Salut, cher tous ! Merci d'avoir lu le précédent chapitre, et merci pour vos reviews ! J'espère que la suite que voilà vous plaira tout autant ! Rating T. (Lime et langage de vilain méchant pas beau.) .oOo. - Gabriel ? Ça va ? Le blond, surpris, leva les yeux vers Jorge, qui le regardait d'un air inquiet. - ... Oui... pourquoi ? - Je sais pas, Joshua vient te bousculer et tu ne t'es pas énervé. - Ah. Tu crois que ça vaut la peine de s'énerver contre un type pareil ? - ... J'admire ton self-control. Maintenant que j'y pense, c'est vrai que vous ne faites plus trop attention l'un à l'autre depuis que vous vous êtes battus dans ce local... Si j'avais su que ça se résoudrait avec une simple baston, je vous aurais laissé vous taper dessus depuis longtemps, soupira Jorge. On aurait peut-être été plus tranquilles pendant le lycée, sans vos engueulades... Gabriel se contenta de répondre par un sourire, puis, tandis que Jorge et le reste de leur bande se dirigeait vers le réfectoire, il s'écarta légèrement d'eux : - Je vais par là. - Tu ne manges pas avec nous ? demanda Louis, un type toujours dans la lune. - Non, j'ai oublié ma carte de cantine. - Je peux te prêter la mienne, proposa Jorge aussitôt. - Merci, mais de toute façon, il faut que je parle à un pote qui est dans une autre classe, donc je vais profiter de la pause. - Comme tu veux, répondit Jorge en haussant les épaules. À toute. Toute la bande s'éloigna dans un joyeux brouhaha, et Gabriel, resté seul, entra dans le bâtiment de sciences, qui était presque vide puisque tous les élèves étaient en train de déjeuner. Il monta l'escalier, et lorsqu'il arriva au niveau du deuxième étage, à peine avait-il avancé un peu vers le couloir qu'une main puissante attrapa son poignet et l'entraîna derrière lui. - T'es en retard. - Hé !! Le kidnappeur n'avait pas l'intention de le laisser s'échapper, et il ne relâcha sa prise qu'une fois en sûreté dans un recoin sombre du couloir. - Tu m'as fait mal, grogna Gabriel. - Ferme-la. Avant qu'il ait eu le temps de répondre, ses lèvres furent capturées par celles de Joshua, et les mains kidnappeuses se glissaient dans le creux de ses reins, tandis qu'il sentait fondre sa résistance. Malgré lui, ses bras se glissèrent autour du cou de Joshua et ses mains se perdirent dans ses longs cheveux noirs. - Pas dans le couloir, marmonna Gabriel entre deux baisers brûlants. - Y'a personne... Oui, pour l'instant, il n'y avait personne, mais quelqu'un pouvait très bien passer pas loin, et même si le recoin était sombre et au situé tout au bout du couloir, il n'était pas exclu qu'on puisse les voir. C'est ce qu'il aurait aimé répondre, mais dans la pratique, sa langue jouait avec celle de Joshua avec bien trop d'ardeur pour qu'il gâche le tout avec une telle phrase. Lorsque le brun délaissa ses lèvres pour venir l'embrasser dans le cou, il tenta une nouvelle résistance : - On va nous voir... - Tu fais chier, grogna Joshua tout contre son cou. Le brun se recula brutalement, et l'entraîna vers le cagibi qui se trouvait juste à quelques mètres. Depuis que leur mésaventure des manuels de classe était passée par les oreilles du proviseur, la porte du local avait retrouvé une poignée et une serrure – et c'était bien utile dans un moment pareil, surtout quand l'un des deux avait la clé. - T... t'as... bien f-fermé nnh... la porte... ? Leurs habits avaient rejoint le sol plus vite que Lucky Luke en train de dégainer – c'était vraiment pas le bon moment pour que quelqu'un entre dans le local. - Ta gueule... Hnn.... Oui, je l'ai... fermée... - AAaah.... Si Jorge avait vu la scène, il aurait peut-être compris pourquoi les tensions entre Gabriel et Joshua s'étaient calmées en public – ils avaient trouvé un moyen très efficace de se défouler en privé. - Aah... C'est bon, mmh... - Nnnh... p'tain... Parfois, Gabriel se demanda si c'était une conséquence logique du jour où Joshua avait mis le feu aux poudres en l'embrassant, ou si ça découlait juste d'un hasard particulièrement étrange – mais quelle