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au 31 Mai 21 :
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Quatre
Par Tibre
Harry Potter  -  Romance  -  fr
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    Chapitre 4     Les chapitres     9 Reviews    
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My Eyes Have Seen You

 

Bonjour, bonjour.

Avant toute autre chose, au cas où ne serait-ce qu'une seule personne sur ce site ait attendu la suite de cette fic, je me dois de lui présenter mes plus plates excuses pour le délai extrêmement long. J'aurais voulu mettre à jour plus tôt mais ça ne s'est pas fait -ou plutôt, ça ne s'est pas écrit- pour des raisons diverses que je ne vais pas développer ici, inutile de polluer cette page. En tout cas, sachez bien que je ne suis pas fière de moi...

Maintenant à propos de ce chapitre, il y a toujours une playlist associée et vous pouvez toujours aller sur mon blog pour de plus amples informations (à propos de l'avancée de la fic aussi d'ailleurs).

Comme je ne l'ai pas fait en temps et en heure mais que mieux vaut tard que jamais, je remercie ici Nightsky et haniPyanfar pour les reviews qu'elles m'avaient laissées naguère (je crois que le mot convient pour le coup), en espérant qu'elles repasseront dans le coin!

Sur ce, bonne lecture.

 

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Chapitre Trois bis

My Eyes Have Seen You

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Il faisait un temps de chien. Peter, abrité par un parapluie, fit un signe de la main à son père qui s'éloignait en voiture puis s'engagea dans l'allée qui menait au collège Poudlard.

C'était la quatrième semaine de cours qui commençait aujourd'hui mais la vue du château qui s'approchait lentement au cours de sa longue marche était toujours impressionnante et ne manqua pas de provoquer chez le jeune homme un petit soupir. Il n'aimait pas marcher.

Il y avait d'autres élèves, devant et derrière lui qui se dirigeaient dans la même direction.

Il n'avait pas envie d'y aller…

Arrivé à l'école, Peter ne se rendit pas à la conciergerie. Il n'y allait plus depuis qu'il avait surpris Rusard la semaine dernière en train de donner un bain à sa chatte… La vision du concierge vêtu d'un tablier bleu ciel en train d'essayer de maintenir sous l'eau une Miss Teigne tout à fait réticente avait été effrayante. Et encore plus effrayant : l'expression sur le visage du concierge lorsque Peter avait ouvert la bouche pour dire quelque chose… qu'il n'avait finalement jamais dit puisqu'il s'était enfui en laissant dans sa précipitation la porte ouverte et les poils mouillés de Miss Teigne à la vue de tous.

En désespoir de cause, Peter avait bien essayé de se rappeler où il avait perdu son carnet, mais il avait beau se passer la journée de la rentrée en boucle il ne se souvenait pas le moment où il l'avait perdu… ce qui était assez logique maintenant qu'il y pensait parce que si on avait conscience du fait qu'on perdait quelque chose –et il faut être conscient pour se souvenir de quelque chose, non ?– alors on ne perdrait pas la chose… parce qu'on saurait qu'on est en train de la perdre… donc on ferait attention à ne pas la perdre, du coup… Bref.

Il avait bien une hypothèse : peut-être qu'il l'avait fait tomber quand il était entré en collision avec Remus dans un couloir ce jour-là, il ne l'avait pas vu et ne l'avait pas ramassé !

Et puis il avait une autre hypothèse : peut-être que celui qui avait déposé son sac devant les toilettes pendant qu'il était en train d'y perdre deux kilos par voie orale avait fouillé le sac et piqué son carnet !

Et puis il en avait une dernière : peut-être qu'il l'avait simplement oublié quelque part… Il oubliait toujours tout.

Enfin ! Peter s'était résigné à oublier son carnet à dessins. Mais ça lui avait quand même mis un sacré coup au moral et il n'avait toujours pas recommencé à dessiner alors qu'avant il ne se passait pas deux jours sans qu'il ne gribouille quelque chose. Pas d'inspiration.

Peter n'avait pas envie d'aller en cours. Il était nul. Ses notes allaient de mal en pis. Il avait besoin de cours de soutien, il ne pouvait rien faire tout seul.

Si je pouvais être ailleurs… C'est ce que Peter se disait alors qu'il attendait dans le couloir, assis pas loin de la porte qui menait à la salle de classe où avait lieu son premier cours : mathématiques.

Au bout de cinq minutes de rumination, Peter vit quelqu'un arriver dans le couloir : c'était cette fille, le génie des maths. Il était neuf heures moins dix, les autres élèves étaient encore en train de flâner en groupe dans le hall ou dans les couloirs.

Elle s'assit, presque en face de Peter, mais pas tout à fait. Ses cheveux blond foncé étaient tellement longs que Peter crut qu'elle allait s'asseoir dessus. Mais non, elle devait avoir l'habitude. Elle sortit un livre de son sac et s'y plongea sans hésitation.

Peter ne voulait pas aller en cours, il détestait les maths, il entendait des rires résonner depuis les étages inférieurs plus fort encore que la pluie sur les vitres, il faisait froid dans ce couloir, sur ces pierres froides, il s'ennuyait.

Peter se mit à observer la fille. Elle lisait un livre assez épais, assise en tailleur, le livre posé sur sa jupe normalement plissée mais tendue par l'écart de ses genoux, elle avait de grosses chaussettes de laine grise qui lui montaient au-dessus des genoux. Ses cheveux n'étaient pas si foncés d'habitude. Ils étaient collés par la pluie et Peter se dit qu'elle devait avoir froid.

Elle s'appelait Aricie Heller. Son père était un type très riche, le patron d'une entreprise pharmaceutique, et elle, elle était bizarre.

Elle ne parlait pas beaucoup, sauf pour donner les bonnes réponses en cours de maths. Elle n'avait pas beaucoup d'amies, et le plus souvent on la voyait seule en train de marcher dans les couloirs perdue dans ses pensées. Elle était… bizarre, juste étrange.

Elle avait adressé la parole à Peter une fois. Mais Peter avait une réputation assez minable comme ça, il n'avait pas voulu qu'en plus on le voie discuter avec cette fille. Elle était trop… bizarre !

Et puis elle n'était même pas belle pour compenser.

