Chapitre 17 :
La pensine 2
Vous l'avez peut-être remarqué, j'ai changé de façon d'écrire : J'écris en POV et au présent. C'est comme ça que j'écris pour mon autre fiction et j'arrive plus à écrire avec un narrateur et les temps classiques du récit (imparfait/passé simple).
J'espère que ça ne dérange personne. :)
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Merci pour toutes vos suggestions sur le Gryffondor coupable. La plupart d'entre vous ont suggéré :
Georges, Dennis, Hermione, Ginny, Molly W.
Réellement, ça aurait pu être n'importe qui, car tout le monde a perdu quelqu'un pendant la Guerre – sauf Hermione en fait, mais elle a été suggérée car elle gère en potions et en sortilèges-. Mais ça devait forcément être une personne relativement proche d'Harry – vu qu'elle a été invitée au Nouvel An – qui avait été à Poudlard ou qui y était encore.
En effet il y avait peu de chances que ce soit quelqu'un de la famille de Ginny car le plan des vestiaires de Quidditch est vraiment sadique.
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POV Ron
Toujours le 21 Mai
- C'est quoi ça ?
Il regarde le cognard et je retiens mon souffle. Je le fixe tandis que ses sourcils se froncent. Mon cœur manque un battement. C'est mon frère. Il ne peut pas faire ça. Pas vrai ?
- Où as-tu trouvé ça ?
- Dans la chambre de Fred.
- Qu'est-ce que tu faisais dans sa chambre ?
Sa voix tremble un peu et je recule.
- Elle était ouverte. J'avais envie de... Je ne sais pas.
Il tend la main pour prendre le cognard mais je le serre comme si ma vie en dépendait.
- Fred aimait bien voler des trucs à Poudlard. Il a sûrement subtilisé ce cognard quand nous avons décidé de partir, à l'époque d'Ombrage. Mais c'est étrange, je ne l'ai jamais vu, et pourtant j'ai nettoyé sa chambre de nombreuses fois après sa...
Il ferme les yeux et reprend sa respiration.
- Après sa mort.
Je dis d'une voix blanche :
- Un cognard a agressé Harry en Novembre. Un cognard sûrement ensorcelé... qui a disparu.
Il me jette un regard à la fois surpris et déçu.
- Tu penses que je suis derrière tout ça ? Fait-il.
- Avoue que la coïncidence est étrange !
- Pourquoi est-ce que je voudrais faire du mal à Harry ? Il est comme mon frère !
Il marque un point.
Je baisse les yeux vers le cognard et pense à ce foutu jour où je n'ai pas été capable de me souvenir du sort qui pourrait empêcher Harry de se fracasser la tête contre le sol. Blaise avait été plus efficace avec Malfoy. Même si au final ils ont tous les deux eu une perte de mémoire. Malfoy...
- Non, tu as raison. Tu ne ferais pas de mal à Harry.
Il acquiesce et ma voix tremble un peu lorsque je dis :
- Mais faire du mal à Malfoy ?
Son regard plonge dans le mien et ce que j'y lis me fait peur. Je tourne les talons, le cognard serré contre mon torse.
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22 Mai - Poudlard
- Nous avons enfin établi une liste de personnes qui pourraient vouloir du mal à Monsieur Potter et qui ont la puissance magique nécessaire pour lancer un sort d'Oubliette, Monsieur Weasley, me dit O'Connor en me tendant un parchemin.
Je lui jette un regard noir, histoire de lui dire "C'est pas trop tôt" mais il me fait un petit sourire. Le polynectar fait encore effet ; il a l'apparence de son neveu de dix-sept ans qui étudie à Salem, et ça m'amuse de le regarder se passer la main sur le menton, l'air à chaque fois étonné de ne sentir aucun poil sous ses doigts.
- Ça n'a pas franchement été facile, si vous voulez tout savoir. Les Serpentards ne sont pas des grands bavards. Et je déteste le polynectar... Enfin, vous savez de quoi je parle – j'ai entendu parler de vos exploits en seconde année-. Bref, j'ai dû interroger tous les professeurs, notamment votre mère.
- Oubliez ça, je lui dis. Il faut établir une liste des élèves qui pourraient avoir une dent contre Draco Malfoy. Je pense que c'est à lui qu'on a essayé de nuire avec ce cognard.
Je ne lui ai pas encore parlé de Georges. Je veux en discuter avec lui avant. Sauf que depuis hier, je ne trouve pas le courage d'y retourner.
Le sourire du type s'agrandit et il me tend un autre parchemin. J'écarquille les yeux et il toussote.
- Maintenant, inspectons cette liste ensembles, voulez-vous ?
J'hoche la tête et on s'assoit côte à côte.
C'est long et fastidieux. Je ne connais pas la plupart des élèves : après tout, pratiquement tout le monde a perdu un proche pendant la Guerre, et je ne compte plus les remarques acerbes, les insultes, les regards noirs que Malfoy a dû essuyer depuis son retour à Poudlard.
Je sursaute lorsque mes yeux se posent sur un nom bien connu.
- Vous connaissez cet élève ?
- Dennis est dans ma maison. Il faisait partie de l'Armée de Dumbledore.
- Il a perdu son frère pendant la Guerre.
- Je sais... Colin. Il était très... fan de Harry.
- Oui, et d'après son entourage, Monsieur Crivey est décrit comme instable psychologiquement depuis la mort de son grand frère. Il est suivit par le Docteur Mur, à Pré-au-lard.
Je fronce les sourcils et dis d'un ton catégorique :
- Il a trois ans de moins que moi. Il ne peut pas produire un sort d'Oubliette.
- À l'âge de seize ans, Monsieur Potter n'avait-il pas affronté le Seigneur des Ténèbres de nombreuses fois ? Me répond O'Connor en haussant un sourcil. De plus, si les séquelles sont si... détectables et visibles sur Monsieur Potter et Monsieur Malfoy, c'est bien que le sort a mal fonctionné.
- Dennis est un gamin...
- Malheureux.
- Faible...
- Désespéré.
- Il ne ferait jamais de mal à Harry !
- Même si ça lui permettait d'atteindre Monsieur Malfoy ?
Je lui jette un regard dépité et il pose sa main sur mon épaule. Il faut vraiment que je parle à mon frère.
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23 Mai, Chemin de Traverse
- Je suis désolé.
Georges me jette un regard noir et je m'assois sur ma chaise habituelle.
- Je ne comprends pas comment tu as pu penser que je serai capable de faire une chose pareille.
- Avoue que les preuves étaient contre toi.
- Je suis ton frère, du con !
- Tu étais... détruit après sa mort.
Il ferme brièvement les yeux.
- Et c'est une raison pour penser que je pourrais blesser Harry ?
- Si ça te permettait d'atteindre Malfoy, pourquoi pas ?
- T'es malade ou quoi ? C'est Harry, Ron ! J'ai risqué ma vie pour le protéger !
- Tu étais tout le temps à Poudlard ! Tu étais là le jour du Bal de Noël, ainsi le soir de mon anniversaire, et le jour de l'entraînement d'Harry, et le soir du Nouvel An !
- Et alors ! Je vendais mes produits ! Et puis je n'allais pas manquer une petite sauterie à Poudlard, quand même... Et ne me dis pas que je suis le seul qui a perdu quelqu'un pendant la Guerre ! Attends... Mais qu'est-ce que tu racontes ? Je n'étais pas là le jour du Bal de Noël !
- Hein ? Bien sûr que si, tu étais là ce jour là. Je t'ai vu courir dans un couloir, d'ailleurs...
- Quoi ? Mais non. Attends...
Il se fige soudain.
- Il faut que j'aille voir quelqu'un, fait-il.
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POV Draco
Même jour, Poudlard
Je ne savais pas Blaise si bavard. A croire qu'il traîne trop avec Weasley. Bien sûr, il a toujours été le plus expressif de nous tous, mais là, il décide de tout déballer : ce qu'il sait, ce qu'il pense, ce qu'il croit savoir au sujet de Potter et moi, notre amnésie, l'enquête.
À la fin, je lui lance un regard que je veux blasé, mais Blaise est mon meilleur ami et il se lève soudainement :
- Par Salazar ! Tu te souviens, n'est-ce pas ?
Je trouve ça amusant qu'il ait pu fermer les yeux sur Potter et moi pendant des mois – on était loin d'être discrets, on se baladait dans Londres- ainsi que sur mon amnésie plus qu'étrange – deux personnes perdent la même quantité de mémoire juste en se cognant, c'est franchement étrange non ? - mais que maintenant qu'il sait la vérité, il fasse preuve d'autant de justesse dans ses intuitions.
- Draco, réponds moi. Tu as retrouvé la mémoire, n'est-ce pas ?
J'ouvre lentement les yeux et affronte son regard.
- Quand bien même, qu'est-ce que ça changerait ? Je demande d'une voix blanche.
- Ça change tout ! Tu te souviens, toi ! Tu peux te battre pour le récupérer !
