Le Chemin de Traverse. Auteur : haniPyanfar. Tous les personnages appartiennent à Madame Rowling à l'exception de Dame Adelphine. J'ose espérer qu'elle ne dépare pas au milieu des autres. . Chapitre 13 : Dans l'Allée des Embrumes. « Draco, avons-nous encore de l'ambre ? --Non, Monsieur. Le pot est vide. --Du jade ? Du corail rose ? --Non, Monsieur. La réserve de pierres magiques est presque épuisée. Il reste un peu d'œil-de-tigre, de l'ivoire végétal et quelques opales. --C'est très ennuyeux ! Il me faut au moins une de ces pierres pour l'onguent contre le Furonculus. C'est assez urgent. Figurez-vous que les Turpin ont encore laissé leur deuxième fille, Lucretia, jouer avec la baguette magique de sa grande sœur. La gamine n'a que dix ans mais c'est une surdouée. Une future Serdaigle, évidemment ! Elle a lancé le sort sur son petit frère et il est couvert de pustules. --Peut-être qu'on pourrait trouver quelque chose au « Diamant Bleu » ... ? --Non, la bijouterie ne vend que des pierres précieuses très chères. Je ne vais tout de même pas sacrifier une topaze ou un péridot ... Ah mais j'y pense ! Dame Adelphine pourrait peut-être nous dépanner ! Elle tient une droguerie dans l'Allée des Embrumes ... Enfin une droguerie ... Elle vend un peu de tout. Elle avait autrefois un rayon de gemmes liées à l'astrologie. Elle disait que le jade et l'ambre apportaient la bonne fortune. Des balivernes, Draco ! Vous pouvez me croire ! Quel est votre signe du zodiaque ? --Gémeaux, Monsieur. Mais moi non plus, je ne crois pas à toutes ces sornettes. Si vous voulez, je peux aller à cette droguerie et demander à ... --Dame Adelphine ... C'est une personne très spéciale ... Une Griffondor qui a mal tourné ... Elle a fait de la prison dans sa jeunesse ... On l'accusait d'avoir fait disparaître une rivale en amour ... On n'a jamais su le fin mot de l'histoire ... Mais c'est une bonne idée. Sa boutique est tout au bout de l'Allée des Embrumes. Ça ne vous dérange pas d'aller dans ce lieu de perdition ? --Non Monsieur. Aucune inquiétude à avoir. Je ne m'arrêterai pas en chemin. A part Barjow et Beurk, presque tout est fermé. Je ne suis jamais allé au bout de l'Allée. Que dois-je acheter ? --Ambre, jade, turquoise ... ce que vous trouverez à un tarif intéressant. Les pierres n'ont pas besoin d'être de première qualité puisqu'il s'agit de les dissoudre dans une préparation. Discutez, proposez votre prix, marchandez. Rapportez-moi tout ce que vous pouvez obtenir pour trois gallions. De toute façon, Parsifal doit bientôt rentrer et renouveler notre stock. --J'y vais immédiatement, Monsieur. -- -- -- -- -- -- Le soleil était levé depuis un bon moment, pourtant l'Allée des Embrumes restait sombre. Peu de monde. Draco croisa quelques sorciers qui, comme lui, se dissimulaient sous une cape à capuchon. En passant devant la vitrine éclairée de Barjow et Beurk, il remarqua devant la porte, sur l'escalier, un oiseau, un rouge-gorge, qui le fixa un instant de son petit œil rond et se mit à le suivre. « Sauve-toi, petit, lui dit-il. Ce n'est pas un endroit pour toi ici. Tes plumes écarlates sont recherchées et je ne donne pas cher de ta peau si un mauvais sorcier t'attrape. Tiens, voilà quelques miettes de mon déjeuner et ensuite, envole-toi. » Mais l'oiseau continua à sautiller derrière lui en pépiant. Draco haussa les épaules et poursuivit sa route entre les échoppes fermées aux vitrines barrées de planches. L'Allée était sinueuse et plus longue qu'il ne croyait. Enfin il aperçut une lumière jaunâtre. Ce devait être la droguerie. Il