DRACO

- Citrouille au chocolat.

Drago regarda la statue  tourner lentement  pour dévoiler des escaliers gris et usés conduisant au bureau du défunt Dumbledore.

Il monta la boule au ventre, le professeur Mcgonagall, qui était à présent la nouvelle directrice,  ne l'avait convoqué qu'une seule fois -5 mois auparavant- ... pour lui annoncer la mort de sa mère. Il se revoyait encore , effondré dans les bras de son professeur de métamorphose, ne parvenant pas à retenir ses larmes, oubliant tout de son éducation Malefoyenne... 

Ce qui expliquait sûrement sa gorge sèche et son teint plus pâle que d'habitude. Il secoua la tête pour effacer ces idées de son esprit et inspira profondément avant de pousser la lourde porte en bois de chêne. Planté sur le pas de la porte, il laissa son regard dérivé sur son nouvel environnement.

L'endroit avait beaucoup changé depuis la fin de la guerre. Une cheminée trônait au centre de la pièce circulaire, entourée de bibliothèque et de fauteuils. Sur le niveau du dessus -accessible par un petit escalier en bois vernis- se trouvait un bureau massif  couvert de nombreux dossiers et de notes de service. La directrice quant à elle était assise sur un large fauteuil,  un énorme livre posé sur ses genoux. 

- Mr Malefoy, asseyez vous. La voix était froide mais Drago y décela une trace d'appréhension.

Il refusa poliment l'invitation, se postant néanmoins devant une petite chaise en bois, tentant vainement de se détendre. L'atmosphère se faisait  de plus en plus pesante. Sa respiration était sifflante,  il avait l'impression que ses poumons ne lui obéissaient plus, s'obstinant à repousser l'oxygène de son corps.

Au bout d'un moment qui lui sembla durer des siècles, la directrice ferma sèchement son grimoire puis soupira. Visiblement la future discussion n'allait pas être agréable.

- Bien, je vous demanderai volontiers si vos cours se passent bien ou si vous vous amusez avec vos amis mais nous savons tout les deux que j'ai accès à votre dossier scolaire et à la grande salle et que donc j'en connais déjà la réponse. Et si vos notes sont excellentes votre vie... bref.  En fait si je vous ai convoqué c'est pour vous parler de... de votre père.

Toutes tentatives pour se décontracter s'envolèrent à ces mots.

- Mon... mon père ?

- Oui Lucius Malefoy est de retour.

Il frissona.

Depuis combien de temps n'avait il pas entendu ce nom ? Depuis la fin de la guerre  ? La fin de son hospitalisation ? La mort de sa mère ? Lucius  n'avait même pas envoyé des fleurs pour l'enterrement de sa femme. Elle qui était censée être l'amour de sa vie n'avait même pas eu l'honneur d'avoir la présence son mari pour son éloge funèbre.  Drago se souvenait encore de ce jour. Il se revoyait seul devant le cercueil de cette femme extraordinaire qui l'avait toujours protégé et soutenu, abandonné par la figure paternelle dont il avait tant besoin. Il avait alors pris une décision :

Il n'avait plus de père. A vrai dire peut être qu'il n'en avait jamais eu.

- Vous savez ce que ça signifie ? demanda brusquement sa directrice.

Il s'arracha péniblement de ses douloureux souvenirs et s'efforça d'employer son ton aristocratique  pour camoufler l'appréhension qui menaçait de faire trembler sa voix.

-Pardon ? J'avoue que je suis perdu.

- Il n'est pas seul Drago...  -la voix de Mcgonagall était à présent douce- Ils sont avec lui et... leur but est Potter bien sûr mais... je pense qu'ils vont vouloir plus...  

- Plus ?  dit il en tombant lourdement sur sa chaise, perturbé autant par l'emploie de son prénom que par le sous entendu de sa phrase.

- Oui comme... revivre leur passé, votre passé... publiquement.

-  Que... qu'est ce que... quoi ? Non c'est pas possible ! s'écria le blond cette fois réellement paniqué.

- Je suis vraiment désolée...

- Non...

L'ex mangemort tenait à présent sa tête entre ses mains, réprimant ses gémissements.

- Non non non NON ! Vous aviez promis ! Seigneur... non...

- Calmez vous Malefoy ! Soyez fort !