Ça fait 22 heures que je n'ai pas pris ma potion et je sens que je suis en train de redevenir... comme avant. Je déteste ce sentiment, je déteste que mes lèvres tremblent et que mon cœur s'affole.
- Ecoute moi bien, Blaise. Je ne me battrais plus jamais. Je refuse de souffrir de nouveau. Tu sais, j'ai déjà essayé de le récupérer. Deux fois. Et les deux fois il m'a déçu.
Il me fixe, étonné. Je m'autorise un sourire amer. Et oui, je me suis trouvé le courage d'un Gryffondor pour toi, Potter.
- Je ne souffrirai plus jamais, et surtout pas pour Potter.
Mon ton est sans appel et Blaise hoche la tête, lentement. J'aimerais lui dire quelque chose pour le remercier – parce qu'il s'est décarcassé pour moi, même si je sais qu'il ne porte pas Potter dans son coeur-. J'aimerais lui dire qu'il est mon meilleur ami, que je sais ce qu'il a fait pour moi et que je lui en suis reconnaissant. J'aimerais lui dire que je l'aime depuis qu'on est enfants et qu'il pourra toujours compter sur moi. Je ne lui ai jamais dit tout ça, même si je pense qu'il le sait, mais ça me semble important de le dire maintenant.
Mais les sons n'arrivent pas à franchir mes lèvres. Tout courage m'a quitté, et je pense que ce n'est même pas à cause de ma potion.
J'ai eu envie de me battre, c'est vrai, mais quand je me vois marcher jusqu'aux vestiaires de Quidditch pour lui parler, j'ai l'impression que c'est une autre personne qui avait cette volonté dans le coeur. Je ne me savais pas courageux, mais pourtant je l'ai été, et ce à deux reprise.
Potter m'a donné envie d'être une personne meilleure, mais Potter est mort pour moi, à présent.
Potter n'en vaut plus la peine.
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POV Harry
24 Mai, Poudlard
- Non.
Ses lèvres tremblent violemment mais son regard est déterminé.
- Ginny...
- Non, Harry. Je ne peux pas t'épouser. Je ne peux pas.
Sa voix se brise lorsqu'elle prononce cette dernière phrase et je me relève, la bague toujours dans les mains. Je ne me suis jamais senti aussi con de ma vie.
- Mais tu es enceinte...
- Et alors ?
- Tu ne m'aimes plus ?
- L'important n'est pas de savoir si moi, je t'aime, mais si toi, tu m'aimes.
Elle me jette un regard empli de pitié et je me sens fondre – de honte-.
- Ne pense plus jamais ça. Tu es l'homme de ma vie, Harry. Je l'ai toujours pensé et je le pense encore. Le soucis, tu vois, c'est que moi, je ne suis pas l'amour de ta vie. Et je refuse de revivre ce que j'ai vécu la dernière fois – j'en suis sortie vivante, mais je crois que je pourrais pas m'en sortir une fois de plus-. C'est juste trop pour moi.
- De quoi tu parles ? Je demande.
- Je refuse que tu me quittes une nouvelle fois, sans raison. Je suis contente que tu acceptes ton rôle de père avec autant d'enthousiasme. Mais je refuse de t'aimer à sens unique. Je l'ai fait toute cette année et regarde ce que ça a fait de moi...
- Mais... Le bébé ?
- Je ne dis pas que ce sera facile, ce sera même franchement invivable parfois. On peut faire garde partagée, je pourrais retourner vivre chez mes parents et toi venir quand tu veux. Mais c'est ma vie, Harry, je n'en ai qu'une et je ne peux pas la gâcher.
Je me sens à la fois perdu et soulagé. Je sais que c'était la bonne chose à faire. Au fond de moi, j'avais envie qu'elle accepte. Faire partie d'une famille. La seule que je n'ai jamais connue.
Mais j'avais aussi envie qu'elle refuse. J'avais envie qu'elle refuse parce que quand je ferme les yeux, je revois le visage souriant de Gabriel - cet inconnu qui me connaît si bien-, qui me dit "Il détestait que je l'appelle Dray. On se voyait au moins trois fois par semaine."
Je ne sais pas vraiment pourquoi, mais quand je me suis agenouillé devant elle, j'ai entendu Ron me dire "Fais pas ça, vieux."
- Je regretterai sûrement cette décision dans quelques mois, sûrement même dans quelques heures, quand tu me manqueras tellement que j'aurais envie de m'arracher le cœur, mais si tu ne peux pas me donner ton amour, accorde-moi ton respect. Ne me mens pas. Ne fais pas semblant.
- Ginny...
- Maintenant, laisse-moi partir avant que mon courage ne m'abandonne.
- Attends, Gin'.
- Je refuse de souffrir de nouveau, Harry. Je ne peux pas.
Ah, bon. On est deux, dans ce cas.
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POV Blaise
Nous passons les épreuves de Métamorphose écrites le 26 Mai. Le lendemain, nous passons un par un pour Métamorphoses appliqués. Le 28, c'est sortilèges écrits et le 29, sortilèges appliqués. Le 30, nous passons les écrits de potion, et le 31 la pratique. Défense contre les forces du mal le 1 er et le 2 Juin. Draco a ses épreuves de Runes Anciennes avec Granger le 3 Juin.
Je pense que je m'en suis bien sorti, mais je veux faire du droit magique et l'Ecole de Droit est très sélective. J'ai intérêt à avoir au moins Efforts Exceptionnels partout, car on a le droit de s'inscrire aux Concours d'Entrée seulement si l'on a un bon dossier de scolarité.
En plus de ça, ces fameux Concours d'Entrée sont en Août et je n'ai pas encore commencé à réviser – je ne peux pas être partout-.
Draco a étudié comme un fou depuis qu'il est sorti de St Mangouste, j'ai dû lui donner quatre potions d'énergie pour pas qu'il s'endorme sur son parchemin – potions fournies par Slughorn, je crois que je ne reprendrai plus jamais le risque de lui faire boire quoi que ce soit que j'aurais fait mijoter-.
Nous attendons tous les résultats avec angoisse, surtout Granger, qui s'est arraché cinq ou six touffes de cheveux depuis la fin des épreuves. Cette fille me fait un peu pitié, elle a une tête d'inferi depuis le Nouvel An, à croire qu'elle ne dort littéralement jamais.
Elle ne prend même plus ses repas dans la Grande Salle : elle descend aux cuisine chercher un sandwich, qu'elle mange en allant à la Bibliothèque, où elle passe sa vie. J'ai entendu dire qu'elle allait passer le Concours d'Entrée à l'Ecole de Droit, je crois que je devrais vraiment commencer à m'inquiéter.
J'ai parlé de son état à Ronald qui a haussé les épaules, comme pour dire "J'ai déjà Harry à gérer, je ne peux pas être partout", et je le comprends, car tout le monde sait qu'entre lui et ses ASPICs, elle a préféré ses ASPICs. En fait elle a un petit côté Serpentard, parce que c'est typiquement le genre de décision que Théodore aurait prise.
Potter – ce trou du cul – a fait sa demande en Mariage et la fille Weasley a refusé. Elle est très nettement remontée dans mon estime. Je ne comprends même pas comment Potter a pu penser qu'elle dirait oui. Tout Poudlard sait qu'il est gay et qu'il l'a quittée comme une vieille chaussette. Et puis il ne l'aime pas, ça crève les yeux.
Même si je ne savais pas que ce connard est amoureux de Draco – il a une drôle façon de le lui montrer, d'ailleurs-, je saurais qu'il n'est pas amoureux d'elle. Je veux dire, Rusard et Miss Teigne est un couple qui me fait plus rêver qu'Harry Potter et Ginny Weasley !
Ronald a beau le défendre, je trouve que ce type est un vrai abruti. J'imagine que je dis ça parce qu'il a fait de la peine à Draco, mais quand même.
Depuis qu'il est revenu de St Mangouste - alors ça me fait bien rire que Monsieur ait eu besoin d'aller à St Mangouste après avoir compris qu'il avait été en couple avec Draco mais pas après avoir tué le Seigneur des Ténèbres, à croire que l'amour est plus traumatisant que la mort-, il a passé son temps à réviser à la Bibliothèque avec Granger – qui n'a toujours pas trouvé utile de s'excuser auprès de Ronald pour sa conduite ces cinq derniers mois-.
Plus je passe de temps avec Ronald, plus je me dis qu'il est bien sympa d'avoir accordé son attention à ces deux là.
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POV Ron
12 Juin
" J'ai attendu que tu passes tes ASPICs, mais maintenant que c'est fait, il faut que tu viennes à la Boutique de Pré-au-lard. Je pense qu'il faut que tu t'entretiennes avec Lee.
Georges"
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O'Connor et moi avions laissé l'enquête en suspens du temps que je passe mes ASPICs. Mon frère m'attend devant la Boutique, il m'adresse un petit signe de la main lorsqu'il me voit. Je perçois sa nervosité même à plusieurs mètres de distance.
- Ecoute, tu m'as bien dit que quelqu'un avait vendu une potion de rage au lieu d'une potion de désir à Zabini – il fait une grimace en prononçant son nom, mais je ne relève pas-.
