Le Chemin de Traverse. Auteur : haniPyanfar Le Londres sorcier appartient à Madame Joanne K.Rowling. Chapitre 3 : WizzHard Books. Le Chemin de Traverse était très animé, surtout l'après-midi et aussi en fin de semaine, quand les sorcières de la campagne venaient y faire leur shopping en empruntant le Magicobus. Chacun, chacune voulait dépenser et s'amuser, maintenant que la guerre était finie. Les commerçants faisaient de bonnes affaires, on trouvait de tout en abondance et ceux qui en avaient les moyens s'offraient le superflu en plus du nécessaire. Pendant un an, quand les fidèles de Voldemort étaient au pouvoir, les gens se terraient chez eux. Tout le monde avait peur. Plusieurs boutiques étaient fermées. Ollivander et Florian Fortarôme avaient disparu. Certains magasins appartenant à des Sangs Mêlés, avaient été dévastés ou incendiés et les affiches offrant des récompenses à qui dénoncerait des sorciers d'origine moldue fleurissaient sur les vitrines vides. La rue était lugubre et personne ne s'y attardait. Heureusement, tout avait été remis à neuf et la plupart des gens commençaient à oublier les malheurs passés. Seuls, ceux qui avaient collaboré d'un peu trop près avec Dolorès Ombrage et sa clique se faisaient discrets. Les plus compromis avaient perdu leur travail et connaissaient la misère. Maintenant, ils fréquentaient plus le Fond de la Malle que la boutique de Madame Guipure. Draco avait ainsi croisé toutes sortes de gens en allant du Chaudron à son travail. Dès que Tom ou sa femme ouvraient pour lui la grande arche de briques, il se trouvait plongé dans la foule. Et au milieu des sorciers anonymes, il avait bien sûr aperçu des visages de connaissance. Poudlard n'ayant pas encore rouvert ses portes, de nombreux élèves venaient se promener sur le Chemin de Traverse. Le premier jour, quand il n'était pas encore protégé par le capuchon de sa cape, il avait senti sur lui les regards noirs de Terry Boot et de Justin Finch-Fletchley, postés devant le magasin d'accessoires de Quidditch. Ensuite, ça avait été plus facile. Cependant, il était sûr que Blaise Zabini, qu'il avait vu sortir un soir de chez l'apothicaire, l'avait reconnu car il lui avait fait un petit signe discret de la main. Et puis, il y avait la bande de Dennis Crivey. Ils étaient quatre et passaient leur temps à glander devant les vitrines en se partageant des gâteaux ou des bonbons et en buvant du jus de citrouille en canettes, la nouveauté de l'année. Le frère de Colin, un petit blondinet qui n'avait peur de rien, ne se consolait pas de la mort de son aîné et multipliait les bêtises. Il faisait des grimaces aux mages à l'air sévère, dénouait par derrière les tabliers des sorcières quand elles s'arrêtaient près d'un vendeur ambulant pour marchander et faisait peur aux petits enfants en leur criant « Bouh ! » dans les oreilles. Il était toujours accompagné de Jimmy Peakes et de Euan Abercrombie, Griffondors comme lui, et de Kevin Whithby de Pouffsouffle. Draco avait compris qu'ils l'avaient reconnu malgré ses précautions, il les entendait ricaner dans son dos et lancer quelques injures sur son passage. En voilà quatre à qui le retour à l'école ferait le plus grand bien ! En attendant, ils étaient livrés à eux-mêmes. Un jour, en passant devant le magasin de farces et attrapes des Weasley, Draco avait vu Georges et Ron discuter sur le pas de la porte. Il avait hâté le pas. Il n'avait pas menti en disant à leur sœur que la mort de Fred l'avait marqué. Plus que toute autre, cette disparition lui avait fait comprendre l'horreur et l'injustice de la guerre. Bizarrement, ça avait été pour lui le début des remords et des regrets. Pourtant Merlin savait qu'il ne portait pas la