Y'a un message caché. Si si, j'en suis sûr, cherchez bien !
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Quelques timides rayons de soleil filtrèrent par les fins rideaux de sa chambre. Bien sûr, ce fut suffisant pour le réveiller. Mike tâtonna les draps à côté de lui : comme elle l'avait dit, elle était partie.
Son téléphone vibra. Il était déjà l'heure de s'extirper du lit. Il le fit sans trop de problèmes, se relevant doucement pour éviter d'être pris de vertige. Les volets étant fermés et les rideaux tirés, il n'y voyait absolument rien. Il mit donc quelques longues secondes à trouver ses chaussons et à les enfiler, puis il se dirigea vers le salon et y ouvrit les volets : pour changer, le temps était moche. Pas menaçant, juste nuageux et moche. Il mit la cafetière en route, sortit un mug, de la brioche et la plaquette de chocolat noir. La journée s'annonçait aussi banale que les autres. Et donc ennuyeuse.
Arriver sur son lieu de travail. Dire bonjour aux collègues de bureau, discuter rapidement autour du premier café de la journée, entendre les autres parler des jambes sans fin de la nouvelle secrétaire, puis rentrer dans son box et passer la matinée à monter des sites pour les clients. C'était bien là la seule réelle différence d'un jour sur l'autre : Allait-il faire un site de rencontres aujourd'hui, ou bien de paris en ligne ? Même chose après la pause déjeuner. Si on lui avait demandé ce qu'il y avait d'intéressant dans son boulot, il aurait certainement répondu "rien". D'autant qu'étant nouveau dans la boîte, il pouvait toujours attendre avant d'avoir une promotion à un post plus intéressant. Ce n'était pas vraiment la vie qu'il s'était imaginée.
Finalement, la journée de travail approchait lentement de son terme. Il avait pris l'habitude de ne pas utiliser sa "pause café" comme tout le monde dans l'après-midi, de sorte qu'il sortait toujours un quart d'heure avant les autres. Et évitait de fait les bouchons. Il pouvait toujours prendre un café chez lui, n'y manquerait que les ragots des autres employés. Si ceux-ci devaient venir à lui manquer, il n'aurait qu'à les enregistrer plusieurs jours de suite, et se faire une petite sélection. Cette pensée le fit rire intérieurement, sans qu'il en laisse paraître la moindre trace à l'extérieur. Il s'était refermé sur lui même depuis quelques années, au sommet de sa tour de magicien aimait-il à penser. S'il kidnappait une princesse, peut-être quelque héros viendrait tenter de la délivrer, faisant de lui un méchant sorcier. Autre rire intérieur.
Une fois rentré chez lui, il avait plus intéressant à faire qu'au bureau. Ne serait-ce que parce qu'il n'avait-il plus la pression de finir le site de tel client à l'heure, ou la peur que tel autre lui renvoie le site qui n'était "pas comme il l'espérait", il arrivait à se détendre. Chez lui, il pouvait aussi aller sur ses forums, son propre site, répondre à ses abonnés. Parfois, quand il s'ennuyait particulièrement, il allait même visiter les sites qu'il avait fait pour d'autres clients. Uniquement les meilleurs, bien sûr. Ce qui incluait les plus hideux, qu'il s'était particulièrement amusé à faire. L'unité centrale grésilla quelques micro-secondes, avant de ronronner tendrement. Ses deux moniteurs s'allumèrent alors, et une voix sortie des hauts-parleurs.
« - Bonjour, toi »
Son petit programme l'accueillait, de sa voluptueuse voix féminine. C'était Elle qui l'occupait la plus grande partie de la soirée. Enregistrer sa propre voix et faire en sorte que cette femme virtuelle lui réponde selon certains algorithmes. Petit à petit, les options de discutions s'agrandissaient, et il était persuadé qu'à terme le logiciel pourrait aider de nombreuses personnes qui, comme lui, ne savaient pas vraiment à qui parler. Pour autant, il n'en était pas au point de préférer cette entité virtuelle à une vraie femme et avait l'espoir d'en rencontrer une qui l'accepterait tel qu'il était : pas vilain physiquement mais pas exceptionnel, mais ce qui rebutait le plus la gente féminine chez lui était ce besoin compulsif qu'il ressentait parfois de s'isoler pour ne faire qu'une seule chose pendant plusieurs jours : généralement programmer, mais aussi jouer à des jeux tant vidéo que de plateau, ou bien lire. Et parfois broyer du noir. Jusque là, personne n'avait tenu plus de quelques mois.
Après y avoir apporter quelques modifications, il s'apprêtait à entamer une conversation pour tester celles-ci lorsqu'un petit rectangle sortit du coin bas-droit de l'écran.
"Selvania aimerait vous rencontrer ; lire la demande ?"
Internet réservait parfois des surprises : il n'avait commencé à discuter avec cette Selvania que quelques jours auparavant, une semaine tout au plus. Et déjà celle-ci demandait à le voir ? Peut-être allait-il se laisser tenter. Tout dépendait de la demande.