- Oui, je réponds simplement.
- Les potions de rage sont difficiles à faire, tu le sais n'est-ce pas ? Toutes les potions qui contrôlent les émotions humaines sont extrêmement complexes.
Je fronce les sourcils.
- Hermione m'en a parlé, je crois, oui.
- Et lancer un oubliette requiert une certaine puissance magique. Ton pote Crivey n'aurait vraiment pas pu faire ça. Tu te souviens quand Harry a lancé un Doloris à Lestrange ? Ça aurait eu le même effet.
- O'Connor continue de le soupçonner, et je le comprends car il est allé parler au Docteur Mur – qui n'a pas pu lui dire grand chose à cause du serment inviolable- mais apparemment Dennis est vraiment au plus mal depuis la mort de son frère. Je le croise rarement, en fait il ne sort pas beaucoup de son dortoir. Mais il a vraiment une sale gueule.
- On a tous une sale gueule, répond Georges en soupirant, et c'est vrai qu'il a raison. Harry ressemble à un fantôme, Hermione pourrait passer le concours de Miss Inferi et je ne parle même pas de Malfoy, qui est presque transparent.
- Oui mais O'Connor a bien dit que l'Oubliette avait été mal lancé, non ? Je fais remarquer.
- C'est pas forcément à cause de la puissance magique. Peut-être que c'était à cause de la situation, tu vois ? Imagine que la personne qui l'a lancé était pressée... Qu'elle était entourée de gens... Comme au Nouvel An.
- Dennis était là au Nouvel An. Je l'ai vu parler avec Padma.
Georges secoue la tête.
- Ce n'est pas lui. Il faut que tu saches, Ron... Tu n'es pas le seul à être très ami avec un Major de Promo.
- Hein ?
Quel est le rapport ?
- Il faisait toujours le pitre, mais il a eu un Optimal aux buses, en potion. Et en sortilège, aussi. Et si moi j'avais toujours les idées, c'est Fred et lui qui faisaient les potions, ensorcelaient les objets, faisaient les essais.
- De qui tu parles ?
Il me jette un regard agacé.
- Désolé vieux, je suis pas légimens moi !
- Essaie de suivre un peu, Ronnie. Je parle de Lee, bien sûr.
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Il y a dix minutes j'aurais juré que mon frère se trompait mais le regard absent que pose Lee sur moi me glace le sang. Je ne l'avais pas vu depuis des mois, car si Lee est responsable de la Boutique de Pré-au-lard, c'est Angelina qui était en caisse.
Il se lève lentement et je le fixe. On dirait un fou, franchement il fait peur.
Je retire ce que j'ai dis tout à l'heure, Malfoy a l'air de revenir de deux semaines aux Baléares à côté de ce type.
- Lee, qu'est-ce qu'il se passe, ici ? Murmure Georges en fixant, la chambre de son meilleur ami.
Celle-ci est envie de photographies de mon frère. On dirait le repère d'un psychopathe.
- Tu l'as oublié, répond juste Lee d'une voix que je ne lui connais pas.
- Quoi ?
- Tu l'as oublié. Je suis allé dans sa chambre, quand je suis venu te voir à la Boutique, l'autre jour, et il y avait de la poussière partout. Tu ne fais plus le ménage. Tu l'as oublié.
- Oh Merlin... C'est toi, n'est-ce pas ?
Lee fait une tête bizarre, et lorsqu'il reprend la parole il crie presque :
- Je l'ai fais pour lui, mais pour toi aussi !
- T'es malade ou quoi ? T'as failli tuer Harry avec tes conneries !
- Je l'ai sauvé ! Il s'était perdu... Tu te rends compte qu'il sortait avec Malfoy ?
Il crache son nom comme Malfoy a tant de fois craché le mien. La ressemblance est troublante.
Il croise mon regard et j'y lis exactement la même lueur que dans les yeux de Bellatrix Lestrange.
- Je vais chercher O'Connor, je fais d'une voix tremblante.
J'hésite à laisser mon frère seul avec ce type mais Georges hoche la tête et s'agenouille à côté de son meilleur ami, qui s'est mis la tête entre les mains.
Sa magie crépite autour de lui, je comprends mieux ce que voulait dire Georges à propos de l'Oubliette.
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Lee pleure bruyamment et ça me met mal à l'aise. J'aurais préféré qu'il nous lance des sorts. Ça, je sais gérer. Les pleurs, en revanche... Georges le lâche tandis qu'O'Connor l'embarque, ils vont l'emmener directement à St Mangouste, il n'est pas en état d'être interrogé.
Mon frère se place à côté de moi et je ferme les yeux. La seule chose qui me traverse l'esprit est une pensée égoïste, mais je n'arrive même pas à en avoir honte.
Heureusement que ce n'est pas Georges qui a fait ça.
Heureusement que Georges a décidé d'aller de l'avant.
N'importe qui, mais pas Georges.
Pas mon frère.
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Draco
16 Juin
- Ils l'ont attrapé. Il est parti pour St Mangouste. A l'étage des maladies mentales.
- L'étage préféré de la Belette-Femelle, non ? Je ricane.
- Draco... Soupire Blaise.
- Te fais pas de bile, Blaise. J'étais au courant.
- Et c'est tout ce que ça te fait ?!
Blaise fronce les sourcils et j'hausse les épaules.
- Ça ne changera rien, n'est-ce pas ? Harry et moi, on a été coupés en plein élan. Les deux fois - trois, si j'en crois le nombre d'Oubliettes que j'ai sûrement reçus-. Plus rien ne peut changer ça. Il peut bien mourir à St Mangouste, pour ce que ça change.
Il me fixe, incrédule, mais je lui jette un regard mauvais qui le fait capituler.
- D'accord... Au fait...
Son ton n'annonce rien de bon. Il me parle toujours comme ça quand il s'apprête à me dire quelque chose qui va m'énerver.
- La presse s'est emparée de l'histoire. Je ne sais pas qui a filtré. Ça m'étonnerait que ce soit Ron... Je pense pas que ce soit l'Auror non plus. Les murs ont des oreilles, ici.
Il me tend un magazine - la Gazette, fidèle au poste-.
Une photographie d'Harry et moi volant côte à côte durant un match de Quidditch fait la couverture.
"L'amour oublié : l'histoire tragique d'Harry Potter et Draco Malfoy."
Oh bordel. Le titre me donne envie de vomir. Qui a écrit ce torchon ?
- C'est pas Skeeter, fait Blaise - qui peut apparemment lire dans mes pensées-. C'est une fille que je ne connais pas.
Je fixe le nom quelques secondes. Dana Vlenbrow.
- Ce doit être une slave, avec un nom pareil, suggère mon meilleur ami en m'adressant un sourire désolé.
J'enrage intérieurement. Comme si ça ne suffisait pas que nos amis soient au courant avant nous, maintenant l'Angleterre sait que j'ai aimé Harry - que j'aime Harry - et qu'il ne se souvient pas de moi. Super.
J'ai envie d'étrangler cette pétasse de Dana - c'est vraiment un prénom ça ?-.
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Remise des Diplômes, 18 Juin
Granger pleure à chaudes larmes et je retiens un reniflement dédaigneux. Cette fille se met vraiment dans tous ses états pour pas grand chose ; tout le monde savait qu'elle obtiendrait Optimal à toutes les matières, de toute façon. Les gens la félicitent tandis qu'elle descend lentement de l'estrade.
McGonagall m'appelle et je m'avance sur l'estrade. Je sens les regards sur moi, comme toujours depuis que la vérité a éclaté. Elle me complimente pour mes notes et me tend le parchemin. Je suis de nouveau deuxième derrière Granger mais ce n'est pas grave. Je n'ai qu'une envie : quitter Poudlard et la vision de Potter le plus vite possible.
Je descends rapidement et Théo est appelé. Ça m'étonne qu'il ait eu de moins bonnes notes que moi mais j'imagine qu'il a excellé en théorie et moins en pratique. Granger et moi avons eu l'occasion de lancer des sorts... pendant la Guerre. Théo, lui, est resté à Poudlard pendant ce temps. J'imagine que c'est ça qui a fait la différence.
Je n'écoute pas la suite de la cérémonie, et personne ne dit quoi que ce soit lorsque je quitte le groupe de Septième et Huitième années pour aller m'asseoir sous l'arbre à côté du lac.
J'allume une cigarette et regarde le soleil se coucher. C'est ma dernière nuit à Poudlard, demain nous serons tous des adultes. Mais nous sommes déjà des adultes, et ce depuis longtemps.
Un craquement me fait me retourner et mon regard plonge dans celui de Potter.
- Qu'est-ce que tu veux, Potter ?
La dernière fois que nous nous sommes parlé, je l'ai jeté hors de ma chambre d'hôpital, lui et sa pute rousse.
- J'ai parlé avec Gabriel. Il m'a dit la vérité... à propos de... Toi et moi.
Oui, puis il y a aussi la Presse qui a parlé au monde entier de "lui et moi", mais je préfère éviter de parler de ça : j'ai vu sa réaction quand il a eu le journal dans les mains, je crois que je préfère encore manger des crottes de doxy qu'évoquer le sujet.