que soit la réponse, maintenant, c'était devenu un rituel. Une obsession tenace, un intense besoin physique. Les jours où ils ne trouvaient pas de coin tranquille où assouvir leurs pulsions, ou bien les jours où, pour quelque raison que ce soit, ils ne parvenaient pas à se voir, Gabriel se sentait les nerfs particulièrement à vif. Et à voir la façon dont Joshua était toujours en rogne, dans ces moments-là, c'était visiblement réciproque... Les week-ends, surtout, étaient particulièrement difficiles. - NNhh!! Pas.... si fort... - On est... lundi, se justifia Joshua. Il ne fit pas mine d'y aller plus doucement, et de toute façon, Gabriel se plaignait juste pour la forme – le lundi était devenu son jour de la semaine préféré. Il devait y avoir une sorte d'alchimie entre leurs corps, parce qu'il prenait plus son pied avec lui qu'avec tous ses ex-coups réunis. Joshua arrivait à le faire monter si haut qu'il se demandait parfois s'il n'allait pas rester accroché – mais il finissait toujours par redescendre, et le monde de rêve qu'il pouvait toucher du doigt au moment de son orgasme se dissipait aussi rapidement qu'une bulle qui éclatait. C'était le moment qu'il aimait le moins. Le retour à l'ordinaire. La fièvre retombait tellement qu'il se demandait toujours si c'était bien la peine de dépenser une telle énergie pour ça. - ... Puissant, aujourd'hui, murmura Joshua. Le front posé sur son épaule brûlante, Gabriel ne répondit pas. Après l'atterrissage brutal post-orgasme, l'odeur du sexe et de la sueur lui donnaient envie de le faire à nouveau – à chaque fois, c'était pareil. - T'as aimé ? insista le brun, comme s'il voulait à tout prix entendre son avis sur le sujet. - Ouais, j'ai aimé... L'immobilité et le silence de Joshua lui apprirent que sa réponse devait sans doute être trop tiède à son goût, et il ajouta : - C'était dément... Cette fois, c'était la bonne. Joshua lui leva le menton et l'embrassa d'une façon qui aurait paru presque tendre si Gabriel ne le connaissait pas si bien – mais en réalité, c'était juste un baiser paresseux qui signifiait que leurs ébats étaient finis pour le moment. Après le baiser, ils pouvaient redevenir des ennemis et s'envoyer les pires vacheries à la tronche ; c'était leur manière de switcher entre les deux modes, en gros. Gabriel se releva et se rhabilla en silence. Il faisait froid, c'était désagréable. C'était le moment où il devait enfiler ses vêtements par dessus sa peau moite – jamais de douche possible, dans ces moments là – et il détestait ça. - On remet ça demain ? lui demanda Joshua. - Je suppose que oui... Il fit tourner la clé restée dans la serrure pour déverrouiller la porte du cagibi. Depuis leur fameuse bagarre – elle était devenue célèbre dans tout le lycée – le prof de maths avait eu l'idée, à chaque fois que Joshua se faisait punir (et ça arrivait souvent) de l'assigner au rangement et au tri des manuels plutôt que de lui faire passer une heure de colle à bêtement copier des lignes. Autant qu'il se rende utile, après tout. Joshua avait donc demandé et obtenu d'avoir la clé du cagibi, plutôt que d'aller la demander à chaque fois aux surveillants. Rétrospectivement, Gabriel se demandait s'il ne l'avait pas demandée exprès pour ce genre d'usage crapuleux. À l'époque, ils ne couchaient pas encore ensemble, mais avec le caractère obscène de Joshua, ça n'aurait même pas été étonnant. - J'y vais, lança le blond avant de sortir dans le couloir. La porte se referma sur le soupir de Joshua, resté seul dans le local. .oOo. Jusqu'aux vacances d'avril, l'étrange relation qu'ils entretenaient continua tant bien que mal, dans le secret le plus absolu, et avec une règle stricte : le cagibi était un monde à part. Ce qui se passait dans son intimité ne devait pas avoir d'influence sur la vie courante. À l'intérieur, ils pouvaient bien coucher ensemble s'ils le voulaient, mais à l'extérieur, la haine était de mise – et jusqu'à présent, l'un comme l'autre s'étaient pliés à la rigidité de cette règle. Il n'y avait pas de