|   . Le monde d'Harry Potter ne m'appartient pas bien entendu, tout revient à J.K. Rowling.  
   ___________________________________________________________________________   Sang-Pur     Vendredi 19 décembre 1997.
 
 
 Elle  posa la brosse en vermeil sur la coiffeuse en marbre de Carrare, puis  passa une main lasse dans ses cheveux blonds que, trop nerveuse, elle  n'arrivait pas à discipliner. Elle pensa à la journée qui se profilait  et qui ne lui plaisait guère mais depuis que son époux était à la prison  d'Azkaban, on ne lui avait pas laissé le choix de ses actions. Pas  d'esprit de Noël cette année pour les habitants du manoir au fond du  Wiltshire ou si peu.
 
 Elle refit son chignon avec soin, s'habilla  puis contempla le résultat, elle voulait faire honneur à son seul amour.  Elle examina dans le miroir ce visage blafard, cette bouche mince dont  les coins descendaient lui donnant un air perpétuellement maussade, ces  yeux céruléens qui semblaient avoir tout vu, ces cernes qui racontaient  les nuits sans sommeil, les nuits de peur, les nuits d'angoisse. Elle  pensa à lui et eut un sourire triste, depuis l'échec de Lucius au  ministère et son emprisonnement tout allait de mal en pis pour eux. Dès  cet évènement, leur vie devint difficile. Une fois de plus elle en  voulut à son mari de les avoir placés dans cette situation par simple  ambition.
 
 Elle étala le fond de teint clair du bout des doigts,  mit du rouge sur ses joues, un peu de noir autour des yeux, joua avec le  camaïeu de roses pour se dessiner au pinceau des lèvres un peu moins  sévères, puis devant le psyché, elle se composa le masque malfoyen, fier  et dédaigneux de la belle Narcissa de la maison des Black, épouse de  Lucius Malefoy, Sang-pur et mangemort. Que restait-il de tout cela  hormis un orgueil affiché? Elle ricana à cette idée.
 
 Elle  descendit le grand escalier du manoir, sortit sur la terrasse, soupira  de soulagement quand elle atteignit les limites du parc et transplana  seule au chemin de traverse. Une fois passée du côté moldu de Londres,  elle chercha une de ces voitures appelées taxis qui l'amena à la gare de  King Cross. Pour une fois, les mangemorts souvent dévolus à sa  surveillance ne s'attachèrent pas à ses pas.
 
 A l'écart des autres sorciers, droite et fière, elle attendit que le train entre en gare
 
 Elle  vit finalement se profiler au loin le rutilant train à vapeur, le  Poudlard Express. Il s'arrêta le long du quai 9 ¾ dans un bruit grinçant  de freins, les portes s'ouvrirent vomissant des flots d'adolescents.
 
 Narcissa  respira plus vite, parcourut avec inquiétude toute la longueur du quai  sans apercevoir la haute silhouette élégante de son ange. Quand elle le  vit enfin, elle chercha sur son visage, dans ses yeux de tempête, ce  qu'il affrontait depuis la rentrée. Rien, elle ne vit rien. Tête haute,  dos droit plein d'arrogance malfoyenne, son fils affichait un air  imperturbable qui, malgré lui, racontait à la mère préoccupée que même  en sa présence, il ressentait le besoin de se protéger. Il approchait  seul. Des élèves qui ne voyaient en elle que l'épouse du bras droit du  lord passèrent non loin sans lui accorder un regard, les anciens amis de  Draco pour qui elle n'était plus que la femme du mangemort en disgrâce  la croisèrent avec un petit air suffisant ou un sourire ironique. Pas un  qui ne soit content de leur malheur.
 
 Draco s'arrêta juste devant  elle. D'une voix lasse et avec un sourire qui n'atteignit pas ses yeux,  il lui murmura un simple bonjour, avant de lui offrir son bras et de la  mener vers la sortie. D'un geste possessif, elle referma sa main sur  son avant-bras sans provoquer de réaction. C'est sans un mot que, malgré  l'aversion que ressentait Draco pour ce transport moldu, ils se  dirigèrent vers la station de taxis pour revenir au Chaudron Baveur.  Narcissa essaya de le faire parler mais il ne répondit à ses questions  pourtant très banales que par des monosyllabes, elle lui en fit la  remarque, il s'excusa, il n'avait plus l'occasion de parler souvent lui  dit-il.
 
 Elle n'eut pas besoin de précisions, elle devina qu'il  venait de résumer sa vie à Poudlard ce premier trimestre de sa septième  année et son cœur se serra. Tenu à l'écart par les Poufsouffle, les  serdaigles, raillé, insulté par les griffondors et méprisé par les  serpentards pour qui il n'était qu'un lâche doublé d'un maladroit,  Draco, ex-prince des verts et argent, vivait un enfer.
 
 Elle  trembla à la pensée de ce qu'il allait découvrir au manoir ces vacances  de Noël. Il n'allait pas tarder à regretter son école.
 
 
 
 
 oOoOoOoOoOo
 
 
 
 Mercredi 24 décembre 1997.
 