Des rires aigus se rapprochaient à un bout du couloir et bientôt trois filles passèrent l'angle du mur. C'était les groupies de basketteurs. Elles avaient des rires vraiment désagréables, mais Peter avait dans l'idée que tous les rires étaient laids quand on y assistait au lieu d'y participer. Lui n'aimait pas tellement entendre les gens rire en tout cas.

Leurs jupes voletaient autour de leurs genoux et Peter se demandait comment elle faisait ça. La plupart des filles faisaient de drôles de bruit de claquement avec leurs jupes quand elles marchaient, Peter avait remarqué, surtout quand elles étaient mouillées. Mais les jupes des groupies de basketteurs ne claquaient pas, elles voletaient joliment autour de leurs jolis genoux. Peut-être était-ce parce qu'elles faisaient des pas plus petits que la plupart des gens. Elles n'étaient pas pressées, les groupies de basketteurs, elles pouvaient faire de petits pas…

Et puis elles arrivèrent à leur hauteur et leur jetèrent un regard. A peine. A Aricie et à Peter, le même. Forcément, la cinglé et le petit gros, c'était du pareil au même…

Dans un élan de fierté assez peu habituel de sa part, Peter se détourna des jolies demoiselles méprisantes et regarda à nouveau Aricie Heller.

Elle, ne le regardait pas de cette façon. Sa seule manière de regarder les gens c'était avec étonnement : elle semblait perpétuellement surprise de leur existence.

C'était il y a deux ans qu'elle l'avait abordé, si sa mémoire était bonne. Après un cours de mathématiques elle l'avait interpellé d'un « hé toi ! » avant de lui poser des questions qui pour lui n'avaient ni queue ni tête. Elle avait été en fait complètement fascinée par son incapacité à résoudre un problème étudié durant le cours précédent et à propos duquel McGonagall l'avait littéralement harcelé. Aricie n'avait fait que renforcer son sentiment d'humiliation totale et Peter était parti sans l'écouter jusqu'au bout.

Le pire était que Peter savait parfaitement que la jeune fille n'avait pas cherché à se moquer de lui –la moquerie, il savait la repérer depuis le temps- elle était juste très bizarre. Tant de maths, ça finissait par monter au cerveau.

D'autres arrivaient dans le couloir à présent que le cours n'était plus que dans quatre minutes. Apercevant des joueurs de l'équipe de basket, Peter s'empressa de se remettre sur ses deux pieds. Ces gars étaient déjà ridiculement grands, si en plus le jeune homme restait assis, il avait carrément l'impression d'appartenir à une autre race. Lilliputien ou quelque chose de ce genre…

De façon tout à fait prévisible pour quiconque avait un peu vécu la vie d'étudiant à Poudlard, l'attention des groupies de basketteurs se tourna immédiatement vers les basketteurs. Oh, pas de façon complètement flagrante, non… la tête qui se tourne légèrement dans leur direction sans que les regards ne se détournent de leur objet d'intérêt précédent, les chevelures –sèches- qui miroitent comme par magie, les jupes qui frémissent imperceptiblement, le tout constituant une parade subtile et cependant parfaitement efficace. Les mâles ne voyaient qu'elles.

Pas qu'ils aient eu besoin d'une incitation quelconque, après tout leurs jupes étaient suffisamment courtes.

Peter était certain que le rituel d'accouplement en resterait à ce stade d'observation flirtive pour ce matin-là, le rapprochement des corps attendaient en général une bonne excuse, comme de devoir se serrer autour d'une table pour que tout le monde puisse manger ensemble le midi, ou de devoir se serrer sur la banquette d'une voiture alors qu'on raccompagnait galamment une camarade de classe, ou de devoir se serrer sur un banc un jour de match pour recevoir comme il se doit les preuves de soutien de grandes amatrices du ballon orange… ce genre de choses qui arrivaient assez fréquemment pour que les mâles n'aient pas à faire preuve de courage en partant à l'abordage d'une donzelle !

Ce fut pourtant ce qui se produit. Dans un élan hormonal supérieur à la moyenne, un des basketteurs de la classe de Peter, un certain Andrew, se dirigea vers les plus jolies filles de la classe avec un air sûr de lui, qui lui était à vrai dire habituel. Il s'accota au mur près d'elle, presque au ralenti -en fait il avait mal jugé la distance entre lui et le mur et par conséquent s'en trouvait plus loin qu'il ne le croyait, ce qui lui causa à en croire l'expression qui passa sur son visage un instant d'angoisse, où il se demanda probablement s'il allait devoir déplacer ses pieds de sorte à être plus près du mur ou si ça allait le faire.

Ça le faisait, à en juger par son sourire satisfait alors qu'il regardait droit dans les yeux une fille en particulier, aux cheveux bruns très brillants.

Peter étaient un expert en ce qui concernait les comportements amoureux, certainement parce que l'absence d'opportunités dans lesquelle les employer dans sa propre vie lui laissait le loisir de les observer dans celle des autres.

A présent, les deux tourtereaux allaient avoir une conversation banale, les yeux noyés dans ceux de l'autre, lui sortirait une ou deux phrases bateaux empruntées à des chansons d'amour, elle lèverait les yeux au ciel pour faire croire qu'elle n'était pas touchée, ils se souriraient d'un air idiot et d'une manière ou une autre à la fin de la journée ils attireraient à tour de rôle la langue de l'autre dans leur bouche. Navrant de prévisibilité et Peter était jaloux comme un pou.

« …les sages disent que seuls les idiots précipitent les choses mais… je ne peux pas m'empêcher de penser à toi tout le temps! »

Ah, quel blasphème ! Cet idiot mélangeait « I can't help falling in love with you » et « Always on my mind » ! Le King devait se retourner dans sa tombe –s'il était vraiment mort- de voir ses textes ainsi déformés et à de telles fins…

L'autre n'avait tout de même pas eu le culot d'aller jusqu'à la déclaration d'amour. Le pire était qu'il n'en avait même pas besoin, son mauvais plagiat était suffisant pour qu'elle glousse en détournant ses yeux brillants.

La cloche sonna, exigeant que les élèves se mettent en rang devant leur salle de classe. Peter se dirigea lentement vers la fin de la queue. Il laissa quelques personnes se placer entre lui et les basketteurs –encore et toujours trop grands !- et veilla à ce que quelques camarades se trouvent également entre lui et Rogue, qui avait fait une arrivée discrète au moment même de la sonnerie.

