Harry en était donc là, à trier toutes les affaires qui s'accumulaient dans sa malle depuis sa première année. Pour l'occasion, Winky, l'elfe de maison, lui avait apporté un grand carton destiné à recevoir ce dont il comptait se débarrasser. Il jeta le strutoscope cassé que Ron lui avait offert en deuxième année, mais garda les morceaux brisés du miroir que lui avait donné Sirius, quelques temps avant de mourir. Il garda aussi l'album photo fait par Hagrid, et jeta tous ses vêtements. Après tout Jean-Claude lui avait dis qu'il n'avait pas à s'en préoccuper, alors il n'allait pas garder une garde-robe qui, pour les trois quarts, contenaient les vieilles hardes de Dudley. Il déposa aussi tous les livres de ses précédentes années, à part celui de l'Histoire de Poudlard qu'il n'avait jamais pris le temps de lire.
Bref, Harry était en plein nettoyage de printemps. A tel point que Ron crut qu'une bombabouse avait explosé dans leur dortoir lorsqu'il rejoignit son ami.
-Par Merlin Harry, qu'est-ce que tu fais ?! On croirait que des gens se sont battus dans ce dortoir !
-Et bien je range, tout simplement, Ron.
Il jeta un regard aux affaires de Ron.
-Il est vrai que « ranger » n'est pas un verbe que tu sembles connaître. Il faudra pourtant t'y mettre lorsqu'il faudra que tu quittes Poudlard.
-M'en parle pas 'Ry, j'entends déjà d'ici les grincements de dents et les grognements indignés d'Hermione !
Tous les deux éclatèrent de rire, avant que Neville entre à son tour et ne fasse les gros yeux devant le spectacle du dortoir dans un désordre innommable.
-Je ne sais pas ce que vous avez fait les gars, mais vous avez intérêt à ranger !
Ron s'indigna et montra du doigt Harry.
-Hey c'est de sa faute à lui ! Harry s'est mis en tête de faire le tri de tout ce qui se trouvait dans sa malle. D'où le carton quasiment plein de trucs à jeter à côté de lui.
-Et bien quand tu t'y mets Harry, ce n'est pas de la rigolade ! Au fait, Jean-Claude et Asher sont devant la porte de la salle commune, je pense qu'ils veulent te parler.
Le jeune Londubat eut un sourire compréhensif lorsque son ami lui répondit d'un grognement irrité.
-Aller Cromagnon, va donc papoter avec tes petits-copains !
-Ron, tais-toi, ou je t'assure que tu ne pourras plus rien assurer de tout avec Hermione, et certainement plus une descendance.
Le rouquin blêmit en esquissant un léger sourire quelque peu... grimaçant. Une fois qu'Harry eut quitté le dortoir, Neville gloussa.
-Il n'est pas vraiment à prendre avec des pincettes en ce moment, surtout lorsqu'on aborde le sujet des vampires.
Il n'aurait pas pu être plus dans le vrai. Devant la porte de la salle commune, Harry se retrouva effectivement face aux deux vampires.
-Neville m'a dit que vous sembliez vouloir me parler. De quoi s'agit-il ?
-Nous nous sommes dit qu'il serait bon que l'on fasse un peu connaissance avant le départ, pour te mettre plus à l'aise.
-Est-ce que c'est juste histoire de ne pas me braquer pour avoir mon sang, ou bien c'est sincère ?
-Nous te promettons que cette démarche est sincère. Nous voudrions en apprendre plus sur toi, et en échange, nous te confierons des anecdotes sur nous.
-Oh, bien. Mais en fait, j'étais en train de ranger et...
Mais Harry surpris la brève lueur de déception dans le regard clair d'Asher avant que celui-ci ne redevienne totalement neutre. Sans qu'il ne sache pourquoi, cela toucha le jeune homme. Peut-être parce qu'il sentait que le vampire, malgré lui, possédait une vulnérabilité à fleur de peau.
-Attendez-moi ici deux minutes, le temps que je mette tout sur mon lit, et je reviens.
-Nous t'attendrons, merci d'accepter.
Lorsqu'il revint, les deux vampires s'étaient confortablement installés dans les fauteuils faisant face à la cheminée. Ils étaient aussi immobiles que des statues et un instant, Harry fut pris de crainte devant ces êtres de marbre. Puis il secoua la tête, se traitant d'idiot, et alla s'asseoir près d'eux.
