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au 31 Mai 21 :
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Si t'as des yeux devant c'est pas pour regarder derrière
Par Morphine
Originales  -  Humour/Général  -  fr
3 chapitres - Rating : T (13ans et plus) Télécharger en PDF Exporter la fiction
    Chapitre 3     Les chapitres     5 Reviews    
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un début
Il est tard, je ne dors pas. A mes côtés il y a l’ange. Il faut trop chaud, on ne dort plus avec les draps. Son tatouage étalé sous mes yeux est presque obscène. Je me lève et j’envoie un message à Charles. Encore une preuve de ma stupidité, de mon caractère borné.

 

I LOVE YOU

 

En majuscules.

 

Est-ce que je n’ai que Charles ? Est-ce que j’ai d’autres amis ? Je parcours mon carnet d’adresse, chose que je n’avais pas fait depuis des années, pour essayer de me rappeler les gens, les visages, les choses que nous avions en commun… Mais le carnet est vide, blanc, neuf et vieux à la fois. Comme s’il avait été acheté il y a longtemps, mais jamais utilisé… qu’est ce que j’ai bien pu manger de déglingué pour avoir une hallu pareil ? Je parcours les pages et tombe sur une note à la page des X. Une écriture familière, mais que je ne reconnais pourtant pas. Un numéro de téléphone. Je le note sur les post-it du frigo pour ne pas oublier qu’il est là.

Les fées chuchotent dans le robinet d’eau chaude. De leurs petites voix aigues et pressées. Comme mon ange, elles chuchotent des mots que je ne comprends pas.

 

C’est comme si la migraine envoyait des impulsions magnétiques à mon cerveau, et me donnait l’inspiration.

Comme si cette douleur insupportable réveillait mon encéphale engourdi.

Je vis dans de l’eau tiède. L’eau tiède est la pire de toutes. Ni assez froide pour me réveiller, ni assez chaude pour me relaxer. Tiède, comme si rien d’étonnant n’allait arriver, tout est moyen dans l’eau tiède. La vie est moyenne. Elle pourrait au moins avoir l’originalité d’être horrible, atroce, acre. Mais non, elle a juste le mauvais goût d’être médiocre.

 

Ca fait un mois que je ne sors plus de mon appartement.

Internet est mon dernier lien avec la civilisation. Je fais mes courses par Internet, je me distrais via Internet, je travaille sur Internet. L’ange est là pour me rappeler l’autre. Le corps nécessaire et indiscutable de l’autre. La vie, la chaleur, l’effort, le sexe… Toutes ces choses si facilement laissées de coté.

J’aime à enfoncer mes doigts dans la chaire de ses hanches. Pétrir de mes mains sa peau brûlante dans la chaleur suffocante de l’été.

Il vient d’arracher le numéro de téléphone sur le frigo. Je l’ai vu. Son visage pale, ses mâchoires crispées… Dans son délicieux et beaucoup trop court short en coton. Tant pis pour la chaleur. J’ai envie de le dévorer. De mettre mes mains partout, de serrer mes doigts et mes bras tout autours de lui.

 

Quatre heures du matin. Se réveiller brusquement, paniqué, allumer la lumière, sans raison, un peu à l’ouest… Et là, se rendre compte. La nausée. La nausée extraordinaire. Et personne avec soi. Marcher, penser à autre chose et pas aux œufs et au pâté de maquereau qu’on a mangé le soir même, à l’énorme Paris Brest qui a suivit…

Marcher dans l’appartement, sans personne, où est il ? Marcher en espérant que ça passe. Etre dans un tel état de détresse qu’on est prêt à aller ennuyer le gardien de nuit de l’immeuble pour penser à autre chose… N’avoir dormit qu’une heure pour l’instant, et s’habiller un peu plus chaudement pour faire le pied de grue devant les toilettes au cas où ça arriverait. Avoir envie de pleurer. Marcher. La nausée passe lorsque l’on fait face à la porte des toilettes. On retourne s’asseoir sur son lit et elle revient, plus effrayante qu’avant. La Nausée est mesquine, fourbe, vicieuse et incompréhensible. S’asseoir sur son lit, le dos contre le mur, et se rendormir. Pas allongé surtout. S’endormir, se faire mal au cou, tout habillé. Se réveiller cinq heures plus tard. Froissé, perdu, seul et mort de faim.

Comme toujours.

La nausée c’est la faim.

La faim tellement atroce qu’elle nous réveille et nous donne envie de vomir.

Mais manger nous effraie, nous répugne, nous tord les entrailles.

Alors marcher, attendre que ça passe. Seul.

Dormir. Où est il ?

 

J’ai rangé la cuisine et le salon, passé le balai et la serpillière.

Devant moi il y a le carnet d’adresse et le téléphone. J’ai besoin de composer ce numéro, au fond de moi comme une certitude. Il faut que je compose ce numéro. Le calepin est dans mes mains, je n’ai pas le souvenir de l’avoir ouvert. Le combiné à mon oreille, coincé contre mon épaule, quand est ce que j’ai fait ce mouvement ? Je fronce les sourcils et commence à composer le numéro.

L’ange rentre, je lève les yeux. Plus qu’un chiffre... Ma main est en suspens. Il me regarde. Il me regarde et je lis la panique dans ses yeux. Son visage se tord et il me fait non de la tête. Je raccroche.

 

La seule chose dont je me souviens par la suite, c’est son corps contre moi. Le sexe, les soupirs. J’oublie le numéro, le téléphone... J’oublie Dieu et le Diable.

Juste lui.

 
 
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