Fabien était intimidé et quelque peu angoissé. Ancien habitant de Belgique, il venait d'emmenager à des centaines de kilomètres de là : à Marseille. Le jeune brun de 18 ans se demandait sur quelle planète il avait atterrie. Et pour cause, nulle ressemblance ne semblait exister entre les deux villes. Pour un garçon qui jusque là vivait depuis toujours à la campagne, le dépaysement ne pouvait être plus complet. De plus, le piètre immeuble qui lui tenait lieu de résidence se situait dans l'un des quartiers chauds de la ville ; rien de mieux après un petit déjeuner copieux que de contempler une mare de sang au pied du vieux bâtiment délabré. (MIAM !!! XD) Ce qu'il voyait l'affligeait totalement, et encore, il ne demeurait ici que depuis trois jours. On pouvait donc aisement comprendre les raisons de son humeur particulièrement mauvaise. Mais, elle n'était pas entièrement due qu'à cette constatation. En effet, il savait que s'il voulait être respecté et avoir un peu de tranquilité, il devrait user de la violence ; violence qu'il haïssait de tout son coeur car elle lui avait volé son frère.

A présent que le jeune brun se tenait debout devant la trentaine d'élèves de Terminale L3, il se sentait tellement mal qu'il voulait à tout prix se précipiter dans le couloir, trouver les toilettes et y rendre le peu de nourriture qu'il avait réussi à avaler le matin même. Mais, il garda cependant contenance et décida de la jouer cool.

- Bon bah... Moi c'est Fabien. Mais, vous pouvez m'appeler Fab.

Il y eut un bref silence, aussitôt suivi par des questions qui fusèrent de toutes parts alors que le nouveau ne s'y attendait pas.

- Le dirlot a dit que tu venais de Belgique. D'où exactement ?

- T'es super canon ! T'as une petite amie ? Non ? Je peux être la tienne si tu veux !

- C'est quoi tes centres d'intérêt ?

Fabian essaya tant bien que de mal à suivre le fil des interrogations et répondit à celles-ci en passant bien entendu sous silence celles qui lui paraisaient bien trop indiscrètes. Mais soudain, une voix grave se fit entendre :

- C'est laquelle ton équipe de foot préférée ?

Le propriétaire de cette voix se nommait Boris Kaligan. Grand, blond et baraqué, il occupait le poste de capitaine de l'équipe de foot du lycée. Pour preuve : l'insigne brillant qu'il arborait fièrement sur sa poitrine. Et, d'après le regard jaugeur qu'il posait sur la silhouette de Fabien, celui-ci devina qu'il serait bientôt invité à se joindre à son équipe.

- Je n'ai pas de préférence, lui répondit le belge. J'admire juste le jeu de jambes de certains joueurs, c'est tout. Personnellement, j'adore le foot, je pratique depuis mes 7 ans.

Visiblement, sa réponse sembla lui convenir vu qu'il se contenta de hocher la tête pour approuver.

Plus loin, dans le fond de la salle, Sébastien soupira. Il était certain que les prochaines semaines allaient s'averer particulièrement éprouvantes. Le nouvel arrivant intégrerait bientôt le CDRF (Club Des Ringards Footeux) et qui disait nouvel adhérent disait également une double dose de souffrances pour lui. Le seul espoir qui animait encore le blond était que le nouveau soit un peu moins brute que Boris. Mais, au fond de lui, il ne se faisait pas d'illusions.

Alors que le brouhaha s'emplifiait, le professeur rappela ses élèves à l'ordre.

- Nous ne sommmes pas dans un salon de thé, vous allez donc me faire le plaisir de vous taire ! leur ordonna M.Lenoir.

L'enseignant les réprimanda vertement, il comprenait que l'arrivée d'un nouvel étudiant pouvait alimenter les conversations mais, pour l'heure, il devait faire son cours et il voulait un minimum de calme pour cela. C'est pourquoi il se tourna vers Fabien qui se tenait encore debout près du tableau et lui désigna une table à deux places au dernier rang à côté de la fenêtre en lui demandant de s'y installer rapidement.

Le jeune belge, en regardant le bureau que lui montrait son professeur de littérature, remarqua qu'un garçon s'y trouvait déjà et sans s'en rendre vraiment compte, il commenca à l'examiner minutieusement. Le jeune homme possédait des cheveux blonds mi-long qui cascadaient jusqu'à ses épaules, un teint très pâle, presque maladif semblable à celui d'une personne qui venait de sortir d'une très mauvaise grippe et deux magnifique prunelles couleur océan qui ornaient son délicat visage.

L'inconnu, quant à lui, géné d'être ainsi épié, baissa la tête en rougissant.

Fabien repris péniblement ses esprits, bien décidé à faire sa connaissance. Lorsqu'il arriva à ses côtés, il avait la quasi-certitude que sa vie ici ne serait pas aussi terrible et ennuieuse que cela.

- Salut ! Je m'appelle Fabien. Et toi ?

- Sébastien, murmura l'autre, la tête toujours courbée.

- Tu sais je vais pas te manger !

Lui qui espérait détendre l'atmosphère c'était raté ! Sébastien le regardait en chien de fusil. Si un regard pouvait tuer, le belge se tiendrait sûrement depuis longtemps raide mort sur le sol.

- Et bien... En tout cas... J'serais un peu paumé au début... Donc... Donc je compte sur toi pour m'aider, Séb...

Le blond ne lui répondit pas et soupira, agacé. Dire qu'il aurait simplement voulu avoir les caractéristiques de l'homme invisible. Malheureusement, ce ne serait pas demain la veille que son rêve se réaliserait et l'autre emmerdeur ne manquait pas de le lui rappeler.