famille Belette dans son cœur. Mais autant il était facile de détester le clan tout entier, autant il était dur d'imaginer un des jumeaux sans son double. Il avait souvent pensé à eux quand il était ... là-bas. Ce souvenir rempli à la fois de tristesse et de joie de vivre attirait les Détraqueurs comme des mouches. Putain de saloperie de guerre ! -- -- -- -- -- Après son emploi chez Madame Rubirosa, Draco passa deux jours au Chaudron Baveur sans avoir d'autre proposition. Il n'osait pas aller quémander du travail lui-même et d'ailleurs, Harriett lui avait dit de se reposer un peu. Il avait déjà meilleure mine mais ce n'était pas encore la grande forme. Le miroir lui renvoyait toujours l'image d'un visage pâle et pointu et de cheveux mous et ternes. C'était ce qui lui déplaisait le plus. Il avait toujours été fier de sa chevelure. Il avait sacrifié quelques noises pour acheter du shampoing aux œufs en promotion au Grand Bazar, mais malgré cela, il était obligé de rejeter simplement ses cheveux assez longs en arrière et de les attacher dans son cou avec un ruban. « Cela vous va très bien, lui répétait le miroir. Vous ressemblez à ces jeunes lords des temps anciens qu'on voit dans les livres d'images. C'est vrai qu'on vous appelait le Prince des Serpentards autrefois à Poudlard ? C'est la patronne qui me l'a dit. Et Harry Potter, est-ce qu'on l'appelait Prince des Griffondors ? --On lui donnait plusieurs surnoms, Celui-qui-a-survécu ou l'Elu-du-monde-sorcier ou encore le Garçon-à-la-cicatrice. Mais il était trop mal coiffé et trop mal habillé pour se faire traiter de Prince ! --Ah oui, c'est vrai ! Quand il est venu ici, il portait un tee-shirt trois fois trop grand pour lui et il était tout ébouriffé. Mais quel gentil garçon tout de même ! Quelles nouvelles sur la Gazette ? Tous les matins, en faisant son travail au pub, Draco parcourait des yeux le journal qu'apportait une chouette messagère. On y trouvait en première page le bulletin de santé de Potter publié par Sainte Mangouste. Il répétait ensuite au miroir ce qu'il y avait lu. On a les fans qu'on peut, soupirait-il, mais c'était dit sur le ton de la plaisanterie. Qu'est-ce qui avait bien pu passer par la tête du Balafré pour qu'il s'ouvre les veines ? Et il avait eu de la chance que sa copine Granger le trouve rapidement et appelle les médicomages des urgences ! Il n'avait même pas laissé une lettre d'explication ! Toujours aussi bizarre, le Potter ! --Il va mieux, répondait-il au miroir. Il sortira de l'hôpital dans quelques jours. --Mais s'il recommence ? Vous croyez qu'il a des peines de cœur ? --Je n'en sais foutre rien et je m'en moque. Nous étions ennemis, ne l'oublie pas ! --Plus maintenant, voyons ! C'est de l'histoire ancienne ! » D'accord ! Plus maintenant ! Mais ça, Draco ne l'avouerait à personne ! -- -- -- -- -- Au matin du troisième jour, alors que le jeune homme finissait son petit déjeuner, un sorcier d'un certain âge, portant chapeau et cape gris souris, entra dans le petit salon en compagnie d'Harriett dont le visage était fendu d'un grand sourire. « Draco, vous avez un nouveau travail, dit-elle joyeusement. Le jeune homme se leva et salua courtoisement le vieux monsieur. Celui-ci fit un petit geste gracieux vers la patronne du Chaudron qui s'éclipsait déjà et dit d'une voix douce ; --Si vous acceptez, bien sûr ! Je suis Joshué Graham, le propriétaire de la maison d'édition WizzHard Books. J'ai été chargé par le Ministère d'imprimer le nouveau livre d'Histoire de la Magie à l'intention des élèves de Poudlard. Il a fallu bien sûr ajouter un chapitre sur la dernière guerre. C'est maintenant chose faite. Mais nous avons un petit problème. --En quoi puis-je vous être utile ? demanda Draco, la bouche sèche, le cœur battant trop vite. Tout ce qui touchait à cette période de sa vie ravivait sa peur et sa douleur. --L'auteur du livre, Bathilda Tourdesac, est décédée, comme vous le savez sans doute. Pour le chapitre supplémentaire, le Ministère a donc fait appel à une personne qui a vécu la guerre de l'intérieur, si je puis dire. Elle a écrit un résumé des faits aussi exact possible. Tout ceux qui l'ont lu en sont satisfaits. Mais avant la publication, elle a posé une condition. --Laquelle ? demanda Draco en voyant que le vieux monsieur s'interrompait et le regardait curieusement. --Elle veut que vous lisiez le chapitre et que vous donniez votre opinion sur les faits rapportés. --Pourquoi ? --Elle prétend que tous ceux qui ont lu et apprécié son exposé appartiennent au même camp et qu'il faut aussi l'avis des adversaires. L' Histoire de la Magie doit être aussi impartiale que possible, c'est ce qu'elle dit. --Mais pourquoi moi ? Je ne suis pas historien. Je ne suis qu'un pauvre idiot qui a choisi le mauvais camp dans la bataille. --Vous êtes le seul Mangemort en qui on peut avoir confiance. --Quoi ? Mais vous êtes fou ! ... Je vous prie de m'excuser, Monsieur. Mes paroles ont dépassé ma pensée. Qui est cette personne qui demande ainsi mon avis ? --Mademoiselle Hermione Granger. Le souffle coupé, Draco retomba assis sur sa chaise. Le sang battait à ses oreilles. Son cerveau refusait de fonctionner. Granger ! Celle que sa tante Bellatrix avait torturée au château Malfoy ! La plus proche amie de Potter ! Granger qu'il avait toujours méprisée et qu'il avait insultée de mille manières ! Granger lui faisait confiance ! --Je comprends votre surprise, Monsieur Malfoy, continuait le vieil homme de sa voix douce. Mais finalement, elle a su nous convaincre. Voilà le travail que je vous propose. Vous viendrez à l'imprimerie lire le chapitre en question. Vous noterez toutes vos remarques et vous en discuterez avec elle. Quand tout sera au point, vous recevrez un salaire de dix gallions. C'est ce que gagne un correcteur d'épreuves. Cela vous convient-il ? -- ... Oui, bien sûr, répondit-il à retardement. Quand dois-je me présenter à votre établissement ? --Cet après-midi à deux heures. Puis-je aussi compter sur vous pour surveiller l'impression des feuillets corrigés ? Mademoiselle Granger n'aime pas beaucoup ma machine. La « Sans Coquille » est pourtant extraordinaire. Il n'en existe que deux exemplaires dans le monde. Vous serez payé en plus pour ce surcroît de travail, bien entendu. A tout à l'heure, Monsieur Malfoy. --A tout à l'heure, répéta machinalement Draco en se relevant vivement pour saluer l'aimable vieux monsieur. La surprise avait plus ou moins bouleversé sa capacité de réflexion mais le bon usage de la politesse était implanté dans ses gènes. . -- -- -- -- -- « WizzHard Books, Maison d'édition et Imprimerie depuis 1468 » proclamait l'enseigne en lettres de bronze sur fond bleu. Draco pensa aussitôt que son visiteur était un ancien Serdaigle. Celui-ci l'attendait dans son confortable bureau situé sur la gauche d'un long couloir. A droite se trouvait une pièce aux murs couverts de rayonnages où s'empilaient des livres, certains très anciens, des rouleaux de parchemins, des feuilles couvertes de signes étranges, de dessins, de gravures ou de textes en latin. «C'est ici que travaille Mademoiselle Granger, dit Joshué Graham en le faisant entrer dans cette seconde pièce. Elle n'arrivera que dans une heure environ. Elle m'a envoyé un hibou pour me prévenir de son retard. Le matin, elle est au Ministère, au Bureau des Dédommagements. Elle termine à une heure mais souvent, elle passe à Sainte Mangouste avant de venir