raison pour que ça change, en théorie. - Gabriel, tu veux que je vienne te chercher, ce soir ? demanda Jorge. - Non merci, je vais bien arriver à trouver tout seul. - Ça ne me dérange pas, tu sais ! Et puis, c'est sur mon chemin. - Si tu continues à être aussi gentil, je vais profiter de toi, Jorge. - Si c'est toi, ça va, parce que tu es mon chaudoudou ! - ... Je suis ton quoi ? - Mon chaudoudou ! Tu me fais des compliments et je suis content. - ... J'ai pas bien compris le principe, mais enfin, si tu veux... - Bon, quoi qu'il en soit, je passe te chercher chez toi à huit heures moins le quart, ça va ? J'espère que tu ne vas pas te battre avec Joshua pendant la fête ! Ça ne risquait pas – par contre, ce que Gabriel espérait, c'était qu'il ne finirait pas bourré et suspendu à son cou en train de l'embrasser comme un possédé. Le meilleur moyen pour faire sauter leur couverture... C'était une fête pour l'anniversaire de Paul, un gars de leur bande de copains. Presque toute la classe avait été invitée à sa fête, et Joshua en faisait partie. C'était plutôt un concours de circonstances : Paul lui avait proposé tout en étant certain qu'il refuserait une fois qu'il saurait que Gabriel était là – il avait été sacrément surpris quand le brun avait accepté. - Pas de casse, hein ? avait supplié Paul. Ce à quoi Joshua avait répondu avec un sourire carnassier qu'il ne garantissait rien. Depuis, Gabriel avait dû promettre au moins trente fois que non, il ne réagirait pas aux provocations de Joshua, que non, ils ne se battraient pas à l'intérieur de la maison, que oui, il resterait calme, et ainsi de suite. À huit heures, Jorge était devant la grille de la maison de Gabriel et sonnait à l'interphone. - J'ai dû te le dire au moins trente fois, mais, jolie baraque. - T'es en retard, tu le sais ? - C'est ma marque de fabrique. Dis bonjour à tes parents de ma part et ramène tes fesses outside. Lorsque Gabriel le rejoignit à l'extérieur, il se rendit compte qu'il n'était pas seul – il y avait Louis aussi. C'était un type qui était toujours complètement à l'ouest, mais Gabriel l'aimait bien malgré tout. À trois, ils se dirigèrent vers la maison de Paul, qui était au moins aussi grande que celle de Gabriel – il fallait dire que ce n'était pas la pauvreté qui les étouffait, tous les deux. - Ah, vous voilà, tous les trois ! s'exclama Paul en leur ouvrant le portail. Je me demandais ce que vous faisiez. Entrez, entrez ! Gabriel, Joshua est déjà là... Tu... - Je sais, coupa Gabriel. On ne se bat pas. Tu me l'as déjà dit. - Ok, dit Paul avec un sourire contrit. Ah, voilà d'autres invités, je vous laisse trente secondes, il faut que je... En un instant, il s'était éclipsé, et Gabriel observa la pièce où avait lieu la fête. C'était un immense salon, dont les meubles avaient été poussés sur le côté pour que les gens puissent danser au milieu. Au fond, avachi sur un canapé, dans l'ombre, Joshua Lasheras jetait un regard franchement hostile sur tout ce qui l'entourait. Gabriel se demanda vaguement pourquoi il était venu, si c'était pour faire la gueule – puis le brun leva les yeux vers lui, et ils échangèrent un regard. C'était dans ce genre de cas que la Règle était la plus dure à respecter. Ils ne s'étaient pas vus depuis cinq jours, à cause des vacances qui avaient débuté le samedi précédent, et depuis qu'ils avaient commencé à coucher ensemble, ils n'étaient jamais restés sans le faire aussi longtemps. Il suffisait d'un simple regard pour mettre le feu aux poudres – et Gabriel savait que si Joshua venait se pointer pour lui proposer d'aller dans les toilettes une petite demi-heure, il ne réfléchirait même pas et le suivrait aussitôt. Dangereux, donc – il valait mieux qu'il se change les idées. À peine avait-il formulé sa pensée que quelqu'un sembla se matérialiser devant lui, un verre de punch dans chaque main. - Tenté ? Il tendit un verre à Gabriel, qui le prit d'un air étonné. Il ne connaissait pas ce type-là, qui pourtant n'était pas de ceux qu'on ne remarquait pas – un