Bonjour/soir !!
Bienvenue sur cette nouvelle fiction qui est (oui, vous avez bien lu) une originale ! Etant plus que novice en la matière je me permets de solliciter l'aimable participation de lecteurs avisés (Toi ! Oui, toi derrière ton écran :D !) pour me faire part leurs critiques les plus sincères et objectives quant à cette première partie.
[EDIT 16.10.16]
Re bonjour/soir. J'ai passé l'été à travailler sur cette originale et voici mon nouveau premier chapitre retravaillé et reécrit un milliard de fois. Il va être découpé en huit petites parties que je publie aussi ce jour.
En espérant que cela vous plaise ^^ !
Bref, je vous laisse lire tranquille pour les quelques égarés qui auraient survécu à mon monologue.
Enjoy !!
*
Zéphyr
Dans la petite pièce enfumée qui lui servait de cabinet de divination, Zéphyr agitait mollement le sac de tissu contenant ses outils de travail. Avec une facilité d'exécution liée à l'habitude, elle répandit les pierres plates sur le carré de velours étendu devant elle. L'homme assit de l'autre côté du velours jetait des coup d’œil curieux autour de lui. Comme toujours cela amusait beaucoup la jeune femme qui se demandait s'il était simplement effrayé ou juste fasciné par les crânes d'oiseaux, les fleurs séchées et les innombrables plumes colorées qui garnissaient les étagères. A cela s'additionnaient de lourdes tentures pourpres, une ribambelle de bols d'encens et quelques signes obscurs et mystérieux peints à même le sol. Oui, sa chambre avait de quoi impressionner, elle en convenait. Mais l'ambiance ésotérique et étouffante de la pièce n'était pas pour lui déplaire. Elle était ici chez elle.
Dans une ébauche de caresse imaginaire, elle frôla la surface froide et lisse des pierres. Ses paupières se fermèrent d'elles mêmes, rejouant une scène maintes fois répétées. Elle laissa les secondes s'égrener et ne prit la parole que lorsque la respiration de l'homme en face d'elle se fit plus saccadée, démontrant sa tension intérieure.
-Je vois que vous avez fait une longue route pour venir jusqu'ici...
Elle planta ses prunelles sombres dans les iris clairs de l'homme. Avec ses longs cheveux blonds, sa peau livide et ses fourrures, il avait tout du parfait aragonien. Son visage fermé et le poignard d'os qui dépassait de sa ceinture ajoutaient encore au tableau. Il hocha lentement la tête, une expression indéchiffrable sur son visage marqué par le manque de sommeil et les privations.
Les pointes de ses cheveux étaient alourdies par un mélange de sable et de sel.
-Je vois un bateau, poursuivit Zéphyr à voix basse. Je vois l'océan.
Il hocha à nouveau la tête, silencieux.
Les aragoniens étaient sans conteste les clients les plus difficiles de son point de vue. Après des années de pratique, elle était arrivé à la conclusion que le climat gelé et austère de leur pays avait figé chaque muscle de leur visage de sorte qu'ils finissent par oublier comment les mouvoir. Pourtant elle se sentait galvanisée par ce nouveau défi. Elle scruta avec attention les vêtements de l'homme.
Des fourrures élimées et du cuir bouilli masquaient un corps sec et musculeux. Peut-être travaillait-il dans les champs ? Il n'avait rien d'un soldat avec ses vêtements sales et son air affamé. Mais le poignard accroché à sa ceinture -assez étrange d'ailleurs, ce foulard vert noué autour de sa taille- et la lourde épée à son flanc démontraient le contraire.
Un mercenaire alors ?
Ce serait le plus logique. Depuis la défaite d'Alès, elle ne comptait plus le nombre de paysans aragoniens désespérés qui venaient à Polaris offrir leur corps ou leur bras en échange d'un repas chaud journalier.
-Il y'a un contrat. Un accord qui vous lie à quelqu'un... Quelqu'un de riche.
Un éclair de surprise passa dans les iris clairs, confirmant les suppositions de la voyante. Elle reprit avec assurance.
-La mort.
Zéphyr désigna une rune gravée sur une pierre plate choisie au hasard. Elle prit un air pénétrant qui avait l'habitude de faire son petit effet.
-Il y a la mort autour de vous.
Assez étrangement, l'homme ne parut pas effrayé ; ni même surpris. Il se contenta d'un demi-sourire et l'invita à poursuivre d'un mouvement de l'épaule.
-Vous aller répandre le sang.
La divinatrice fronça les sourcils tandis qu'elle se rendait compte que la motivation de l'homme à venir la consulter lui échappait. Elle était plus habituée à recevoir de riches Ilérosyiennes qui souhaitaient savoir si tel seigneur était réellement épris d'elle ou si tel enfant allait survivre à la maladie. Quelque fois un marchand anxieux face à une baisse d'activité ou un jeune homme poussé par sa mère qui hésitait entre l'armée et le commerce.
Les mercenaires n'avaient pas l'habitude de venir consulter les runes ciidiennes et les oracles esclaves. Leur destin était la mort et ils s'en contentaient, essayant simplement d’accélérer le processus avec des tonneaux de bons vins et de donner quelques descendances anonymes aux nombreuses prostituées qui peuplaient les entrailles de Polaris.
Elle jeta un coup d'oeil à la bourse pleine que l'homme avait donné en paiement de sa consultation. Où avait-il eut cet argent et pourquoi l'utiliser pour connaître son avenir au lieu de se payer un repas chaud ce dont il semblait avoir plus besoin ?