ici. Installez-vous, elle a tout préparé. » Une longue table prenait tout le centre de la pièce. Deux chaises étaient placées côte à côte. Devant chacune d'elle était posé un gros paquet de feuilles couvertes d'une écriture régulière, des plumes et de l'encre. Ainsi, Granger était sûre qu'il accepterait l'offre de son patron ! Qu'il y serait obligé, pensa-t-il avec amertume. --Voici la première mouture du chapitre consacré à la guerre. Mademoiselle Granger en a fait une copie magique. Vous en avez donc chacun un exemplaire. Lisez le vôtre et notez en marge tous vos commentaires. Vous en discuterez avec elle quand elle arrivera. Il vit le visage pâli et l'air un peu perdu de Draco et ajouta d'une voix compatissante : --Je sais que cela vous rappelle de bien mauvais souvenirs. Mais mettre votre passé à plat devrait vous aider à faire le point sur votre vie. Ce sera peut-être le début de votre ... guérison. Vous vous en êtes à peu près bien sorti. D'autres n'ont pas eu cette chance ... Je vous laisse travailler. » Il s'en alla en refermant doucement la porte. Draco resta seul, tout à coup pris de panique. Il n'aurait jamais dû accepter ce travail ! Il ne voulait plus penser à ces années noires. Il ne voulait pas réveiller de terribles fantômes. Il voulait oublier ... changer de vie ... repartir à zéro ... Il voulait ... Il faillit partir. La main sur la clenche de la porte, il s'arrêta. Non ... Il ne s'enfuirait pas. Il affronterait sa peur. Qu'avait dit son nouveau patron ? ... « Le début de votre guérison » ... Mais il n'était pas malade ! Cassé, brûlé, laminé par l'après-guerre, oui, sans doute. Ce mal de vivre qu'il ressentait, était-ce une maladie ? Il aurait plutôt dit des blessures de l'âme. Il s'en était « à peu près bien sorti », c'était vrai. Il aurait pu retourner ... là-bas. Mais pourquoi le vieux monsieur avait-il ajouté « D'autres n'ont pas eu cette chance » ? Plaignait-il les Mangemorts emprisonnés ? Certainement pas ! Draco eut malgré tout une pensée pour sa mère, elle n'aurait jamais dû subir un tel châtiment. Son nouveau patron évoquait-il les deuils, les morts, les blessés, les disparus ? Ou était-ce autre chose ? Qui ne s'en sortait pas aussi bien que lui après la guerre ? La lumière se fit dans son esprit alors qu'il s'asseyait à la longue table et qu'un nom écrit sur la première page lui sautait aux yeux. Harry Potter ! En voilà un qui n'avait pas eu de chance ! Une vie pas plus longue que la sienne mais si dure à supporter que celui qu'on appelait le Survivant n'avait même plus envie de vivre ! Lui renaissait et l'autre crétin se laissait mourir ! Une brusque poussée d'adrénaline ... le visage d'un jeune homme brun ravagé par la douleur au soir d'un terrible jour ... et Draco se mit au travail. Il décida de parcourir d'abord le chapitre en continu puis de le reprendre feuille par feuille et d'y inscrire alors d'éventuelles remarques. Au fur et à mesure qu'il avançait dans sa lecture, il était de plus en plus étonné par la précision et la justesse du récit. Tout était clairement expliqué, sans détails superflus et sans parti-pris. Les élèves qui étudieraient ce chapitre auraient une vision très juste des origines de la guerre, des deux camps en présence et de la suite chronologique des évènements. Y figuraient aussi une biographie complète des deux principaux adversaires, Harry Potter et Lord Voldemort, et la liste de leurs partisans, Ordre du Phénix ou Mangemorts. Le nom de sa famille était mentionné parmi ces derniers. Il ne releva que quelques erreurs de dates, quelques fautes dans les noms et quelques termes inexacts. C'était du beau travail. Il en était à peu près au milieu du récit, au moment où Rufus Scrimgeour, alors