Du coin de l'œil, Peter vit quelqu'un se placer vivement à côté de lui. Surpris, il se tourna et croisa le regard myosotis d'Aricie Heller. Ils clignèrent des yeux chacun un certain nombre de fois.

« Quoi ? » demanda-t-elle, d'une voix soufflée.

« Rien. » répondit-il.

_____________

 

Pourquoi y avait-il tant de monde dans le réfectoire ? C'était à peine si James voyait son assiette avec toutes les mains qui s'agitaient au-dessus venant de tous côtés ! Oh, et puis ça puait ici, on se serait crû dans le vestiaire après un match, sauf qu'au lieu de sentir la sueur et la victoire ça sentait l'humidité et le porridge, mais l'atmosphère était tout aussi étouffante.

L'absolue totalité des élèves de l'école était réunie dans cette pièce, aux dimensions certes impressionnantes mais pas encore suffisamment pour qu'on ait l'impression que l'air restait frais malgré l'amas d'êtres humains qui s'y débattait et les fenêtres fermées.

Et puis il en avait marre d'être pris pour une tranche de jambon entre ses deux voisins de table. Pourquoi ils avaient absolument besoin de manger tous ensemble ? L'équipe plus les petites amies, plus les amies des petites amies… S'ils tenaient tant que ça à leur couple ils n'avaient qu'à se prendre une table pour eux, chaque petite copine ayant droit à une copine pour tenir la chandelle et basta ! Lui pourrait manger avec le reste des célibataires, entre hommes, et tout irait très bien !

James avait beau leur répéter encore et encore que non, il n'avait pas besoin qu'on le branche avec telle brune ou telle blonde, ils s'acharnaient à lui ramener les pires bêcheuses à sa table. S'il voulait une fille il pouvait se débrouiller tout seul, merci bien, après tout il ne les avait pas attendus pour découvrir les joies de la compagnie du beau sexe. S'il n'avait pas de copine en ce moment c'est qu'il n'en voulait pas !

« Eh James, tu sais sur qui tu vas faire l'exposé de sciences popol ? »

James se tourna vers Howard, enfin essaya parce qu'Andrew se servait présentement de son épaule comme dossier pendant qu'il roucoulait avec sa petite amie de cette semaine. Celui-là s'était décidément fait une manie d'envahir l'espace personnel de James dès qu'il le pouvait ! James lui donna une grande bourrade entre les deux omoplates puis, sans se soucier de l'expression coléreuse de l'autre –plus ça allait plus il s'en foutait- lui tourna le dos pour pouvoir regarder en face Howard. Il réfléchit finalement à la question.

« Ah ouais, ma mère m'a parlé d'un vieux copain de fac ! Il est membre du Parlement. Chambre des Communes et travailliste, de quoi faire les pieds au vieux Vector et bâcler ce devoir à la con ! »

« Tiens, un sympathisant de Miss Révoltons-nous Evans ? »

« Quoi, y a des gens de gauche à Poudlard, maintenant ? Je pensais être unique… »

« Oh, tu l'es James, mais pas concernant tes idées politiques, vous êtes au moins deux ! Je ne t'ai pas raconté le scandale qu'elle a fait la semaine dernière ? »

James secoua la tête, toujours désireux d'entendre parler d'actes de dissension au sein de cette vieille, conservatrice Poudlard. Si ça n'avait pas été une tradition remontant à plusieurs générations chez les Potter que d'envoyer leurs fils à Poudlard, la mère de James l'aurait sans aucun doute mis dans le public.

« Eh bien, le jour où Vector nous a parlé de son fumeux projet, une fille de ma classe a pété un plomb et lui a balancé ses quatre vérités; je crois même qu'elle a employé l'expression "se torcher le cul" a un moment mais je ne me souviens pas vraiment du contexte. Trop occupé à la mater. Enfin, elle a bien mouché Vector… C'est quand même sexy, une femme en colère ! »

« Là, tu m'apprends rien… » répliqua James en ayant une pensée tendre pour un nez roussi, infortuné et innocent composant d'un Blitzkrieg incarné. « C'était qui déjà, la redresseuse de prof tordu ? »

« Lily Evans, rousse boursière de septième année. Coincée et frigide en apparence… mais le feu couve sous la glace ! »

« Rousse, tu dis ? » répéta James, pris d'un doute. « Elle aurait pas une voiture verte, par hasard ? »

« Alors là tu m'en demandes trop, Jimmy. Mais… » et Howard se pencha vers James, le regard fixé vers la porte du réfectoire « fais semblant de me foutre par terre, et je te dis la couleur de ses sous-vêtements pas plus tard que dans quatre secondes. »

James dirigea à son tour son attention vers l'entrée de la salle et vit effectivement une fille en ayant franchi le seuil de quelques mètres. Le chignon roux serré, la démarche rapide et assurée, le nez tout mignon…

Le Blitzkrieg !

« Trois, deux… tant pis, ce sera pour une autre fois ! » dit Howard avec un soupir alors qu'il regardait la jeune fille s'arrêter avant de passer à côté d'eux et s'installer à une table.

« Je la connais ! » s'exclama naturellement James. « Y a pas que sur Vector qu'elle s'est énervée la semaine dernière, y a moi aussi ! » ajouta-t-il avec un large sourire.

« Veinard ! »

« Ouais, je l'ai "rencontrée" dans le parking l'autre soir… »

« Veinard ! »

« Même que c'est elle qui est venue me chercher des noises. Encore une qui n'a pas pu résister à mon magnétisme animal, elle a perçu mon aura de mauvais garçon et s'est dit qu'elle trouverait en moi un bouc émissaire à la hauteur de sa fureur, un type avec les épaules assez larges pour encaisser ses frustrations… »

« Et qu'est-ce que vous avez fait dans ce parking ? »

« On a crié. Pendant dix bonnes minutes ! »

« Dix minutes, c'est tout ce que tu peux faire James ? »

« Oh, c'est pas la longueur qui compte mais la qualité, et j'extrais de mes partenaires des cris de très grande qualité ! »

Howard ricana un moment puis étudia à nouveau Lily Evans, deux tables plus loin, en face d'eux.