entendit derrière lui l'oiseau s'envoler et le vit se percher sur une enseigne rouillée qui portait en lettres délavées l'inscription : « Au Diable de Tasmanie ». A travers la vitrine fendue et poussiéreuse, on pouvait encore voir des objets exotiques, des têtes réduites pendant au bout de longues ficelles, des attrape-rêves indiens, des poupées vaudou plantées d'épingles, tout un bric-à-brac soi-disant magique à deux noises trois mornilles. Draco sourit et quelques enjambées plus loin, il arriva à destination. Quand il poussa la porte, une sonnerie stridente retentit, faisant sursauter une sorcière qui sommeillait dans un rocking-chair. «Bon sang de bois, garçon ! Tu ne peux pas arriver comme tout le monde par la poudre de Cheminette ? Il est rare qu'un client passe la porte ! Les ménagères sorcières ont bien trop peur de s'aventurer dans l'Allée ! Qu'est-ce qui t'amène de si bon matin ? Il faisait doux dans la boutique. Au fond, un petit feu brûlait dans la cheminée au-dessus des braises rougeoyantes. Des bougies allumées étaient posées un peu partout. Une odeur de cire d'abeille parfumait l'air. Tout était nickel, bien rangé, étincelant de propreté. On ne s'attendait pas à trouver un endroit aussi « clean » en un tel lieu. --Bonjour, Madame, dit Draco après un instant de surprise. Je suis envoyé par Monsieur Jiggers, l'apothicaire. --Par la barbe de Merlin ! Ce bon vieux Phylloxène ! Qu'est-ce qu'il veut, le gredin ? --Il aurait besoin de quelques pierres magiques pour une préparation. Il est en manque. Pouvez-vous le dépanner ? --Ah ! Ça va lui coûter cher, nom d'un petit bonhomme ! Il ne pense à moi que quand ça l'arrange ! Quel genre de pierres ? Elle s'était extirpée de son fauteuil et Draco remarqua alors qu'elle était superbe. Plus toute jeune bien sûr, mais un visage lisse, un front haut, des yeux noirs brillants, une bouche bien dessinée et encadrant le tout, une épaisse chevelure ondulée couleur de nuit qui faisait ressortir son teint très clair. Ajoutez à ça, un port de reine ! Seul son langage fleuri jurait un peu avec l'ensemble. --Jade, corail, ambre ou autres, de qualité moyenne; pour les potions. --Qu'est-ce qu'il mijote encore, le filou ? La dernière fois – c'était il y a six mois, comme le temps passe ! -- il voulait de l'azurite, soi-disant pour un ongle incarné ! Mais c'était pour un homme à qui un sortilège avait noué l'aiguillette, j'en suis sûre ! ... Quoi ? Ne fais pas ces yeux de hibou ! Tu ne sais pas ce que ça veut dire ? Un mâle qui ne pouvait plus bander ! ... Faut pas rougir, gamin, ça peut arriver à tout le monde ! Voyons ce que j'ai en réserve ! Elle se dirigea vers son comptoir de bois ciré, ouvrit un tiroir et en sortit plusieurs boîtes de carton de différentes couleurs portant en noir les lettres de l'alphabet. --A ... Ambre ... J'en ai trois morceaux à cinq mornilles. Ah ! Celui-là vaut plus cher, il y a un petit insecte en inclusion ... » Une fois que Dame Adelphine était lancée, il était difficile de l'arrêter. Draco se contentait de faire signe quand une gemme lui semblait intéressante. Cela dura deux bonnes heures. Entretemps, une harpie, une sorcière et une elfe de maison étaient arrivées par la cheminée pour acquérir qui de la peinture invisible, qui du Nettoie-Tout de la Mère Grattesec, qui un balai moldu demi-tête en soie, avec une brosse à reluire assortie. Puis arriva le moment du marchandage. Draco avait retenu une douzaine de pierres. Il n'avait pas pris le corail. La branche était beaucoup trop jolie pour servir à une potion. Mais il avait choisi