Petit blablatage: D'abord, j'voudrais juste dire un énorme merci à Marlene, qui a gentiment accepté de corriger ce texte et de le critiquer ouvertement... <3 Puis... Et bien, ma Soeurette, j'espère que cette seconde partie te plaira autant que la première, même si j'ai l'impression de radoter beaucoup... Et voilà, j'crois qu'à part ça, je vais vous laisser tranquilles ^^. Bonne Lecture! °o°O°o° Je m'intoxique de ces moments hors du temps passés avec toi. Entre autre.
Ta bouche entrouverte réapparait devant mes yeux, ravivant ma douleur, en répétant inlassablement le requiem acide amer de tes silences entrecoupés de sarcasmes...
Les images virevoltent, réminiscences extatiques de ta peau offerte à la mienne, enflamment mes joues... taillade ce qui me reste d'espoir.
Un instant, j'ai pu poser autre chose que mes yeux sur le corps glacé de ma chimère... J'ai composé avec elle -lui- une mélopée aussi puissante que sensuelle, rythmée de soupirs furieux, parce qu'on savait, au fond, que la musique s'arrêterait aussi vite qu'elle avait commencé... Qu'on en crèverait -Moi- que ça nous torturerait que...
Ca n'a plus d'importance, maintenant.
Hier est passé. L'aube est venue, a effacé les ombres létales de nos brumes, les tourments de la nuit pour ne laisser que... Ce que j'ai fait de tout ça. Mes doigts ont pourtant eu la chance insolente d'enserrer tes hanches, de meubler tes « non-dit », j'y ai cru, pourtant, jusqu'à la dernière seconde de possession... J'ai cru que tu serais enfin à moi.
Aujourd'hui, les portes du ministère s'ouvrent... que mentir, encore? Ils ne peuvent savoir, et pourtant... tout recommencera tant que tu n'auras pas assez fauté... Remercie-moi, l'administration a la fâcheuse tendance de laisser mes haines devenir celles du peuple, ou au moins, de la loi... et puis, tu es une proie de choix, pour occuper les larbins de l'Ordre. Tant de prestige dans tes yeux d'encre noire...
Cette nuit encore, la cage de verre risque de se transformer en cage d'acier.
Ron me lance une oeillade intriguée, je devine que mon sourire l'inquiète. Il faut dire que depuis quelques temps, ce genre de comportement n'est plus de rigueur pour moi... Et Ron est par définition inquiet pour tout. La psy qui me suivait aurait dit, en posant sur le bureau ses lunettes carrées "troubles profonds de la personnalité dûs à un complexe d'infériorité chronique, une pulsion narcissique datant d'un Oedipe mal passé, impossible à assouvir, bref, un tas de petites frustrations accumulées qui..."
Le sourire doit s'agrandir, puisque le rouquin qui en est témoin hausse un sourcil...
Ron ne sait pas. Plus. Ron est libre de tout, puisqu'il n'est qu'un héros parmi tant d'autres... Il ne peut pas comprendre cette sensation d'emprisonnement... Même si la cage n'existe qu'avec Leurs regards... C'est une certitude, un jour, je le haïrai pour ça.
Mais Draco... Draco sait... Et si Delwin le trouve, il a parfaitement conscience du fait que ses chaînes redeviendront réelles... Et il s'en moque... Mon dragon se faufile entre les barreaux invisibles, vers Ailleurs... si seulement il pouvait m'emmener, me traîner dans son sillage, oh, pas loin, juste ce qu'il faut...
Si il se fait attraper, tout sera perdu. Son âme aura définitivement échappé à la mienne, et sur son coeur, ce n'est pas mon nom qui s'imprimera en lettres de feu.
-Au fait, Harry? Ginny joue ce soir.
Battement de cils. J'ai envie de clopes... J'ai tellement envie...
-Elle nous a pris des places, loge d'honneur évidemment! Tu imagines? Son équipe va peut-être se qualifier pour jouer en international! Depuis le temps qu'elle s'entraîne pour ça!
Je lui accorde un signe de tête discret. Mais où est passé ce putain de paquet de crasses? Sous le tas de feuilles?
-Ca...Oh, merde, tu l'as fini ton paquet. Il y a une heure. C'est affolant ce que tu peux t'en enfiler, vieux. Je disais donc que ça commençait à 22heures. Hermione ne viendra pas, elle a du boulot avec "ses elfes"... Ce sera une soirée sympa, entre mecs. Ca nous fera du bien, je crois! Si il croit, alors...