« En vrai, qu'est-ce que tu lui avais fait ? »

« Elle n'aimait pas la couleur de ma voiture. »

Howard eut un air sceptique mais finit par laisser tomber et retourna à son déjeuner. James, lui, resta fixé sur la rouquine.

Ainsi c'était pour ça qu'elle était si énervée l'autre soir dans le parking… Mademoiselle s'était fritée avec Vector ! Décidément elle était pleine de surprises : elle n'avait pas seulement un nez, elle avait aussi un esprit critique. Elle commençait presque à devenir intéressante. Elle pourrait peut-être devenir sa copine de retenue !

Mais c'est vrai qu'elle avait un petit air coincé. Pourtant elle n'était pas moche. Même plutôt très jolie et royalement gaulée. Seulement, un peu rigide. Si la mémoire de James était bonne, elle n'avait pas du tout cet air-là quand elle lui criait dessus l'autre fois… Peut-être qu'il devrait essayer de la mettre en rogne à nouveau pour voir un peu si elle avait vraiment du caractère ou si l'autre jour était simplement un moment d'égarement. Oui il ferait ça, tiens…

Il le ferait peut-être devant Rusard histoire de se prendre une petite retenue, il en avait toujours une de retard depuis la semaine dernière.

L'histoire du bain de Miss Teigne avait fait le tour de l'école : le concierge avait laissé la porte de son bureau ouverte et tous les élèves passant dans le couloir avaient pu profiter du spectacle du désormais célèbre tablier bleu ciel ! James, lui, était passé trois fois, juste pour le plaisir.

Malheureusement il n'avait pas eu l'occasion de se frotter à Rusard ni de voir si Miss Teigne avait toujours envie de se frotter à lui depuis la semaine précédente. Ses entraînements de basket trois fois par semaine l'épuisaient tellement qu'il n'avait même pas l'énergie d'envoyer paître ses emmerdeurs d'amis quand ils l'obligeaient à les ramener chez eux le soir. En même temps ça arrivait de moins en moins puisque James, en tant que capitaine de l'équipe, restait souvent après les entraînements pour parler tactique avec le coach McFly. Ce dont il se serait bien passé honnêtement, mais ça avait effectivement ses avantages : ses potes avaient la flemme de l'attendre et se trouvaient un autre pigeon. Alors il avait sa voiture pour lui tout seul et pouvait chanter du Marvin Gaye aussi fort qu'il en avait envie…

La raison des entraînements intensifs était le premier match de basket de l'année scolaire qui aurait lieu le samedi suivant. Il s'agissait d'un match amical contre l'équipe de Durmstrang, une école située dans un pays dont James avait toujours eu du mal à retenir le nom. Toujours était-il que leur niveau était excellent et que si Poudlard arrivait à les battre tout le pays en entendrait parler !

Les joueurs de l'équipe étaient surexcités… Ce qui devait se traduire par un excès de testostérone si James en jugeait par le comportement actuel de ses coéquipiers. On aurait dit qu'ils étaient en rut, ils tournaient la tête en tous sens à la recherche d'une femelle et quand ils l'avaient trouvée ils se collaient à elle avec l'espoir, sans doute, que leur odeur de mâle en sueur les séduiraient… Remarquez, James ne devait pas être totalement épargné par la maladie puisqu'il n'avait pas cessé de regarder Lily Evans depuis qu'elle s'était assise en face de lui deux tables plus loin…

D'ailleurs elle le regardait aussi, à présent. Oh ! Des yeux ! Et quels yeux… Verts, verts… si verts ! Comment James avait-il pu ne pas remarquer ces yeux, pourtant si proches du nez ? Peut-être justement avait-il été trop obnubilé par le nez pour voir les yeux. C'était la seule explication : de tels yeux !

Et si bien soulignés par ces fins sourcils roux, dont l'un s'élevait présentement en signe d'interrogation… James secoua la tête, profita une seconde de plus de la vue des yeux verts à la lueur légèrement suspicieuse, puis laissa tomber son propre regard, d'un banal marron, sur son assiette à peine entamée.

Diantre ! Il en avait même oublié de manger. Poulet basquaise, enfin ! Hum… pas mal. Il aurait bien pris un peu d'épinards avec, mais bon…

« What's new, pussycat ? Wow hou wow hou wow ohoh ! »

« Pitié, Potter ! Recommence pas avec ton chaton, à cause de toi je l'ai eu sans arrêt dans la tête la semaine dernière… »

Des hochements vinrent soutenir les propos de Cole et James se résolut à chanter dans l'intimité de son cerveau, agacé. Lui non plus n'avait pas demandé à l'avoir dans la tête ! Et puis il ne chantait même pas fort. Il pouvait faire bien pire. Oh oui.

You and your pussycat eyes !

C'est que Tom était du genre insistant… Dire que pendant des années Miss Teigne avait été la seule femelle à pouvoir enclencher cette mélodie en lui… Désolé, La Teigne, il semble que tu te sois fait évincer par une bipède ! Adieu SPA, bonjour les Chiennes de Garde… la vie est parfois ironique.

Le repas de midi se termina dans la même ambiance de moiteur hormonale, sans épinards mais avec des chatons.

Une fois sorti de table, James chercha une autre chanson à se mettre dans la tête et à mettre dans celle de ses camarades, de préférence une qui les énerveraient tout autant. Le plus délicat était d'en trouver une qui les agace eux et pas lui…

Ah oui ! Avec celle-là il pourrait même imiter la trompette, et ça c'était très énervant.

Toum Tam. Tadadaadam… Papa's in the swing! Toum tam. Tadadaadam…

_____________

 

Si James Potter avait été là à ce moment précis, Remus Lupin l'aurait remercié.

Il pleuvait. Il pleuvait à torrent, il pleuvait des chats et des chiens même, comme on disait en cette chère Angleterre.

Et Remus Lupin marchait. Remus Lupin était à pied et se les caillait sévère. Il était aussi trempé qu'on pouvait l'être, partout où on pouvait l'imaginer. Ses vêtements n'étaient plus qu'une épaisseur de peau supplémentaire, de couleur bleu marine. Ses pieds auraient flotté dans ses chaussures si ces dernières n'avaient pas comporté de trous pour évacuer l'eau. Ses cheveux s'entêtaient à venir ruisseler sur son visage alors même qu'il les ramenait en arrière toutes les minutes trente environ. La chair de poule s'était définitivement installée sur toute partie de sa peau accueillant des poils susceptibles de se dresser à cause du froid.

