3-La bavure de la honte
Chère journal... Oh non, j'avais dit que j'arrêtais avec ça !
Encore une journée qui va s'annoncer de plus belle, toujours les même.
Le lycée n'a toujours pas changé, avec toutes ses têtes de globuleux qui ornent les recoins du bâtiment. Des couples un peu partout... Mais entre nous, le mien c'est le mieux. Et d'ailleurs, je compte bien devenir reine de promo vendredi soir avec mon copain Pierre ! Et oui, nous sommes pourtant en France mais mon lycée a au moins une chose de particulière : c'est faire un bal de promo au milieu d'année, voire en fin d'année quand les élèves se décident d'en organiser une. Et devinez qui l'organise cette soirée ? C'est moi, la fille la plus populaire, et bien sûr aidée de mes chères amies compatriotes, qui, pour ma part, n'ont toujours pas trouvé de cavaliers. Il faut toujours tout faire soi-même, c'est pas croyable !
Tout ça pour dire que je suis bien contente de m'y retrouver avec Pierre pour ce bal. Et j'espère qu'il pensera à tout, c'est à dire limousine, énorme bouquet de fleur de lavande, mes fleurs préférées ! Et puis bien sûr, qu'il se ramènera en bon gentleman. Ah mais le seul problème c'est que j'avais oublié qu'il était pas très riche...
Je m'aventure au lycée, toujours les mêmes regards posés sur moi, et moi avec un large sourire sur mon visage bien dessiné, je toise chacun de mes fans un par un. Mais sans avoir le moindre petit intérêt pour eux.
Je marche en direction de Lena et Marjolaine, mes amies, la mine fière, le torse bombé en avant, jetant ma belle chevelure blonde en arrière. Elles aussi sont très jolies mais... ne me valent en aucun point.
Léna est une jeune fille de 16 ans, qui a passé une classe, les cheveux mi-longs, qui lui tombent en cascade jusqu'à ses épaules. Sa chevelure épaisse et frisée a la couleur d'or. Et oui, elle aussi est blonde. Quant à l'autre, elle a l'apparence d'un garçon manqué, les cheveux coupés court avec une raie sur le côté. Une mèche pendouillant le long de son œil gauche. Puis quelques autres mèches colorés de rouge bordeaux parmi ses cheveux noirs.
On discute pendant longtemps, et bien évidemment le sujet de conversation c'est la soirée de vendredi soir. Elles réfléchissent encore avec qui elles vont y aller. Quand soudain, j'aperçois au loin, marchant droit dans les escaliers qui mènent à l'étage supérieur, un jeune homme bien musclé qu'on peut voir à travers son haut moulant sous un gilet ouvert. Je n'en reviens pas. Léna et Marjolaine l'ont également tout de suite remarqué. De toute façon, comment ne pas remarquer un aussi beau gosse ? C'est impossible ! Je tuerais pour lui ! Non c'était une blague.
J'ai la bouche grande ouverte, les yeux rivés sur ce bellâtre. Je ne peux que le suivre du regard. Il a un sourire tellement... Tellement sexy qui me fait craquer ! Oh non, j'ai l'impression qu'il s'avance vers moi. Non, il faut que je fasse comme si de rien n'était : une mine tout à fait normale et naturelle. Ma bouche toujours entrouverte, je sens comme de la bave couler le long de mes lèvres asséchées. De la bave gluante presque visqueuse dégouline jusqu'à en mettre plein par terre ainsi que sur mes chaussures à talons aiguilles toutes neuves.
Il est enfin à ma hauteur... le visage rayonnant, les dents aussi blanche que blanche. Ce qui m'éblouit légèrement... Non, ça me gâche carrément la vue mais il est tellement... beau et sexy que j'en perds la vue. Je crois qu'il veut me dire quelque chose mais je n'entends rien tellement submergé par sa beauté presque irréel.
Il pointe un doigt sur sa bouche. Il veut m'embrasser ? c'est ce qu'il veut ? Oui ! Je ferais tout pour lui ! Prends moi dans tes bras, je suis tout à toi !
-Hum hum... Nina ? Tu as...
Et c'est là que j'ai compris ce qu'il voulait me dire : ma bave ! j'en avais partout sur moi ! Oh non, je me sens terriblement honteuse d'avoir eu ça ! Son sourire rayonnant se transforme en rire sonore qui fait presque rire tous les autres élèves qui nous encerclent ! Non je suis encerclée ! Je vais me venger !
Mais je n'ai pas trop à m'en faire de ça, vu que je suis populaire et aimée de tous, ce genre de choses ne m'atteint pas. Tout le monde aura oublié d'ici là.
Il me quitte déjà, je le vois partir au loin... Non reviens ! |