[...]
Les ombres volent, tantôt sous la lune, tantôt sous nos yeux, rouges et bleues, ou noir et grise. Les cheveux de Ginny jurent avec la sobriété de son uniforme. Ginny jure avec le ciel. Le ciel est à l'orage. L'orage est à Draco.
Feinte de Worsky... oh il faut bien ça... Le spectacle est tellement banal... Dire qu'il fut un temps où j'aimais ça...
Ratée. Comme cette relation entre elle et moi. Le soupir excédé des supporters me secoue de haut en bas. A croire qu'ils savent avec exactitude que je pense encore à lui. Je suppose qu'on peut appeler ça du manque... Salazard, faites qu'il n'y aille pas ce soir.
Ailleurs une harpie marque. L’écart se creuse... Entre Ron et moi. Il est tellement... con? Heureux?
Il n'y a que moi. Pour se laisser griser par seulement six grands verres de cet alcool amer. Amer... comme la cigarette. Comme...
Oh, Tu pourrais me laisser crever, ma chère chimère... d'un regard, je n'en aurais cure, à condition d'être l'unique à te poursuivre, dans le dédale des rues, comme dans mes cauchemars la nuit. Le seul à jamais sentir ton souffle erratique au creux de mon cou, à chercher des restes de ton odeur dans les brumes...
Les autres ne méritent pas de te contempler le dos au mur. Jamais. Personne... Je suis le seul à avoir gagné ce droit! Il faut dire que je te chasse depuis tellement longtemps, mon décadent...Eux ne t'ont pas observé se perdre, ils ne savent pas cette posture qui était tienne, dans la cage de ton procès, que Ses doigts sont nerveux, qu'ils caressent sans cesse le secret qu'il dissimule dans Sa poche. Il n'ont jamais tiqué sur cette façon qu'il a de lisser sa manche droite, de battre des cils pour st'envoler.. Ils ne savent pas à quoi ressemble ton regard lorsque les ombres s'additionnent au brouillard des larmes. C'est tellement normal qu'ils n'aient pas cherché à t'effacer avec la même ferveur que moi...
La foule hurle son délire, pour le vif, cette fois. Ginny s'élance... Chaque de nous a son inaccessible.. Le Quidditch a perdu tout son charme. Comme elle. Comme tout ça. Il ne me reste qu'une chose derrière laquelle courir. Lui, le seul but qu'il me reste. La fin décisive du grand match.. On pourrait le croire dérisoire face à ma quête précédente... Sans doute sa petite personne ne vaut-elle pas la passion acharnée que je lui voue...
Ron crie à mes côtés, le sourire béat. Ses encouragements, elle ne les entend même pas, alors à quoi bon? Mon silence est lâche, elle n'en souffrira pas non plus...
Comme j'ai souffert du tien, Malfoy.
Oh... si seulement tu pouvais encore te contenter d'être lâche, une grande foi... Fuis.. Qu'il appelle des renforts une fois ses certitudes totales, que je puisse faire passer son meurtre futur pour une bavure, ou mieux! Te le coller sur le dos... Puis partir, sur ta piste, te traquer, et me venger, enfin, de tout ce que tu fais de moi...
T'abattre. T'épingler comme un vulgaire papillon au mur... T'arracher ces ailes à moitié coupées que tu t'évertues encore à battre. Pour le sport, je suppose. Ou contre moi. Salazard, fais qu'il reste ma proie... J'ai tellement besoin de ce qu'il fait de moi.
[...]
On lève nos verres. C'est une victoire qui leur semble grandiose. On sourit, à Ginny, à Ron, simplement à moi, souvent, trop. Mes doigts tambourinent sur le comptoir de bar rétro où nous nous sommes attablés. Aucune horloge au mur, pas d'affiches, pas de journaux... Cet endroit semble figé hors du temps, c'est sans doute pour ça que Ginny l'aime tant. Une autre illusion pour elle... Pourtant, chaque seconde qui passe est un manque de plus, une brûlure que tu n'infligeras pas à ma peau. Minuit doit être passé, maintenant...Et aucun appel... peut-être, alors...?
-C'est une belle victoire, mon ange, soufflais-je à mi-voix, moins pour Toi que pour moi.
Et les yeux bleu pâle que je croise s'allument doucement, alors que la main gelée de ma fiancée se pose sur la mienne. -Je veux bien gagner tous les matchs, si tu m'appelles "mon ange" pour ça.