Vraiment, son seul réconfort résidait dans cet air quelque peu répétitif mais inévitablement joyeux que James Potter lui avait martelé dans la tête pendant le cours d'histoire de l'après-midi et qui ne le quittait pas, même en ce moment de morosité menaçante, devenant un véritable rempart contre la tentation de céder au désespoir complet.

Pourquoi n'avait-il pas de voiture ? Et pourquoi vivait-il dans un pays où la pluie faisait partie du patrimoine ? Et, bon dieu, pourquoi n'avait-il pas des chaussures sans trous ? Parce que si l'eau était évacuée, elle avait quand même le temps de dire bonjour à ses chaussettes qui se faisaient un devoir d'en garder un peu à chaque fois, tout ça ayant pour résultat de gros « spouick spouick ». Pas que Remus l'entendit par-dessus le boucan des chats et des chiens qui atterrissaient tout autour de lui, mais la sensation qu'il éprouvait évoquait elle aussi quelque chose comme « spouick spouick ».

Remus s'imagina dans le vieux tacot de Lily : la pluie faisant un bruit d'Enfer sur la taule, roulant à deux à l'heure à cause du manque de visibilité et de la peur viscérale qu'avait Lily d'avoir un accident, adressant des bras d'honneur aux voitures qui les doubleraient en klaxonnant…

Malheureusement l'accord de covoiturage ne comprenait que les allers, Lily, Remus et Ethan ayant tous les trois des emplois du temps différents et des obligations régulières à l'extérieur du collège, ils avaient convenu que ce serait trop compliqué de s'attendre tous les soirs. Alors à patte, le Remus.

Son parapluie était cassé, voilà pourquoi tout allait mal ! Avec un parapluie tout irait mieux… Mais tout était de toute façon cassé chez lui : le transistor, le parapluie, les amitiés… lui-même se sentait un peu ébréché par un temps pareil, en tout cas ça expliquerait les fuites… En parlant de morosité.

Il ferait mieux de positiver un peu. Par exemple : il avait de très bonnes notes… et encore heureux, vu le temps qu'il passait à bosser.

Quoi d'autre… il gagnait de l'argent… Et il le dépensait aussi, mais pas en disques, voiture de sport ou sorties le soir, ou même en parapluie neuf, non plutôt en nourriture, vêtements et matériel scolaire. Bordel.

Mais il avait une famille qui l'aimait au moins… c'est-à-dire quand il la voyait il avait l'impression qu'elle l'appréciait assez, même si elle ne se rendait pas compte de toute la merde qui s'accumulait sur ses épaules et de toute la fatigue aussi… Bordel !

Décidément, Remus avait un don pour se remonter le moral. Mais il y avait des jours comme ça où tout semblait vraiment, vraiment merdique. Un poids monstrueux sur le plateau étiqueté « mauvais côtés » de la balance et pas même un rayon de soleil pour compenser sur le plateau « bons côtés ». Tout juste un petit air de musique qui commençait à s'étioler sous les coups de griffe du ras-le-bol.

Et dire qu'il en avait encore pour un bon quart d'heure de flotte avant de retrouver sa maison, une serviette sèche mais rêche, ses parents fatigués…

Une voiture. Une voiture arrivait derrière lui. Ira ? Ira pas ? Ira pas ? Oh et puis merde…

Remus se retourna, traversa la moitié droite de la route et s'arrêta pile au milieu. Il leva le bras droit, pouce en l'air.

Le chauffeur de la voiture sembla ne pas l'apercevoir tout de suite et c'est seulement à une cinquantaine de mètres qu'il commença à freiner brusquement, Remus put entendre les pneus crisser, autrement plus sonores que les « spouick spouick ».

Au bout d'une longue stridence le véhicule s'immobilisa, ayant dépassé Remus de quelques mètres.

La voiture était noire, grande, belle et coûteuse et Remus n'avait plus tellement envie de monter dedans, lui qui était totalement trempé.

En fait, il n'avait jamais fait de stop. Et si on lui demandait quelque chose en échange ? Et si au lieu de le déposer chez lui, on l'éloignait encore plus ? Et si on l'enlevait ? Peu probable, mais quand même, Remus était loin d'être à l'aise.

Cependant il pleuvait et pas qu'un peu et Remus était planté au milieu de la route et la voiture s'était arrêtée pour lui… Il fit quelques pas hésitants en direction de la portière avant. Il crut apercevoir une main faire un mouvement vers l'arrière et après un nouveau temps de réflexion il alla ouvrir la porte arrière et, inspirant un grand coup, monta dans la voiture.

« Ferme la porte. On gèle. »

Une voix de garçon en pleine mue claqua, elle appartenait à la personne assise à la place du mort. Remus ferma la porte d'un coup sec et la voiture redémarra immédiatement. Pas lentement.

Remus se tourna vers le passager et prononça à voix basse un remerciement auquel seul un reniflement dédaigneux répondit. Le garçon, qui avait l'âge d'être à Poudlard en troisième ou quatrième année et qui en portait l'uniforme sous un manteau noir trop élégant pour son âge, tourna la tête vers l'avant et fixa résolument l'horizon. Remus s'intéressa donc au chauffeur.

Qu'il mit moins d'une seconde à reconnaître, puisqu'il s'agissait de Sirius Black et que tous les élèves de Poudlard –les plus âgés en tout cas- savaient qui était Sirius Black.

Il était le fils de Lord Black. Le mécène de Godrictown, dont il avait financé la clinique, et de Poudlard, qui lui devait en partie la rénovation de l'aile Est. La famille Black était du genre très influent à Godrictown, en conséquence de quoi Sirius Black était du genre VIP à Poudlard. Un héritier.