Prenant une grande inspiration, Zéphyr tapota ses runes avec tendresse.
-Je vois beaucoup de choses autour de vous, je pourrais en parler pendant des heures. Mais je ne veux pas vous faire perdre votre temps, il est précieux. Dites moi quelle est la question qui vous tourmente le plus et j'y répondrais sans tarder.
Il y eut quelques secondes de silence, puis l'homme fouilla dans sa chemise sale et en tira un peigne d'os gravé de fleurs délicates.
-Plusieurs questions.
Sa voix était étrange : un peu sourde, comme étouffée par quelque chose. Zéphyr eut l'étrange intuition qu'il avait beaucoup pleuré. Elle prit maladroitement le peigne qu'il lui tendait.
-Elle. Souffrir ?
Il parlait mal l'Ilérosyien. Mais elle comprit.
-Non. Dit-elle sans réfléchir. Elle est heureuse à présent.
L'homme hocha gravement la tête. Ses yeux étaient humides. Il fit pudiquement glisser une main sur son visage et se racla la gorge avant de reprendre la parole.
-Le contrat. Sûr ?
Elle rendit le peigne, touchée malgré elle par la tristesse qu'elle devinait à présent dans les traits et les gestes de l'aragonien.
-On vous donnera ce qu'on vous a promis mais vous n'en profiterez jamais. Vous allez mourir avant.
Zéphyr se figea de surprise devant ses propres paroles.
Que disait-elle ?
Les mots s'étaient échappés de ses lèvres sans son consentement. C'était des suites de sons et de syllabes dont elle comprenait la signification au même moment que son interlocuteur.
Ce dernier n'avait pas l'air étonné par la terrible sentence.
-Vous. Sage. Merci.
Elle baissa les yeux, incapable de soutenir plus longtemps le regard trop clair de l'aragonien. Ses mains posés sur ses genoux se mirent à trembler et elle sentit son coeur battre frénétiquement sous les tissus colorés qui habillaient sa poitrine.
C'était bien la première fois que son corps réagissait ainsi. Terrifiée, elle repensa à Idass qui était morte quelques semaines plus tôt, foudroyée en pleine rue par un arrêt brutal de son cœur malade.
Mais la vieille Idass était une esclave au visage mangé par les rides et aux os rongés par un mal qui rendait ses gestes malhabiles et ses mains douloureuses à regarder. Zéphyr venait tout juste d'atteindre l'âge adulte et ses mouvements étaient aussi fluides et aisés que lorsqu'elle était une innocente enfant courant dans les dunes du Désert de Ciid.
L'homme se leva sans un mot et sans un regard pour la jeune voyante qui tremblait comme une feuille.
La gorge de Zéphyr se serra sous le lourd collier de métal qui signait son esclavage. Elle avait envie de hurler alors que la silhouette masculine s'éloignait et franchissait la porte de sa chambre.
Non ! N'y allez pas ! Vous allez mourir !
Les mots étaient bloqués. Des larmes s'échappèrent de sous ses paupières et rigolèrent le long de ses joues entraînant avec elles des coulées de fard dorée.
Elle resta dans cet état pendant plusieurs longues minutes. Incapable de parler et encore moins de bouger. Ce n'est que lorsqu'on frappa à sa porte qu'elle parut retrouver un semblant de contrôle sur elle-même.
Elle essuya maladroitement son visage avec un pan de sa robe et tenta tant bien que mal de remettre de l'ordre dans son esprit.
Une femme entra. Probablement la plus belle que Zéphyr n'ait jamais vue de sa courte vie. Pourtant elle ne se laissait plus tromper depuis longtemps par le visage parfait et les cheveux brillants de Sevys. Celle qui avait tout pouvoir sur elle depuis qu'elle l'avait achetée dix ans auparavant au marché aux esclaves de Polaris.
Sevys eut un claquement de langue approbateur en voyant la bourse pleine que lui tendait son esclave.
-Il a été généreux celui-là. Es tu sûre que tu n'as fait que parler ?
Elle rit de son propre trait d'humour et rendit deux pièces de bronze à Zéphyr. Le reste finit dans une poche secrète de sa robe.
Puis la voix de la maîtresse se fit mielleuse et elle caressa du bout des doigts les courtes boucles sombre de la voyante dans un geste qui se voulait maternel.
-Tu es beaucoup trop sérieuse. Tu sais pourtant que je suis une bonne maîtresse et que je ne t'en voudrais pas si tu décidais de t'entraîner sur quelques clients. J'aimerais simplement le savoir, afin de m'assurer qu'ils paient correctement pour ce corps jeune et sain.
La ciidienne baissa les yeux pour masquer leur flamboiement de colère. Plus rien ne subsistait de son étrange émoi passé.
-Je ne me prostitue pas.
Son ton impérieux fit grimacer Sevys. Elle raffermit la prise de sa main sur le crâne de l'esclave pour faire basculer sa tête en arrière.
-Pour l'instant ! Prophétisa la maîtresse. Tu sais que c'est ce qui t'attends le jour où Polaris se sera lassé de tes fausses prédictions.
Elle lâcha finalement Zéphyr et quitta la pièce dans un tintement sonore de bronze, non sans un dernier avertissement.
-Ton prochain client est un de mes amis. Un riche ami. Il paie cher alors tâche de d'appliquer et de lui dire ce qu'il veut.
*
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