Il sort quelque chose de sa poche et me le tend. C'est une photographie de nous trois le jour de son anniversaire, au restaurant. Après l'échec du clafoutis. Harry fait un grand sourire, sa main est posée sur la mienne, j'ai le menton en l'air et l'air fier, et Gabriel est accroché à son verre de vin – on ne se refait pas-.
La photographie ne bouge pas, bien sûr, mais nous n'avons pas besoin de bouger pour que quiconque la regarde perçoive la complicité qui nous lie. On transpire le bonheur.
L'émotion me prend à la gorge et je m'autorise un petite sourire tendre. Je ne savais pas que cet abruti de moldu garderait tous ses putain de polaroid, comme il les appelait.
C'était l'an dernier mais pourtant j'ai l'impression qu'un autre que moi a vécu cette vie.
Moi, je n'ai pas le droit de vivre une vie aussi belle, aussi facile, aussi simple.
Je déteste Gabriel de m'avoir fait croire que je pourrais être heureux, un jour.
- Je me répète, mais que veux-tu, Potter ?
- Toi, tu te souviens.
Je me tourne vivement et demande d'une voix tremblante :
- Tu vas l'épouser ?
Je me déteste de retenir mon souffle tandis que j'attends sa réponse.
- Elle a dit non, me répond t-il en regardant ses chaussures.
Elle a dit non. Alors il lui a quand même fait sa demande. Même si je sais que Gabriel lui a dit la vérité à notre sujet. Même si je sais qu'il est amoureux de moi et qu'il le sait -il l'a dit à Weasley qui l'a dit à Blaise qui me l'a dit-. Ouais, ça fait beaucoup d'intermédiaires mais je le savais, au fond. Sinon j'aurais pas trouvé le courage d'aller lui parler, dans les vestiaires.
Il me jette un regard bizarre et je me fige.
Bordel, qui est ce connard et qu'a t-il fait à Harry ?
Je ferme les yeux et quand je les ouvre, je dis d'une voix sans appel :
- Pars.
Je ne sais pas à quoi je m'attendais. À croire qu'au fond de moi, je suis un putain de poufsouffle. Je pensais qu'en apprenant la vérité, en voyant Gabriel, Harry aurait un genre d'électrochoc, une révélation.
Mais le regard qu'il pose sur moi est le même que ces derniers mois. Il ne me voit pas comme moi je le vois. Il ressent le manque, je le sais. Je me souviens de son attitude ces derniers mois. Mais il ne me connaît pas. Il ne me connaît pas comme je le connais, lui.
Harry ne se souvient pas.
- Quoi ? Non, mais...
- Pars, Potter, s'il te plaît.
- Ecoute... C'est juste que c'est difficile à accepter, fait-il d'une voix un peu suppliante.
- Quoi ? Tu penses que Gab' t'a menti ?
- Non, mais...
- Tu penses que t'as pas pu tomber amoureux d'un Mangemort ? C'est ça, Potter ? Ou c'est juste parce que c'est moi ?
- Arrête ! Je sais que je t'ai aimé, que je t'aime, je le sens au fond de moi ! J'ai ressenti le manque de toi pendant des mois ! Je me suis traîné en te cherchant partout alors que tu étais juste là, sous le bout de mon nez ! C'est juste que...
- Quoi, Potter ? Quoi ? Pourquoi tu l'as demandé en mariage, si t'es soi-disant amoureux de moi ?
- C'est trop compliqué ! C'est juste trop compliqué !
- Ta gueule ! Je m'exclame.
- Non ! Je ne supporte pas cette situation ! Tu ne peux pas te souvenir, alors que moi, il ne me reste rien ! J'ai...
Sa voix se brise et il dit dans un souffle :
- J'ai l'impression qu'on m'a volé ma vie.
Moi j'ai l'impression qu'on m'a volé mon amour, alors bienvenue au club.
- Ce n'est pas parce que c'est toi. J'ai mis la Guerre derrière moi depuis longtemps – je crois-. Ce qui me rend fou, c'est de savoir que tu me connais si intimement, alors que moi...
Toi... Tu ne te te souviens de rien, pas vrai Potter ? Toi... Tu m'as brisé le cœur.
- J'ai envie de recommencer à zéro, de t'emmener dans un café et de te payer un thé, ou un chocolat chaud, bordel, je sais pas. J'ai envie de vivre une histoire normale. J'ai envie d'être comme tout le monde.
Je m'adoucis considérablement mais ce qu'il me dit ensuite me remet en colère :
- Avec toutes les choses qui se sont mises entre nous, comment peux-tu encore y croire ?
- Détrompe-toi, Potter, je n'y crois plus ! Je ne crois plus en toi, je ne crois plus en nous ! Maintenant dégage avant que je ne gâche la Cérémonie en te lançant un impardonnable !
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J'avais peur de croiser Potter après la remise des diplômes, mais le destin n'est finalement pas si sadique. Le fait que j'évite tous les endroits où je pourrais le voir y est peut-être aussi pour quelque chose.
Durant l'été, Weasley et Blaise passent une bonne partie de leur temps ensembles, nous obligeant, Pansy, Théo, et moi, à être poli avec lui. Je sais que Pansy les rejoint souvent pour aller boire une bière au beurre ou manger un glace, sûrement parce qu'elle espère y voir Londubat, mais moi je ne peux pas prendre le risque de le croiser.
Même Théo s'est mis à apprécier les Gryffondors, bien que ce soit à petite dose ; il n'a jamais su être sociable plus de deux heures d'affilée, de toute façon. Je crois qu'il aime bien Granger, en tout cas il parle tout le temps d'elle, des livres qu'ils s'échangent.
Moi je ne comprends pas comment Weasley peut tolérer sa présence après ce qu'elle lui a fait, à croire que les Gryffondors sont vraiment d'une fidélité à toute épreuve – mais bon, elle lui a pardonné le fait d'être roux et pauvre, il peut lui pardonner le fait d'être une connasse ambitieuse-.
Plusieurs fois depuis mon réveil, j'ai voulu me jeter un Oubliette pour ne plus penser à ce connard, mais Théodore m'a dit que si je subissais une nouvelle fois ce putain de sort, je risquais de devenir fou.
Je me suis battu pour survivre durant la Guerre, ce serait dommage d'être hors jeu maintenant.
J'ai survécu au Maître. Je peux bien survivre à Potter.
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Gabriel revient en Angleterre le 5 Juillet en Angleterre. Je le sais car c'est Weasley qui le dit à Blaise.
Dès que j'ai pris connaissance de ce fait, je me suis imaginé divers scénarios dans lesquels il essaie de nous remettre ensembles, Harry et moi.
Après tout c'est à cause de lui que l'on s'est retrouvés ensembles la première fois.
Dans mon cerveau torturé, il veut me joindre et me donne rendez-vous dans le restaurant où nous avions l'habitude d'aller, et finalement quand j'arrive, c'est Potter qui est assis à sa place.
Ou il m'envoie une photographie de Potter en compagnie d'un autre homme – un connard – accompagnée d'un parchemin "Bouge toi Draco" – le connaissant, il aurait écrit "Bouge toi Dray" mais mon imaginaire m'épargne le surnom horrible- pour me faire réagir.
Mais il ne fait rien de tout ça et je n'ai de nouvelles de lui que par l'intermédiaire de Weasley.
Je crois que c'est mieux comme ça ; non seulement Potter m'a brisé le cœur, mais en plus, nous avions appris à être un couple, Harry et moi. Un couple sans lui. Car si au début nos sorties se résumaient à traîner avec Gabriel dans le Londres Moldu, nous avons fini par retourner à Poudlard et nous créer notre univers : les rendez-vous dans la salle sur demande, les balades sous la cape d'invisibilité.
On avait presque réussi à passer le cap : j'allais parler à mon père de mon mariage, il allait dire la vérité à ses amis. Pour d'autres, ça peut sembler ridicule, mais Harry et moi avons tellement de choses qui nous séparent... Rien que le fait que mon Père ait essayé de le trucider plusieurs fois aurait fait divorcer la plupart des couples.
Parce que tant que nous étions dans le Londres Moldu avec Gabriel, à prétendre que nous étions des étudiants comme les autres, nous pouvions apprendre à nous apprécier pour ce que nous étions vraiment ; j'ai appris à connaître un Harry timide, mais féroce quand il veut quelque chose, pénible, bougon au réveil, de mauvaise foi.
Mais à Poudlard, dans notre Monde, il y a le poids des convenances, de nos amis, de notre passé, et pourtant, nous étions en train de le surmonter.
Alors c'est mieux que cette fois-ci, il ne s'en mêle pas.
Parce que si Harry ne se souvient pas de tout ce que nous avons traversé et surmonté, moi je m'en souviens.
En vérité, ça m'aurait rendu triste de me dire qu'Harry et moi, nous ne sommes pas capables de nous retrouver sans son aide – et puis c'est faux, on s'est déjà retrouvés, au Nouvel An, et il n'était pas là-.