de l'ambre, du jade, deux petites perles baroques, une agate mousse, quelques éclats de lapis-lazuli, un minuscule copeau d'or, de l'onyx, un petit sachet de sable blanc scintillant, une cornaline contre le mauvais œil et une émeraude malheureusement gâchée par un « crapaud », une inclusion qui lui enlevait toute valeur marchande. --Je te fais le tout pour quatre galions, annonça Dame Adelphine. --Quatre galions ? Vous n'y pensez pas ! Il y en a à peine pour deux galions et cinq mornilles. Je sais compter ! Et d'ailleurs l'agate mousse est écaillée. Je ne la prends pas finalement. Mais j'avais repéré ... La discussion prit presque une heure, parsemée de quelques exclamations bien senties ...Mille Gorgones ... Sac à gargouilles ... Nom d'un Scroutt à pétard ... Mais ils finirent par tomber d'accord. --Par Godric Griffondor lui-même ! Je ne sais pas où tu as appris à marchander, mais tu t'y connais, gamin ! Trois galions, entendu ! Mais tu diras à ce vieux grigou de Phylloxène que je lui fais une fleur. Tu as le commerce dans le sang, tu sais ? Qui es-tu ? Non, ne dis rien ! Ton visage me dit quelque chose. Tes cheveux ... tes yeux ... Tu es le fils de Lucius et de Narcissa ! Draco se crispa intérieurement. Les remarques désagréables n'allaient pas tarder. Mais Dame Adelphine souriait. --Sais-tu que j'étais à Poudlard en même temps que ton père et ta mère ? Pas dans la même Maison, évidemment ! Ils fricotaient déjà ensemble ! Je ne sais pas si le vieux Malfoy voyait ça d'un bon œil. Narcissa était une Black, il y avait de tout dans la famille. Bellatrix était folle. Et Sirius, un cousin à toi, était passé à l'ennemi en intégrant Griffondor ! Cornes de bouc ! Quelle époque ! Sa bonne humeur était communicative. Draco se détendait. Pour une fois, l'évocation de ses parents ne l'attristait pas. Et sa fierté Malfoyenne ne regimbait pas sous l'appellation de « gamin ». Dans la bouche de Dame Adelphine, c'était un peu moqueur mais presque affectueux. Il savait qu'il avait bien mené sa barque ! Elle ne l'aurait pas autant apprécié s'il n'avait pas marchandé mornille après mornille. Elle avait l'air de bien s'amuser. --Tu es à Serpentard, naturellement ! Quel âge as-tu ? Tu n'as pas encore terminé tes études ! Oh mais, tu vas pouvoir me donner des nouvelles de cette usurpatrice de Trelawney ! Oui, sacrebleu ! Elle est devenu professeur de Divination à ma place ! Sang d' hippogriffe ! Elle n'avait même pas le « don » ! Ou si peu ! Mais c'était le temps de l'affaire ! Ces niquedouilles de juges m'avaient envoyée à Azkaban ... Son regard se perdit dans le vague. Elle se tut. Et Draco frissonna. Cette femme superbe avait connu l'enfermement et si longtemps après, ce souvenir la taraudait encore. Putain de prison maudite des dieux et des hommes ! --Je n'ai suivi les cours de Trelawney que les deux premières années, répondit-il. Lire l'avenir dans les feuilles de thé, très peu pour moi ! Mais elle avait fait une prophétie à propos de Potter et Dumbledore la protégeait. Moi, je ne crois pas à toutes ces fariboles ! --Ne sois pas aussi catégorique, garçon. Les voyantes véritables existent et sans me vanter, Merlin m'en préserve, j'en suis une. Dis-moi ton prénom et assieds-toi près de moi. Elle avait repris sa place dans son rocking-chair. Elle condamna d'un geste le passage par la cheminée et tendit les mains vers lui. Avec un soupir de contrariété, il y posa les siennes en s'asseyant sur un tabouret. Il était pris au piège. Et dire que Monsieur Jiggers attendait les pierres ! --Je m'appelle Draco, fit-il d'une