NdA : Voila le chapitre 3, qui suit le personnage de Pavel, l’héritier du trône et le frère jumeau de Myldi. A suivre, l’apparition de nouveaux personnages que l’on retrouvera pas mal par la suite.

Bonne lecture !

Pavel sortit de la chambre de Myldi après avoir pris congé de cette dernière et de Tina, qui restait patiemment à son chevet. Aussitôt eut-il refermé la porte derrière lui, qu’il abattit violemment son poing contre le mur dans un cri de rage étouffé, sous l’œil stupéfait des sentinelles qui jalonnaient le couloir. Il s’éloigna rapidement, bouillant de colère. Il détestait sa mère ! Comment avait-elle pu ? Elle allait le lui payer ! Fouetter ainsi une princesse royale…Sa sœur bien aimée…Sa jumelle…Celle qui était une partie de lui…

Mais il avait trouvé au moins aussi furieux que lui en la personne de son père. Il n’oublierait jamais l’expression de ce dernier lorsqu’il était venu le chercher dans les cachots. Cachots dans lesquels il avait d’ailleurs passé plusieurs heures…Ses propres cachots ! Lui, le prince héritier, celui qui gouvernerait Meath un jour ! Mais lorsqu’il avait vu son père, il avait su qu’il n’aurait guère besoin de mettre les menaces qu’il avait proféré envers sa mère à exécution. Son père allait visiblement très bien s’en charger…Si ce n’était pas déjà fait, au demeurant…

Pavel sourit en repensant à tout cela. Sa mère était en train de payer et ce n’était que justice. Dans un premier temps, le roi l’avait confiné dans ses appartements jusqu’au bal du lendemain soir. Il s’amusait de constater que la punition qu’elle avait assénée à sa fille la veille lui était aujourd’hui attribuée. A priori, rien de bien terrible, mais pour Dya, ne pas accueillir tous les invités de grande marque, les nobles de tout Meath, était un véritable drame…Et que toute la Cour sache exactement pourquoi, un véritable calvaire. Pavel sourit à nouveau, satisfait en songeant au désaveu qui attendait sa mère, tout en se hâtant vers la cour principale du palais. Son père l’attendait pour accueillir leurs invités.

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Leurs hôtes se succédèrent dans un lent et monotone défilé, tout au long de la matinée. La noblesse de Meath était si nombreuse que, pour des évènements tels que celui-ci, le palais royal et ses 718 chambres parvenaient à peine à contenir tout le monde ! Selon le protocole, Pavel se tenait bien droit aux côtés de son père, accueillant avec amabilité et politesse comtes et comtesses, ducs et duchesses, barons et baronnes,…Toutes ces personnes que, pour la plupart, il ne connaissait que de nom. Des noms qu’il savait associés à des mouvements d’opposition à son père. En effet, ce dernier avait entrepris des réformes démocratiques, notamment sur la possession des terres, et les nobles meathois se sentaient lésés par ses méthodes… D’ailleurs, Pavel n’ignorait pas que ce bal était un excellent prétexte à son père pour s’entretenir avec eux et tenter d’apaiser les conflits.

Enfin, au milieu de la foule des arrivants, Pavel eut tout de même le plaisir de voir arriver des visages familiers… Tout d’abord, ses amis de la cité de Pyrla, la cité portuaire de l’ouest. Après la grande guerre de révolution menée par son père des années auparavant, ce dernier avait placé aux commandes de Pyrla son meilleur ami Tòmas. Celui-ci, marié à Galandiel, avait 2 enfants du même âge que Pavel. Le bouillant Alexey et la lumineuse Lucia…La proximité de Pyrla, à seulement une demie journée de cheval, leur permettait de se côtoyer souvent, et les enfants royaux avaient passé de nombreuses semaines à Pyrla au cours de leur enfance, de même que leurs cousins et cousines. Filipo avait toujours insisté pour qu’ils restent tous très liés. Et c’était le cas aujourd’hui…

Puis étaient arrivés à Leoness les nobles de Minas Terdeth, la ville de roc, bâtie et même sculptée aux pieds des monts Eridus, au Nord. Et parmi ces nobles, leurs seigneurs : Hylda, la sœur cadette de Filipo et son mari Senna ; la sœur de ce dernier : la tante Isabel, et les deux princes de Minas : Perez et William. Ils formaient tous deux, avec Pavel et Alexey, le quatuor de choc qui faisait trembler chaque chaumière de leurs facéties, lorsqu’ils se trouvaient réunis.

Enfin, étaient arrivés les seigneurs d’Ilona, la cité de l’est, et ceux d’Edoras, la cité guerrière du centre, qui avaient fait route ensemble jusqu’à la capitale. Sa cousine Caitleen, implacable, et son père Wilfried, de la même trempe, régnaient sur Ilona. Pavel n’avait jamais pu croiser le regard d’aucun d’entre eux sans ressentir un frisson glacé lui parcourir l’échine. Ils semblaient tous deux faits de la glace la plus dure…Mais Pavel ne pouvait s’empêcher de retrouver beaucoup de Myldi en sa glaciale cousine, ce qui la lui rendait finalement plutôt sympathique… D’ailleurs, ces deux dernières étaient inséparables…

D’Edoras, Pavel accueillit avec grande joie sa tante Lucilla, dans toute sa splendeur, accompagnée de Iain, son insignifiant mari, et de ses 3 enfants : Colin, le sage guerrier ; Elena, réputée pour être la plus belle femme de Meath, et ce n’était guère lui qui allait affirmer le contraire…et enfin, la douce Megghan.