 
 Narcissa  contempla la parure d'émeraudes sur le velours noir puis celle de  saphirs dans l'écrin bleu. Indécise, elle mit les deux successivement  devant la robe de velours bleu nuit rebrodé de turquoise et vert  véronèse sans arriver à un choix. Elle attira l'attention de son fils  dont la silhouette se découpait devant le fenêtre et lui demanda son  avis! Il lui conseilla la parure verte sans hésitation, sans regarder ni  la robe ni même son visage. Elle la contempla puis son faciès  impénétrable et voulut savoir pourquoi.
 
 
 -  Pour l'espoir! murmura-t-il.
 
 C'était  la première fois qu'il sortait de sa chambre depuis son arrivée, il y  avait même pris ses repas. Incrédule, elle regarda la couleur des  pierres puis son fils. Elle trembla de ce qu'elle avait cru comprendre.
 
 
 -  Draco?
 
 -  A ma majorité, dans six mois!
 
 -  Toi? rejoindre Potter?
 
 Il  se perdit dans la contemplation du parc avant de répondre à sa mère et  de briser une fois de plus ce qu'il pensa être ses espoirs pour l'unique  héritier des Malefoy.
 
 -  Oui! murmura-t-il enfin.
 
 -  Crois-tu donc être accepté dans ses rangs? railla sa mère, le fils  de Lucius Malefoy, ancien bras droit du lord, le neveu de la meurtrière  qui tua son parrain adulé?
 
 Draco sourit dédaigneusement, malgré  ses dires, il ne douta pas une seconde de l'intégrité du survivant mais  ne répondit rien. Il se remémora la grossière erreur commise l'année  précédente, il se revit refusant en tremblant l'aide du vieux fou. La  mère essaya de suivre sur le visage chéri les sentiments mais rien, il  avait trop bien appris la leçon de son père.
 
 Narcissa trembla  lorsqu'ils pénétrèrent dans le grand salon décoré pour Noël, elle, tout  contre son fils raidi d'appréhension. Il n'avait plus vu Voldemort  depuis plus d'un an et n'avait pas encore été puni de son échec à tuer  le directeur. Nombre d'invités étaient déjà là, d'autres arrivèrent  encore... Ses invités? Non bien sûr! Ceux de sa sœur mais surtout ceux  de Voldemort qui sans état d'âme s'imposait depuis un mois chez son  ex-bras droit sous prétexte de soutenir sa famille qu'en réalité il  martyrisait et humiliait à plaisir. Il avait donc établi ses quartiers  généraux au manoir, les sous-sols retentissaient de cris et de pleurs,  les va-et-vient de mangemorts étaient incessants.
 
 Elle se dirigea  vers le coin du salon où retentissait le rire hystérique de sa sœur.  Belle, froide, inaccessible, parée de joyaux comme une châsse, telle  passait Narcissa de la maison des Black. Le silence se fit et les  invités s'écartèrent pour leur permettre le passage. Elle serra  doucement le bras de Draco sur lequel était posée sa main et affronta  les coups d'œil dédaigneux ou narquois de ceux qui furent les très chers  amis de son époux. Enfin elle parvint devant celui-dont-on-ne-doit-pas  prononcer le nom et brava son regard sanglant uniquement consciente de  la crainte de son tout-petit.
 
 Lord Voldemort regarda les deux  sang-pur hautains qui se tenaient devant lui, il percevait leur peur  mais ne voyait que leur morgue. Il se tourna vers l'enfant,  s'introduisit dans sa mémoire et ne vit que le séjour du jeune homme au  manoir, le reste lui était inaccessible. Il fixa l'occlumens songeur  puis sa mère.
 
 -  Ainsi te voilà, jeune incapable. Tel père,  tel fils! asséna-t-il. Pas d'échappatoire pour toi, jeune Malefoy! Une  punition proportionnelle à ta stupidité!
 
 -  Punition pour bébé Draco! punition pour bébé Draco! oui, oui, oui... chantonna Bellatrix les yeux dans le vague.
 
 Narcissa  fixa le monstre qu'était devenu sa sœur avec haine. Le lord noir eut un  grognement amusé, il était de bonne humeur. Il la prit par le coude et  la mena vers la table dressée dans la salle à manger, laissant Draco  s'occuper de sa tante.
 
 Elle, assise à la droite du sang-mêlé, ne  lâcha son fils des yeux qu'une fois qu'il fut installé entre le serpent  et sa sœur et en face d'elle. Les invités se répartirent selon les  petits cartons leur indiquant leur place. Voldemort s'était beaucoup  amusé à les répartir selon leurs inimitiés. Il fit planer sur  l'assistance un regard caustique... tous rampant à ses pieds! Il fit  entendre un rire de dément qui glaça les Malefoy.
 
 Narcissa  encouragea Draco d'un coup d'œil. Il devait fermer son esprit,  l'occlumencie était la seule arme dont il disposait, surtout maintenant  qu'il avait décidé de faire son chemin du côté de la lumière. Elle  s'aperçut que le mage noir lui parlait, elle ne l'avait pas entendu tout  à ses préoccupations, elle se força à lui accorder son attention.
 