Et puis nous ne sommes plus du tout les mêmes personnes maintenant – en tout cas, moi, je suis incapable de retourner en arrière-.
J'apprends par Weasley que Potter refuse de voir Gabriel – et ça, ça me fait de la peine pour lui, parce qu'il n'y est pour rien dans tout ça- et qu'il passe la plupart de son temps avec Granger. Ça, ça m'étonne vraiment, parce qu'après tout ce que Weasley a fait pour lui – je veux dire, il a remué ciel et terre pour obtenir l'adresse de Gabriel, il a coopéré avec les Aurors alors qu'il passait ses ASPICs, il a démasqué les coupables – il pourrait quand même prendre son parti dans leur rupture.
Mais en même temps je ne reconnais plus le Harry que j'ai aimé dans cet homme qui se vautre allègrement dans le déni, allant jusqu'à demander Ginny Weasley en mariage tout en sachant pertinemment qu'une part de lui est amoureuse de moi.
Le Harry que j'aimais se serait battu pour nous, pour moi. Mais le Harry que j'aimais est mort en Novembre.
Il ne reviendra pas et je commence à m'y faire.
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La fin de l'été arrive et je rentre à l'Ecole des Guérisseurs. Blaise me propose de prendre un appartement ensembles, mais je ne supporte pas l'idée de laisser ma mère seule au Manoir – encore- alors je refuse.
Je fais les aller-retour en transplanant mais ça ne me fatigue pas autant que je le croyais. Et puis ça m'évite d'être harcelé par des journalistes en manque de potins sur Potter – on ne va pas se mentir, personne n'ose approcher le Manoir, ma mère fait peur quand elle est énervée-.
J'évite toujours soigneusement les rassemblements où je pourrais voir Potter, ou même ses amis. Ce qui fait que je suis souvent seul chez moi, et que je passe la plupart de mon temps à étudier. On dirait Granger.
Mais de toute façon je ne peux pas me permettre un seul faux pas ; si je n'obtiens pas un Optimal à toutes les matières, je suis recalé. On ne peut pas faire d'erreur quand on est Médicomage ; une seule erreur de diagnostique et le patient peur mourir.
Je vois beaucoup Pansy, Théo et Blaise, bien sûr, mais toujours seuls, toujours chez eux ou dans des endroits discrets. Moi qui aimais tant m'afficher en société avant la Guerre, j'ai perdu de ma superbe.
Étrangement, il me semble que nous sommes encore plus proches qu'avant. Le fait qu'ils soient encore amis avec moi après avoir appris que je leur ai menti pendant des mois et qu'en plus je sortais avec Potter – qui a envoyé nos pères manger les mandragores par la racine ou contempler les murs gris d'Azkaban- doit y être pour quelque chose.
Mon quotidien se résume donc à aller à l'Ecole, manger le soir avec ma mère, et voir mes amis le weekend. Ce n'est peut-être pas très glamour, mais c'est ma vie, elle m'appartient. J'ai trouvé un certain équilibre et je ne souffre plus – ou du moins plus trop-.
Je ne souffrirai plus jamais.
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31 Octobre
Je crois que même si Londubat fait encore semblant d'être effrayé par les avances de Pansy, il a fini par se prendre au jeu. Sinon, pourquoi l'inviterait-il à sa soirée d'Halloween ?
Elle est littéralement extatique – j'ai envie de lui faire remarquer que c'est Londubat, pas Victor Krum mais son enthousiasme me fait sourire alors je me tais-. Elle rajuste son costume de dragon – de dragon sexy, plutôt, parce que j'ai rarement vu un dragon avec une jupe aussi courte- toutes les cinq secondes et même Blaise lève les yeux au ciel.
On arrive devant chez Londubat et Pansy ajuste une nouvelle fois sa tenue avant de sonner. Mon instinct de survie me dit de déguerpir vite fait bien fait mais Blaise et Pansy ont endormi ma confiance en remplissant largement mon verre pendant l'apéritif que nous avons fait chez Théodore. Et puis ça fait des mois maintenant, je pense être capable de pouvoir affronter Monsieur Connard.
Enfin, je crois.
Londubat ouvre la porte et j'étouffe un fou rire. J'évite soigneusement de croiser le regard de Blaise, parce que je sais que sinon on n'arrivera pas à se retenir de rire.
- C'est quoi ton costume ? Demande Théo en penchant la tête sur le côté, avec la tronche d'un mec qui vient de découvrir une nouvelle espèce intéressante.
Je suis une bouteille de bière au beurre ! Répond t-il comme si c'était évident.
- Et tu me laisserais boire au goulot ? Susurre Pansy.
Je manque de vomir sur mes chaussures en cuir et pousse Londubat sans ménagement pour me diriger vers le buffet. J'ai besoin de boire.
Blaise me suit en ricanant et Théo s'arrête au milieu de la pièce pour observer la décoration. Je me jette sur le champagne elfique – il y a une bassine de punch, mais je persiste à dire que cette boisson a été inventée par Satan-.
Je bouscule Granger sans ménagement – mais je ne l'insulte pas non plus, c'est un progrès notable à mon sens- et me réfugie sur le balcon.
- Salut.
Je me retourne vivement et croise le regard d'Astoria Greengrass – mon ex fiancée-.
- Qu'est-ce que tu fais là ? Je demande en fronçant les sourcils.
- Daphné est en cours de Professorat avec Neville, répond t-elle simplement. Il lui a dit qu'elle pouvait venir avec quelqu'un si elle avait peur de se sentir seule.
Un brave type, ce Londubat.
- Ecoute... fait-elle en avançant vers moi – je recule instinctivement, je ne suis plus habitué à être proche de quelqu'un-. Je voulais te dire que j'ai trouvé ta décision courageuse.
Elle me prend pour qui, un putain de Gryffondor ? Je ricane en allumant une cigarette et secoue la tête.
- De quoi tu parles, Astoria ?
- Pour nos fiançailles. Tu as osé dire non à ton père, et tu as sauvé nos vies.
- Il était en prison, c'était pas bien difficile.
- Je sais ce que ça représente de s'opposer à des fiançailles, dans une famille de Sang-Pur. Je voulais te dire... J'étais amoureuse de Terry depuis des mois, mais je me serais mariée avec toi puisque c'était prévu comme ça. Je suis contente que tu aies eu le courage de dire non.
Elle jette un regard à Terry Boot – un Serdaigle insignifiant – qui se trémousse sur la piste, déguisé en – Doux Merlin – mandragore géante.
- Tu nous as épargné cinquante ans de malheur, fait-elle en souriant.
Tant mieux pour elle si maintenant elle peut roucouler en paix avec sa Mandragore, mais moi je suis toujours malheureux – et ce même si j'ai affronté le regard d'incompréhension de mon père-.
- Je voulais aussi te dire que je ne crois pas ce que les journalistes racontent sur toi.
- De quoi tu parles ?
- Quand ils disent que tu as donné un filtre d'amour à Potter. Tu es une personne qui mérité d'être aimée, et ça ne m'étonne pas que Potter ait jeté son dévolu sur toi.
Si elle parle encore d'Harry je crois que je vais me mettre à pleurer, ou à la frapper, au choix. Je ferme les yeux et me masse douloureusement les paupières.
Elle voit qu'elle est allée trop loin et s'éclipse après un dernier sourire. La vie est une putain de chienne. S'il y avait eu une justice, j'aurais subi la Guerre et j'aurais fini par épouser cette fille qui est belle comme un soleil, parce que j'aurais eu mon quotta de souffrances.
Je l'aurais épousée et on aurait eu un enfant que j'aurais nommé selon les constellations, comme tous les enfants Black. Mon fils se serait appelé Opuchius ou Scorpius. Il aurait eu les yeux de ma mère – bleu gris-, les cheveux de mon père.
On se serait endormis et réveillés ensembles tous les jours, ses cheveux m'auraient chatouillé le nez, je lui aurais fait l'amour dans des draps de satin.
Mais la vie est une chienne et je suis sur ce balcon, chez un type que je me suis évertué à insulter durant toute ma scolarité, déguisé en vampire – Faut pas déconner, j'allais quand même pas me déguiser en Mandragore comme Boot – à fumer clopes sur clopes en essayant de ne pas penser à Potter.
- Je dérange ?
Décidément, ils se sont passé le mot. Je me tourne et Weasley m'adresse un sourire rayonnant. Il a les joues un peu rouges, j'en connais un qui a forcé sur le punch.
- Bordel, Weasley, c'est quoi ce déguisement ?
- Quoi, tu n'aimes pas ?
- Qu'est-ce que tu es supposé être, exactement ?
- C'est évident, bon sang ! Je suis un hibou !
Ah. D'où les plumes. J'hausse un sourcil et il éclate de rire.
- Tu passes une bonne soirée ? Me demande t-il joyeusement.
- Jusqu'à maintenant, super.
Il ne relève pas l'ironie de ma voix et fourre un beignet dans sa bouche.
- Je savais que tu venais ce soir, fait-il en regardant le ciel.
