« Que m’arrive-t-il ? »

Cette question ne cessait de tonner péniblement dans ma tête depuis mon réveil dans ce lieu où aucune théorie plausible n’expliquait ma venue toute aussi déconcertante qu’étrange. Mes jambes entièrement écorchées après mes nombreuses chutes continuaient à courir, persistaient à fuir tant bien que mal. Respirer m’était à présent atrocement difficile, autant par la peur qui me nouait l’estomac, que par l’effort inhabituel que je fournissais qui causa de nombreuses pointes me rongeant douloureusement. Mon bras gauche pressait la blessure béante de l’autre provoquée par un des projectiles en métal lancés par centaines là où j’avais atterrie, là où un massacre vivant faisait rage.

Je secouais la tête afin que la scène à la quelle j’avais assistée sorte enfin de mon esprit. En vain. A croire que ça me hantera jusqu’à la fin de mes jours. Du sang qui coulait à flot, des gens qui se battaient, qui tuaient sans états d’âme, sans même regarder leur victime, qui couraient intentionnellement vers une mort certaine, qui soufraient non de leurs blessures mais des pertes de personnes chères à leurs yeux, qui criaient leur désespoir, leur haine, et des milliers de sortes d’armes tranchant l’air à une vitesse époustouflante, en enlevant la vie d’autant de personnes. Même la pluie abondante et le vent violent semblaient se déchainer l’un contre l’autre. Avais-je assisté à ce qui se nomme couramment « la guerre » ?

« Kushina ! »

Et ce nom ! Pourquoi m’appelle-t-on ainsi, nom de dieu ?! Je me retournais dans le but de voir à qui appartenant cette voix grave qui hélait inlassablement ce prénom inconnu, prénom qu’un petit garçon, de pas plus de 10 ans, ressemblant comme deux gouttes d’eau à mon petit frère m’avait déjà attribué. Surement à cause de ma blessure d’où le sang coulait à flot malgré la pression exercée dessus, ma vue devint floue et je sentis mes forces s’affaiblirent de plus en plus à chaque seconde, or je ne pouvais m’arrêter ici, bien que je ne savais ni où j’étais ni comment revenir chez moi, je ne pouvais rester ici ! Soudain, je percutais violemment quelque chose, et alors que je tombais lourdement, des bras solides me rattrapèrent avant que mon crane ne se fracasse contre le sol. Serait-ce la personne qui me courait après ? Impossible ; comment aurait-il fait pour apparaitre devant moi, alors qu’il n’y a même pas deux minutes, c’état derrière moi qu’il se trouvait !? Des questions de plus me martelant la tête avant que je ne m’évanouisse.

Sous la douleur du choc de ma tombée habituelle du lit, j’ouvris les yeux avant de les refermer promptement lorsque je remarquais que je ne m’étais toujours pas réveillée de ce maudit cauchemar près de la nuée de paroles de Stephan ; mais je ne pouvais décidemment pas restée ainsi, allongée sur le ventre avec, je le sens, une énorme bosse sur la tête, comme si elle ne souffrait déjà pas assez avec tout ce qui m’arrivait. Au bruit d’une porte s’ouvrant, je sursautais, malheureusement le sort continuait à s’acharner sur ma pauvre personne, et je me cognais violemment contre la commode. Si après cela, mon crane ne garde pas de terribles et graves séquelles, je lui en remercierais vivement, avant de m’excuser pour toutes les autres mésaventures passées et à venir!

La main que j’avais posée sur ma récente bosse afin de constater cette fâcheuse arrivée venue accompagner la précédente, glissa lentement sur mes cheveux avant que je ne me fige tout à coup. Est-ce mon cerveau qui a finit par succomber après mes maints accidents ou ma chevelure est plus longue, moins épaisse, et plus soyeuse ? Je me levais soudainement, affolée et encore plus déroutée qu’avant, sans toujours faire attention à la personne qui me regardait, j’en suis sûre, complètement déconcertée, bien que je sus qu’il était là ; mais j’étais bien trop préoccupée !

Enfin un miroir en main, je cru défaillir. Ma tignasse brune et frisée avait laissé place à de longs cheveux fins et ………ROUX !! Seule théorie que j’ai trouvée : dans mon satané cauchemar je suis daltonienne ; mais cela n’expliquerait pas le reste ! Mes yeux, à mon plus grand soulagement toujours verts, glissèrent à mes vêtements que je ne reconnus pas. Mon jeans était à présent un pantalon orange vif que je soupçonnais d’être pour homme ; mon long T-shirt mauve est devenu un T-shirt de même couleur que le pantalon avec un drôle de symbole en tourbillon blanc sur le coté gauche au niveau de  ma poitrine, celle-ci dissimulée sous des bandages qui faisaient l’impression que je n’en possédais pas ; des sandales remplaçaient mes converses ; et, des bandages plus gris que blancs recouvraient ma blessure qui ne saignait étrangement plus. Ainsi je ressemblais avant tout à un homme qu’à une jeune fille ! Ne manquerait plus que je ma chevelure soit coupée pour que je doute de mon identité.

Mes doigts caressèrent fébrilement ma peau maintenant si pâle que  je me demandais si cachée sous la neige on arriverait malgré tout à me voir, avant que je ne tombe dans les pommes.