Sur tes lèvres entrouvertes coule le doux nectar de l'amour tandis que mes doigts lassés d'attendre effleurent la pulpe de ta chair, rose de plaisir. Jeunesse impatiente, jeunesse trépidante se confondent dans la passion sensuelle qui doucement, doucement mon amie, étreint la liberté des sens. Sens-tu l'euphorie de nos baisers, la chaleur de nos embrassades, l'union de notre amour ? Je ne vis que par ton souffle haletant, qui rythme nos ébats. Alangui est l'amant qui attend tes faveurs, désespérément. Je te regarde ; tu es à moi. Tu tombes entre mes griffes, lentement, lentement mon amie, tu me rends fou. Goûtant la douceur de ses lèvres, il se penche lentement pour appuyer sa bouche contre celle de l'être adoré. La sensualité à fleur de peau les entoure de son aura langoureux, comme une goutte de lait ; il caresse sa joue, tendrement, faisant fi des bruits alentours. Ils sont seuls au monde, glissant sur les lèvres de Baudelaire.
Naruto regrettait leurs actes manqués, leurs folies évitées, leurs divagations perdues, leur psychose commune, leur extravagance qui leur mangeait le cerveau, le grignotait avec gourmandise, les rendant plus agités que jamais. Leur souffrance unie. Ici, seuls les oiseaux pouvaient lui rendre son chant de démence. Il était fatigué de cette attente, et de ce printemps qui n'en finissait pas. Son allergie au pollen l'empêchait de voir la lumière du jour, et de respirer même parfois si bien que ses journées de méditations ne satisfaisaient pas son appétit naturel de vie. Des jours entiers se succédaient. Elle arriva. Il dormait entre les fleurs, se reposant dans les bras de Morphée. Les senteurs étourdissantes tourbillonnaient, venant chatouiller son odorat, pour l'endormir sournoisement. Les herbes qui s'affaissèrent sur son côté gauche indiquèrent l'allongement pesant d'une présence dérangeante. Des doigts masculins glissèrent le long de son torse pour se loger au creux de son cou, rejoint bientôt par une langue sensuelle, qui fit son chemin contre sa mâchoire. Naruto crut étouffer de désir. Il ouvrit les yeux. Le vent lui renvoya cette image de lui-même, tremblant de solitude jusqu'à rêver de possession. Il tourna la tête, et effleura du bout des doigts les cheveux blonds éparpillés dans la verdure, qui se mêlaient avec délicatesse dans la palette de couleur printanière. Elle ressemblait à une gisante de marbre, sommeillant à l'ombre paisible du grand chêne. Il resserra son étreinte autour du fil doré. Il avait peur qu'elle lui échappe. Leur romance voluptueuse les faisait basculer dans une haine l'un envers l'autre. Cette interdiction de se toucher les rendait fou. Ils se regardaient pendant des heures, se scrutaient, s'observaient avec méfiance pour déceler la moindre faiblesse, et attaquer, toutes dents dehors à l'image du plus grand prédateur naturel. Ils aimeraient se dévorer. La morale ne les retenait pas, elle ne faisait que les retarder. Ils attendaient le moment idéal pour bondir, et s’envoler. Peut-être.
Reviens.
C’était plus une supplication qu’une demande véritable. Elle se retourna, le détailla avec minutie puis s’approcha de lui sur la pointe des pieds, comme une lionne. Ses doigts flattèrent son torse, et son nez trouva un nid confortable dans le creux de ses reins. Ils restaient comme cela durant des heures entières, des jours même, si leur condition faible d’humains ne reprenait pas le dessus. Ils ne bougeaient pas, attendaient l’état de grâce qui pourrait les délivrer de ce mal pour leur montrer la voie banale d’une vie paisible, dont leurs parents avaient tant parlé les yeux remplis d’étoiles. Un fantasme moderne à atteindre, loin de toutes les supercheries que pouvait engendrer la passion, cette créature des délices. Ils rêvaient secrètement d’évasion, et se chuchotaient quelque fois des idées folles de voyage ; ils s’imaginaient trottinant sur des routes désertes, le soleil tapant sur leurs nuques blanches encore, explorant des savanes remplies de fleur de paradis, se perdant dans d’immenses villes côtières en respirant la brise marine. Ils souriaient des heures et n’affrontaient plus la réalité. Elle n’avait rien à leur offrir.
Ino avait acheté un sac de toile, en prévision. Elle gardait toujours propre de la lingerie et quelques tenues, s’ils devaient s’enfuir le plus vite possible. Longtemps elle regardait à la fenêtre pour scruter les ombres, et tenter de découvrir la silhouette de son sauveur. Cette nuit-là, elle était close et quand Naruto était arrivé, seul l’écho lui répondit. Son manque de confiance avait failli les perdre, mais le coup d’œil qu’elle jeta finalement en direction de l’obscurité la combla d’espoir.
Elle l’avait rejoint tellement vite qu’on aurait dit qu’elle avait lévitée, l’espace d’un instant divin.
Ils s’étaient envolés dans la fière pénombre, devenue leur plus précieuse alliée. |