- Et ?
- Je voulais te donner ça.
Il pose quelque chose dans ma main. C'est froid et je baisse les yeux, intrigué.
Un flacon qui contient de longs filaments jaunes. Un souvenir.
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Mes mains tremblent lorsque j'ouvre la porte-fenêtre et traverse la salle. Je croise le regard de Pansy et lui indique que je me tire d'ici, elle me fait un geste étrange et je regarde dans la direction qu'elle m'indique : Potter est appuyé contre le buffet. Il est déguisé en citrouille, c'est absolument ridicule mais même comme ça je le trouve beau.
Il croise mon regard et je n'arrive pas à lire son expression – il a l'air à la fois blasé et surpris-. Peut-être que Londubat n'a pas eu l'amabilité de le prévenir de ma présence.
Je sors de ce putain d'appartement et transplane directement dans ma chambre. Mère dort depuis un moment, maintenant. J'ouvre ma pensine et y verse le souvenir.
L'an dernier, je suis tombé amoureux de Harry parce que je l'ai découvert à travers ses souvenirs. J'ai compris qui il était vraiment ; pas le connard à lunettes sauveur de la veuve et l'orphelin que je pensais connaître, mais un homme à multiples facettes, une personne pleine de défauts et de peurs, d'angoisses et de contrariétés.
L'ironie de la situation devrait me faire sourire, mais j'ai un peu envie de pleurer.
Je sais pourquoi Weasley m'a donné ça, c'est pour que je réagisse, mais je ne peux pas. J'ai trop donné, je n'ai plus la force de me battre.
Il faut que ce soit Harry qui vienne me retrouver, cette fois. Et en fait, même s'il fait un geste vers moi, je ne sais pas si je pourrais lui tendre la main en retour.
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Dans la pensine, chez Draco
- Mais enfin, Harry, ce truc est fichu, de toute façon !
La voix de Granger est légèrement aiguë et je fronce les sourcils. Harry s'accroche farouchement à mon pull – qui a perdu sa couleur originelle et qui ressemble franchement à un chiffon – et lui jette un regard noir.
- Si tu le laves, il perdra son odeur ! Réplique t-il d'une voix dure.
- Mais il a déjà perdu son odeur ! Tous les sorts de conservation que tu peux lui lancer ne serviront à rien, Harry. Ça fait trop longtemps que tu le trimbales partout !
- Je m'en fiche !
- Il empeste, Harry !
- Si tu n'es pas contente, tu peux aller vivre ailleurs !
- Ronald, je t'en prie, dis quelque chose !
Je la trouve bien gonflée de demander de l'aide à Weasley après ce qu'elle lui a fait mais bon c'est leurs histoires. S'il n'est pas capable de la remballer, c'est son problème.
- Laisse-le tranquille, il fait ce qu'il veut.
Elle lui jette un regard noir mais il hausse les épaules.
- Qu'est-ce que ça peut te faire, de toute façon ? Fait-il.
- Ce n'est pas sain cette obsession qu'il a avec tous les objets qui ont appartenu à Malfoy !
Elle se tourne vers Harry qui la regarde comme s'il allait la mordre. Il porte un bas de pyjama rouge avec des petits motifs de souaffles complètement ridicule et un t-shirt qui devait très certainement appartenir à son cousin, vu l'absence de forme et de couleur.
Je me déteste de le trouver beau même quand il est aussi ridicule.
On dirait qu'il sort du lit et d'ailleurs je pense que c'est le cas, même si l'horloge derrière lui indique qu'il est 15 heures et que Weasley et Granger sont tous les deux habillés – Merci Merlin je tiens à mes rétines-.
- Vas lui parler ! Vas lui parler si tu l'aimes encore ! Mais lâche ce putain de pull !
- Je ne peux pas !
Sa voix tremble et je m'en veux parce que mon cœur se serre.
- Je ne peux pas...
Il tremble de tout son corps. Weasley détourne les yeux et Granger le prend dans ses bras.
- Oh, Harry...
- Je ne peux juste pas. Je... C'est trop pour moi.
Je sors de la pensine. Le souvenir date de cet été, si j'en crois le teint de Harry – hâlé – et celui de Weasley – rouge-.
C'était il y a longtemps. Entre temps, Harry a largement eu l'occasion de lâcher ce putain de pull.
De le jeter à la poubelle comme il l'a fait avec mon cœur.
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Novembre 2000
Après cette soirée, je me surprends à imaginer de nouveaux scénarios :
* Potter se frappe la tête contre une pierre durant son entraînement d'Auror, et bim il retrouve la mémoire et me déclare son amour éternel.
* Un chercheur trouve un sortilège qui rend la mémoire aux accidentés et Potter me déclare son amour éternel.
* Je croise Gabriel par hasard dans le monde moldu et on va secouer Potter, et il me déclare son amour éternel.
Enfin, en tout cas, dans tous mes putain de scénarios, Potter finit par me déclarer son amour éternel.
Mais rien de tout cela n'arrive. J'apprends par Weasley que Gabriel est retourné à la faculté de lettres, et que la Belette Femelle va bientôt accoucher – super-. Quand je suis triste, je l'imagine grosse et en souffrance, et ça me réconforte. Tu portes peut-être l'enfant de Harry, mais tu vas te chier dessus pendant l'accouchement, ma grande.
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Les mois passent, le Nouvel An arrive. Comme l'an dernier, je me dispute avec Pansy. J'ai envie de le passer à Amsterdam, le pays de la poudre de licorne, tandis qu'elle veut le passer avec Londubat – qui a finalement fini par céder à ses avances, faut croire que tout est possible-. Mais je me souviens l'avoir vue consulter les prix des philtres d'amour dans le catalogue de la Boutique Weasley, donc bon...
C'est Blaise qui tranche. On passe le début de soirée dans un restaurant à Amsterdam, juste Pansy, lui, Théo et moi, puis on va se fournir en poudre de licorne et on transplane chez Thomas et Finnigan, où se déroule "la fête du siècle" selon Pansy.
Tout ce petit plan me rappelle douloureusement l'an dernier, mais je me tais parce que j'ai pris une dose de poudre de licorne et que de toute façon je passe mon temps à penser à Harry. Alors que je l'imagine ou que je le vois pour de vrai, c'est pareil niveau souffrance.
Londubat est littéralement extatique quand il nous ouvre la porte – on ne lui donnera pas de poudre à celui-la, sinon il risque d'exploser-. Pansy se jette à son cou et il m'adresse un regard d'imbécile heureux avant de fermer les yeux et de l'enlacer. Je croyais qu'on était chez Finnigan et Thomas, ce sont eux qui devraient ouvrir la porte, mais il faut croire que ce type n'a aucun savoir vivre - c'est un ami de Weasley après tout-.
- Je vais vomir, lâche Blaise en les contournant pour entrer.
On se dirige à grand pas vers le buffet – j'ai besoin de boire – et Blaise fait des petits commentaires sur la tenue et le rang social de chacun. Je sais qu'il fait ça pour m'amuser, parce qu'il n'en a fichtrement rien à faire de tout ça, et je me force à rire.
Une boule s'est formée dans ma gorge depuis que j'ai franchis la porte et Théo me jette des regards inquiets – je déteste ça-.
On est obligés de dire bonsoir à Weasley et Granger, puis à Finnigan et Thomas – on est quand même chez eux-.
J'apprends que la Belette Femelle va bientôt accoucher – dans deux ou trois semaines – et réprime une grimace – de douleur ou de dégoût, je ne sais pas-.
Blaise et Théo ne me lâchent pas d'une semelle et on passe une bonne partie de la soirée dans la salle de bain à prendre de la poudre de licorne.
Comme d'habitude, ça me rend un peu euphorique, ça fait dire des conneries à Blaise et ça renferme Théo dans son mutisme. J'ai envie de les remercier, de leur dire que j'apprécie ce qu'ils font pour moi mais une fois de plus, les mots restent coincés dans ma gorge, alors je pose ma main sur l'épaule de Blaise et il m'adresse un sourire rassurant.
- Allez, viens, Draco, c'est bientôt minuit.
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Potter est beau. Il est en train de devenir un homme, c'est étrange car je crois que pour moi, il restera toujours l'adolescent que j'ai embrassé dans cette boîte moldue. Il a une petite barbe de trois jours, ça lui donne un côté un peu sauvage.
C'est bien qu'il ait changé ces derniers mois, car je peux mettre plus de distance entre le Harry que j'ai connu et la personne que je fixe depuis plusieurs minutes déjà.
Il tourne la tête vers moi mais j'observe ma coupe de champagne avec minutie.
Minuit sonne et Théo et Blaise m'enlacent en riant. On ne se fait pas souvent des câlins chez les Serpentards, mais cette occasion est spéciale. Je suis complètement déchiré et je tiens à peine sur mes jambes, mais mes deux meilleurs amis me soutiennent – comme toujours-.
Puis on va arracher Pansy aux bras de Londubat – qui, vu le sourire qu'il me lance, a clairement dévalisé le bar – et Blaise insiste pour qu'on fasse un câlin groupé – ce type a l'âme d'un poufsouffle-.
