"Eh mince, tu as vu ce temps? Avec ça les routes vont être impraticables d'ici la fin de la journée. Bon, je vais faire les courses, qui vient avec moi ? »
Il faut savoir que quand Luciana va faire les courses, elle a toujours le coffre plein alors elle a besoin de main d'œuvre pour tout décharger.
Delphine s'est précipitée, comme toujours, puis Christopher et sa copine se sont avancés.
« Il reste encore une place, qui d'autre vient ? A demandé Luciana.
J'ai regardé Benjamin et j'allais me proposer quand il l'a fait. Avant de partir, Benjamin est venu me voir.
« T'inquiète pas, on en a juste pour une heure ou deux, tu ne resteras pas seule longtemps, et au pire, il y a toujours Alexandre. »
J’acquiesçais avant qu'ils ne partent. La neige tombait +fort depuis ce matin mais elle s'était calmée pour l'instant et il n'était pas prévu qu'elle retombe dru avant la fin de la journée.
Je m'ennuyais ferme. J'étais montée dans la chambre que Delphine et moi partagions mais je n'arrivais pas à m'occuper. Depuis deux jours j'étais chez Benjamin. Ma mère et mon père étaient partis en voyage, depuis le temps qu'ils en rêvaient. Ma mère avait donc décidé que j'allais vivre chez sa meilleure amie, Luciana, jusqu'à leur retour. Ça m'arrangeait car Benjamin, son troisième fils, était mon meilleur ami. Christophe, le grand, habitait avec sa copine, Sonia. Ensuite venait Alexandre. À dix-sept ans il était en terminale dans mon lycée mais je ne lui parlais pas vraiment. Benjamin avait mon âge, dans mon lycée aussi, on passait notre temps ensembles. Puis enfin Delphine, la seule fille. Elle était terriblement mignonne. À onze ans elle était en avance pour son âge et était très mature. Je l'adorais.
J'essayais de dessiner mais je m'en lassais vite et mis mon crayon dans mes cheveux avant de repousser mes feuillets. Je m'allongeais sur mon lit et laissais mes pensées dériver.
« Au pire il y a toujours Alexandre. » Je ne vois pas pourquoi Benjamin m'avait dit ça, il savait que je ne lui parlais pas. Nous n’avions jamais été proches, bien que nous soyons dans le même lycée. Âgé d'un an de plus que nous, Alexandre me restait un mystère.
D'un geste de la main je chassais ces idées de mon esprit, à quoi bon chercher à le comprendre, ça ne m'aiderait pas à le connaître plus.
Je me relevais et sorti de la chambre pour aller dans le salon. Tout était étrangement calme sans les voix qui résonnaient sans cesse ici habituellement. Je m'allongeais sur le canapé et me laissais glisser dans le sommeil quand j'entendis des pas dans l'escalier...
Alexandre apparut dans la pièce. Il portait un jean et une chemise noire ouverte sur son torse. Il ne m'avait pas vu mais je fermais les yeux quand il passa près du canapé.
Il était entré dans la cuisine et je l'entendis se servir un verre d'eau. Puis il revint dans le salon et s'assit à table, derrière moi. Je me relevais doucement et le regardais. Il était couché, la tête entre les bras et je ne voyais pas son visage. Comme il ne bougeait pas, j'en ai déduit qu'il s'était endormi. Je me levais sans bruit et me rapprochais de lui jusqu'à être à son niveau. Il avait l'air paisible et je me demandais s'il rêvait. J'approchais ma main pour lui caresser les cheveux mais avant qu'elle ne le touche il ouvrit les yeux. Je reculais, surprise et gênée car je ne savais pas s'il avait vu ce que je m'apprêtais à faire.
« Approche, dit-il doucement, tu peux rester à côté de moi si tu veux, ça me dérange pas. »
Il avait refermé les yeux mais à son ton je devinais que ce n'était pas qu'une proposition, alors je m'avançais.
« Tu … tu ne veux pas une couverture ou quelque chose comme ça … demandais-je timidement. »
Il rigola doucement avant de faire non de la tête. Je ne savais pas ce que je devais faire à par rester à côté de lui et je me sentais mal à l'aise. Je m'assis à côté de lui et continuais de le regarder.
Au bout de quelques minutes sa respiration ralentit et son visage se détendit. Je rapprochais alors ma main de sa tête et je lui caressais doucement les cheveux. Il étaient doux et fins. Pendant un long moment je passais ma main dans ses cheveux tandis que lui dormait d'un sommeil profond.
Soudain la porte d'entré s'ouvrit et Luciana entra, les bras chargés de paquets. Je me relevais précipitamment, toute rouge. Luciana nous regarda un instant avant de sourire, de poser ses sacs et de s'approcher de nous. Elle embrassa doucement Alexandre sur le haut de la tête avant de se tourner vers moi.
« Laissons-le dormir encore un peu, dit-elle il en a besoin ces temps-ci, il travaille beaucoup trop. »
Elle marqua un temps d'arrêt et regarda son fils avec amour avant de repartir vers l'entrée pour finir de décharger le coffre. Je lui emboitais le pas quand un main m'agrippa le bras. Je me retournais brusquement et vis Alexandre, encore couché sur la table et les yeux entrouverts, qui me regardait. Sans savoir pourquoi je me mis à rougir. Il resta un instant sans rien dire puis doucement il dit, hésitant :
« Merci … d'être resté à côté de moi. Il fit une nouvelle pause avant de continuer. Mais tu sais, il ne faut pas croire tout ce qu'elle dit … »
Je souris.
« Ça m'a fait plaisir. Maintenant il faut que tu dormes ! »
Je m'écartais doucement. Je sentis mon bras glisser dans sa main et je fus heureuse qu'il ne puisse pas entendre mon cœur qui battait à toute allure dans ma poitrine. Après un dernier sourire je me précipitais dans l'entrée et me cognait à quelqu'un. Je murmurais un vague désolé avant de me ruer dehors. Je restais quelques instants sur le pas de la porte pour me vider l'esprit quand Benjamin se planta devant moi.
« Bah, qu'est-ce que tu as ? T'es toute rouge, ça va ? »
J'acquiesçais rapidement et courus prendre des affaires dans le coffre en évitant son regard et je rentrais, les bras chargés dans la maison. Je posais rapidement les affaires sur la table avant d'aider Luciana à tout ranger. Quand je revins dans la pièce, Alexandre n'était plus là. Je m'approchais doucement et effleurais la table là où il avait posé sa tête. Le bois était encore tiède.
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