Eclater de rire, désabusé, ça ne se fait vraiment pas...
[...]
-C'est tout?
-Oui Monsieur.
Le rapport est achevé par le salut réglementaire. Mais cela, les oreilles à rallonge des frères Weasley ne me permet pas de le savoir. J'écrase rageusement ce qui reste de ma cigarette... Il ne l'a pas trouvé. Peut-être qu'Il n'est plus venu. Qu'il ne viendra plus.. Même quand ce sera à nouveau à mon tour de le chercher... Ou c'est autre chose. Et Delwin l'a trouvé... Peut-être Draco a t'il acheté son silence d'un de ses baisers lacifs. Peut-être a t'il encore une fois laissé les passions l'emporter sur les trottoirs... Oh, comme c'est poétiquement tourné, comme ça. Peut-être... qu'il a parlé, pour sauver sa peau? Peut-être Delwin sait-il pour lui, Nous, pour.. rien! Tout ça, tous ces films, ce n'est que du vent, un vent putride d'opium et de silences! C'est consternant. Je suis consternant.
-C'est fou, vieux, depuis qu'on sait que tu vas devenir l'Auror en chef à la pension de Duplancton. Tous nos collègues te font des sourires charmeurs... Attends-toi à trouver des fleurs dans ton vestiaire ou devant la porte de ton appart' .
Si seulement... [...] Les secondes volent, s'éloignent, retombent. Salazard, ce qu'il me manque... Depuis ce matin, j'ai les mains qui tremblent. D'anticipation, sûrement. Ce soir c'est à O'Brian. Je le suivrai. La brume danse d'hors et déjà dans les rues de Londres. Je devine que sa passion du Flou le reprendra ce soir, et que mon dragon me rejoindra. Ce soir... J'ai les mains qui tremblent. Non, ce n'est pas la drogue. Pas dans le sens où ils l'entendent. Pas encore. Maintenant peut-être... Eet te voilà déjà..
Ma décadence, mon déchu, ma tendre frustration.. Combien de fois encore te faufileras-tu entre mes doigts? Ta beauté est insolente sous ce ciel sans lune, les soieries que tu portes une insulte à l'insalubrité ambiante, ta peau une rivale à la lune elle-même; alors que ton regard distant sied à merveille à ce temps d'hiver feutré où le ciel s'est affaissé sur la terre pour en dissimuler les plaies. Tes yeux ont la beauté des fleurs de givre qui couvrent les fioles de ces venins coûteux... Les silences y ont dessiné des ombres bleutées qui donnent à tes iris une profondeur abyssale. J'aime la bulle de verre qu'ils ont clos sur toi. Le malheur te rend plus magnifique et inaccessible que jamais. Et tu es beau, mon cher ennemi, lorsque tu me toises, que tu ironises ou mieux, lorsque tes yeux assassinent les magistrats qui t'offrent leur pitié et leurs moqueries... Comme je t'envie à chaque fois que tu les rabaisses, que tu t'enfuis... Quelle ironie.. Notre société m'a enfermé dans un rôle qui plait, et que je hais. Toi, les anonymes te détestent... Par amour pour moi, oui, comme toujours... Je ne sais pas qui est le plus lésé de nous deux, ce qui reste du gryffondor qui était en moi m'empêche d'affirmer ce que je crois. Le narcissisme est mal vu pour des gens comme moi. Sourire amer. Tu me le rends si bien... Eux... M'étouffent avec leurs grimages, m'étranglent de leurs attentes, leur prévenance, leur putain d'insécurité! Tous... il ne me reste que toi, damné Serpentard... J'aime cette franchise déguisée que tu affiches avec moi. Celle qui te permet de me contempler loin, caché derrières tes remparts d'orgueil... Les murs du manoir Malfoy paraissent pourtant bien pitoyables face à cette noblesse que tu affiches encore.. Tu aurais pû être un de ces héros de roman, Chimère, sublime dans ta mélancolie et ta déraison.. Somptueux dans tes passions et tes haines mortelles... Tu me rirais au nez, si tu savais que je viens de penser à cela.
Tu aurais tellement de moyens de me rire au nez, Draco, si seulement tu avais compris...
Un pas. Deux pas. Je n'ai pas peur de toi. Je m'attendais juste à devoir te traquer plus longuement. Ta suffisance affichée me laisse rêveur... M'attendais-tu réellement? C'est étrange de constater à quel point l'ombre te va bien. Battement de cil. Ton sourcil s'arque, le premier sarcasme ne tardera pas... Je riposterai, compte sur moi.