Ministre de la Magie, était assassiné et remplacé par Pius Thicknesse, mis sous Imperium par Yaxley et donc tout dévoué au Lord Noir, quand la porte s'ouvrit et Hermione Granger entra. Il se leva aussitôt et tous les deux se fixèrent quelques instants en silence. « Elle a changé, pensa Draco. Elle fait plus mûre, plus femme. Mais elle est bien pâle et ses lèvres sont serrées comme si quelque chose la tourmentait. Elle a l'air surprise de me voir. C'est pourtant bien elle qui m'a fait venir ! » « Merlin ! Malfoy ! Avec tous ces ennuis, je l'avais presque oublié ! ... Il a l'air plus vieux que dans mes souvenirs. Les traits de son visage sont plus accusés, ses yeux plus enfoncés. Il est bien maigre aussi, on dirait qu'il flotte dans ses vêtements. Ah oui ! La prison ... » « Bonjour, Malfoy, dit-elle, rompant le silence la première. --Bonjour, Granger, répondit-il d'une voix unie, bien éloignée de ses intonations moqueuses d'autrefois. --Excuse mon retard, des soucis imprévus ... Je vois que tu as commencé à travailler. Alors, quelles sont tes premières impressions ? Toujours la même, la Griffondor ! Pas d'hésitation, pas de faux semblants ! Directement dans le vif du sujet ! --A première vue, c'est du très beau travail. Ton souci d'impartialité est remarquable. Sincèrement, je te fais tous mes compliments. A question franche, réponse tout aussi franche. Terminés les affrontements absurdes ! Il était temps de se conduire en adultes responsables. Hermione le sentit aussitôt et son visage se détendit. Ça allait être plus facile que prévu. Tant mieux ! Elle avait autre chose à faire que recommencer de vaines disputes. Malfoy avait changé, au physique et sans doute au mental. Elle s'installa à ses côtés. La suite se passa sans problème. Ils reprirent ensemble les pages qu'il avait déjà lues. Pour chaque paragraphe, il lui faisait part de son approbation ou de ses rares remarques. Quand il y avait une correction à faire, elle utilisait sa baguette magique, effaçait, récrivait, ajoutait. Au bout d'une heure, les cinq premiers feuillets étaient prêts à l'impression. « C'est assez pour aujourd'hui, décida-t-elle. Allons à l'atelier, je vais te montrer la presse. Tout en rassemblant ses affaires, elle ajouta sur un ton plus sévère : « Joshué Graham a dû te vanter sa machine, la fameuse « Sans coquille ». Je dois t'avouer que je ne l'aime pas, tu comprendras pourquoi quand tu la verras. Mais malheureusement, on ne peut rien y faire. Ces elfes sont d'une obstination sans bornes ! Des elfes ? Qu'est-ce que c'était que cette histoire ? Draco eut la réponse à ses interrogations en suivant le long couloir de l'entrée jusqu'à la porte du fond. Il arriva dans une pièce brillamment éclairée de dizaines de chandelles et presque entièrement occupée par ... il ne savait trop quoi. Une machine, sûrement, avec ses engrenages, ses poulies, ses leviers, ses courroies ... son capot noir marqué de signes bizarres et de lettres blanches en écriture gothique ... son odeur d'huile et d'encre ... son cliquetis, son bourdonnement sourd, sa ... respiration ... oui, car la machine était vivante ! Elle RESPIRAIT ! Elle haletait même ! Quand Draco entra à la suite d'Hermione, elle tourna vers eux deux grosses boules luisantes ... des YEUX ! .. et un sifflement feutré suivi d'une série de grommèlements sortirent d'une ouverture ronde, une ... BOUCHE ! ... placée au centre du capot ... pendant que ses deux longs BRAS articulés cessaient leurs mouvements rythmés sur ses flancs. Une voix pointue retentit et les yeux de Draco s'arrondirent plus encore. « Elle dit que vous n'êtes pas les bienvenus. Elle est occupée à réimprimer une série de « Mille herbes et Champignons magiques » pour la prochaine rentrée scolaire. Revenez plus tard. » Draco découvrit avec stupeur un ... non, TROIS elfes de maison assis autour de la machine, un devant et un de chaque côté. Ils portaient des habits propres et neufs, une courte veste, un pantalon, un chapeau pointu, le tout de couleur noire. Leurs grands pieds étaient nus et ne touchaient pas le sol. Leurs énormes yeux étaient fixés sur eux et ils n'avaient pas l'air aimables. « A ma demande, Monsieur Graham leur a offert ces vêtements puisque d'après les nouvelles lois, les elfes de maison doivent être libres de choisir qui ils veulent servir. C'est normal quand on sait ce que ceux de Poudlard ont fait à la fin de la bataille ! Elle s'animait Et Draco sourit intérieurement. L'ancienne présidente de la S.A.L.E. refaisait surface ! --Mais ceux-ci prétendent qu'il n'est pas leur maître, continua-t-elle. Ils n'obéissent qu'à cette foutue machine ... Un sifflement se fit de nouveau entendre. Elle pointa sa baguette magique et lança un « Silencio ». Le bruit cessa. Elle continua ses récriminations. --Ils ne sortent jamais d'ici ! Ils ne mangent que du pain noir, du miel et du fromage de chèvre ! Il ne boivent que de l'eau et une affreuse piquette qu'il faut faire venir des Balkans exprès pour eux ! Ils dorment par terre, derrière ELLE ! Ils ne savent même pas que le monde existe ! Parce que tu ne sais pas le plus beau ! Ils ne savent pas lire ! --Mais c'est impossible ! --Oh ! Ils connaissent le principe ! Les lettres, les mots, les phrases ... Pour toute la partie technique ils sont imbattables ! Mais ça n'a pas de sens pour eux. Ils ne savent pas que ce qu'ils impriment existe réellement. Pour eux, le Liber Secretorum Alberti Magni ou les Contes de Beedle le Barde, c'est du pareil au même ! --Et comment font-ils pour composer les pages de textes ? --Ils COPIENT ce qu'on leur donne sans rien comprendre, comme les ouvriers du Moyen Age ! --Ils ne font jamais de fautes ? --Si bien sûr, ça leur arrive de temps en temps ! Mais ELLE s'en aperçoit ! Elle arrête tout et le coupable est durement puni. Pourquoi tu crois qu'on l'appelle la « Sans Coquille » ? Parce qu'elle ne laisse passer aucune erreur, aucune « coquille » comme on dit chez les imprimeurs ! Elle attend alors qu'un humain vienne lui dire quoi faire. Monsieur Graham t'a dit que tu devrais la surveiller ? --Oui, en effet. --Moi, je ne la supporte plus ! C'est une honte ! Ces malheureux elfes ! --On n'est pas malheureux, chantonnèrent trois voix à l'unisson. Maman s'occupe de nous. --Et en plus, ils l'appellent maman ! ... Bon, je t'explique. Elle connaît tous les anciens livres par cœur. Mais dès qu'il s'agit d'une nouveauté, comme le dernier chapitre de l'Histoire de la Magie, on doit rester près d'elle pour lui donner des renseignements quand elle s'arrête. Corriger un mot, une lettre, ajouter la ponctuation ... C'est facile mais c'est long et contraignant et je t'avoue qu'en ce moment, j'ai d'autres soucis en tête. Es-tu d'accord pour me remplacer dans ce travail ? Tu seras payé évidemment. Draco se raidit un peu et faillit lui balancer une vanne. Mais il se retint. Elle ne l'avait pas dit en mal. C'était une Moldue, on ne lui avait pas appris la délicatesse. Et puis, dans sa situation, il n'avait pas à faire le difficile. Il hocha simplement la tête. La machine et ses trois servants avaient repris leur travail. Il ne s'était jamais demandé comment les livres magiques étaient imprimés. Il avait la réponse sous les yeux. La magie avait bien des avantages mais elle ne résolvait pas tous les problèmes. Il se demanda où et comment se fabriquaient les autres objets magiques. Les balais pour le Quidditch, par exemple ... A suivre. |