Lorsqu’il eut embrassé affectueusement cette dernière, Pavel eut un sourire satisfait : pour la première fois depuis quelques années, la famille royale était réunie au grand complet. Et cela lui plaisait. Il aimait ce sentiment d’appartenance à une fratrie, la sensation de fierté et la force qu’il pouvait en tirer…Son père lui avait toujours conseillé de privilégier l’essentiel…Sa famille était l’essentiel…

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Pavel tendit la main vers les longs cheveux châtains mais ceux-ci lui glissèrent entre les doigts…Comme toujours…

« Attendez ! », cria-t-il alors. « S’il vous plaît ! Ma dame ! »

Un éclat de rire familier retentit à ses oreilles lorsqu’il eut prononcé ces mots. Etrangement, il fut pourtant incapable d’y mettre un nom dessus…Mais ce rire, si pur, si cristallin…il le connaissait…

« Attendez ! », s’exclama-t-il à nouveau, se lançant à la poursuite de la fine silhouette. « Ma dame ! »

Elle ralentit puis s’arrêta.

« Tu ne dois pas m’appeler ainsi, Pavel… »

Il était tout près d’elle à présent…Si près…Il sentait son cœur tambouriner si fort dans sa poitrine…Il admira un instant ses cheveux…Ses longs cheveux bruns…Magnifiques…De longues boucles parfaites…Etrangement, ils lui rappelèrent ceux de Myldi…

« Qui êtes-vous ? », murmura-t-il.

« Je suis Shana », souffla-t-elle comme une évidence. « Mais tu ne dois pas m’appeler ainsi non plus… »

Stupéfait et ne croyant pas en sa chance, Pavel la vit amorcer un demi-tour. Il se tendit d’excitation…Il allait enfin la voir…Connaître son visage…Il allait savoir !

« Tu dois m’appeler… »

Pavel se réveilla en sursaut, suffoquant. Il reprit peu à peu ses esprits, et tandis que sa respiration se calmait, il laissa échapper un grognement de dépit. Comme toujours, il s’était réveillé avant de savoir qui était cette femme…Pourtant, cette fois, il était si près…si près de savoir enfin…Il avait même appris son prénom…Shana…

Il se frotta les yeux et inspira une grande bouffée d’air. Ces rêves le hantaient depuis si longtemps à présent qu’il aurait été bien incapable de dire quand ils avaient commencé. Il se releva, époussetant d’un revers de main la terre et les brins d’herbe restés sur ses vêtements. Il s’était assoupi à l’ombre d’un immense pin parasol, dans les Jardins du palais. Il jeta rapidement un coup d’œil au soleil, n’ayant strictement aucune idée de l’heure qu’il pouvait bien être. Il grimaça. Il était encore tôt, l’après-midi venait à peine de commencer…Il lui restait bien quatre bonnes heures à tuer avant le début du Tournoi.

Il sourit d’excitation. Le Tournoi… Chaque année, son père organisait un tournoi de chevalerie pour son anniversaire. Cet évènement faisait venir à Léonness des dizaines et des dizaines de jeunes gens de tout le royaume, espérant le remporter. A gagner ? Une bourse de mille écus et le baiser de la damoiselle de son choix. Il est certain que la récompense attirait de nombreux participants. Mais ce n’était pas ce qui intéressait Pavel. Il n’avait aucune damoiselle précise en vue…Celles qu’il croisait à la Cour tous les jours étaient si insipides…S’il gagnait, il choisirait probablement sa jumelle, songea-t-il distraitement en haussant les épaules. La bourse ne l’intéressait guère plus…Non, ce qui l’intéressait réellement, c’était la gloire, le prestige, cette ivresse que la victoire seule pouvait procurer…Et s’il avait échoué de si peu l’année précédente, il comptait bien l’emporter cette année ! Ne serait-ce que pour faire enrager Myldi qui, en tant que fille, ne pouvait y participer…Ce qui la frustrait au plus haut point ! Il se remémora en réprimant un rire, les crises de rage dans lesquelles tout cela la plongeait chaque année à l’approche du Tournoi ! Et que dire pour la calmer ? Elle était la meilleure, le savait pertinemment, mais ne pouvait pas le montrer…

Le Tournoi se décomposait en trois épreuves : la joute, le tir à l’arc et pour finir, le combat à l’épée… L’arc était son point faible mais s’il arrivait à remporter les deux autres épreuves, il gagnerait à coup sûr…Mais il n’y était pas encore ! Il fallait qu’il garde tout son sang-froid pour ne pas, comme l’an passé, se faire doubler au dernier moment. Il sourit, sûr de lui, et partit rapidement en direction du palais. Peut-être qu’une chevauchée autour de Leonness tenterait ses cousins…

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Pavel ralentit sa monture alors qu’ils arrivaient en vue de Pendarane, et la fit dévier vers l’est au petit trot. Pas question de se perdre dans cette maudite forêt à quelques heures à peine du Tournoi ! Il se retourna et jeta un coup d’œil à ses compagnons de chevauchée. Tonyo, William et Alexey avaient accepté de l’accompagner.

« Comment va votre sœur ? », lui demanda courtoisement Tonyo en poussant sa monture à sa hauteur.

« Je vous en prie, Tonyo ! Nous avons quasiment le même âge ! Vous pouvez me tutoyer en privé…Personne n’en saura rien ! », rétorqua Pavel en riant.

Tonyo eut un sourire franc.

« Très bien…Alors…Comment va ta sœur ? », demanda-t-il à nouveau.

« Bien…Elle se remet doucement. Le médecin a affirmé qu’elle serait sur pieds demain. Bien qu’elle veuille absolument assister au Tournoi…Ca ne m’étonnerait pas qu’elle réussisse à convaincre Père d’y assister…Tu la croiseras sûrement au bal demain. Je suppose qu’elle voudra te remercier… »

« Me remercier de quoi ? », s’étonna le prince sifilien.