voix plus froide. --Ne fais pas ta mauvaise tête, Draco, se moqua-t-elle. Tes parents t'ont choisi un bien beau prénom, un nom de feu et de glace. Pourtant, je le sens par ton influx vital, tu es du signe de l'air. Verseau ? Non. Tu n'as rien d'un humaniste prônant la fraternité entre les êtres humains. Tu es individualiste et assez distant envers les autres. Je me trompe ? --Heu ... non, fit Draco assez surpris par sa perspicacité. --Balance ? Non plus. Tu n'as pas besoin de la société pour exister. Tu brilles par toi-même. Ton esprit est vif et tes mains sont agiles. Tu ne recherches pas non plus la tranquillité à tout prix. Mais tu utilises la ruse plutôt que la force pour arriver à tes fins. Tu es double, Draco. Gémeaux ? Début du sixième mois ? --Heu ... oui, en effet, je suis né le 5 juin. Draco était très surpris. Parmi les douze signes du zodiaque, Dame Adelphine avait trouvé le bon. Mais il restait septique. Elle était sans aucun doute observatrice. Elle l'avait jugé pendant leur marchandage. Déjà, elle développait sa thèse. --Ton corps, d'ailleurs, confirme ma première idée. Tu es mince mais même si tu étais plus enveloppé, tu attirerais l'œil. Tu bouges bien, tu as une élégance naturelle et ... mais attends ! Tu as les yeux gris ! Tu fais honneur à Mercure, ta planète gardienne ! Et j'avais raison pour tes aptitudes ! Mercure est aussi le dieu du commerce et de l'artisanat. Tu feras de tes mains de belles choses. Quel métier aimerais-tu exercer ? --Si nous n'étions pas ruinés, j'aurais repris les affaires de ma famille. Sinon, je suis assez doué pour les potions. --Mmmm ... Je ne te vois pas dans l'amer ou l'acide mais plutôt dans le doux et le parfumé. Tu es un créateur, Draco. Mais pour des œuvres éphémères, destinées à la satisfaction des sens ... Plus tard ... En ce moment, tu es entre deux mondes ... Tu n'es pas au bout de ton Chemin de Traverse ... Des épreuves douloureuses t'attendent encore ... « Elles disent toutes la même chose ... C'est si facile de prédire des malheurs aux gens ... Ensuite, ils sont tout contents quand les prédictions ne se réalisent pas ... Combien de fois Trelawney a-t-elle annoncé la mort prochaine de Potter ! Pourtant il est toujours là ! » -- ... Tu viens de penser à lui ... Il a été important pour toi dans le passé ... Il le sera encore plus dans l'avenir ... Il sera à l'origine du choix le plus décisif de ta vie ... C'est un fils du feu ... Il te consumera ... Et tu l'enflammeras ... Ou tu l'éteindras ... Par ton souffle ... Ensemble pour toujours ... Ou à jamais séparés ... Elle le regardait mais elle ne le voyait pas. Il en était sûr. Elle parlait d'une voix unie, les mots coulaient comme l'eau d'une source. Elle était lumineuse et absente. Ses mains tenaient les siennes sans les retenir. Rien ne bougeait. Le temps s'était arrêté. Puis dans la cheminée, une braise crépita. Juste assez pour que Draco se « réveille ». Il se leva brusquement et recula. -- ... Par tous les lutins de Cornouailles ! Je viens de rêver tout haut, hein, garçon ? Je ne me souviens pas de ce que je t'ai dit. Tu dois savoir par toi-même si mes paroles ont un sens ... Sacrebleu ! Je suis fatiguée ! Apporte ses pierres à Phylloxène ... Et dis-lui que ma proposition de mariage tient toujours ! Il lui faut quelqu'un qui lui tienne chaud au lit ! C'est valable pour toi aussi, jeune homme ! Reviens me voir à l'occasion ! --Je n'y manquerai pas. Au revoir Madame; dit Draco un peu sonné en se dirigeant vers la porte. --Attends ! J'aimerais t'offrir un cadeau. Apporte-moi la boîte