-Que me vaut un sourire du grand Draco Malfoy?
-Tu es revenu. Et tu me cherchais. Je présume que le charme de ma conversation n'est pas à mettre en cause. Ta... somptueuse personne est donc à elle seule une flatterie pour mes autres talents. Ravi donc, de te revoir, Amant.
Le sourire s'accentue. Je mens, je crois, mal, de travers, toujours. Je refuse d'envisager que tu aies compris l'exacte nature de mon inclinaison.. que tu l'aie rejetée sciemment. Et la sécheresse de ma bouche s'entend sûrement un peu trop...
- Ou que mon boulot est de t'envoyer moisir près de Papa et Maman, qu'ils puissent observer comment tu te consoles de leur absence, Amant?
Comme avant. Cynisme mordant, frisson en voyant son sourire s'effacer. Se pincer...
-Si ta seule envie est de m'entraver, Potter, susurre-t-il. La brise agite sensuellement quelques mèches de ses cheveux trop pâles...
Luna... disait souvent, du temps où nous nous parlions encore que tu n'étais ni un Dragon ni une fouine. Que tu ressemblais plutôt au fantôme d'un passé encore glorieux, trop pâle pour te permettre de vivre vraiment à la lumière du jour. Trop lumineux pour supporter les ténèbres. Elle t'appelait Spectre, et t'a toujours évité pour ça. Et pourtant, tu es tellement opposé à cette image, pour moi. -Alors on en finit, Malfoy? Il hausse les épaules, la moue de vaincu s'efface aussi naturellement qu'elle est apparue. Ses mains s'enfoncent plus profondément dans son pantalon trop noir.
-Tu n'oseras pas.
-Encore de tes certitudes?
-Constat rationnel, simplement, Potter. Tu ne feras rien, parce que tu es revenu... En te disant que tu me retrouverais, ou pas, simplement pour te fumer un peu plus qu'un joint, de toute façon, on s'en fout de tout ça... Mais que feras-tu, quand tu m'auras attrapé, attaché, et finalement envoyé au trou?
-Je me fumerai une putain de clope en ton déshonneur.
Le sourire devient grimace. Il n'aime pas perdre, je déteste gagner... on aurait pu s'entendre, oui, mais. Il sait déjà tant de choses! Son rire éclate, entre cruel et assassin.
-Tu mens comme un chien.
Un pas. Deux pas. De lui à moi. Son parfum trop raffiné, trop doucereusement épicé me chatouille les narines... J'exhale rapidement un nuage noir de tabac, muraille dérisoire entre lui et ce qui reste de moi. Ne plus l'imaginer. Ne plus le sentir. Laisser simplement disparaître son sourire entre les volutes de mes fumées.
-Admettons. Je suis donc condamné... En gentil bourreau, tu vas m'accorder la faveur du condamné.
- Je préfère te tuer tout de suite.
Etait-ce un frisson?
-Ca enlèverait de ton panache... Non, pour quelqu'un de ton envergure, je veux bien me laisser emmener. Je pourrais même te résister, puisque tu aimes ça... Mais avant, je veux... une dernière fois avec toi. Je repousse catégoriquement la main qu'il a posée sur mes hanches, sentant déjà l'autre m'agripper, me repousser loin de ce réverbère branlant...
-Tu joues encore?
-Nan... C'est bien plus intéressant que ça... je te ballade. Je te perds. Je cherche ta faille...
-Tu es complètement défoncé.
-Absolument pas. Et toi, l'autre jour tu...
-Je rien, coupais-je. Ce n'était strictement rien.
-De l'intérêt scientifique?
-Tu surestimes. Rien, vraiment rien, et c'est tout.
-Exactement.
Il sourit. Derrière mon dos, je sens bientôt une porte de bois. Mon souffle s'accélère. Devant mes yeux son visage, son sourire assuré, ses canines carnassières...
-Le jeu commence comme ça... Potter le dos au mur, à faire le brave face au méchant adversaire. Potter qui le transperce de ses trop grands yeux verts, et condamne. Potter qui ne fait jamais rien de plus spontanément.. Peur de perdre? De gagner? A croire que pour lui, ces mots sont devenus synonymes. Puis enfin.. Potter qui s'apprête à rétorquer que je suis fou, que je dis n'importe quoi, et qu'à ma place je ne sais pas ce qu'il ferait. A croire que Potter aime m'entendre rire...