« Allons ! Nous savons tous très bien que si tu n’avais pas été chercher mon père, Myldi serait bien plus mal en point à l’heure qu’il est… Crois-moi, elle te sera reconnaissante à vie…et elle déteste cette idée ! Mais Myldi n’oublie jamais rien. Qui sait ? Peut-être qu’un jour, elle te rendra la pareille… Toujours est-il que toute cette histoire a dû te donner une bien mauvaise image de Meath ! »

« Nullement ! Sans vouloir t’offenser, seule ta mère s’est ridiculisée à mes yeux…Mais je n’ai pas grand-chose à y redire…La mienne est toute aussi dépourvue de raison ! »

« Ma mère est complètement folle ! Si attachée aux convenances…Et pourtant, lorsqu’il s’agit de Myldi ou Tina, elle ne se contrôle plus ! »

« Myldilia a été très courageuse… », souffla Tonyo, presque pour lui-même.

« Myldilia est très courageuse », approuva Pavel. « Peut-être un peu trop d’ailleurs…Elle ne semble avoir peur de rien…Et ça lui joue souvent des tours . »

« Eh, Pasha ! », l’interpella Alexey, se portant à sa hauteur avec William. « Aurons-nous le plaisir de voir ta charmante jumelle durant notre séjour à Léonness, ou nos yeux seront désespérément privés de son si joli minois ? »

Pavel éclata de rire à ces mots.

« C’est justement ce que j’étais en train de dire à Tonyo ! Myldi sera au bal demain soir ! Tu pourras la faire valser autant qu’il te plaira ! »

« Autant qu’il lui plaira ! », corrigea William, faisant allusion au si « charmant » caractère de sa cousine. « J’aurais donc le plaisir de voir ma douce Tina, qui ne sera plus retenue au chevet de sa sœur adorée ! », ajouta-t-il, l’air faussement rêveur.

« Et moi de faire sa connaissance ! », ajouta Tonyo.

« Mettons-nous d’accord Tonyo ! J’ai la priorité sur les danses de Tina ! », l’interpella William d’un ton féroce.

Pavel s’interposa en riant.

« Je t’interdis de faire la cour à Tina, William ! Elle est bien trop jeune pour toi ! Et puis, ta réputation est atroce !! »

Ils éclatèrent tous de rire à ces derniers mots.

« Très bien ! », reprit William, faussement vexé. « Dans ce cas, sur quelle douce jeune fille vais-je bien pouvoir rabattre mon attention et mes soins empressés ? »

« Mes sœurs aînées ? » suggéra Pavel. « Tu les occuperais et elles n’auraient guère le temps de cancaner… »

William grimaça comiquement.

« Trop glaciales ! »

« Caitleen ? » proposa Alexey.

« Entre elle et son père, je ne finirais pas la soirée vivant ! »

« Votre cousine Megghan ? Ou sa sœur Elena ? » avança Tonyo.

« Meg dansera toute la soirée avec son frère Colin, comme toujours…Quant à Elena, toutes ses danses sont retenues depuis au moins six mois ! »

« Lucia ? »

Pour réponse, William désigna l’air féroce d’Alexey

« Son frère ici présent abrègerait ma vie de quelques longues années ! »

« Eh bien, je crains que nous ayons fait le tour de la famille royale ! Il faudra que tu te contentes d’une noble ! On m’a dit que les sœurs Permeal étaient charmantes cette année ! », lança Pavel.

« Ou bien la fille Brivet… »

La conversation continua sur cette voie pendant un bon moment jusqu’à ce que William lui-même détourne la conversation.

« A propos, avez-vous vu passer dans vos villes cette troupe de charlatans dont le rouge semblait être la couleur de prédilection ? »

« Oui, ils sont restés quelques jours à Pyrla », affirma Alexey. « Mais j’avoue n’y avoir guère prêté attention… »

« Tu as bien de la chance ! » s’exclama Pavel. « Myldi et Tina nous ont traîné, avec ce pauvre chevalier Eragorn, les voir tous les soirs pendant les deux semaines qu’ils ont passé à Léonness ! Elles sont si friandes de toutes leurs histoires à dormir debout ! Par Dana ! Ils ont dû nous raconté au moins vingt fois la légende des Ilderhuìns ! »

« Qu’est-ce que les Ilderhuìns ? », questionna Tonyo, intrigué malgré lui.

« Oh, une vieille légende meathoise… Les Ilderhuìns seraient les cinq pierres bénies de Dana. L’histoire raconte que la déesse les aurait dissimulées en différents endroits de Meath, pour protéger le royaume. L’homme qui parviendrait à les réunir connaitrait la richesse et la prospérité éternelle mais le royaume serait plongé dans le chaos… »

« C’est une jolie légende… », concéda Tonyo.

« S’il n’y avait que celle-ci ! Mais ces charlatans ont dans leurs cordes un nombre impossible de légendes, contes et autres inepties ! Par Mörnir, j’ai passé deux semaines infernales par leur faute ! »

Tous rirent aux éclats devant son air de martyr. Puis, ils décidèrent d’un commun accord qu’il était grand temps pour eux de retourner au palais afin que chacun se prépare pour le Tournoi.

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Pavel écouta avec délice les acclamations de la foule massée sur les gradins au dehors. Il enfila son heaume qu’il enfonça bien sur sa tête et s’apprêta à sortir de sa tente. Lorsqu’il ferait son apparition dehors, toutes les acclamations seraient pour lui, il le savait. Lui, le fils prodige, l’héritier du trône…Déjà aimé parce que son père l’était ; déjà respecté parce que sa jumelle l’était ; déjà protégé par le peuple parce que sa sœur cadette l’était ; déjà craint des guerriers parce que sa cousine Caitleen l’était…Sa famille et sa naissance lui avait tout donné… Mais tout cela ne lui faisait pas peur. Il savait ce qu’il avait et ce qu’il aurait à faire…Il serait roi un jour et cela lui convenait très bien…Parce qu’il savait que ses sœurs, ses cousins, ses cousines, ses oncles et ses tantes, et le peuple de Meath seraient tous là pour l’aider lorsque ce jour serait arrivé…