Et puis on est obligés de faire un tour pour souhaiter la bonne année à tout le monde – heureusement que j'ai un verre encore plein et que je sais qu'il nous reste de la poudre de licorne, sinon je me lancerais un avada kedavra pour m'épargner cette souffrance -. C'est une tradition moldue apparemment, j'aimerais bien m'éclipser pour ruminer dans mon coin mais Blaise me pousse vers Londubat en souriant – le traître-.
Je pose une main sur l'épaule de Londubat qui tente de m'enlacer, mais je me dégage prestement – gentil, Londubat, gentil-.
Puis je me tourne vers Astoria Greengrass – que fait-elle ici ? Cette fille n'a t-elle donc pas d'amis ?!- qui m'enlace avec douceur. Elle sent bon et je pose mon menton sur son épaule durant quelques secondes.
Puis elle me lâche et je me retrouve en face d'un Serdaigle qui était Capitaine de l'Equipe de Quidditch quand j'étais à Poudlard. Je fronce les sourcils et penche la tête sur le côté. David ? Dave ? Il a un prénom ridicule.
Il m'adresse un sourire crispé et me tapote l'épaule, histoire de me tenir à distance : pas de câlin pour moi – tant mieux, je crois que j'ai accumulé assez de chaleur humaine pour les dix prochaines années-.
Puis une tornade se jette dans mes bras et une odeur immonde – un parfum si capiteux qu'Ombrage serait jalouse- m'envahit les narines.
- Bonne année, bogosse !
Je titube. Qu'on me débarrasse de cette furie !
Trop tard, Lavande Brown – ça y est, son nom m'est revenu- me prend la tête entre ses mains et me roule la pelle du siècle -. Je me fais violer la bouche.
Je lâche ma coupe de champagne et je sens les regards tournés vers nous tandis que le brouhaha ambiant baisse légèrement.
Quand elle me lâche enfin, les gens applaudissent en riant et je cherche le regard de Blaise, furieux. Mais c'est celui de Potter qui s'accroche au mien. Une part de moi aimerait y lire de la jalousie, mais l'étincelle au fond des prunelles vertes n'est rien d'autre qu'un signe de dégoût.
Il retrousse les lèvres comme s'il allait me mordre et je tourne les talons à la manière d'un homme poursuivi par une armée de détraqueurs.
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Le bébé de Potter et Weaspute est né le 3 Janvier 2001. Il ressemble tellement à Harry que s'en est douloureux. Ils l'appellent James et la Gazette publie une superbe photo d'eux trois à St Mangouste.
Ce jour-là, j'ai envie de crever.
C'est moi qui devrais être à ses côtés, à la place de cette pute. Harry, moi, et notre bébé-chaudron. Il aurait mes cheveux et ses yeux. Ou ses cheveux et mes yeux. Ou tout de Harry, même ses putain d'épis, même sa myopie, même son sourire de connard. Tant pis. Je m'en fiche. Tant que c'est notre enfant.
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Le temps passe et des soirées comme le Nouvel An, où je revois Potter sans lui parler, j'en vis – subis- quelques unes. La fin des examens de mi-année en Janvier, par exemple. L'anti-St-Valentin en Février. L'anniversaire de Ronald Weasley en Mars. La St Patrick.
Après le Nouvel An, Weasley m'envoie ses souvenirs par hibou, toutes les semaines, avec la régularité d'un métronome. Ils concernent tous Harry, ils sont tous déchirants et bouleversants, et j'ai envie d'organiser un repas avec comme plat principal son putain de volatile, histoire d'arrêter de recevoir ces putain de colis empoisonnés.
Je n'en peux plus de me torturer le cerveau, debout devant ma pensine.
Je les regarde tous, bien sûr. Et à chaque fois, j'ai envie de m'arracher le cœur.
Je ne sais pas pour qui me prend ce type : le gardien des souvenirs concernant Potter ?
Je sais qu'il m'envoie ça pour me faire réagir. Les Gryffondors sont des gens optimistes, Weasley n'a toujours pas compris que j'avais abandonné, et ce depuis longtemps.
À chaque soirée, il me jette un regard interrogateur, et j'ai envie de lui mettre mon poing dans la mâchoire. Il n'a personne d'autre à torturer ?
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5 Mars
J'apprends par Weasley que sa sœur va considérablement mieux depuis que le bébé est né.
On est assis tous les quatre - Weasley, Blaise, Théo et moi- sur un banc devant la faculté de magie. Je fume une clope tranquillement en pensant à ce que je vais boire ce soir - ça m'aide à dormir, c'est médical- et Weasley doit penser que le silence est pesant puisqu'il se met à débiter des conneries sur l'état mental de sa sœur - qui est apparemment sortie de sa dépression, vous m'en voyez ravi-.
Moi, je pense que Ginevra est une putain de folle qui n'a jamais su être entière en étant seule. Le genre de fille qui a trop d'amour à donner et qui ne s'en prive pas. Le genre de fille qui a l'air indépendante et farouche comme ça, mais qui aime à la folie, sans aucune retenue.
Qui donne tout. Qui donne trop.
Une amoureuse qui croit aux âme-sœurs, une mère poule assumée -revendiquée, même-.
Je plains son gamin.
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16 Mai, devant chez Blaise
Je croise Weasley et me fige. Il sort de chez Blaise, je m'y rends. Ça allait bien finir par arriver un jour.
- Je t'en prie, arrête avec ça.
Je lui tends le flacon vide et lui mets dans la main.
- J'en peux plus.
Je ferme brièvement les yeux et quand je les ouvre, il me tend le flacon – plein-.
- C'est le dernier. Si tu ne fais rien après avoir vu celui-ci, je te promets de te laisser tranquille.
- Promis ?
- Promis.
- Si tu me renvoies encore ton putain de hibou, je le mets sur la table de dissection de mon Ecole !
- Message reçu.
- Pourquoi tu fais ça ?
- Quoi ?
- Tu me détestes.
- Je ne te déteste pas. Tu es un petit con, arrogant, froid, prétentieux...
- Merci.
- Mais je ne te déteste pas. Et Harry est malheureux sans toi.
- On dirait pas... Je dis en pensant à la photographie de la Gazette.
Il a l'air de comprendre ce à quoi je pense parce qu'il hoche la tête.
- Tu sais, tu n'es pas le seul à savoir préserver les apparences, fait-il en plongeant son regard dans le mien.
J'ai envie de lui dire que le Harry que j'ai connu ne savait pas cacher ses émotions mais ce serait vain. J'hoche juste la tête et je transplane chez moi.
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19 Mai - Trois jours plus tard
C'est Weasley qui m'ouvre la porte.
En fait, j'ai encore la clef de cette maison mais j'ai un minimum de savoir vivre. J'ai pas envie d'arriver et de les trouver à poil sur le canapé, Granger et lui - Doux Merlin sortez cette vision de ma tête-.
- Tu es venu, fait-il dans un souffle.
- Ta gueule, Weasley. Je ne te permets aucun commentaire.
Il esquisse un sourire et s'efface pour me laisser entrer.
- Harry est dans le jardin, dit-il.
Je marche d'un pas rapide et faussement assuré. Harry me tourne le dos, il est assis sur sa chaise habituelle et regarde les étoiles. Il tourne la tête lorsque je franchis la porte-fenêtre.
Ses yeux plongent dans les miens et j'y lis ce qu'il doit sûrement lire dans les miens. La peur. L'espoir ?
Il triture une chose grise et informe et j'esquisse un sourire en reconnaissant mon pull.
- Je viens récupérer mon pull, je fais d'un ton qui se veut ironique.
Ou mon cœur. Ou mon âme. Ou tout ce que j'ai laissé ici, avec toi.
- Ah... Ok, répond t-il dans un souffle, l'air un peu déçu.
Bordel, je ne sais pas pourquoi j'ai dis ça. J'ai envie de lui dire que je l'aime, que je suis venu le récupérer, qu'il n'est qu'un putain de connard mais que c'est pas grave, qu'il me manque tous les jours que Merlin fait, que je rêve de lui, que j'ai besoin de lui.
Que je n'arrive pas à vivre sans lui.
Mais comme toujours, les mots restent coincés dans ma gorge.
J'ai épuisé mon quota de courage l'an dernier.
Il me fixe quelques secondes et je crois qu'il va me frapper mais il se lève lentement et me fait signe de le suivre.
C'est étrange de revenir dans cette maison, que j'ai considérée comme la mienne pendant quelques mois.
On entre dans sa chambre et les souvenirs me submergent. Une boule se forme dans ma gorge tandis qu'il ouvre son armoire. Sur le côté gauche, bien rangés et bien suspendus, se trouvent toutes les chemises et tous les pulls que nous avons achetées ensembles, ainsi que les miens, ceux qu 'il a voulu garder comme doudous.
Il me jette un regard douloureux.
- Je ne sais plus lesquels sont les tiens, fait-il d'une voix rauque. Je ne me souviens p...