- Me calmer ? me CALMER ?

Le blond était à présent réellement en colère et ne pouvait plus contenir sa rage. Tant pis si ça tombait sur sa directrice

-Non mais vous avez vu ma vie ? Vous avez vu ce que je suis devenu ? Et maintenant vous voulez que ... vous voulez que je sois...

Les larmes coulaient librement sur ses joues, sa voix se brisait, le désespoir se lisait dans ses yeux orageux.  

"Pathétique"

Il tenta de cacher ses larmes en fermant les yeux. Ne voulant pas montrer d'avantage ses faiblesses.

Soudain il sentit deux bras se refermer autour de lui. Mcgonagall l'avait entrainé dans une douce étreinte protectrice et maternelle  à laquelle il ne répondait pas. Il n'en avait pas la force.

- Oh, si je vous ai prévenu c'est parce que je vous estime beaucoup Malefoy mais n'en parlé pas à Harry. Le danger n'est pas encore présent et on ne connait pas les plans de l'ennemi donc...

- Je serai muet professeure. Har... Potter ne saura rien. J'ai plus à perdre que vous de toute façon.

- Vous voulez en parler ?

-Non je veux juste... être seul.

Sans un mot il se détacha des bras de Mcgonagall, gêné et après l'avoir remercié quitta le bureau.  

" Je ne veux pas être seul... je veux... je veux juste... Harry..."

***

Drago était assis dans la tour d'Astronomie depuis déjà une heure, la tête entre les bras. La nuit étant tombée depuis longtemps il avait donc raté le dîner. De toute façon il n'avait pas faim. En fait ça faisait des mois qu'il n'avait plus faim. Il mangeait par nécessité pas par envie.

A vrai dire la seule trace de bonheur visible dans sa misérable existence était dans ses rencontres nocturnes avec Potter.

Potter et ses sourires lumineux.

Potter et ses blagues nulles qui font quand même rire.

Potter et ses yeux trop verts.

Potter et ses mains.

Potter et ses cheveux.

Potter et son rire.

Potter qui l'appelle encore et toujours par son prénom.

Potter Potter Potter Potter...

- Drago ? Qu'est ce que tu fais là ?

Le blond releva violement la tête et tomba nez à nez avec le Sauveur-du-monde-magique. Sauveur qui entre parenthèses avait des yeux réellement magnifiques et déroutant.

- Ah Potter... je  "décompressais".

Le brun sourit un peu trop tendrement au goût de Drago avant de s'assoir à ses côtés. Tous deux fixaient le ciel étoilé, parsemé de nuage sombre ignorant le silence devenu lourd et pressant ; pourtant Potter ne semblait pas vouloir rompre le silence, son regard émeraude obstinément braqué sur la demi lune qui éclairait faiblement le parc de Poudlard. Drago savait que son mensonge n'avait pas convaincu son ami, il décida de briser la glace en étant franc.

-  Tu sais ce que c'est que la peur Potter ?.

-  Tu sais à  qui tu parles non ? ria le Survivant. J'ai vécu dans la peur.

-  Non pas cette peur là. La peur soudaine, brusque, celle qui te prend soudain et veut plus te lâcher. Qui t'obsède et te retourne le coeur.

-  Hein... ouai. Cette impression on te comprime les poumons tout en te frappant dans le ventre.

Drago sourit reposant sa tête contre ses genoux.

-  Ouai... je déteste ça.

-  Moi ça me rassure. Pendant la guerre ça me prouvait que je pouvais encore ressentir quelque chose...  que je n'avais pas perdu mon âme.

Drago se redressa et se tourna vers son ami.

- Tu ne perdra jamais ton âme. Tu es trop pur pour ça. Alors que me moi je su..

L'héritier Malefoy s'étrangla dans un sanglot. Honteux.

- Je suis perdu, finit il dans un souffle.

- Hey... murmura le brun en prenant son ancien ennemi dans ses bras, tu es super Drago, je ne sais pas quel est ton problème mais je t'assure que je vais t'aider... jusqu'au bout. N'ai pas peur... tout ira bien. Tout ira bien.

Soulagé Drago se laissa aller, délivrant ses larmes contre l'épaule de Harry.

" Merde, je crois que... je crois que l'aime toujours...

... Je suis amoureux de Harry James Potter."