Il sourit. La victoire lui tendait les bras aujourd’hui…Il avait échoué au tir à l’arc, battu de justesse par Alexey, mais il avait désarçonné ce dernier dès le premier tour de joute. Ce qui le plaçait bien devant lui. A présent, il allait jouter pour le dixième tour, le dernier. Contre Eragorn… S’il le désarçonnait, il serait quasiment sûr de l’emporter…A condition de remporter l’épreuve à l’épée…

Il sortit donc de sa tente. Aussitôt, et comme il s’y était attendu, le public l’acclama. Pavel jeta un regard circulaire autour de lui. En face de lui, de l’autre côté de l’aire de joute, Eragorn était déjà sur sa monture et l’attendait. Dans les gradins de bois installés dans le Parc du palais pour l’occasion, des gens du peuple, des nobles. Dans la tribune d’honneur, couverte, se tenaient son père, le roi Santiago, ses oncles et ses tantes, ses cousines, Tina, et Myldi qui avait bravé son père pour assister au Tournoi. Ce dernier s’était mis dans une colère épouvantable, mais Myldi l’avait tant et tant supplié qu’il avait fini par céder. Elle lui lançait un regard fier, et il ne put que lui sourire en retour…Il savait qu’elle ne le verrait pas avec son heaume, mais il savait également qu’elle connaissait exactement toutes ces réactions, et que c’était comme si elle pouvait voir son sourire à travers la protection métallique… il fronça légèrement les sourcils en remarquant que Tina avait les yeux fixés sur le chevalier Eragorn. Tous deux avaient toujours entretenu une relation particulière…

Il prit une grande bouffée d’air frais puis monta à cheval et se saisit fermement de la lance que lui tendait un écuyer. Il la mit en travers de sa monture et baissa la visière de son heaume. Puis, il éperonna son cheval et se plaça de son côté de l’aire de joute. Eragorn s’avança à son tour. Au signal, ils s’élancèrent à pleine vitesse, dans le murmure d’appréhension de la foule. Il souleva sa lance et la dirigea sur la poitrine d’Eragorn, attendant le choc. Il esquiva la pointe émoussée de son adversaire, mais la sienne s’écrasa contre l’armure du chevalier, se brisant dans un choc violent. Pavel eut la respiration coupée sous le choc et n’eut pas vraiment le temps d’analyser la situation que son cheval était déjà arrivé en bout de parcours.

Il entendit un cri strident et un bourdonnement d’attente s’éleva de la foule. Il confia ce qui restait de sa lance à l’écuyer et ôta son heaume avec difficulté. La première chose qu’il vit fut Myldi, appuyée à la barrière, soutenue par son père, l’air effrayé. Aussitôt, il déglutit péniblement, avant de reporter son regard sur le sable de la piste. Tina arrivait à toute vitesse vers Eragorn, qui gisait au sol, inerte. Il s’élança à son tour. Sa sœur l’avait devancé et s’affaissa aux côtés du chevalier, maculant sa robe blanche de terre battue.

« Oh, par Dana, pitié ! », l’entendit-il murmurer en arrivant près d’elle.

Elle releva la visière et se pencha vers le visage du chevalier, tâtant dans le même temps l’endroit où la lance de Pavel s’était brisée. Ses longs cheveux dorés s’étalaient tout autour d’elle, empêchant Pavel de voir son expression.

« Tina ! », appela Myldi, d’une voix saccadée. « Est-ce qu’il respire ? »

Tina releva la tête.

« Oh ! Pasha ! Il est vivant ! Dana soit louée ! », s’exclama-t-elle.

Pavel laissa échapper un long soupir de soulagement. Il ne se serait jamais pardonné d’avoir tué Eragorn. Plus qu’un chevalier, c’était son ami…il s’agenouilla à son tour auprès du chevalier et l’appela doucement. Mais ses appels restèrent sans réponse. A nouveau, Tina se pencha vers lui. Pavel vit les yeux gris d’Eragorn s’ouvrir et rencontrer ceux de sa sœur qui lui sourit. Soudainement, il se sentit désagréablement de trop. Il se releva et fit signe à sa jumelle que tout allait bien. Mais un appel discret de Tina le fit changer d’avis. Elle n’avait pas quitté le visage du chevalier du regard, occupant son attention, mais désignait à son frère sa main tâchée de sang qu’elle venait de dégager de la cotte de mailles du chevalier. Aussitôt, Pavel fit signe que l’on apporte une civière pour évacuer le blessé.

Ce qui fut fait aussitôt. Pavel saisit un bout de la civière et la souleva avec deux écuyers et Tonyo qui avait accouru. Ils se précipitèrent vers la première tente sur leur chemin. Tina trottinait à côté d’eux. Elle avait pris la main du chevalier dans la sienne. Une fois dans la tente, ils soulevèrent le chevalier et le déposèrent sur la litière de paille. Tina se jeta presque sur lui pour lui retirer sa côte de mailles, mais ses petites mains luttaient en vain contre la lourde armure.

« Tina, le médecin va arriver ! », l’interrompit doucement Pavel.

« Pasha ! Aide-moi à retirer cette cotte ! », ordonna-t-elle durement, au bord de l’hystérie.

Sonné par le ton de sa sœur, d’ordinaire si douce, il s’exécuta sans broncher. Aidé de Tonyo, il retira la lourde cotte de mailles du chevalier. Immédiatement, Tina déchira sa chemise tâchée de sang d’un geste brusque qui les fit sursauter. Elle posa sa main sur la blessure, arrachant un gémissement à Eragorn. Ses doigts fins tâtonnèrent un instant sur la plaie et elle eut un soupir de soulagement.

« Juste une éraflure… », murmura-t-elle à l’attention de tous, en adressant un sourire rassurant à Eragorn.

A nouveau, Pavel eut l’impression d’être de trop.