-Tu dois avoir pas mal de questions à nous poser, n'est-ce pas ?
-Oui, j'en ai quelques unes.
-Alors n'hésite pas, nous te promettons de te répondre le plus exactement possible.
-D'abord, que veut dire « Maître de la ville » ?
-Cela signifie que je suis le Maître de tous les vampires résidant à Saint-Louis. Si un vampire étranger veut entrer sur mon territoire, son maître doit me demander l'autorisation et donner les raisons de son déplacement. Je partage un lien de sang avec mes vampires et leur puissance s'accroît au rythme de la mienne. Ainsi, si je suis capable de me « réveiller » plus tôt dans la soirée, ils en seront également capable.
Harry dévisagea Asher.
-Vous n'êtes pas liés à Jean-Claude par le sang.
Son ton assuré surpris les vampires bien que leur visage n'en exprima rien.
-Effectivement, je suis lié à jean-Claude par un lien de pouvoir.
-Un lien de pouvoir ?
-Cela se produit lorsqu'un triumvirat se rompt.
-Un triumvirat ? Qui était le troisième ?
Jean-Claude lança un rapide coup d’œil à Asher pour tester sa réaction.
-Notre servante humaine.
Le jeune homme devina qu'il y avait là une histoire tragique, et décida de ne pas insister pour le moment.
-Gretel et Requiem vous sont liés, n'est-ce pas ?
-Oui, ils sont de ma lignée. Comment le sais-tu ?
-Et bien ma magie réagit bizarrement quand ils sont proches de moi, mais elle ne fait rien en présence d'Asher, elle se transforme juste en vague de chaleur légère.
-C'est étonnant. Cela dit, nous sommes rarement en contact avec des sorciers dans notre communauté.
-Où vivez-vous à Saint-Louis ? Je veux dire, est-ce que vous vivez dans une maison comme tout le monde ?
-Nous vivons dans les sous-sols aménagés de mes clubs.
-Vos clubs ? Qui « nous » ?
-Je suis propriétaire de plusieurs... cabarets dans lesquels je fais travailler mes vampires et quelques lycanthropes. La plupart vivent donc avec nous.
Harry sursauta.
-Des loups-garous ? Comme Remus, mon ancien professeur de Défense ?
-Oh pas seulement des loups-garous, mais aussi des léopards, des lions, et même des rats et des cygnes-garous. Ils ne se transforment pas qu'à la pleine lune.
Asher et Jean-Claude esquissèrent un sourire devant l'air émerveillé de l'étudiant.
-Waouh ! Et il n'y a pas de problèmes ?
-Certains clans lycanthropes un peu faibles préfèrent se mettre sous la protection d'un vampire, en échange ils lui doivent une certaine obéissance.
-Vous ne me ferez pas travailler dans vos clubs, hein ?
-Non ne t'inquiètes pas. Moi j'y suis quelque fois obligé car je possède de la magie incube que l'on appelle l'ardeur. C'est pour cela que je tiens ces cabarets, pour pouvoir me nourrir du désir des gens.
S'il pensait choquer Harry, il en fut pour ses frais. Après tout, le garçon avait vécu une guerre et il en avait vu bien d'autre.
Asher prit enfin la parole.
-Et puis ne t'inquiètes pas, tu auras ta propre chambre qui sera attenante à la notre. L'un des léopards, Nathaniel l'a aménagé avec soin pour te mettre à l'aise.
-C'est gentil à lui.
Le reste de la discussion tourna essentiellement autour d'Harry, qui n'en revenait pas de les voir si avides d'informations sur lui. Et malgré lui, même s'il se méfiait de leurs tentatives de séduction, il commençait à les trouver plutôt sympathiques...
-Harry, tu as bien tout pris ?
Le jeune homme grogna et regarda Ron.
-Es-tu sûr de ne pas avoir envoyé de sort à Hermione pour qu'elle ressemble autant à ta mère ?
-Sûr, c'est pourtant pas faute d'avoir vérifié...
-Harry, Ron !
Des coussins vinrent les percuter et les faire tomber sur les fesses.
-Attends un peu que je répète ça à ta mère !
Le rouquin laissa échapper un gémissement pitoyable et adressa un regard suppliant à sa petite-amie.
-Tu ferais pas ça, hein ?