Il était de la même année que Remus et même s'ils n'avaient jamais été dans la même classe, la réputation du garçon, elle, avait fait le tour de l'école plusieurs fois, murmurée de bouche féminine principalement puisqu'une autre raison de la popularité de Sirius Black était l'attrait qu'exerçait son physique sur ces demoiselles. Attrait que Remus ne pouvait que reconnaître alors que ses cheveux noirs et souples luisaient légèrement au-dessus du dossier en cuir noir de son siège, et que dans le rétroviseur ses yeux clairs reflétaient la lumière des phares de la voiture qu'ils croisaient en ce moment même. Ce type avait son charme.

La situation était tout de même légèrement absurde quand on y pensait : qu'est-ce que Remus Lupin foutait dans une voiture conduite par Sirius Black? Pourquoi n'avaient-ils pas de chauffeur, d'ailleurs ? Ils devaient être plus riches que Crésus en son temps.

C'était vraiment n'importe quoi : Black et les types dans son genre considéraient les boursiers tels que Remus comme des tâches dans le tableau immaculé de l'élite anglaise formée à Poudlard, ils n'auraient jamais du se trouver en même temps dans la même voiture. En fait leurs vêtements de factions si éloignées n'auraient jamais du effleurer le même cuir, que ce soit en simultané ou bien en différé.

Pourquoi diable l'héritier parmi les héritiers s'arrêtait-il au milieu de la route pour prendre un chien mouillé en auto-stop ?

Et à présent il regardait le chien mouillé en question. Il le regardait même avec une fixité effrayante pour quelqu'un tenant un volant entre les mains. Ah non il regardait la route de temps en temps quand même. Sinon il n'aurait pas pu doubler ce camion à cent kilomètres heure sur une route de campagne par temps de pluie, n'est-ce pas ?

Mouais. Sirius Black était peut-être beau mais pas encore à en mourir, or Remus avait l'impression que c'était ce qui allait lui arriver à chaque fois que la voiture en doublait une autre, prenait un virage… roulait en ligne droite… Passer de Lily l'escargot à Black Pédale-au-Plancher c'était un peu violent pour son pauvre petit cœur.

Remus se demandait s'il était censé engager une conversation. Le remercier de l'avoir pris à bord, lui dire qu'il était lui aussi de Poudlard, parler des cours peut-être. Remus l'aurait sûrement fait en temps normal –même si il ne se faisait pas prendre en stop en temps normal- mais dans la présente situation cela lui semblait bizarrement déplacé. Comme si un Black n'était pas une personne avec qui on pouvait badiner.

Le cuir du siège arrière couinait sous le fessier de Remus à son moindre petit mouvement, aussi évitait-il de bouger au maximum.

De toute façon le jeune homme doutait que quoique ce soit qu'il ait à dire puisse intéresser un héritier. Après tout ce Black faisait partie de la bande qui harcelait Peter Pettigrow et d'autres depuis des années à Poudlard, alors Remus n'avait rien à lui dire. Sa présence dans cette voiture était une erreur qui ne se reproduirait pas.

Le garçon assis à l'avant côté passager ressemblait remarquablement au chauffeur. Son frère, se dit Remus. Il ne se rappelait pas l'avoir déjà vu à Poudlard mais le collège était vaste et peuplé.

Le plus jeune ressemblait beaucoup à l'aîné certes, il n'avait cependant pas le même charisme, Remus pouvait le dire rien qu'au profil renfrogné qui captait lui aussi de loin en loin la lumière des phares. Il ne faisait pas non plus très sympathique mais Remus ne se souvenait pas la dernière fois où il avait vu un visage aristocratique arborer un air aimable et il avait eu quelques occasions d'en apercevoir à Poudlard. Sans vouloir généraliser, ces gens-là n'avaient pas besoin d'être aimables et n'en faisaient donc pas l'effort.

Ils roulaient depuis près de cinq minutes maintenant et l'atmosphère était glacée dans l'habitacle. Il ne s'agissait pas seulement de la température : les deux frères ne se parlaient pas, pas plus qu'ils ne s'adressaient à leur passager et si chez d'autres il aurait pu s'agir d'un silence serein, dans le cas présent Remus le comparait davantage à celui qui hantait la voiture de Lily Evans chaque matin. Ce n'était pas le grand amour chez les Black.

« Où est-ce que tu habites ? »

Remus eut un léger sursaut au son un peu rauque de la voix de Sirius Black s'adressant à lui. Il devait avouer que cette question-là il l'attendait impatiemment depuis quelques minutes, ils étaient à présent en vue de Godrictown et la thèse de l'enlèvement flottait encore, absurde, dans un coin de l'esprit du jeune homme.

Toutefois, subitement, Remus se dit qu'il n'avait pas envie que ces deux garçons richement vêtus voient l'endroit où il vivait.

« Vous pouvez me déposer dans le centre. » dit Remus sans vraiment savoir si le « vous » désignait la fratrie ou l'aîné uniquement.

« Où exactement ? »

« Peu importe. »

« Tu habites dans le centre ou pas ? » demanda Black avec une pointe d'impatience dans la voix.

« …Non. »

« Alors dis-moi où tu vis ce sera plus simple. » insista Black. Il regardait à nouveau Remus dans le rétroviseur et son ton était ferme. Remus ne se sentit pas la volonté de le défier ce soir. Il était là trempé dans cette voiture de luxe de toute façon, un peu plus ou un peu moins de sa misère révélée au monde ne changerait pas grand-chose.

« Mannaro Drive. »

Deux silencieuses minutes plus tard, la voiture ralentit à l'entrée de Mannaro Drive. Black ne demanda pas le numéro et immobilisa le véhicule. Remus regarda le cadet puis l'aîné, ouvrit la portière et sortit avec un « merci » cette fois audible.

Il pleuvait toujours, Remus courut vers le treize de la rue et la voiture partit.

Chez lui Remus fut accueilli par sa mère et son père dans la cuisine, en train de se détendre devant une tasse de café. Sa mère lui demanda pourquoi il n'avait pas utilisé son parapluie. Remus lui répondit qu'il était cassé. Après un temps de silence son père déclara avec un sourire que Remus avait la chance d'être jeune et en bonne santé. Il devait profiter de ces belles années où un mauvais grain ne suffisait pas à éteindre l'humeur enthousiaste. Golden years.

Plus tard dans sa chambre, Remus ne prit pas la peine d'allumer la lumière, il se déshabilla et s'allongea sur son lit. Run for the shadows, run for the shadows, run for the shadows in these golden years.