« Tu peux aller te préparer », lui lança Tina. « Il est juste un peu sonné mais il sera sur pieds pour te battre à l’épée… »

Une fois de plus, elle sourit au chevalier Eragorn, puis sortit de la tente. Pavel confia Eragorn à Tonyo et alla se rafraîchir et se préparer pour l’épée.

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Tina avait eu raison. Eragorn était sur pieds et même très bien ! La finale d’épée, la dernière épreuve, l’opposait, lui, Pavel, au chevalier qu’il avait cru tuer quelques heures auparavant… Et en tant que prince héritier, il se trouvait à présent en fort mauvaise posture. Le combat avait commencé depuis de longues minutes à présent mais plus le temps passait, plus il avait du mal à repousser les assauts, et à parer les attaques du chevalier de Léonness. Il frappait si fort, se déplaçait si vite. Pavel savait qu’Eragorn s’était entraîné de longues heures avec Myldi, mais il n’aurait jamais cru qu’il avait atteint ce niveau d’excellence.

Dans un cri de frustration, il fut désarmé par Eragorn, d’un coup d’épée précis. Et pour la deuxième année consécutive, la victoire lui échappa. Ecœuré, il se tourna vers les gradins d’honneur. Myldi lui souriait toujours. Elle semblait si fière de lui…C’était là l’essentiel. Il lui rendit son sourire et se tourna vers Eragorn, le félicitant chaleureusement. La foule avait déjà commencé à quitter les gradins, souhaitant retourner dans la ville avant la tombée de la nuit qui arrivait à grande vitesse.

Pavel et Eragorn se dirigèrent d’un même pas vers la tribune d’honneur où ils grimpèrent. Myldi s’avança vers son jumeau en souriant.

« Joli combat, Pasha… »

« Le résultat n’est guère joli… »

« On se moque du résultat…Seule la manière importe », murmura-t-elle en déposant un baiser sonore sur sa joue. « Tu as quand même droit au baiser de ta damoiselle préférée ! »

Il éclata de rire et se tourna vers Eragorn auquel son père était en train de remettre la bourse de mille écus. Et avant qu’il ne se rende compte de ce qu’il se passait vraiment, Pavel aperçut le chevalier poser ses lèvres sur celle de Tina dans un chaste baiser. Il avala de travers et se mit à tousser violemment, soutenue par Myldi qui riait aux éclats.

« Je n’arrive pas à croire que Père l’ait laissé faire cela ! Elle n’a que 13 ans ! », chuchota-t-il, furieux, à son intention. « Je vais aller lui toucher deux mots à ce chevalier ! »

« Pavel, ne sois pas ridicule ! Je t’interdis d’intervenir ! C’est son premier baiser…Elle a bien de la chance d’ailleurs, Eragorn doit être bien plus doué en la matière que ne l’était Shantì avec moi… »

« Quoi ??? Shantì ?! », s’étrangla Pavel. « Le fils du cuisinier ? Oh par pitié, ne me dis pas que ce bon à rien a osé poser ses mains sur toi ! »

« C’était il y a 4 ans, Pasha…C’est juste mon ami depuis ! », rétorqua-t-elle en haussant distraitement les épaules.

Pavel lui lança un regard furieux alors que Myldi continuait de rire à gorge déployée. C’est alors que par-dessus l’épaule de sa jumelle, il aperçut le regard de Tonyo sur elle.

« C’est assez ! », jeta-t-il en lançant un regard assassin à ce dernier. « Je vais me changer ! »

« C’est ça ! Va te changer ! », le taquina Myldi, riant toujours.

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Pavel s’arrêta brusquement en plein milieu du couloir sombre. Il faisait nuit depuis un bon moment à présent et il regagnait rapidement ses appartements, impatient d’aller dormir après cette journée bien chargée. Il se trouvait dans l’aile de la famille royale, lorsqu’il entendit des gémissements lascifs.

Il sourit, moqueur. William était-il en train de s’amuser avec une domestique au détour d’un couloir ? Amusé, il se dirigea vers les gémissements dont le volume augmentait de plus en plus. Mais ses pas ne le conduisirent pas dans un recoin sombre comme il avait pu le penser quelques instants plus tôt…Il arriva devant des appartements privés dont la porte était entrouverte de quelques centimètres. Un filet de lumière s’échappait dans le couloir. C’est alors seulement que Pavel remarqua l’absence de sentinelles dans le couloir. Alors qu’ils étaient censés garder cette aile du palais en permanence, il n’y avait aucune trace d’un garde quel qu’il soit dans le couloir désert et sombre. Comment cela était-il possible ?

Intrigué, Pavel se pencha vers l’interstice de la porte. Les gémissements étaient de plus en plus forts. Il se figea, fasciné par la scène qui se déroulait sous ses yeux. La femme était magnifique…La peau diaphane, ses longs cheveux blonds retombant en cascade sur son dos et son visage, ses courbes parfaites… Elle se tenait à quatre pattes tout au bord de l’immense lit à baldaquin. Derrière elle, debout, un homme, que Pavel ne pouvait voir que de dos, la pénétrait avec force. De plus en plus vite…leur arrachant à tous deux des gémissements rauques.

La respiration devenant haletante, Pavel ne pouvait détacher son regard du couple. Soudain, ils poussèrent simultanément un râle de plaisir et s’effondrèrent tout deux sur le lit, l’homme s’affaissant sur la femme, toujours en elle. Pavel sentait sa propre excitation grandir. Au bout de quelques minutes, la femme gloussa doucement.

« Eh bien, chevalier…Déjà fatigué ? », murmura-t-elle sensuellement, recommençant à onduler des hanches. « Mais quoi qu’il arrive n’oubliez pas votre promesse. »

Elle se dégagea et l’homme se retourna, s’allongeant sur le dos. Pavel reconnut Igor, le commandant des chevaliers de Leonness. La femme grimpa à califourchon sur lui et commença à lécher sa poitrine, puis descendit vers son nombril puis plus bas. Le sexe du chevalier était à nouveau dressé. Au moment où elle le prit en bouche, Pavel put apercevoir son visage et retint un cri d’horreur, reculant violemment sous le choc. Sa mère…Par Mörnir ! Il n’arrivait pas à y croire ! Et s’il avait besoin d’une confirmation, Igor la lui donna dans un murmure rauque.