marquée P Q R . J'ai quelque chose qui devrait te convenir ... Ah ! Voilà ! Du quartz rose ! Une des pierres liées à ton signe. Prends-en deux cristaux, un pour toi, un pour la personne que tu choisiras. Ils chaufferont dans vos deux mains si ton choix est le bon. Cornedrue et dragoncelle ! Allez file ! Tu me fais devenir chèvre ! » Draco se retrouva dans l'Allée des Embrumes. Il rabattit son capuchon et referma étroitement sa cape. Il avait froid tout à coup. Les paroles de Dame Adelphine tournaient dans sa mémoire. Il avait pensé fugitivement à Potter et elle avait prédit quelque chose qui les concernait tous les deux. Etait-elle une vraie voyante ? Ses convictions étaient ébranlées tout à coup. Il se sentait à la fois ému et furieux. ... Potter ! Toujours Potter ! ... « Ensemble pour toujours ou à jamais séparés » ... N'importe quoi ! Il approchait de chez Barjow et Beurk quand il aperçut devant la porte le vieux sorcier qui chassait à coups de canne le rouge-gorge qui piaillait. --File d'ici, oiseau de malheur ou gare à tes plumes, grinçait l'homme qui semblait en colère. ... Oh bonjour, Monsieur Malfoy, reprit-il d'une voix beaucoup plus aimable quand Draco passa devant lui. Vous me cherchiez ? Avez-vous besoin de mes services ? --Non, je vous remercie, dit rapidement le jeune homme, encore perdu dans ses pensées. --Ça viendra, Monsieur Malfoy, ça viendra, lui cria Barjow depuis le seuil de sa boutique. Draco était content de sortir de l'Allée des Embrumes. L'ombre et le froid qui y régnaient lui pesaient tout à coup. Mais il n'atteignit pas le Chemin de Traverse. Alors qu'il passait devant la dernière échoppe barricadée de planches, il fut brutalement entouré de deux bras musclés, une main s'écrasa sur sa bouche et on l'entraîna à l'intérieur. Il faisait noir comme dans un four. Draco, glacé d'horreur, trébucha et sa tête heurta un objet dur. Il se prit une bourrade dans les côtes et entendit des exclamations étouffées. Son ravisseur n'était pas seul. Quelqu'un prononça un « Lumos » et la pointe d'une baguette magique apparut tout près de son visage. Lui ne pouvait voir que deux ombres noires. « C'est pas le bon, dit une voix sourde. Tu t'es trompé de type ! --Ils se ressemblent tous avec leurs capes ! C'est pas ma faute ! --Toujours aussi con, mon frère ! --Qu'est-ce qu'on fait ? On le relâche ? --T'es fou ? Il va nous dénoncer aux Aurors ! --Il ne nous a pas vus. Il ne sait pas qui on est. --C'est pas sûr ! Mieux vaut être prudents ! --On ne va tout de même pas le tuer ! --Non, mais on pourrait s'amuser un peu avec lui. Et après, on lui jetterait un « Obliviate ». C'est ce qu'on faisait autrefois. Tu te rappelles ? --On n'a pas le temps ! Il faut guetter l'autre. --Juste un petit « Doloris » ! Pour rire ! --Un rien t'amuse, frérot ! Vas-y mais jette un sort de silence sinon il va ameuter tout le quartier. Je reste près de la porte. Draco sentit la terreur l'envahir. Qui étaient ces deux hommes ? Que faisaient-ils là ? Il n'eut pas le temps de réfléchir plus avant. La terrible douleur le cueillit au ventre. Il poussa un cri mais n'entendit pas le son de sa voix. Le sortilège était efficace. Il tomba à genoux et se plia en deux,. Un coup de pied le projeta à terre et il ne pensa plus qu'à protéger sa tête autant que possible. Tout à coup, il y eut une lumière plus vive. Le sort de silence fut annulé et quand il leva les yeux, Draco aperçut le visage de Barjow qui lui souriait d'un air aimable. Mais il tenait lui aussi sa baguette magique braquée sur lui. Et à ses côtés se tenait l'un des