_____________

 

Il ne l'avait pas encore classé celui-ci. Il connaissait son visage mais ne se souvenait pas lui avoir accordé son attention suffisamment longtemps pour s'en faire une idée. C'était un visage comme tant d'autres.

Avec la pluie ses cheveux avaient eu l'air brun foncé mais devaient être plus clairs, secs. Pour ce qu'il en avait vu ses yeux avaient une couleur rare, plus claire que noisette. Sans être jaunes, il y avait quelque chose de ça. Ces yeux étaient étranges et retinrent l'attention de Sirius.

Ils la gardèrent alors même qu'ils n'étaient plus dans son champ de vision.

Regulus lui demandait ce qui lui avait pris de prendre ce type en stop. Et de faire un détour pour l'amener chez lui en plus. Sirius aurait pu lui répondre qu'il avait fait ça uniquement pour l'agacer mais il savait que le silence énerverait Regulus encore davantage que la vérité. Il eut un sourire un peu tordu.

C'était de la faute de son frère s'il rentrait si tard. Comme s'ils n'avaient pas les moyens de faire venir un professeur de piano à domicile, non, il fallait que Regulus fasse ça à Poudlard jusqu'à dix-huit heures tous les lundis soirs.

En réalité il s'agissait juste de laisser le manoir plus longtemps à sa mère pour qu'elle puisse faire Dieu seul savait ce qu'elle faisait quand elle était seule. Sirius en tout cas ne voulait pas d'indices.

Bref, Sirius était condamné à attendre son frère pendant deux heures tous les lundis et ce jusqu'à la fin de l'année. Merci Mère.

Mais pour ce qui était de cet auto-stoppeur, à dire vrai, même sans Regulus Sirius se serait arrêté. C'était la deuxième fois qu'il voyait ce type au bord de la route –du moins il pensait que c'était le même, il avait remarqué son uniforme de Poudlard. Mais la première fois il ne pleuvait pas et le type n'était pas en train de faire du stop alors il n'avait pas eu de raison de le prendre à bord.

Sirius s'était promis de prendre tous les auto-stoppeurs qui iraient dans sa direction le jour où il avait eu son permis. C'est-à-dire il y a trois mois, il n'avait pas encore eu l'occasion de mettre son serment en pratique jusqu'à ce jour. L'idée était un peu stupide, Sirius en convenait, mais il pouvait être certain que les gens qu'il prendrait en stop n'étaient pas de ceux que sa mère inviterait un jour au manoir, et le jeune homme avait pris la décision d'en faire une condition obligatoire à ses futures relations sociales.

Des gens rares, voilà ce qu'il cherchait et il avait l'intuition que le bord de la route était un bon endroit pour commencer ses recherches. Sirius subissait probablement l'influence de son groupe préféré et de leur « Riders on the storm »…

Ils arrivaient au Manoir Black, le détour n'avait pas été si long finalement.

Sirius attendit patiemment que le concierge du parc ouvre le portail puis s'engagea dans l'allée qui, si elle n'égalait pas celle de Poudlard offrait tout de même un panorama de qualité. La particularité du manoir était que sa façade était d'un noir profond. Sirius, en dépit de ses griefs envers sa famille, ne pouvait s'empêcher d'aimer cette couleur et d'admirer la vue de ces hautes fenêtres illuminées qui semblaient flotter dans la nuit comme des fantômes désœuvrés dont le seul loisir consistait à attirer les voyageurs égarés vers un manoir hanté qui dissimulait dans la nuit le gouffre avide qui les avalerait tout cru.

Il se souvenait que, plus jeune, Regulus avait toujours eu peur de cette vision que Sirius s'était amusé à lui graver dans la tête à la première occasion. L'aîné tourna la tête vers son cadet, presque prêt à le taquiner comme au bon vieux temps, puis aperçut l'air indifférent que Regulus s'était fait incruster dans les traits et eut lui-même une grimace de mépris. Il avait failli oublier que Regulus était devenu un parfait crétin.

Sirius se gara sous le porche prévu à cet effet dans le deuxième emplacement, le premier étant celui attribué au Lord Black et perpétuellement vide.

Regulus s'empara du seul parapluie qui se trouvait dans la voiture et sortit sans un mot. Sirius poussa un long soupir, éteignit le moteur et s'étira voluptueusement sur son siège. Si seulement il pouvait rester ici toute la soirée ou bien aller directement se coucher sans passer par la case « dîner en famille »…

Sirius entendit une voiture arriver dans la petite cour de gravier qui s'étendait au seuil de l'entrée du manoir. Il se demanda si un miracle – ou une catastrophe- s'était produit, si c'était son père qui rentrait à la maison. Il passa sur la banquette arrière pour mieux voir… Non. Il vit le majordome des Black se précipiter pour ouvrir la portière tout en essayant de maintenir un parapluie au dessus de trois silhouettes féminines qui sortaient du manoir, deux très brunes et la dernière très blonde : sa tante et ses cousines. Apparemment elles repartaient. Loué soit le Seigneur !

Sirius attendit que l'autre voiture soit partie et hors de vue avant de sortir de la sienne, laissant les clés sur le contact.

Il considérait le fait d'avoir évité les deux pestes et la vielle peau comme une victoire sur la malchance et en conclut que sa soirée ne pourrait pas être si terrible…

A table ce soir-là, l'ambiance n'était pas folichonne. Si Sirius n'avait pas su que le dîner à vingt heures précises avec la famille au complet –autant que possible- était une tradition familiale de longue date, il aurait juré que sa mère l'avait instaurée uniquement pour le torturer pendant ces séances d'ennui organisé : la soupe en silence, la viande à écouter le frère et la mère discuter –comprendre: le critiquer à mots couverts- et le dessert à subir un interrogatoire à sujets multiples, de préférence tous en sa défaveur… Une vraie partie de plaisir.

« Tu as manqué Bellatrix et Narcissa tout à l'heure. » commença Lady Black, les poignets délicatement posés au bord de la table, de chaque côté de son assiette de pudding, tandis que son dos droit reposait, royal, sur le dossier de velours de sa chaise. Ses ongles peints d'une teinte sombre effleuraient, de loin en loin, un à un, la nappe vert forêt.