-Je me gênerais tiens !
Harry, qui avait repris son sérieux, les observait avec un sourire indulgent. Ron, intrigué par son silence, se tourna vers lui.
-Et bien mec, qu'est-ce que t'as ?
-Ça va m manquer tout ça, vous et vos éternelles chamailleries...
-Oh Harry, ce n'est qu'une nouvelle aventure ! Nous resterons malgré tout le Trio d'or.
Une main froide se posa sur son épaule, le faisant sursauter.
-Nous inviterons tes amis, ne t'inquiètes pas. Nous ne voulons en aucun cas te séparer de ton monde et de tes amis.
Harry savoura quelques instants la présence étonnamment réconfortante d'Asher, avant de fermer sa malle d'un sort.
-Tu es prêt ? Ton ami Neville est déjà avec les autres devant le portail de l'école.
Hermione eut une expression attendrie.
-Je l'ai croisé tout à l'heure, il parlait déjà de toutes les plantes dont il aurait à répertorier les propriétés là-bas.
-Neville et sa botanique...
Ils restèrent silencieux quelques instants avant de s'étreindre un peu maladroitement, comme le font les gens trop émus.
-je vous enverrai une lettre lorsque nous serons arrivés.
-Au revoir Harry, et profite un maximum.
La gorge du jeune homme se serra douloureusement tandis qu'il quittait la salle commune et qu'il parcourait les couloirs. Il adressa un signe de tête et un sourire un peu crispé à un Dumbledore toujours aussi pétillant de malice. Heureusement, il y avait des choses qui ne changeraient jamais...
Devant l'entrée du majestueux château, le reste du groupe les attendait. La dénommée Gretel émit un reniflement de dédain.
-C'est bon, nous pouvons y aller maintenant ? Ces messieurs ont été bi-bise à tout le monde ? Parce que j'aimerais vraiment quitter cet endroit, fréquenté par tous ces misérables humains...
Elle poussa un cri étouffé lorsque l'une de ses mèches de cheveux prit feu. Elle se tourna vers Harry qui la fixait d'un air impassible.
-Tous ces « misérables humains », comme vous dîtes, sont également tous des sorciers. Et vous ne tenez pas à brûler vive, n'est-ce pas ?
Lorsque ses émotions étaient à leur paroxysme comme c'était le cas à l'instant, Harry n'avait plus aucun scrupule. Entendre ses camarades se faire insulter le jour de son départ n'était pas quelque chose de prudent à faire. Il ne s'était jamais laissé marcher sur les pieds, et ce n'était pas aujourd'hui qu'il allait commencer ! La vampire ouvrit la bouche, mais un regard glacial de son maître la réduisit au silence. Neville lui, affichait un sourire goguenard.
-Nous prenons le train jusqu'à Londres, le Professeur Dumbledore nous a arrangé cela. Ensuite, nous prendrons l'avion.
-Mais le trajet va être long, il va y avoir un moment où vous allez mourir, non ?
Les cinq autres membres du groupe grimacèrent de son peu de tact.
-En effet, nous finirons le voyage dans les soutes de l'avion pendant que nos gardes du corps resteront près de vous.
-D'ailleurs ces gardes...
-Plus tard, un train nous attend. Un peu plus de neuf heures de trajet s'annoncent.
-Génial...
Tout était silencieux dans l'avion. Plongés dans le noir le plus complet, tous ses occupants semblaient dormir. Tous sauf un.
Neville avait depuis longtemps abandonné sa lutte contre le sommeil, et sa tête avait fini par rouler contre l'épaule d'Harry. Harry qui avait les yeux grands ouverts fixés sur le paysage éclairé par les lumières des villes et le soleil naissant. Il était 6h du matin, ils allaient bientôt arriver. L'excitation et le stress avaient agi sur lui comme l'auraient fais plusieurs litres de caféine. Il avait hâte de parcourir les avenues de Saint-Louis, de respirer le parfum de l'Amérique, que tant de personnes trouvaient enivrant. Son Angleterre lui manquait déjà un peu, parce qu'elle était la terre de ses parents mais aussi de toutes ses aventures. Alors, il n'avait plus qu'à relever tous les défis de ce nouveau sol.
-Neville, réveille-toi, nous arrivons.
-Mmh... Quoi ?
-Nous arrivons Neville, nous sommes à Saint-Louis.
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