- Tu ne te souviens pas, je sais, Potter, je le coupe en fermant brièvement les yeux. J'avais cru comprendre.
- Ça ne va pas ?
- Je me porte comme un charme, je réponds en évitant son regard.
Il a toujours eu les yeux trop verts. Avant, je trouvais ça laid.
Il m'aide à plier mes affaires et à les placer dans mon sac. J'ai envie de pleurer et de mourir, mais je me contiens parce que je me suis déjà assez ridiculisé comme ça pour cet homme.
Je me tourne et me fige soudain. Mon regard s'est posé sur sa table de chevet. Le bracelet en argent elfique de mon grand-père me fixe presque et je ferme les yeux en pensant à comment il s'est retrouvé en sa possession. Harry perçoit mon trouble.
- Ça aussi c'est à toi ? Je m'en doutais. Hermione m'a dit que c'était de l'argent elfique et Ron m'a dit que c'était très rare, et qu'il y en avait chez les vieilles familles de Sang-Purs. Reprends-le, si tu veux.
Je secoue la tête et le regard qu'il me jette me bouleverse.
- Non, garde-le. C'était un cadeau pour une fois où je me suis comporté comme un connard avec toi.
Il s'agite, mal à l'aise. C'est la première fois que je parle de mes souvenirs et il n'a pas l'air d'aimer ça.
- Calme-toi, Potter, je ne vais pas me jeter sur toi pour te violer, je dis froidement.
Je sors lentement mon portefeuille et en extrais la bague que je gardais cachée depuis des mois – depuis que Weaspute s'est jetée sur moi pour m'accuser de l'avoir volée à Harry-.
- C'est à toi. Ginevra Weasley m'a dit qu'elle était là quand tu l'as achetée. En Espagne, je crois.
Il fixe le bijoux quelques secondes et secoue la tête.
- Non, garde-là. Je te l'aie offerte. Le moi d'avant aurait voulu que tu la gardes, je pense.
Le moi d'avant. On dirait qu'il parle d'un défunt. Mais en fait, ce n'est pas loin de la vérité.
J'hoche lentement la tête. Il faut que je sorte de cette maison avant de me mettre à pleurer.
- Je... Je vais y aller, je fais d'une voix tremblante.
Je ne lui laisse pas le temps de répondre et prends mon sac, puis dévale les escaliers.
- Attends !
Je l'ignore et accélère. Ça me rappelle la fois où je l'ai entendu parler aux tableaux et que j'ai déguerpi vite fait en songeant que je ne voulais plus jamais souffrir. Bordel, si j'avais su.
Je l'entends courir derrière moi. J'ouvre brusquement la porte et il attrape mon poignet.
- Ron disait que tu étais venu pour me voir, fait-il d'une voix qui me bouleverse.
Il semble au bord des larmes, mais je ne peux pas franchement voir parce que les miennes troublent déjà ma vue.
- C'est vrai.
- Alors pourquoi me dire que tu veux récupérer tes affaires ?
Il faut que je sorte d'ici, sinon je vais imploser.
- Je croyais que je pouvais, mais je ne peux pas, Harry.
J'ai employé son prénom parce que ses yeux m'affolent.
- Tu ne peux pas quoi ?
- Je ne peux pas me battre pour toi. Pas encore. Je sais que tu ne te souviens pas, mais moi je me souviens, et c'est un putain de fardeau, crois-moi.
Ma voix se brise et je ferme les yeux une nouvelle fois.
- Je t'aime, je dis d'une voix ferme. Je t'aime, mais je ne peux pas.
- Tu aurais préféré ne pas te souvenir ?
Il maltraite mon pull et les jointures de ses mains sont blanches.
- J'aurais préféré ne pas me souvenir, je fais dans une souffle.
- Mais moi je ne veux pas que tu m'oublies.
Sa voix est cassée, mais je refuse d'en tirer une quelconque conclusion.
- Toi, tu m'as oublié, pourtant, je chuchote.
Et je me dégage de sa poigne pour transplaner.
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5 Juin – Jour des 20 ans de Draco
Je reste chez moi pour réviser – ou mourir – jusqu'au cinq juin, jour de mon anniversaire. Ce jour là, je n'ai pas le droit de faire le mort, sinon Pansy m'achèvera pour de bon cette fois-ci.
Je vais déjeuner avec ma mère au restaurant – dans le Londres moldu, ça nous évite bien des regards haineux-. En dessert, ils proposent des mille-feuilles et j'esquisse un sourire en pensant à mon père – c'est son gâteau favoris-.
Le soir, j'essaie de me barricader chez moi mais Pansy ne l'entend pas de cette oreille. Très vite, je me retrouve avec une coupe de champagne à la main, une clope dans l'autre, dans la cour d'une boîte de nuit sorcière dont j'ai oublié le nom après mon cinquième verre. La fontaine de jouvence, ou un truc comme ça.
Théodore est un peu mal à l'aise, je me demande si tout ce monde l'incommode.
- Pourquoi tu gigotes comme ça ?
Il me jette un regard de bête traquée et je ne peux réprimer un sourire amusé.
- Théo ?
- Pansy a invité Londubat, fait-il dans un souffle – il a parlé si bas que je ne suis pas sûr d'avoir entendu-. Et Blaise a proposé à Weasley de venir.
- Mais c'est mon anniversaire, je dis d'une voix blanche. Ce ne sont pas mes amis.
- C'est ce que je lui ai dis, réplique Théo en gigotant.
- Tu penses qu'il y aura...
- Salut.
Bingo. Quand on parle du loup.
Je me tourne lentement et affronte le regard d'Harry. Il est beau comme un dieu et j'ai envie de le tuer pour cet affront.
Du coin de l'œil, je vois Théo mettre les voiles. Instinct de préservation. Je ne lui en veux pas, j'aurais fait pareil à sa place.
- Salut.
Il me tend la main droite et se passe l'autre dans les cheveux. Il fait toujours ça quand il est nerveux, mais je ne comprends pas son geste, car il n'a aucune raison d'être anxieux.
- Je m'appelle Harry. Je suis un ami de Ron, fait-il d'un ton décidé.
Je fixe sa main quelques secondes.
- Draco. Je suis un ami de Blaise.
- Enchanté, Draco. Joyeux anniversaire, au fait.
- Merci.
- Je t'offre un verre ?
"J'ai envie de recommencer à zéro, de t'emmener dans un café et de te payer un thé, ou un chocolat chaud, bordel, je sais pas. J'ai envie de vivre une histoire normale."
- Volontiers.
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Nuit du 17 au 18 Juin
Je suis tombé amoureux de Harry parce que j'ai fouillé dans sa pensine. Je suis tombé amoureux de lui en regardant ses souvenirs. Je suis tombé amoureux du petit garçon effrayé par le noir, de l'adolescent qui découvrait son homosexualité, qui avait peur de tuer le Maître.
Je suis tombé amoureux de lui et je le suis resté même lorsqu'on m'a volé mes souvenirs.
J'ai décidé de le conquérir en sortant d'une pensine. J'ai décidé de le récupérer en sortant d'une pensine.
C'est une histoire d'amour qui a commencé dans une pensine, qui s'est terminée par un Oubliette et qui a su renaître grâce à une pensine.
La boucle est bouclée.
Harry n'a jamais retrouvé la mémoire. Il vit tout comme une première fois. Ça a ses avantages et ses inconvénients.
- Tu es beau, me fait-il en me dévorant des yeux.
Je lui adresse un sourire carnassier et me penche pour l'embrasser langoureusement. Il gémit contre ma bouche et je le sens durcir contre ma jambe.
Pour lui, c'est notre première fois.
Pour moi aussi, dans un sens.
J'ai envie de lui dire que je l'aime mais je sais qu'il n'est pas prêt à l'entendre.
Et puis j'ai envie d'attendre qu'il me le dise en premier.
Après tout, c'est souvent moi qui aies fais le premier pas.
Ça donnera l'occasion à Harry de prouver qu'il a le courage des Gryffondors.
On a beaucoup de casseroles, tous les deux. Il y a un bébé entre nous, des non-dits, des souvenirs et l'absence de souvenirs, en plus des choses qui étaient déjà sources de disputes : mon père, nos caractères, nos modes de vie... Ses amis - non, je plaisante-.
Mais Harry a fait le premier pas cette fois-ci. Il a envie d'être avec moi, et ça, ça me donne la force de me battre, moi aussi.
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Fin
Cinq ans plus tard, j'ai enfin réussi à écrire le dernier chapitre de Courir sur les nuages.
On ne va pas se mentir, ça fut laborieux...
Bon et l'anagramme de Dana la journaliste est pas terrible, mais je suis pas douée en anagrammes haha.
Vous remarquerez sûrement que je ne précise pas si Ron et Hermione se remettent ensembles. On s'en fiche un peu, c'est pas un RW/HG donc c'est laissé à l'imagination du lecteur. Moi j'aime bien ce couple mais je sais que plein de personnes ne peuvent pas le saquer.
Merci pour vos encouragements !
Plein d'amour.
Tham |