« Oh, ma reine ! »

Totalement désorienté, il s’éloigna rapidement, plus honteux que jamais par la réaction naturelle qui s’était formée dans ses chausses.

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Perdu dans ses pensées, Pavel sentit un coude s’enfoncer sans douceur dans ses côtes et sursauta. Son regard vert croisa le gris des yeux de Tina. Elle lui adressait un air plein de reproches. Il fit donc de son mieux pour se concentrer sur la cérémonie se déroulant sur la place centrale de Leonness. Aujourd’hui étaient célébrées, en plus de son anniversaire, les festivités de la déesse Dana. Ainsi, toute la ville se réunissait tous les ans sur la place devant le temple de la déesse pour assister au cérémonial organisé par les prêtresses. Vêtues de rouge, couleur de la déesse, ces dernières s’adonnaient à différents hommages, sous les yeux fascinés de la foule. Au programme, danses et chants de l’ancien temps ; dressage de chevaux, symbole de la terre, … Enfin, la prêtresse possédant le don de double vue sacrifiait un taureau et lisait l’avenir du royaume dans son sang frais…

En tant que membre de la famille royale, Pavel était tenu d’assister à ces festivités. Il se tenait donc debout, au premier rang, entouré de son père, ses sœurs aînées et Tina. L’état de Myldi ne lui avait pas permis de venir, et Dya était toujours consignée dans ses appartements… Derrière lui se trouvaient tous les membres de sa famille présents à Leonness et les princes de Sifilia et derrière eux encore, les membres de la Cour, puis les gens du peuple… Partout autour d’eux, des gardes en civil, et des chevaliers…Lorsque la famille royale descendait ainsi en ville, une protection rapprochée était indispensable…

Pavel ne quittait pas des yeux la prêtresse qui amenait à présent le taureau, tentant de se concentrer sur elle…

A Meath, tout comme en royaume de Brennin, au sud, ou en terre sifilienne, par delà les océans, les divinités adulées étaient au nombre de quatre. Elles symbolisaient ainsi d’une certaine manière les quatre éléments.

Dana et Mörnir étaient les deux plus puissants et les deux opposés. Les légendes et les contes racontaient à leur sujet qu’ils s’étaient fait la guerre durant des millénaires, le monde n’étant alors que chaos. Puis, ils s’étaient finalement accordés et avaient créé le monde de Méraléa… pour s’ignorer totalement ensuite.

Dana était la déesse de la terre, déesse-mère et créatrice. Son culte était très répandu à Meath. Des temples à son hommage se dressaient un peu partout dans le royaume, le plus vaste se trouvant dans la forêt de Pendarane. La reine Dya possédait d’ailleurs de nombreux et très puissants soutiens parmi les prêtresses. Ces dernières, toujours vêtues de rouge, s’adonnaient tout au long de l’année à divers rituels. Les festivités en l’honneur de la déesse avaient lieu en ce jour depuis des dizaines d’années…Jour où le soleil brillait plus longtemps que tout autre jour de l’année. Pavel et Myldi étaient nés ce jour-là…Beaucoup avaient voulu y voir un signe...

Mörnir était le maître du ciel et de la foudre… Le Père créateur…Lorsque sa colère éclatait, les cieux se déchiraient. Beaucoup de temples lui étant consacrés se trouvaient dans les monts Eridus, au plus proche du ciel. Des prêtres méconnus y vivaient en ermites, organisés en castes rigides, régies par des règles très strictes.

Ceinwen…Déesse chasseresse…Elle avait pour elle la forêt et la malice de l’eau. On la disait séductrice et dangereuse, et certains hommes se vantaient d’avoir eu à la satisfaire au détour d’un sentier de Pendarane…Nul ne savait s’il s’agissait là d’une quelconque vérité ou d’ego masculins surdéveloppés…Ce que beaucoup remarquaient, en revanche, c’est que ces hommes-là ne vivaient jamais très longtemps après leurs vantardises…

Enfin, Nemain et Morrigan…les déesses du sang…Doubles mais unique, tant elles étaient complémentaires et indissociables. Leur culte, délaissé en temps de paix, prenait une toute autre importance lorsque la guerre venait…Il avait d’ailleurs été à son apogée au temps des grands guerriers d’Edoras.

Mais malgré ses efforts de concentration et la meilleure volonté dont il disposait, Pavel ne pouvait s’empêcher de repenser à la nuit précédente. Sa mère…avec Igor, commandant des chevaliers de Leonness…Les chevaliers les plus puissants de Meath…L’élite du royaume…

En réalité, et pour dire vrai, ce n’était pas réellement le fait que sa mère couchait avec lui qui le dérangeait. Ce n’était pas la première fois qu’elle trompait son père et il le savait très bien. Ce dernier ne visitait plus les appartements de la reine depuis maintenant bien longtemps, et cela était même de notoriété publique. En fait, Pavel ne se souvenait même pas d’un jour où il aurait pu dire que ses parents lui avaient paru amoureux l’un de l’autre…S’ils l’avaient été un jour… Chacun trouvait son plaisir ailleurs et tous s’en satisfaisaient…Ce n’était pas nouveau.

Cependant, Dya avait toujours choisi ses amants avec soin parmi la haute noblesse. Mais cette fois, elle avait jeté son dévolu sur un chevalier…Qu’est-ce qui avait pu la pousser à faire un tel choix ? Qu’est-ce qu’elle manigançait ? Parce qu’elle manigançait forcément quelque chose…Pavel connaissait trop bien sa mère pour être certain qu’aucuns sentiments n’entraient en jeu dans cette histoire. Si elle avait autorisé Igor à partager sa couche, c’est qu’elle avait besoin de lui. Cette hypothèse était d’ailleurs confirmée par la promesse que sa mère avait évoqué au chevalier…Quelle était cette promesse ? Qu’est-ce qu’Igor avait bien pu promettre à Dya en échange de ses faveurs ?