beau brun aux yeux bleus, grand, ça ne passait pas trop inaperçu. Ce n'était pas quelqu'un du bahut, c'était certain. - Je m'appelle Lawrence, dit-il en répondant à la question muette du blond. Et toi, c'est... Gabriel ? - ... Comment tu le sais ? - Mon cousin Paul m'a parlé de toi, un peu. Il m'a dit que tu étais blond, et je n'en vois pas d'autres ici, alors je me suis dit... Ainsi, c'était le cousin de Paul. Pas étonnant qu'il ne l'ait jamais vu. - Et tu t'es dit que c'était moi. Waouh. Quel sens de la déduction. - J'ai un instinct surhumain en ce qui concerne les beaux gosses. En deux mots, l'inconnu-qui-n'en-était-plus-tout-à-fait-un venait de mettre toute la conversation sur le plan drague. Et pour la première fois depuis qu'il avait commencé à coucher avec Joshua, Gabriel se posa LA question. Non, évidemment que Joshua et lui n'étaient pas un couple. C'était juste une histoire de cul – pas de sentiments, pas d'attaches, pas de contraintes. Si Gabriel décidait du jour au lendemain d'arrêter cette affaire, il avait qu'à ne plus se pointer au local, et c'était réglé, parce que Joshua et lui n'avaient passé aucun contrat d'exclusivité l'un sur l'autre. Juste, il fallait qu'il ait une très bonne raison pour arrêter ça, parce que c'était quand même la perte du meilleur coup de sa courte vie. - T'as quel âge ? demanda Lawrence, indéniablement intéressé par le blond. - Dix-huit ans. Visiblement, Lawrence attendait un retour de question, mais Gabriel n'avait pas l'intention de lui faciliter la tâche, et il fut obligé de reprendre : - Moi j'en ai dix-neuf. - Ah... C'était ce que Gabriel détestait le plus dans les conversations où il était censé faire connaissance avec d'autres gens : comment manifester un intérêt poli pour quelque chose qui ne l'intéressait absolument pas ? Le brun dut le sentir, car il embraya : - J'ai eu mon bac l'année dernière dans ton lycée, tu ne m'as jamais vu ? - Jamais, répondit Gabriel d'un ton catégorique. - Moi, je t'avais repéré, dit Lawrence en souriant. Mais je ne me doutais pas que tu connaissais Paul, cela dit. Encore une fois, le blond ne savait pas quoi répondre. Il commençait à se demander s'il pouvait s'éclipser quelque part, mais l'autre lui avait servi un verre de punch, et donc toute sortie vers le buffet était impossible. Il pouvait bien aussi le planter là pour aller voir un autre de ses amis, mais c'était très impoli, et il préférait éviter, dans la mesure du possible. Il restait la dernière solution, les toilettes, mais ça faisait vraiment craignos – et limite trop flag. Alors tout ce qu'il pouvait espérer, c'était que Lawrence devienne plus passionnant dans ses prochains sujets. - Paul m'a dit que tu avais commencé à écrire un livre. Ok, note mentale : se rappeler de tuer Paul à la fin de la soirée. - Ah bon, vraiment, répondit Gabriel avec un sourire qui cachait mal son irritation. Sacré Paul, je lui avais pourtant dit de ne pas en parler... - C'était parce qu'il était impressionné, dit Lawrence. Il m'a toujours dit qu'il aurait aimé pouvoir en écrire un, mais que pour lui, c'était même pas la peine d'essayer, donc il t'admirait. - Ça n'en vaut vraiment pas la peine, répondit Gabriel un peu sèchement. Je n'en suis même pas à la moitié. N'importe qui peut commencer un livre, le tout c'est de le terminer... Bon, tu m'excuses, il faut que j'aille aux toilettes... En moins de temps qu'il n'en fallait pour le dire, il s'éclipsa aux toilettes, où il poussa un soupir de soulagement. C'était ce genre de boulet qu'il détestait le plus – ils étaient tellement lourds, et le pire, c'était qu'ils ne s'en rendaient même pas compte... Les toilettes n'avaient pas de fenêtre, malheureusement : il ne pourrait pas s'échapper par là. Tôt ou tard, il faudrait qu'il retourne à la fête, au risque de se faire alpaguer par le gros chiant. Avant d'en arriver là, il migra dans la cuisine rapidement, où la sœur de Paul, une jolie fille sans doute étudiante, préparait de la nourriture, et il lui proposa une aide qu'elle accepta avec