 Elle  regarda autour d'elle toute cette belle société qui depuis deux heures  bâfrait, buvait, beuglait et gloussait d'un rire gras. L'alcool aidant,  les masques tombaient. Elle était superbe l'aristocratie du monde  sorcier, faisant des courbettes devant un mégalomane assassin! Son  vis-à-vis, le teint plus blanc encore que d'habitude sembla près du  malaise sous la soudaine attention conjuguée de sa tante ivre et du  tyran. Et comme si ce n'était pas suffisant, on vit un ondoiement vert  approcher. Sur les ordres en fourchelang de son maître, Nagini s'enroula  autour des pieds et des jambes de Draco, la tête triangulaire vint se  balancer à quelques centimètres de son visage, sa langue frôla le visage  du jeune homme.
 
 A moitié mort de peur, le serpentard affronta  pourtant le pouvoir hypnotique du reptile, il n'avait rien à perdre.  Lorsque pour la seconde fois, Voldemort entra dans son esprit, il n'y  vit que sa crainte immédiate du serpent, il insista et étonnamment, ce  jeune veracrasse de Malefoy tint bon! Quelle amourette tenait-il à  protéger, à cacher, ce petit imbécile? Il ricana. Peu importe, sa  résistance était troublante, perturbante, inadmissible. A sa sortie de  Poudlard, il lui apprendrait le respect qu'on doit au maître. Il imagina  ce regard de mercure changeant enfin dépourvu de toute lueur, de tout  espoir et il rit, d'un rire fou, dérangeant, inextinguible.
 
 Narcissa  désespérée tenta de suivre l'affrontement visuel, tremblant de frayeur  pour sa chair, pour son sang, pour celui qu'elle aimait plus que tout.  Le lord contempla la faiblesse de la mère. Toutes pareilles! de la  née-moldu qui sacrifia il y a seize ans sa vie à la sang-pur qui  défaillait à ses côtés. Intolérable amour qui suintait par tous les  pores de leur peau pour une progéniture pitoyable! Toutes! sauf sa mère!
 
 De  fort méchante humeur maintenant, il renvoya d'un geste le reptile et  les deux aristocrates, ne supportant plus leur présence. Pourtant avant  de les laisser aller, il précisa au jeune homme qu'à sa sortie de  Poudlard il ferait partie de la grande famille des mangemorts et pour  que cet avertissement ne soit pas langue morte, il lança en informulé un  doloris qui plia enfin le dos du jeune homme. Il se délecta de sa  douleur et de l'effroi de la froide épouse de Lucius. Jusqu'où  irait-elle pour le protéger?
 
 Elle s'éloigna son bras passé sous  celui de son fils, c'est elle qui le soutint et le mena vers la sortie.  Elle pensa que ça s'était plutôt bien passé malgré les apparences et  espéra qu'il n'avait rien montré de ses intentions. Elle le lui demanda.  Il secoua la tête, les dents encore serrées par la douleur. Il pensa à  Potter qui avait déjà reçu sa part de doloris lors du tournoi des trois  maisons. Pourquoi évoquer ce stupide gryffi, disparu depuis quatre mois?  Qu'est-ce qu'il attendait pour lui régler son compte à ce psychopathe  de malheur?
 
 Il adressa un sourire crispé à sa mère, elle le lui  rendit plein d'une tendresse qu'il ne lui connaissait pas. Il se savait  aimé mais être choyé était autre chose.
 
 Narcissa le laissa devant  la porte de sa chambre. Elle posa ses lèvres dédaigneuses sur le front  de son tout-beau sans un mot de plus, sans une caresse de plus. Elle  rentra dans sa chambre au bout du couloir immense et se laissa tomber  sur le siège devant la coiffeuse. Elle examina sans complaisance son  visage tendu, elle se trouva vieille et misérable, se méprisa pour son  silence. Elle entreprit de se démaquiller. Soudain elle se rappela  qu'elle n'avait même pas souhaité un joyeux Noël à son ange et les  larmes salvatrices lavèrent le mascara, le rouge de ses joues lui  donnant un air de clown triste.
 
 
 
 oOoOoOoOoOo
 
 
 
 
 Lundi 5 janvier 1998.
 
 
 
 Une  fois de plus, elle franchit l'accès au quai 9 ¾, une fois de plus elle  fut l'attention des autres sorciers, une fois de plus, la tête haute,  l'air pincé, elle passa parmi eux comme une reine attendant de ses  sujets qu'ils s'agenouillent sur son passage.
 
 Une fois de plus,  elle lui murmura de prendre garde à ses amis qui n'en étaient plus, une  fois de plus elle admira son courage et sa fierté, une fois de plus elle  le laissa s'éloigner sans le lui dire.
 
 Une fois de plus elle  reprit le chemin du manoir, une fois de plus elle serra les dents  lorsqu'elle en vit le perron, une fois de plus elle en franchit le  seuil...
 
 Pour lui! pour lui...
   ___________________________________________________________________________   Texte écrit en réponse à un défi sur le Forum Francophone :    OS au passé simple portant sur un personnage peu utilisé 1500 mots minimum
 |