Un cri suraigu le fit sursauter et le tira de toutes ces réflexions et suppositions. La prêtresse au don de double vue, couverte du sang du taureau qu’elle venait de sacrifier, paraissait être en transe. Tina lui adressa un regard sceptique qu’il lui rendit. Elle ne croyait pas plus que lui à toutes ces mascarades. La prêtresse, les yeux révulsés, se tordait en tout sens, visiblement en proie à une douleur intense. Elle étalait le sang sur son corps et son visage, poussant des cris déchirants…et ridicules,…songea Pavel. Soudain, sa voix, étrangement déformée, s’éleva puissamment :

Avant la prochaine lune

Les perles disparaîtront une à une

Emportant avec elles l’espoir

Ne laissant place qu’au désespoir

La terre dans le chaos sombrera

Et à jamais perdue sera…

Pour le peuple de la lignée

Le salut ne pourra venir que des héritiers

Si le courroux de leur mère ils osent affronter

Car cette dernière il leur faudra dérober...

Un murmure d’affolement s’éleva de la foule lorsque la voix s’éteignit. La prêtresse s’évanouit et des cris de panique commencèrent à s’élever de la foule. Alors seulement, comme sorti d’un mauvais rêve, Pavel sentit les ongles de Tina qui s’étaient enfoncés dans la chair de son bras et grimaça de douleur. A son grand soulagement, son père, prit la parole, s’adressant à la foule de sa voix forte et rassurante.

« Que tout le monde se calme ! Je ne remets aucunement en cause la valeur des prédictions des prêtresses de la déesse mère…mais l’expérience m’a appris que toutes ne se réalisaient pas comme on l’imaginait. De plus l’avenir n’est pas inéluctable ! Aussi, je ne tolèrerai aucun accès de panique dans ma cité ! »

Ces paroles prononcées, le silence revint plus ou moins et la foule se dispersa dans le brouhaha. Pavel saisit la main de sa sœur cadette qui s’agrippait toujours à son bras et lui sourit, se voulant rassurant à son tour.

« Allons donc voir Myldi ! Elle doit se morfondre, seule dans ses appartements ! », proposa-t-il d’un ton faussement enjoué.

Et il l’entraîna vers le palais, aussitôt suivi de Megghan, Caitleen et Lucia, souhaitant également rendre une petite visite à leur cousine et amie.

-°O0O°-

« Oh, Myldi, tu aurais vu cette femme ! Les yeux révulsés ! Et sa voix ! »

Pavel éclata de rire devant l’air effrayé de Tina, aussitôt imité par sa jumelle.

« Voyons, Tina ! On a droit à cette mascarade chaque année ! »

« Oui, mais je t’assure que cette fois, c’était vraiment différent ! », insista Tina.

« C’est vrai… », approuva Megghan.

Pavel échangea un regard moqueur avec Myldi.

« Je vois… », lâcha Myldi, sceptique. « Et que disait cette atroce prédiction au juste ? »

« Oh ! Tu l’auras surement dans les détails demain, ou même ce soir, au bal…En gros, ça parlait de la destruction du royaume…et tout cela avant la prochaine lune, bien sûr ! », ne put s’empêcher de railler Pavel.

Le sourire moqueur de Myldi s’élargit.

« Je vois… », répéta-t-elle. « Comme tous les ans donc… »

Ces mots détendirent enfin l’atmosphère et tous éclatèrent de rire devant la véracité de ces propos.

-°O0O°-

Pavel pénétra dans la salle de réception, et comme toujours fut ébloui par les dizaines de lustres taillés dans le cristal le plus pur et ornés de centaines de bougies. Il resta un instant sur le seuil de la grande porte, observant la pièce. L’orchestre, dans un coin de la pièce, jouait des danses meathoises, et il aperçut Tina, splendide dans sa robe de perles blanches, tenter d’en apprendre les pas au prince Santi de Sifilia. Son père discutait avec ses oncles et tantes, jetant régulièrement un regard circulaire à la salle. Sa mère était absente, toujours confinée dans ses appartements par Filipo. Pavel sourit d’un air satisfait en songeant qu’elle devait en être malade ! Elle qui avait passé si longtemps à préparer ce bal avec acharnement ne pourrait même pas voir le résultat de son laborieux travail…

Comme prévu, Megghan ne quittait pas son frère aîné ; Lucia et Caitleen, ignorant tous cavaliers dansaient ensemble, formant un couple pour le moins fort étrange ; Will et Alexey contaient fleurette à diverses jeunes filles de la Cour ; Nyldia et Alylda avaient choisi pour cavaliers deux jeunes hommes de la plus haute noblesse ; Elena était près du buffet, entourée d’une douzaine de prétendants, et semblait s’ennuyer ferme… Pavel allait se porter au secours de sa cousine lorsque son attention fut détournée par une tache rousse sur sa droite. Il fit aussitôt volte-face pour apercevoir sa jumelle, plus éblouissante que jamais.

Vêtue de la robe bleu pâle qui avait donné tant de soucis à Dya, et qui soulignait à merveille les courbes fines de sa silhouette, ses cheveux flamboyants relevés et piqués de perles, elle était d’une beauté à couper le souffle. Il l’observa un instant et remarqua l’air pincé qui ornait son beau visage. C’est alors qu’il remarqua en ricanant qu’elle s’entretenait avec Tonyo. Après quelques mots et sourires forcés de la part de Myldi, Tonyo prit congé d’elle, et Pavel s’avança vers sa jumelle. Elle lui tournait le dos et il put contempler un instant la petite cicatrice en forme de rose qui ornait la peau blanche de son épaule. Personne n’avait jamais su d’où cela lui venait, même pas elle qui l’avait depuis son enfance.

