Comme toutes les autres fois, Miku se dirigea vers le réfectoire en ignorant les garçons qui entraient dans la salle de musique numéro trois. Et comme à chaque fois, Yuzu et Akané s'arrêtaient pour lui demander si elle était sûre de ne pas vouloir y entrer aussi. Pourquoi ? Miku Morinozuka détestait le club qui se logeait dans cette salle, et à plus forte raison que sa cousine y était.

- Mais allez-y les filles, je vous garde une place à la cafétéria, proposa-t-elle gentiment.

Ces deux amies hésitèrent et finalement se faufilèrent entre les deux portes massives. Quant à Miku, elle continua son chemin, empruntant les escaliers du bâtiment sud. Ainsi, au détour d'un couloir, elle faillit se manger un porte que quelqu'un venait d'ouvrir.

- Hé ho, doucement ! Ah Kenji...

- Miku, ça fait longtemps. Tu vas manger ? Je t'accompagne.

Une fois attablés, Kenji Ootori se permit de poser quelques questions à la jeune fille, qui se contentait globalement de réponses monosyllabiques.

- Pourquoi tu ne viens plus au club ? Tu manques aux filles, tu sais ?

- Ca m’étonnerait. Et puis, je me suis pris la tête avec Hikari et Zora et  Emi me tape sur le système, elles insinuent que c'est ma faute si elles ont moins de clients.

Kenji hocha simplement la tête, les yeux d'un bleu cristallin irréel donnant l'impression d'une intense réflexion. Il rétorqua finalement:

- L'as-tu demandé à Fubuki ?

Miku ne voyait pas le rapport et affirma ne plus parler à aucun des membres du club, si ce n'est Sophie qui n'avait de cesse de lui tourner autour pour la faire changer d'avis. Akané et Yuzu arrivèrent ensuite, faisant fuir Kenji, car les deux jeunes filles étaient plutôt "prédatrices féroces" quand il s'agissait de beaux garçons.

- Miku, je n'en reviens pas ! Tu faisais partie du Hostess Club, tu avais tous les garçons de l’école à tes pieds, commença Yuzu, dépitée.

- Des prétendants, richissimes, et célibataires, ajouta Akané.

La jeune fille avait le don de voir le potentiel de chaque chose, et réfléchissait d'une logique peu courante; au lycée, elle cherchait le mari bon, fidèle, riche et dont la famille pourrait apporter quelque chose à la sienne, en sommes un mariage arrangé parfait, puis après l'école, elle allait avec ses amies flirter dans les quartiers jeunes du centre-ville, en boîtes, dans les pubs et les karaokés à la recherche d'un compagnon d'une nuit pour s'amuser, se détendre, s'oublier pourrait-on dire, bien que ce soit les cavaliers nocturnes qu'elle avait tendance à oublier.

Yuzu quant à elle, elle était plutôt du genre à suivre le mouvement pour se trouver dans les bonnes grâces de tous. Ainsi, son répertoire comprend tous les contacts utiles voire nécessaire à une jeune fille et future héritière de l'entreprise familiale.

- Vous pourrez dire tout ce que vous voulez, je n'y retournerai pas ! Et puis...

Elle s'arrêta brusquement, croyant avoir vu des yeux de serpent. Elle le chercha du regard à travers la cafétéria et finalement, l'aperçut derrière un battant en train de se refermer.

- Je reviens, dit-elle avant de s'élancer à sa poursuite.

Elle passa la porte et en quelques foulées le rejoint.

- Hey Hyo, appela-t-elle.

Le prénommé se retourna, la surprise animant son visage, jusqu'à ce qu'il reconnaisse Miku.

- Allons, est-ce là une façon de saluer son professeur, mademoiselle Morinozuka ?

Miku fut décontenancée un instant, avant de se reprendre et de se dire qu'il devait avoir trouver son nom dans le trombinoscope de la classe de littérature étrangère.

- Hey professeur ! Quels sont les livres au programme de cette année ?

Il eut un rictus moqueur, puis croisa les bras sur la poitrine, coinçant son cartable sous son aisselle.

- Tu le sauras en temps voulu.

Il se détourna et avec flegme, il ajouta.

- Sois à l'heure !

Miku bouillait, agacée par son air hautain, mais elle eut un sourire de défi; alors comme ça, il se la jouait prof charismatique le jour et guitariste coureur la nuit ? Malheureusement, il n'était pas dans la personnalité de Miku de rester tranquille sans rien dire. Il allait en baver, ça, elle le jurait.