Oh mon dragon... Et ton souffle qui caresse mes joues, ses yeux qui retracent chaque angle de mon visage, chaque ombre que dessine l'astre blême...Ta voix hypnotisante efface doucement la réalité... Peut-être est-ce exactement ce que je veux. Qu'il fourvoie mes certitudes.
Que sa bouche flirte avec mes plus sombres pensées, nargue, avant de se glisser dans mon cou... Que sa présence m'épuise autant que son absence... Et qu'il enserre mes poignets à faire mal.
-Puis, Potter, tu fermes les yeux. Tu rêves en me laissant gagner une partie infime et improbable...Je ferme les miens... Tu vois ton Dragon, et je commence à deviner en toi mon.. J'ouvre les yeux. Son visage figé est tourné vers l'angle gauche de 'notre' ruelle. Un intrus approche nos chimères de son pas faussement discret; Draco se redresse, serre convulsivement mes poignets. Les lâche à présent, recule en me lançant un regard entre colère brûlante. De haine, de déception? Lâche, je le regarde s'éloigner, devenir l'ombre que Luna me décrivait, se fondre dans les brumes en longeant la façade du dos...
Un pas dans sa direction. Ceux de l'intrus qui s'accélèrent et deviennent pesant. Draco court... Je retiens mon souffle, et suivant les traces de mon cauchemar, je tourne le dos à O'Brian, qui scrute à présent les ténèbres de ses yeux marron. Un chasseur chassé n'est plus qu'une proie... Et il est derrière moi.
Un pas, deux pas. De course cette fois. Un sortilège fuse, éclaire la rue d'un rouge sanglant. A gauche. A droite maintenant... un chat stupéfié me fusille, le poil encore hérissé... Draco est passé par ici, tout l'atteste. Ma vitesse s'accroît. Il ne doit pas être très loin, je parviens à retrouver ça et là son odeur, modifiée par un élément rare: sa peur. La sueur rend la brise glaciale âcrement attirante. Et maintenant? A gauche? Non... cette impasse sent le souffre, et tout le monde sait qu'un Malfoy ne souffre pas. A droite, alors. Un pied disparaît à l'angle suivant. Ma proie... Le lumos de mon poursuivant, qui décidément a dû réussir son passage chez les aurors sur un coup de chance, me semble assez distant pour que je ne m'en préoccupe pas. L'adrénaline éveille mes sens à ta présence, je me sens électrique. Où es-tu? A gauche? A droite? En haut, cette fois..? L'échelle rouillée m'appelle, et me voilà sur le toit. Tu me regardes, incertain, puis t'assied, face à la lumière, contre la cheminée. Je m’approche, un peu trop théâtralement, peut-être. Que je n'ai pas ma baguette te rassure. Les volutes argentées qu'exhalent les cheminées dissimulent ton odeur dans leurs impuretés. Tant mieux... Il s'écarte un peu, je m'assied à ses côtés, ferme les yeux pour retrouver un rythme cardiaque aussi normal que possible, au vu de sa présence à mes côtés.
-Et bien, je croyais que tu te laisserais faire?, murmurais-je avec sarcasme.
-Ta gueule. S'il nous trouve...
-Quoi? Je perds ma place, et toi la liberté conditionnelle. Encore faudrait-il qu'il survive à sa vision...
Un souffle qui ressemble à un rire lui échappe, puis le faisceau lumineux longe notre toit, et il se raidit.
-J'ai toujours su que tu étais un assassin en puissance, finit-il par répondre, le souffle encore saccadé par l'effort...
La course avait rougi ses joues, et le stress dilaté ses pupilles.. Oh comme il ressemble à ce qu'il était cette maudite nuit!
-Tu me vois meurtrier?
-Je t'expliquerai quand on aura chassé toi et moi.
De sa poche, il sort une petite boite, une pipe d'ivoire... Bientôt une petite fumée bleutée dessine ses arabesques éphémères entre lui et moi. Il inspire le premier le poison divin, les yeux fermés, la tête en arrière. Me le tend ensuite, porte à mes lèvres sa vision du dragon, me laisse enfin goûter son goût d'absurde...
