J’étais enveloppée dans une serviette avec un chocolat chaud entre les mains. Ma peur s’était un peu évaporée mais cela ne m’empêchait pas de lancer des regards furtifs autour de moi. J’étais sous le chapiteau, la fille rousse qui avait prononcé mon prénom m’avait amenée ici. Elle se tenait à coté de moi et me regardait avec un peu d’inquiétude. J’appris lors du chemin qu’elle s’appelait Roxanne. L’endroit où je me trouvais était particulièrement sombre. On ne pouvait pas voir à plus de quatre mètres devant soi. Des personnes portaient des torches au milieu de la scène du chapiteau. Je ne savais pas trop ce qu’elles faisaient mais les torches volaient des temps à autre. « Elles s’entraînent pour le prochain numéro, me dit Roxanne comme si elle avait lu dans mes pensées. » Ils donnaient donc des représentations ? C’est bizarre. On en aurait entendu parler sinon. Je portai la tasse à mes lèvres et avalai une gorgée de chocolat. J’étais assise sur les gradins et fixais le vide devant moi. Je repensais à la créature de tout à l’heure. Des frissons me parcoururent tout le corps. Je fermai les yeux et respirai lentement avant de lâcher un long soupir.
« Ca va Mel’ ? me demanda Roxanne. » Je hochai la tête en signe de réponse et levai les yeux vers elle. « Au fait, comment tu connais mon nom ? » Mon interlocutrice laissa dessiner un sourire sur son visage et vint s’asseoir à mes côtés. « C’est Mlle Loyale qui m’a dit qu’une nouvelle arrivait dans le cirque et qu’elle s’appelait Melkorka, puis elle pencha la tête et pris un air réfléchi. Je m’attendais à ce que tu poses plus de questions n’empêche. Tu n’es pas très bavarde. »
J’haussai les épaules. Je n’avais jamais était d’un naturel à parler tout le temps. Mais pour connaître une réponse, je pouvais être terrible. Des questions, j’en avais, pas mal même. Mais justement, j’en avais de trop à poser. Comme par exemple, quelle est la présence que j’ai sentie tout à l’heure ? Ou, qui est Mlle Loyale ? Plus important encore : où est-ce que je suis au juste ? Parce que c’est bien beau de savoir que je me trouve au Circus Monster, mais… qu’est-ce que cet endroit ? J’avalai en une traite le contenu de ma tasse tout en me brûlant la gorge et la posai à coté de moi. Je fixai l’une des torches qui allait dans tous les sens avec la flamme qui dansait. Je ne voyais pas la personne qui la manipulait, mais elle était vraiment douée.
« Elle s’appelle Azilis, m’informa Roxanne en suivant mon regard. Elle n’a que dix ans mais se débrouille très bien quand il s’agit jouer avec le feu. »
J’acquiesçai, ce que je voyais confirmaient ses dires.
« Ca fait longtemps qu’elle est au cirque ? demandai-je. - Moins longtemps que moi. »
J’avais envie de lui répondre « Mais encore ? » mais je m’abstins.
« Bon, on ne va pas rester ici toute la journée quand même ! s’exclama Roxanne toute souriante. Viens, j’vais te faire visiter les lieux. »
Je retirai la serviette posée sur mes épaules et me levai. Je suivis mon guide qui m’emmena dehors. J’écarquillai les yeux à la vue de plusieurs cages alignées qui abritaient des animaux. Je suis contre l’enfermement de ces-derniers. Enfin, je n’aimerais pas être isolée comme eux le sont. Roxanne passa à coté d’eux sans s’arrêter et entra dans un immense manoir. On aurait dit que la bâtisse était abandonnée. A l’intérieur, tout était deux fois plus grand qu’à la vue de l’extérieur. On se serait cru dans Harry Potter. Dès qu’on rentrait, on tombait dans une immense salle bondée de monde. La pièce était magnifique, les murs en pierres étaient ornés d’une tapisserie baroque noire et blanche. Nos pas résonnaient sur le carrelage en marbre beige. Un magnifique grand lustre en cristal noir éclairait la pièce d’une lumière blanche. Des canapés, des poufs et des chaises en velours était installés un peu partout dans la salle. Une chaleur et une bonne odeur de bois provenait de la cheminée.
« Voilà la salle principale, m’expliqua Roxanne. C’est vrai que cela peut paraître grand, mais cet effet vient du fait qu’il y ait aucune autre pièce que celle-là au rez-de-chaussée. »
Je comprenais mieux cette sensation de grandeur à présent. Ma guide pris les escaliers à gauche pour accéder au deuxième étage et ouvrit la première porte à sa droite.
« Donc voilà ta chambre. C’est un peu petit. Vous êtes quatre personnes à loger ici. Dont Azilis. La porte au fond mène à votre salle de bain personnelle. »
J’examinai les lieux. J’admets que ce n’était pas très grand mais pas quoi de se plaindre non plus. Et puis, une salle de bain par chambre, c’est le luxe, non ? Dire que des criminels se trouvent de ce confort. D’ailleurs, ils sont où, eux, ces malfrats ? A la base, cet endroit devait être que pour eux. Avant que tout se détraque.
« C’est pas ce que tu penses, me dit Roxanne. Le cirque va très bien. - Ca te dérangerait de ne pas lire dans mes pensées ? râlai-je. - Désolée. »
Cela faisait deux fois que Roxanne devinait mes pensées. Cette dernière avait un don ou il était aussi facile que ça de lire en moi comme dans un livre ouvert ? Elle continua la visite en descendant au premier étage pour me montrer l’endroit où on mangeait ainsi que les cuisines.
« Petit dej’ à huit heures trente, repas à midi pile et dîner à vingt heures tapantes, m’informa le cuisinier. Ne soyez pas en retard Mlle. Crimsey, sinon, vous ne mangez pas. - Et ça serait bête de rater un bon repas, n’est-ce pas ? enchérit mon guide. »
J’arquai un sourcil. Parce que les plats ici sont bons ? C’est l’endroit rêvé pour un criminel. Normal que personne n’en soit jamais revenu. C’est le paradis comparé à la prison ! Plus j’avançais dans ma visite, plus je ne comprenais pas le but de ce cirque. Le jour où j’appris la légende du Circus Monster, j’ai pensé que c’était une bonne chose qu’un tel lieu existe. J’imaginais même que tous ces vilains malfrats se faisaient manger par des monstres censés être présents. Oui, « censés » parce qu’à ce moment-là, je les cherchais encore. Enfin, chercher est un bien grand mot, disons que j’avais tendance à balayer tous les coins des différentes pièces à coup d’œil. A moins que la chose de tout à l’heure en soit un ? Une impression de froid me parcouru tout le corps en y mêlant des frissons. Il ne faut plus que j’y repense.
Nous retournâmes dans la pièce principale. Cette salle, je l’aimais beaucoup. Elle est tellement chaleureuse qu’on pourrait y rester toute une journée entière à papoter avec quelqu’un ou à lire un bon livre au coin de la cheminée. Dans cet endroit de manoir, tout le monde à le sourire, on en vient même à oublier où on est.
« Au fait, Mel’, tu ne vas pas rester toute la journée sans rien faire. On a un boulot pour toi. » Je penchai la tête. Un boulot ? Moi qui déteste travailler… « Rendez-vous demain devant les cages d’animaux. » |