« Vraiment ? » s'exclama Sirius sans faire ne serait-ce que semblant d'être étonné ou déçu. « Eh bien je les verrai demain, je suppose. »

Lady Black regarda son aîné de toute la longueur de son nez acéré, un sourcil noir et fin infimement relevé.

« J'ai cru comprendre d'après leurs paroles à toutes deux qu'elles te voyaient justement de moins en moins, même à Poudlard. Y a-t-il une raison à cela ? »

Sirius empêcha un sourire moqueur de s'installer sur ses lèvres.

« Vous savez, Mère, nous ne sommes pas dans la même classe cette année... Nous sommes tous absorbés par nos études, voilà tout. »

Une moue indéfinissable se peignit sur les lèvres minces et dures de Lady Black. Ses yeux noirs ne lâchaient pas un instant ceux de son aîné.

« Bella m'a parlé de votre projet en sciences politiques. » dit-elle sans pouvoir empêcher de laisser paraître son approbation quant au concept par une certaine rondeur dans sa voix grave. « Ton père est très occupé évidemment, mais nous devrions pouvoir convenir d'un entretien privé avec lui afin que tu lui demandes tout ce dont tu auras besoin pour ce devoir. Le professeur Vector ne pourra qu'être comblé par une interview de Lord Black. »

C'était probablement vrai, ce vieux croulant en pisserait de bonheur. Mais l'interview ne serait pas signée Sirius Black. A présent mieux valait la jouer serrée si Sirius voulait rejoindre sa chambre avant minuit et sans bain de sang.

« A vrai dire, Mère, sachant à quel point notre père est un homme occupé… j'ai décidé de contacter mon oncle Alphard à propos de ce projet. Il a généreusement accepté de m'accorder un peu de son temps prochainement… »

Les yeux de sa mère s'étrécirent instantanément à la mention de l'homme qu'elle haïssait probablement le plus après Albus Dumbledore : son propre frère.

« Généreusement ? » siffla-t-elle, les ongles plantés dans la nappe vert forêt. « Il n'a sûrement rien de mieux à faire de son temps que de discuter avec les fils de bonne famille pour essayer de les corrompre… Non, tu feras ton devoir sur ton père et je t'interdis de voir Alphard. J'ai dit. »

Ce genre d'expression d'un autre temps qu'affectionnait sa mère ne manquait jamais de provoquer amusement et incrédulité chez Sirius, qui semblait bien être le seul membre de sa famille à s'être aperçu que l'Angleterre était sortie de l'époque victorienne il y avait près de quatre-vingts ans de cela. Et pour en revenir à son présent à lui, était-il encore temps d'éviter le bain de sang ? Probablement pas. Sirius pouvait-il énerver davantage sa mère ? Oh, il pouvait essayer…

« Pourtant il me paraîtrait plus équitable de faire entendre tous les points de vue… y compris celui de ce travailliste qu'est votre frère. Ça fait partie de cette… comment appellent-ils cela déjà ? Ah oui… la démocratie. »

Pointe de rouge sur la joue pâle et front courroucé : on est en bonne voie.

« N'utilise pas ce ton avec moi, Sirius. Et nous sommes en monarchie. En monarchie! »

« Techniquement, le petit peuple vote et élit notre dirigeant, je crains qu'on appelle cela la démocratie, Mère. » dit Sirius sur un ton douloureux. « Qu'ils soient tous pendus ! » ajouta-t-il avec un empressement suspect alors que sa mère serrait la nappe vert forêt entre ses serres rouge sang.

« Nous avons une reine ! God save the queen ! »

Cette fois, Sirius ne put retenir un éclat de rire qui avait quelque chose de l'aboiement.

« God save the queen, Mère. » répéta-t-il d'une voix presque tendre. Il se leva ensuite en déposant sa serviette à côté de son assiette de pudding qu'il avait réussi à terminer par on ne savait quel miracle. Lady Black suivait ses mouvements de son regard aigu mais semblait à court de mots, ou du souffle nécessaire à leur énonciation. « Je crois que je vais aller méditer là-dessus dans ma chambre. Je vous souhaite une bonne nuit, Mère. Regulus. »

Sirius adressa un sourire ironique à son frère qui avait comme d'habitude cessé d'exister le temps de la confrontation mère-fils aîné et qui se levait à présent pour aller soutenir sa mère qui était en train de s'étouffer avec ses principes contre son dossier de velours.

Sirius monta dans sa chambre tranquillement. Arrivé dans ce qui était non pas une simple pièce mais en réalité son aile du manoir, il traversa une sorte de vestibule, puis sa chambre proprement dite et alla ouvrir sa fenêtre, qui était l'une de celles qui hantaient le jardin du domaine plutôt que son entrée.

Finalement il n'était pas encore minuit et le sang se contentait de bouillonner dans les veines de sa génitrice, c'était très bien comme ça.

Il fallait qu'il classe l'auto-stoppeur aux yeux bizarres. Seulement il n'avait pas trop d'idée pour l'instant. Il était sûr de connaître son visage mais était incapable de se souvenir où il avait pu le croiser à Poudlard… tout ce dont il était sûr c'était qu'il était boursier. Il pouvait toujours le mettre dans la case des boursiers étranges avec Miss Evans… En attendant mieux. Et s'il le voyait à nouveau faire du stop, il le prendrait à nouveau à bord. Surtout s'il pleuvait.

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Chansons: "I Can't Help Falling in Love With You" et "Always On My Mind" d'Elvis; toujours Tom Jones avec "What's New Pussycat" (et jamais deux sans trois); "Papa's Got A Brand New Bag" par James Brown; "Golden Years" de David Bowie; "Riders On The Storm" des Doors (celle-ci était incontournable); et "God Save The Queen" est toujours une chanson des Sex Pistols.

Voilà, c'est tout pour aujourd'hui. Et demain. Et sûrement après-demain et probablement les jours d'après. Mais. Mais les miracles existent (la preuve en est cette page) alors peut-être que vous aurez la suite un peu avant la Saint-glinglin! Et en ce moment j'écris donc il y a de l'espoir, c'est déjà ça...

En attendant si vous avez des commentaires ils sont bien sûr plus que bienvenus!

Que ces bons vieux Doors veillent sur nos écritures à tous...

 
 
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