jumeaux Jugson. Malgré la douleur qui lui taraudait toujours le corps, Draco comprit qu'il était tombé en de bien mauvaises mains. Les passeurs de Mangemorts ! Ceux qui faisaient sortir du pays les adeptes de Voldemort coupables de crimes ! --Monsieur Malfoy ! dit le vieux sorcier. Je savais bien que vous auriez besoin de moi un de ces jours ! Pas trop de bobo ? Il parlait sur le ton de la conversation, comme s'il ne se trouvait pas dans une pièce crasseuse, au désordre indescriptible, en compagnie d'un Mangemort sadique. --Malfoy ? fit l'autre d'une voix rauque. Le fils de Lucius ? Mais alors ! Il va pouvoir nous aider ! Il doit bien avoir un petit magot que son père a caché pour lui quelque part ! Il nous faut cinq cents galions, ajouta-t-il d'un ton menaçant en s'adressant à Draco, pâle jusqu'aux lèvres. --Tu te trompes, Jonas, reprit Barjow. Il n'a plus une noise. Il trime comme un elfe de maison pour quelques mornilles. Si son père le voyait, il le renierait ! Mais finalement, il va nous être bien utile. Il travaille en ce moment chez Slug and Jiggers. Vous n'aurez pas besoin d'attendre que notre fournisseur de Polynectar passe pour lui voler la potion, au risque de nous faire repérer. Inutile que Josas reste à la porte pour le guetter. Ce jeune homme va nous en procurer bien gentiment et gratuitement. N'est-ce pas, Monsieur Malfoy ? Sa voix était devenue froide comme de la glace. Draco avait à peu près compris toute l'affaire. Maintenant, il s'agissait pour lui de sauver sa peau. Il n'y avait pas de Polynectar en réserve ou en préparation en ce moment à la boutique ... A moins que son patron n'en fabrique en secret dans son bureau privé ... Et comme il semblait bien disposé envers au moins un des jumeaux ... Oui mais, et l'autre ? ... Non, c'était impossible ! Il ne pouvait pas trahir les Jiggers ... Les pensées contradictoires tournaient dans sa tête à toute vitesse ... --Je peux au moins dérober les ingrédients nécessaires pour la fabriquer et vous les apporter, risqua-t-il d'un air hésitant. Nous avons reçu une peau entière de Serpent d'arbre du Cap et les Chrysopes sont déjà cuits d'avance. Je me débrouillerai pour le reste ... Je vous en prie, ajouta-t-il d'un ton geignard assez bien imité, ne me faites pas de mal. --Monsieur Malfoy ! Ce n'est pas beau de mentir, reprit Barjow d'un ton grinçant. Il faut trop de temps pour préparer cette potion. Nous en avons besoin tout de suite. Je veux une réponse claire. Legilimens ! De toutes ses forces, Draco résista au sortilège. Heureusement que son père lui avait enseigné l'occlumencie ! Il ne montra au vieux sorcier que les trois feux du laboratoire de Phylloxène et une potion qui bouillonnait. --Qu'est-ce qu'il prépare, ce vieux fou ? --Un onguent contre les furoncles. Il lui manquait un ingrédient. Il m'a envoyé en chercher chez Dame Adelphine. Il doit m'attendre ... --Ne détourne pas la conversation, Malfoy, coupa Jugson. Mon frère et moi, on a besoin de Polynectar. Tout de suite. Notre avis de recherche est affiché dans tout le pays. Nous devons nous transformer et partir à l'étranger aujourd'hui même. Soit tu nous trouves ce qu'il nous faut, soit je te jette un Avada. Choisis mais choisis vite ! Ma baguette me démange ! --Un bon sortilège d'Imperium serait plus efficace, Jonas, dit Barjow en tendant sa baguette vers le jeune sorcier désespéré. Je vais l'obliger à fouiller toute la boutique de Jiggers. Je suis sûr que l'apothicaire cache du Polynectar quelque part. Sinon, comment ferait-il passer de l'autre côté ceux qui s'adressent à lui ! « Il sait, pensa Draco. Grand Salazar, aide-moi ! » Mais Barjow n'eut pas le temps de lancer son sortilège Impardonnable. Une forte lumière illumina soudain l'intérieur de la boutique et des Aurors apparurent. Deux ...quatre ...sept ... tous l'air féroce et la baguette tendue. En une seconde, les Jugson, Barjow et Draco furent immobilisés par le sort du Saucisson. Les baguettes des sorciers furent confisquées. Bien sûr, le jeune homme n'en avait pas. Cela n'empêcha pas l'un des Aurors de lui dire d'un ton menaçant : --Tiens, Malfoy ! Comme on se retrouve ! Cette fois, tu n'y couperas pas ! Azkaban t'attend et pour toujours ! » -- -- -- -- -- Ils avaient tous transplané au Ministère. Dans l'un des bureaux, deux policiers interrogeaient Draco. Le jeune sorcier avait beau protester de son innocence, les autres n'avaient pas l'air de le croire. Au bout d'une heure de vaines discussions, les choses commençaient à s'envenimer et Draco voyait venir le moment où, comme la dernière fois, les coups et les sortilèges succéderaient aux menaces. Enfin, jusqu'à maintenant, il avait bien résisté à l'interrogatoire et surtout, il n'avait pas trahi les Jiggers. Il avait répété encore et encore qu'il ne savait rien, qu'il n'avait pas l'intention de quitter le Chemin de Traverse, que personne ne lui avait proposé de l'aider à partir et qu'il ne connaissait pas personnellement les jumeaux Jugson. Il n'était pas au courant de cette histoire de Polynectar. Les pierres qu'on avait trouvées sur lui étaient destinées à une potion contre les furoncles. Son patron et Dame Adelphine pourraient en témoigner si on les faisait venir ... Les policiers n'avaient pas réussi à lui faire dire autre chose. Et la menace d'Azkaban devenait plus précise. Soudain la porte du bureau s'ouvrit et un sorcier d'un certain âge entra. Il portait une robe et une cape couleur de muraille et un badge d'argent ornait son col. L'insigne des Langues de Plomb, les employés discrets et tout-puissants du Département des Mystères ! Les deux policiers se mirent immédiatement au garde-à-vous. --Relâchez Monsieur Malfoy, dit le nouveau venu d'une voix sans appel. Il n'a rien à voir avec cette histoire. On lui demandera seulement un témoignage qui enverra les trois autres et même leur complice, le vieux Beurk, à l'ombre pour longtemps. --Oui, Monsieur Funestar ... A vos ordres, Monsieur Funestar ! ... Mais comment avez-vous su ... C'était tout juste si les policiers ne faisaient pas une courbette chaque fois qu'ils prononçaient le nom de leur visiteur. --J'ai un témoin, répondit ce dernier. Et il siffla. Non pas un sifflement d'appel strident mais une longue trille modulée. Un rouge-gorge passa par la porte restée ouverte et se posa sur son épaule en répondant par un bref gazouillis. Draco ouvrit la bouche de stupeur. Il savait que Lord Voldemort et Harry Potter parlaient et comprenaient la langue des serpents. Il savait que ce don était très rare. Mais plus rare encore était le don de communiquer directement avec des oiseaux. Il y avait peut-être un sorcier par siècle qui avait cette capacité. Et ce sorcier était là, devant lui. Il venait de lui sauver la mise. Il était Langue de Plomb au Département des Mystères et s'appelait Oméridon Funestar. De toute évidence, par la couleur de sa cravate, c'était un ancien Pouffsouffle. Une personne de qualité. Quelqu'un de juste et d'intègre ... Un homme d'honneur. « C'est la deuxième fois que j'échappe à un renvoi en prison, pensa Draco avec soulagement. Il n'y aura pas de troisième fois, j'espère ! » . A suivre. |