Beaucoup plus loin dans une petite campagne aux abords de Londres. Un grand manoir appartenant à la famille Phantomhive abritait à présent leur jeune fils, Ciel, ainsi que ses domestiques. De bon matin, les rideaux s'ouvraient un à un afin de laisser entrer le soleil dans la grande demeure. C'était le majordome qui s'acharnait à cette tâche chaque jour, prenant soin de réveiller son cher maître au passage, le préparant, lui apportant son petit-déjeuner, lui donnant certains cours, lui rappelant avec soin tous ses rendez-vous... Un enfer de vie, qui n'avait pas vraiment l'air de le gêner à vrai dire.
Le grand majordome à la chevelure sombre entra dans le bureau de son maître, un plateau en argent en équilibre sur la main. Il l'abaissa à la hauteur du jeune homme :
« Un courrier urgent de la reine, monsieur.
— De la reine ? Il y avait longtemps... »
Le jeune comte prit un ouvre enveloppe et glissa la lame dans la fente du courrier. Il déplia avec grand soin la feuille blanche et la lut avec attention.
« Tiens... Une affaire de disparition...
— De disparition, monsieur ? demanda le majordome en prenant soin de préparer une tasse de thé.
— Des jeunes filles disparaissent mystérieusement aux alentours de la vieille ville de Clevedon... La dernière ayant disparu s'appelle Destiny, une jeune fille orpheline faisant partie de l'orphelinat Diall Hill... Soit, cette affaire me permettra de faire un petit tour hors de chez moi. Il y a bien longtemps que je n'ai pas mis le nez en dehors de Londres. »
Le jeune comte lança la lettre sur son bureau et se leva de sa chaise, ne prêtant même pas attention au thé que son majordome venait de préparer avec un des plus grands soins. L'homme vêtu de noir soupira lentement et accompagna son jeune maître.
Ciel Phamntomhive ordonna à ce qu'on prépare ses affaires, qu'on annule ses rendez-vous et que monsieur Tanaka, le plus vieux domestique, garde le manoir en son absence. Celui-ci ne put refuser, étant, pendant une grande majorité de son temps, déconnecté du monde en train de siroter une tasse de thé. Les affaires prêtes, le compte monta dans son fiacre et partit, accompagné de son majordome et trois de ses domestiques. Regardant par la fenêtre, et pensant à sa prochaine mission, Ciel était accoudé au rebord de l'encadrement. Un de ses domestiques chantonnait en balançant ses pieds comme l'aurait fait un enfant. Il était blond et d'une taille moyenne, les traits de son visage étaient assez efféminés et des barrettes rouges retenaient des mèches rebelles de tomber au niveau de ses yeux, il s'appelait Finnian. Une domestique était assise à côté de lui, balançant sa tête au rythme de la chansonnette, elle avait de grandes lunettes rondes, recouvrant les trois-quarts de son visage. Son large sourire lui donnait quelque peu un air niais, voire naïf, elle s'appelait May Linn. Le troisième domestique était le cuisinier, la clope au bec et la barbe mal rasée, il arborait le même sourire que la domestique bigleuse. Les cheveux blonds et en bataille, avec des lunettes d'aviateur autour du cou, il s'appelait Bardroy. Il y avait encore une personne qui accompagnait le jeune homme, son fidèle majordome. Un homme dans la trentaine, d'une prestance noble et élégante. Il avait des yeux fins et d'une couleur écarlate ressortant magnifiquement bien grâce à sa chevelure d'un noir corbeau, il s'appelait Sébastian. Ce majordome était assis en face de Ciel, les yeux perdus dans la préparation d'un nouveau thé...
« Me feriez-vous l'honneur de boire celui-ci monsieur ?
— Mmh...
— C'est un thé noir d’Assam, agrémenté d'amandes et de morceaux de pommes. Je me suis dit que pour notre voyage un thé gourmand vous ferait le plus grand bien.
— Mmh... »
Sans dire un seul « mot » de plus, le comte pris la tasse en main et ne décrocha pas son regard du paysage, qui défilait à travers l'encadrement de la fenêtre. Il soupira et déposa ses lèvres sur le rebord du récipient en porcelaine. Le majordome sourit, sûrement fier d'avoir réussi à faire boire son thé à son maître capricieux. Le fiacre parcourut des kilomètres, jusqu'à enfin arriver dans la petite ville de Clevedon. Personne n'était dehors, seul un vieux corbeau accueillit, d'un croassement lugubre, le comte. La ville avait l'air comme fantôme, les volets de toutes les maisons étaient fermés, les portes étaient verouillées à double tour... On pouvait entendre le sifflement du vent froid qui soulevait légèrement le chapeau de Ciel. Sébastian s'avança près de l'auberge de Clevedon, tapa deux coups brefs à la porte et entendit une faible voix.
« Partez... Nous ne voulons pas de visiteurs dans notre village...
— Veuillez m'excuser madame, mais je cherche un endroit pour loger mon maître, Ciel Phantomhive et...
— Un Phantomhive ? Ici ? C'est la reine qui l'envoie ? »
Le comte ne laissa pas répondre son majordome, il se mit devant lui et prit la parole :
« Je peux seulement dire que je suis ici en mission, je suis fatigué et j'aimerais me reposer dans un lit ! Êtes-vous en mesure de m'offrir un toit pour la nuit ?
— Oui, oui... »
La voix se tut pendant quelques instants et on put entendre un bruit de loquet. Elle était en train de déverrouiller la porte. La poignée grinça sous une pression et l'auberge s'ouvrit enfin au comte. Il rentra à l'intérieur, accompagné de son majordome. |