[Point de vue d'Amon]
« T'es vraiment sûr mec ? Enfin je veux dire, les sindars et tout, c'est pas une sinécure ! »
Amon regarda l'halfelin en souriant d'un air hésitant. Du haut de ses 95cm, Liéry n'était absolument pas représentatif de sa race avec sa pusilanimité habituelle. L'éladrin ne se laissa pas démonter par ces propos malgré ses nombreux doutes. Il avait longuement réfléchi au pari que lui avait proposé Erik, son meilleur ami, seul autre eladrin sur le site archéologique. Leur race, cousine des elfes, était caractérisée par leur grâce et leur affinité à la magie et sur ce dernier point, Amon s'en sortait plutôt bien. Il maîtrisait les sorts les plus bateaux qu'un magicien pouvait apprendre mais cela lui permettrait de se défendre efficacement lors de son périple.
Traîné de ruines en ruines, ne s'arrêtant que le temps de conférences et d'expositions dans des lieux vraiment civilisés, il avait eu une enfance plutôt atypique. Son père était du genre complètement passionné et avait fait de son mieux pour transmettre le gène de l'archéologie à son fils. Sa mère, quant à elle, avait décidé il y a 10 ans de les quitter avec sa soeur, cette vie d'errances précaires ne lui convenait plus. Amon avait décidé alors de rester avec son père. A 8 ans, il le vénérait et voulait absolument devenir comme lui, il était donc hors de question de s'installer tranquillement dans les baronnies...
Maintenant, il avait mûri. Et, s'il n'avait jamais regretté sa décision, il rêvait d'une vie différente, peut être plus palpitante encore. Quand Erik était venu lui proposer de partir, il était enthousiaste. Quand il comprit que son ami voulait qu'ils partent chacun de son côté, il n'avais pas compris. Il l'avait laissé lui expliquer toute son idée, et si au début cela l'avait effrayé, après quelques jours à la retourner, ça lui semblait peut être fou, mais aussi juste génial. L'idée était qu'ils partent chacun de son côté arpenter les routes de Faêrun et que dans un an, ils se retrouvent pour voir qui aurait amassé le plus de connaissances possibles sur les mystérieux sindars qui déchaînaient tant de passions chez les archéologues. L'expérience promettait d'être dangereuse au vu des temps qui couraient, mais néanmoins si excitante !
« Laisse tomber Liéry, rétorqua-t-il, j'ai déjà pris ma décision. Je viens de dire au revoir à mon père et Erik est déjà parti ! Je ne peux pas me laisser distancer. Mais je t'écrirais t'inquiètes, je sais que mes parents ont un moyen de se joindre, j'enverrais mes lettres à ma mère et elle transmettra ! »
L'halfelin fît la moue mais finit par capituler. Amon prit alors son sac sans fond, ustensile magique bien pratique pour contenir une grande quantité d'affaire avec peu d'encombrement, et partît en direction de l'ouest. Il n'était pas loin d'un port de la côte des épées et c'était un bon endroit pour commencer, surtout qu'Erik avait pris la direction opposée.
Il avait toujours été d'une nature peu sûr de lui. Il se surprenait lui-même à partir ainsi seul avec juste assez d'argent en poche pour faire une traversée en bateau et se nourrir un mois ou deux... Enfin, il avait appris à chasser et peu d'animaux résisteraient à ses projectiles magiques !
La première journée de marche se fit avec l'enthousiasme du premier jour. Mais plus les heures passaient, et plus Amon commençait à sentir la solitude lui peser. Il n'était pas fait pour voyager seul et il le savait... Pour s'occuper, il pratiquait des exercices mentaux permettant de mieux ressentir la magie et il faisait voleter des cailloux le long de la route. Rien de bien intéressant, mais les heures passantes étaient longues et solitaires, du genre de solitude forcée qu'il n'avait jamais connu...
Son arrivée une semaine plus tard au port d'Athkatla fût une délivrance sans pareille. Il savait le coin assez dangereux et la vigilance constante dont il devait faire preuve lui pesait. Certes, sa qualité d'eladrin faisait qu'il n'avait pas besoin de dormir la nuit mais juste de se mettre en transe pendant trois à quatre heures, et c'était bien pratique ! Pas besoin de lit ni de tours de garde, il restait somme toute suffisament vigilant pour sa propre survie. Néanmoins, le luxe d'une auberge et la compagnie des locaux promettaient de lui redonner une bouffée d'oxygène bienvenue.
Athkatla, la cité du péché, à condition d'en avoir les moyens... Là-bas, tout s'achète, la luxure, le vice, l'inavouable et l'immoral. Mais également les places de bateau pour le nord, exactement là où Amon désirait aller. Sa destination ? La glorieuse Porte de Baldur ? La surpeuplée Eauprofonde ? C'est avec un sourire aux lèvres qu'il embarqua, sûr de lui comme jamais il ne l'avait été. |