ça me prend complètement au dépourvu. Mais tu parles d'obession, effectivement, c'est le cas. Bref, merci beaucoup :) |
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L'alcool, c'est mal. En même temps l'eau ça fait rouiller, alors c'est pas comme si on avait le choix, hein. |
Par Alecto le 10 Janv.. 08 - 22:20 :
*O*
Chapitre 5
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Des princesses emprisonnées dans leur tour d'ivoire...Le titre est bien choisi, c'est vraiment l'impression que j'ai ressentie!
Voilà un ensemble de textes bien énigmatiques, mais qui présentent une cohérence d'ensemble, autour des thèmes de la solitude et de la douce folie...Je trouve tes textes très touchants, avec ces phrases qui reviennent comme une obsession. Tu as un style très épuré, qui parvient parfaitement à rendre les émotions. J'aime beaucoup^^.
Mes préférés sont les deux derniers, on voit vraiment une différence avec les précédents, c'est beaucoup plus puissant...Surtout le chapitre 4, il y a des phrases que j'ai trouvées très jolies!!! Et puis j'adore le thème des masques que l'on revêt comme une armure.
J'espère que tu écriras bientôt d'autres "princesses", j'ai hâte de les lire:)
Alecto |
Par Myschka le 09 Nov.. 07 - 04:13 :
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Cloe Lockless : j'avoue que pour "le Royaume de papier", c'était ma première originale, et je ne l'ai pas travaillée (à vrai dire si je suis restée entre une demie heure et une heure sur ce texte, c'est le bout du monde). J'aurais certainement pu alléger certains passages, oui...
Pour "Les orgues de Staline", le texte n'est pas vraiment travaillé non plus, j'avoue...Et je ne suis pas sûre que s'y connaître plus en matière de régimes totalitaires aide vraiment à apprécier plus l'histoire ^^
Enfin, merci pour ta review et tes critiques, j'essaierai de faire mieux pour la prochaine fois, mais j'avoue que pour le moment, je me concentre sur autre chose...
Bref, merci encore !
LolieShing : (ah toi aussi tu as du mal avec les titres ? Bienvenue au club :D )
Que te dire de plus à part merci ? je n'ai jamais reçu de toi que des retours positifs, et savoir que je réussis à te toucher à chaque fois est extrêmement flatteur pour moi...
Bref, merci beaucoup :) j'essaierai de poster d'autres Princesses, même si pour le moment je me concentre un peu sur autre chose, dans un genre assez différent...A bientôt en tout cas ! |
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L'alcool, c'est mal. En même temps l'eau ça fait rouiller, alors c'est pas comme si on avait le choix, hein. |
Par LolieShing le 29 Oct.. 07 - 14:30 :
Non vraiment, ces titres me donnent l'angoisse de la page blanche à chaque fois XD
Chapitre 2
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On pourrait croire que je m'y serais habituée mais chaque fois je m'étonne comme au premier jour :)
Il y a quelque chose dans tes histoires qui trouve toujours un écho en moi, pas forcément parce que tes personnages me ressemblent mais juste parce qu'il y a quelque chose en moi qui s'exclame "Oui ! c'est ça, c'est exactement ça !"
En lisant Princesse No.1, j'ai assez vite compris où tu voulais en venir et le sourire n'a pas quitté mon visage.
Cette fois-ci c'est vrai je me suis vraiment attachée au personnage d'Elle, parce que je lui ressemble (lui ai ressemblé ?). Et rien, ni le désarroi de ses parents ni la rationnalité même ne pouvaient m'enlever ce sentiment de com-passion, cette voix en moi qui disaient "Comme je la comprends, comme je souhaîte qu'elle vive heureuse entre ces murs, comme j'aimerais l'y joindre à nouveau moi aussi parfois..."
Princesse oui, le titre est vraiment bien choisi.
Que dire de Princesse No.2 ?
Pour une amoureuse de l'Histoire comme moi, cette tranche de vie dans l'URSS ne pouvait que m'interpeler.
Princesse encore une fois, enfermée entre quatre murs, enfermée dans sa solitude.
J'aime son accomodation, le fait qu'elle trouve une certaine sérénité dans ce destin, et surtout le fait qu'elle ne songe plus à se débattre.
Tout cela la rend si humaine, dans le sens faible du terme.
Et c'est vrai qu'une vie où les autres décident à notre place est tellement plus simple, il n'y a plus d'indécisions, d'interrogations, d'angoisses.
Mais au final ça ne compense pas tout ce qu'on y perd.
Voui...
Hum bon donc je disais.
Comme d'habitude tu m'as catapultée à dix mille lieues d'ici, et le trajet de retour est un peu long, d'où mon blablatage bizarre.
Bref. :)
Merci pour ces deux histoires, c'est toujours une expérience fabuleuse de te lire.
Bon courage pour la suite, je reviendrai (*rire machiavélique en option*) |
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