Une fois, deux fois, trois fois. Le silence a remplacé les jeux et les mots. Les bouffées changent doucement l'air autour de moi. Ca ressemble à un cauchemar, ces tâches bleues, cette ondulation de brumes, de.. un dédale mental vert et argenté... Dos à la cheminée, je laisse mes sens se fourvoyer, constate que son visage reste le seul élément inchangé dans cette réalité distordue. Mon Dragon, dans son univers, semble se moquer de moi.. Son sourire éclipse doucement la lune elle-même, corrompt mes yeux en laissant échapper la buée bleue... Je me consume, Draco, quand tu consommes...
Les ombres opalines de tes yeux hantent doucement ma transe. Ton souffle brûle l'aile de mon nez, puis mes lèvres quand tu t'approche, et je souris comme un con, en réalisant la normalité totale de ce fait: c'est avant tout mon maudit dragon... Et à l'idée de ce que me ferait un baiser, je sens un autre frisson me secouer l'échine. Une torture, une plaie à vif...
-Alors, tu veux savoir?
La voix rauque caresse mes oreilles, vrille ma tête et mon corps... Evidemment, que je veux. Battement de cil... Le noir prend le pas sur toutes les couleurs de Son univers.. J'avais oublié à quel point le monde pouvait être écoeurant...
-Putain... Ce que tu peux être beau, quand tu chasses...
Je laisse mon doigt tracer et retracer encore les contours de mes lèvres entrouvertes, bientôt sa bouche s'approche, encore, plus, je la dévie vers mes joues.
-Oui.
-Je ne suis pas sûr que tu puisses comprendre, souffle-t’il à mon oreille. C'est décousu même pour moi. J'ai simplement rencontré ma mort sur un bouton de rose... La fleur était interdite et entreprenante, j'ai aimé m'abandonner dans ses bras.
Il passa la main dans mes cheveux, mais c'est moi qui unit nos lèvres, et découvre ce que l'opium ajoute à son goût.
O' Brian court toujours.
Ses mains sur ma peau aussi. La petite pipe, coincée entre deux tuiles, ne fume plus vraiment, et il reste à mes hallucinations une étrange pointe de lassitude que je ne comprends pas. Draco me regarde. Tout ceci nous ressemble. Artificiel. Hors du temps. Pressé et incertain. J'aime ces petites mèches qui tombent devant ses yeux trop gris. Ses regards entre dédaigneux et rêveurs...
-Pourquoi es-tu revenu, Harry Potter?
-Parce que ça n'avait aucun sens.
-Tu n'es quand même pas assez con pour m'aimer?
-Nan, tu penses. J'aime chasser. Tu es la dernière proie valable, c'est tout.
-Mmmmh mmh. Evidemment.
-Ca m'étonne que tu sois encore là, d'ailleurs?
-C'est juste parce que transplaner serait signaler notre position.
-Ah, oui, forcément.
Je lui sourie. Big ben sonne les trois heures... Et ce sera bientôt fini. Draco contemple la lune descendante, sans sourire, et sa bouche semble bien triste tout à coup.
-Admettons qu'il nous trouve, ton collègue zélé?
-Je serai assassin. Et ce sera notre fin.
-Il y a donc un "nous", demande-t-il sans me regarder.
-Non.
-Tu es la logique incarnée, Potter.
-Mais s'il vient, je devrai le tuer. Et te faire porter le chapeau. Eventuellement te tuer.
-Tout un programme. Et?
-Et j'en crèverai chaque soir de brouillard, je finirai shooté, les yeux révulsés, sur un trottoir ou mieux, tiens, dans les égouts. Et ils offriront un enterrement grandiose à mon souvenir... Peut-être un jour jureront-ils sur mon nom?
-Et s'il ne nous trouve pas?
-O'Brian restera médiocre.
Il semble s'amuser de ma réponse, me laisse encore une fois capturer ses lèvres, effleurer sa peau du bout des doigts. Sa chemise précédemment ouverte est écartée sans contrefaçon. Il n'a pas besoin de savoir que ma fin à moi est invariable, qu'au mieux nous nous cacherons des années, qu'au pire, il se mariera d'amour et qu'à l'intermède, je le tuerai de sang froid après avoir chassé une dernière fois... Et que demain, tout recommencera, comme avant.
Le bleu se teinte de rose, à présent, prémices de l'aube, fin de notre utopie, amorce de la leur... On ne se regarde plus, sautant de toi en toits, pour rejoindre le Chemin deTraverse, où nos travers sont encore méconnus. C'est un sourire provocateur qu'il me lance, avant de s'éloigner vers la banque... C'est un clin d'oeil narquois qu'il ajoute, que je fais semblant de ne pas voir, en rallumant une cloppe. Je l'aime tant... |