joie, ce qui lui permit de tenir toute une demi-heure en sûreté. Finalement, quand il l'eut aidée à faire tout ce qu'elle devait préparer, il ne resta plus rien à faire, et il fut obligé de retourner dans le salon, où heureusement, Jorge l'aborda aussitôt. - Gabriel, mon amour ! Alors, ta soirée ? - Sauve-moi et colle-moi aux basques, murmura Gabriel. - Pardon ? - Ne me quitte pas d'une semelle. Un type lourd m'a dragué tout à l'heure, j'ai peur qu'il recommence. - Qui ça ? demanda Jorge en scrutant la salle du regard. - Ne cherche pas comme ça, tu vas le faire venir ! Lawrence. Le type brun près du buffet. - Ah, Lawrence, mais il est super sympa ! Hé ! Lawrence ! Gabriel, les yeux écarquillés, le vit lever le bras pour l'inviter à venir, et il prit mentalement note de tuer non seulement Paul à la fin de la soirée, mais aussi Jorge. Surtout Jorge. - Fils de pute, murmura-t-il. - À ton service, répliqua Jorge avec un sourire enchanté. Il fallait reconnaître que quand une tierce personne menait la conversation, Lawrence s'en sortait un peu mieux – peut-être que c'était de la faute de Gabriel, aussi, qui n'était strictement pas intéressé par ses études d'informatique et donc qui ne constituait pas vraiment l'interlocuteur idéal. Sur le terrain de la littérature, en revanche, il pouvait se montrer beaucoup plus loquace. - En ce moment, je lis l'Amulette de Samarcande, annonça Jorge. Tu l'as lu, non, Gabriel ? - Oui, il était vraiment bien, celui-là. Les notes de bas de page de Bartiméus sont vraiment excellentes, c'était original, comme idée... - Ah, mais oui ! intervint Lawrence brusquement. La trilogie de Bartiméus ! Mais la Porte de Ptolémée, le troisième tome... la fin, putain, la fin !! - Ne dis rien, je l'ai pas encore lu ! s'exclama Jorge, horrifié. - Terrible, approuva Gabriel. Du grand art. J'ai adoré. - Oui, mais, my god, quand même... - Mais chut ! gémit Jorge, désespéré. D'un coup, l'autre paraissait nettement plus sympathique à Gabriel – comme quoi, il ne fallait jamais juger hâtivement les gens. Et même quand Jorge disparut à la recherche de Louis qui avait dû s'endormir dans un coin, il réussit à poursuivre une conversation plus ou moins intéressante avec le beau brun. Du moins, jusqu'à ce qu'une silhouette apparaisse à côté d'eux, silencieuse et menaçante. L'aura effrayante qu'elle dégageait était presque palpable, et quelque part dans la pièce, Paul arrêta de respirer – les autres n'étaient pas tellement mieux. - Tu t'amuses bien, blondinet ? - Ça pourrait aller encore mieux si tu dégageais de ma vue, Lasheras, répondit Gabriel calmement. Lawrence les regardait alternativement, le regard plein d'incompréhension, et Paul se précipita entre les deux, l'air suppliant : - Joshua !! Je t'avais dit pas de bagarre et pas de provocation à l'intérieur de la maison ! - Et je n'avais rien garanti sur ce point, rappela Joshua, mais puisque c'est important pour toi, on va aller se battre dehors, okay, blondinet ? - Arrête de m'appeler blondinet, grinça Gabriel. - Tu préfères blondinette ? Ça ne me pose pas de problèmes, tu sais ! - Joshua !! s'exclama Paul. Arrête !! - Ok ok, on sort, t'excite pas. Il saisit le poignet de Gabriel et l'entraîna à l'extérieur de la maison, tout en se retournant pour dire à Jorge qui les suivait d'un air affolé : - Ne viens pas avec nous, Jímenez, on va pouvoir s'en sortir tout seuls comme des grands. - Mais... - Reste à l'intérieur, c'est entre lui et moi. Jorge n'osa pas désobéir à son ordre, et l'instant d'après, ils se retrouvaient seuls dans la rue déserte. Joshua jeta un coup d'œil à la maison, et fit la grimace – en se retournant, Gabriel put voir que les visages de quelques-uns de ses amis étaient collés derrière la fenêtre, et qu'ils les fixaient d'un air anxieux. Joshua soupira. - Quelle bande de lourds, tes potes... Viens, on va dans une rue voisine. J'ai pas envie qu'ils assistent à notre "baston". Gabriel réprima un sourire – après tout, les autres les espionnaient toujours, ça aurait paru bizarre s'il