Pavel la saisit fermement par la taille, lui arrachant un cri de surprise. Elle se retourna vivement, et s’exclama sur un ton de reproches :

« Pasha ! J’ai failli mourir de peur ! »

« Désolé, petite sœur, j’ignorais que tu avais les nerfs aussi fragiles que ceux de notre chère mère ! »

« Je n’ai pas les nerfs fragiles, ni une quelconque ressemblance avec « notre chère mère »…Quant au « petite sœur », je te rappelle que JE suis née la première…J’étais déjà la meilleure des deux ! », affirma-t-elle, triomphante.

Il grimaça, détestant qu’elle lui rappelle ce fait…Mais il s’avoua qu’il avait tendu le bâton pour se faire battre…Décidant de ne pas se laisser faire, il aborda le sujet qui la mettrait en difficulté :

« A propos…Que voulait Tonyo ? C’est lui qui est venu te voir ? »

Elle lui lança un regard noir avant de se résoudre à répondre devant son regard insistant.

« C’est moi qui suis allée vers lui…et tu le sais très bien ! Je l’ai remercié d’être allé prévenir père l’autre jour…C’est tout ! Je ne peux pas le sentir ! »

« Tu ne peux pas le sentir parce que tu as été obligée de le remercier ! », rigola Pavel devant l’air déconfit de sa jumelle.

« Tu n’aurais pas vu Tina ? Elle n’a pas de cavalier…Une certaine personne a interdit à tous ses cousins de l’inviter à danser…Et Eragorn est absent ce soir…Il a été appelé au dernier moment à l’autre bout de la ville… », lança Myldi d’un ton suspicieux.

« D’accord, c’est moi ! Tu ne voulais tout de même pas que Will lui fasse la cour toute la soirée ? », s’insurgea-t-il devant le regard de reproches que lui adressait sa sœur.

« Will et Alexey, c’est une chose…Mais Perez…Et Eragorn ! C’est son ami…Il n’aurait rien fait de mal ! »

« Après son attitude d’hier, j’en doute ! »

« Je vois… Tu vas donc allé voir ta sœur cadette surprotégée et lui offrir ton bras pour qu’elle puisse danser au moins une fois ce soir… »

« Ma sœur cadette adorée n’a nullement besoin de moi, elle est très occupée avec son cavalier justement…Le prince Santi… »

« Ce bellâtre ralenti ? », s’exclama Myldi.

« Parfaitement… »

« Eh bien, tu peux être tranquille, il est certain qu’avec lui, rien ne lui arrivera ! »

« C’est exactement ce que je me disais…C’est pourquoi je peux maintenant inviter ma jumelle chérie à ouvrir la première valse avec moi en toute tranquillité ! De plus, Megghan, Lucia et Caitleen vont se démettre un bras si elles continuent à nous faire de tels signes depuis la piste de danse ! »

Myldi éclata de rire en apercevant effectivement ses cousines et son amie s’agiter de plus en plus dans leur direction. Elle se saisit de la main que lui offrait son frère et Pavel l’entraîna derrière lui vers les danseurs.

-°O0O°-

Pavel observait distraitement son père aux côtés de Myldi, devisant tout deux tranquillement. Alylda et Nyldia, montées en amazone, piaillaient au sujet de robes, dentelles et gentilshommes…Tina adressait sans s’en rendre vraiment compte des sourires enjôleurs au chevalier Eragorn… Le jeune homme soupira d’aise en s’étirant sur sa monture dans une attitude féline. C’était vraiment une magnifique journée, malgré la chaleur moite des sous-bois de Pendarane…Des journées comme il y en avait si peu…Sa mère, toujours confinée dans ses appartements, n’avait pu participer à cette partie de chasse organisée par Filipo. Mais personne ne semblait en être réellement affecté…La présence de Dya dans de telles expéditions n’était jamais réellement souhaitée…

La plupart des invités pour le bal étaient partis deux jours auparavant ; les princes de Sifilia et leur père, la veille…La vie à Leonness avait repris son cours tranquille…Loin des prédictions de chaos, des robes, des dentelles et du rythme de vie étourdissant de cette dernière semaine…

Pavel fronça les sourcils en entendant des bruits de sabots martelant le sol derrière leur petit groupe. Il se jucha aussitôt sur ses étriers et balaya du regard le sentier sinueux dans son dos. Un rayon de soleil qui avait réussi à percer l’épaisse barrière de feuillages de Pendarane lui fit cligner vivement des yeux. Il mit sa main en visière et aperçut entre 2 méandres du chemin des tuniques bleues sombres frappées du lion scintillant de Léonness. Des tuniques qu’il reconnut immédiatement : des chevaliers de Léonness…

Son père lui lança un regard interrogateur. Ses petites promenades en forêt n’étaient jamais sans danger même s’ils étaient dotés d’une solide escorte…Tous savaient pertinemment que Pendarane était littéralement infestée de brigands de toutes sortes…Et la capture d’un membre de la famille royale aurait constitué pour eux la promesse d’une rançon plus que correcte. Pavel sourit à son père, rassurant :

« Des chevaliers, Père… ils doivent patrouiller dans Pendarane… », lui lança-t-il.

« Ce qui m’intrigue, c’est qu’ils ont poussé leur chevaux au galop… »

Il fit la moue puis haussa les épaules et poussa sa monture vers Tina.

Soudain, un sifflement strident qu’il ne connaissait que trop bien, vint résonner à ses oreilles. Aussitôt, il se plaqua sur son cheval dans un mouvement de réflexe. Il entendit Eragorn hurler des ordres en tous sens. Mais il était déjà bien trop tard…Il allait dégainer son épée quand il interrompit son geste sous le coup d’un violent choc suivit d’une vive douleur à son flanc droit. Y portant sa main, il grimaça en la retirant pleine de sang...