"21 Janvier 2010 - 23:37
Salut Mike ! J'aurais besoin de toi en urgence... Des amies m'ont traîné dans une boîte à 20 minutes de chez toi si je me souviens de ce que tu m'as dit... Sauf que je déteste l'ambiance de l'endroit. Je me suis fait accoster par trois lourdauds en moins de 10 minutes ! On dirait des chiens autour d'un morceau de steak ! Je me suis dit que c'était une bonne occasion de se voir, d'autant que ça nous évitera de passer plus d'une heure dans les transports pour ce voir un week-end ;) ! Je te joins l'adresse. Dis moi si tu viens, je sortirais en avance. Bises,
Selvania"
Vingt-trois heures trente-sept ? Il vérifia l'heure sur l'horloge. Ses petites modifications avaient prises plus de temps qu'il ne l'avait pensé... Et il n'avait toujours pas mangé. Il cliqua sur le lien associé au mail. Elle était même plus près que ce qu'elle pensait. Y aller, ou rester là et prétexter qu'il n'avait eu le message que très tard ? Il avait des essais à faire, et il ne savait même pas à quoi elle ressemblait... D'abord les tests, il verrait après. Il ferma l'onglet contenant l'adresse du site et se préparait à faire de même avec celui du mail, lorsqu'il vit que le "Selvania" était surligné. Il cliqua, et le navigateur afficha une photo. Son logiciel pouvait attendre. Mais allait-il y aller en voiture ou avec le métro ?
Finalement, il opta pour l'option métro qui faisait moins "type qui cherche à se la péter". D'autant que sa voiture n'avait rien de ces bolides de sport qu'on pouvait voir dans les films américains. Il envoya le mail puis se prépara à sortir. Après avoir descendu quelques marches, il se retourna et re-rentra dans son appartement. Il faisait froid, et peut-être pourrait-il lui proposer son manteau ? Quinze minutes plus tard, il sortait de la station de métro et se dirigeait vers la boîte, laquelle était visible directement. Les néons bleus électriques indiquaient "Dream Paradise". Le tout donnait plus envie à Mike d'avoir une crise d’épilepsie que d'entrer, mais il supposa que c'était une question de goût. Il leva la main, et il vit une jeune fille se lever et s'avancer vers lui. "1m68, cheveux légèrement ondulés et châtains... Photo contractuelle, tout roule" pensa-t-il.
Lorsqu'ils arrivèrent à hauteur l'un de l'autre, ils se regardèrent quelques instants. Comment lui dire bonjour ? Il opta pour une bise. Puis il se mit à parler.
« Tu veux aller quelque part de particulier ? Peut-être pas très loin, si tu dois retrouver tes amies après... court silence.
- Normalement non, elles ne m'attendront pas... Et partiront sûrement chacune de leur côté. T'as mangé ?
- Pas encore. J'ai été... Occupé. Petit rire.
- Alors ouvre la marche ! Je connais rien par ici ! »
Moins de deux heures plus tard, ils arrivaient chez lui. Mike essaya de se remémorer comment ils en étaient arrivés là. Tout s'était enchaîné un peu trop vite... Heureusement, ils n'avaient pas bu. Au moins n'était-ce pas dû à l'alcool. A peine eut-il baissé la poignée que Selvania entra à sa suite, les mains posées sur ses hanches. S'il n'en était pas à ses premières expériences, il fut néanmoins pris par surprise. Elle referma la porte derrière eux, puis se colla contre lui, le poussant contre le mur. Elle plaça ses mains dans son cou, "froides. J'aurais dû lui proposer mon manteau. Merde !". Lui passa un bras autour de la taille de la jeune femme et dégagea une mèche de cheveux de son visage avec sa main libre. Une seconde plus tard, ils s'embrassaient. Il ne put s'empêcher de passer en revue tous les clichés de films d'amour : le temps qui s'arrête, la caméra qui tourne lentement autour des protagonistes alors que leur baiser se fait de plus en plus langoureux...
Lentement, ils s'étaient rapprochés de son lit. Leurs regards se croisèrent, et après un court instant d'hésitation, Mike s'assit sur le pan du lit. Entre deux baisers, Selvania réussie à lui dire qu'elle devrait partir tôt le lendemain.
Quelques timides rayons de soleil filtrèrent par les fins rideaux de sa chambre. Bien sûr, ce fut suffisant pour le réveiller. Mike tâtonna les draps à côté de lui : comme elle l'avait dit, elle était partie. Elle n'avait pas laissé de mot, mais il ne s'en inquiéta pas. Il lança son ordinateur et empêcha son logiciel de femme virtuelle de se lancer. L'icône indiquant qu'internet était connectée vira au vert.
"Selvania aimerait vous rencontrer ; lire la demande ?"
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Walààà. Vivons mieux, vivons amoureux ! Il y aura peut-être/sûrement une suite pour ce chapitre. Parce que tout n'a pas été dit : Selvania acceptera-t-elle Mike ? Barbie divorcera-t-elle encore une fois d'avec Ken pour se remarier avec lui ? Et Kimberley comprendra-t-elle enfin que trop de mascara tue le mascara ? Je vous invite à découvrir tout ça dans le prochain chapitre !
PS : [Parfois, je me demande si je suis atteint...] |