avait souri franchement en face de ce connard de Lasheras – et lorsque le brun s'éloigna en direction d'une rue proche, il le suivit en silence. - Ils vont se demander pourquoi on s'éloigne pour se battre, murmura Gabriel. - J'en ai rien à foutre. Dès qu'ils eurent passé le coin, Joshua saisit le bras de Gabriel et l'attira contre lui pour l'embrasser. C'était vraiment une sensation unique – comme de respirer une goulée d'air après être resté en apnée pendant cinq jours. Salvateur, en quelque sorte. Sentir les doigts de Joshua glisser dans son dos, dans ses cheveux, sentir ses lèvres et sa langue qui tentaient de le dominer, et sa cuisse qui frottait son entrejambe... - ... Notre règle... du cagibi, balbutia Gabriel entre deux baisers passionnés. - La ferme... J'en pouvais plus... Alors lui aussi, il ressentait ce manque aussi fort que Gabriel... Le blond s'était souvent demandé si c'était le cas – visiblement, même, c'était encore plus intolérable pour lui que pour Gabriel, puisqu'il le tirait hors d'une fête sous les yeux de tous les invités pour lui dévorer la bouche dans une rue sombre. - Putain... Faudrait qu'on trouve un endroit où le faire... Au moins, il était conscient que ça ne se faisait pas dans la rue – c'était déjà pas mal, songea Gabriel. Mais selon les sous-entendus tacites de leur Règle, il était strictement interdit de le faire en dehors du bahut, et encore moins chez l'un ou chez l'autre : ça aurait donné un caractère beaucoup trop officiel à leur relation. D'ailleurs, est-ce que c'était seulement une relation ? - Tu parlais de quoi, avec le type ? T'avais l'air de bien de marrer, marmonna Joshua tout en l'embrassant dans le cou. - Hhh... J'ai pas le droit de parler avec des types...? T'es pas jaloux, quand même, rassure-moi... - Évidemment que non, grinça Joshua. Tu te surestimes, là... Le blond eut un sourire que Joshua s'empressa de faire disparaître en s'emparant de sa bouche une nouvelle fois – ce dont il n'allait pas se plaindre. Perdus dans leur baiser torride, ils n'entendirent pas le bruit léger de pas qui venait de la rue voisine. - Oh, putain... Ce n'était pas la voix de Joshua, ça – et encore moins la sienne. Dans un bel ensemble, ils tournèrent la tête vers Lawrence, qui les regardait avec les yeux écarquillés, et Gabriel sentit son sang ne faire qu'un tour dans ses veines – il relâcha Joshua, qui s'écarta aussitôt, mais évidemment, c'était trop tard : ils avaient été grillés en beauté. - Euh... vous vous détestiez pas ? demanda Lawrence d'une voix abasourdie. En moins d'une seconde, Joshua s'était avancé et l'avait plaqué contre le mur, le poing serré sur le col de sa chemise, avec une expression meurtrière sur le visage, pendant que Gabriel resté figé. - Si tu racontes ce que tu viens de voir à qui que ce soit – à qui ce soit, t'entends ?! – je te décolle la face pour la mettre en trophée sur le mur de ma chambre. C'est pigé ? - Pigé, répondit Lawrence d'une toute petite voix. - Bien ! s'exclama Joshua en le lâchant brutalement. Et oublie pas, si tu me mens, je le saurai... Maintenant, casse-toi. Le pauvre Lawrence ne se le fit pas dire deux fois, et disparut de leur champ de vision en moins d'une seconde, tandis que Joshua se tournait vers Gabriel, qui avait plus ou moins eu le temps de retrouver ses esprits. - Ça craint, commenta-t-il calmement. - Putain ! s'exclama soudain Joshua en donnant un coup de poing dans le mur. Ce connard ! - C'est de notre faute, on a pas été franchement discrets, rétorqua Gabriel. - Bordel... Un silence pesant s'insinua, avant que Gabriel ne finisse par dire : - Je rentre. Je vais m'assurer qu'il ne dise rien. Joshua leva vers lui un regard irrité, mais de toute façon, ils ne pouvaient pas recommencer à se bécoter comme si rien ne s'était passé, donc à tout prendre, c'était ce qu'il y avait de mieux à faire. Il suivit Gabriel des yeux lorsqu'il s'éloigna, mais ne fit pas mine de revenir avec lui. .oOo. Voilà pour ce chapitre, j'espère qu'il vous a plu. A bientôt pour le prochain ! o/ |