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Stellane
Par haniPyanfar
Harry Potter  -  Romance/Action/Aventure  -  fr
21 chapitres - Complète - Rating : T (13ans et plus) Télécharger en PDF Exporter la fiction
    Chapitre 10     Les chapitres     50 Reviews    
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La Sardine Rieuse

Stellane

Auteur : haniPyanfar

 

o – o – o – o – o – o

Deuxième partie : Stellane et Harry Potter

o – o – o – o – o – o

 

Chapitre 10 : La Sardine Rieuse.

 

o – o – o – o

 

Mardi 3 juillet 2007. La Sardine Rieuse à la sortie de Penzance, Cornouailles.

 

" Vous aussi, vous êtes là pour un tatouage ? Il faut s'inscrire sur la liste d'attente, vous savez ! La Vipéra est très demandée. Elle est arrivée ce matin et elle ne reste que trois jours. Alors, si on est trop nombreux, elle ne pourra pas prendre tout le monde ...

 

Ron et Harry étaient assis à une table, dans le pub de La Sardine Rieuse. La salle était presque vide en ce milieu d'après midi. Un jeune homme était installé à la table voisine. Il souriait et avait clairement envie de discuter pour passer le temps.

 

... Je vous ai vu regarder les bras de Yann quand il vous a apporté vos bières. Le superbe motif celtique sur le bras droit, c'est La Vipéra qui l'a dessiné, mais pas la tête de mort à gauche. Ce tatouage-là est plus ancien et si vous voulez mon avis, il est très moche. Pas la peine de demander le même, La Vipéra vous enverra bouler. D'ailleurs Yann aimerait bien le faire disparaître mais c'est impossible il paraît. Souvent, il le dissimule sous un bracelet de force en cuir mais aujourd'hui, il fait vraiment trop chaud. C'est votre premier tatouage ? Je vous ai jamais vu à la Sardine. Moi j'en ai déjà deux terminés et le troisième est en cours sur mon dos. Une Japonaise en kimono avec le mont Fuji derrière. Ça me coûte un max de fric et ça fait un mal de chien mais quel succès auprès des filles quand il sera fini ! Vous voulez voir ?

 

-Non, répondit Ron d'un ton sec. Nous ne venons pas pour nous faire tatouer. Nous sommes juste de passage.

 

-Mais vous avez l'air de bien connaître Yann, le serveur, reprit Harry d'une voix plus conciliante. Qu'est-ce que c'est que cette tête de mort ? On dirait la marque d'une secte satanique.

 

-Vous ne croyez pas si bien dire, répondit le jeune homme en baissant la voix. Il paraît qu'on lui a fait ça quand il était en fugue mais il ne s'en rappelle pas. Il devait être avec un de ces groupes de marginaux qui prennent des drogues dures. Mais surtout n'en parlez pas devant Ma. Elle vous sonnerait les cloches !

 

-Ma ? Qui est Ma ?

 

-Ben ... Ma Kerrye, la patronne de la Sardine, pardi ! Yann est son fils. C'est une vraie tigresse quand on touche à son rejeton ! Je l'ai vu flanquer dehors à coups de torchon un gros connard qui lui avait fait une réflexion. Yann est beau gosse et c'est son droit de préférer les garçons aux filles. Moi ça ne me dérange pas. Mais c'est encore un sujet qu'il vaut mieux éviter si vous voulez boire vos bières tranquilles. Enfin puisque vous êtes seulement de passage ...

 

-Nous ne sommes pas pressés ! On nous a dit qu'il y avait des concerts le week-end.

 

-Ouaip ! Oh c'est pas des trucs renommés ! Juste des jeunes du coin qui ont monté un petit orchestre et qui jouent pour le plaisir, en plus de leur vrai boulot. Moitié pêcheurs de sardines, moitié musiciens ! La chanteuse travaille comme secrétaire à la capitainerie. Et Yann remplace parfois le batteur quand il est en mer avec son père. Bon, il s'emmêle un peu dans ses baguettes et ses tambours mais il se débrouille. Les jeunes du pays dansent là-bas sur la petite piste. Si on appelle ça danser ! Enfin ça met de l'animation et c'est ce qui fait la réputation de la Sardine ! Ça, la tournée mensuelle de La Vipéra et les délicieuses assiettes de la mer qu'on sert à côté dans la salle d'auberge ! C'est pas un Fish and Chips ici ! Si vous voulez une place ce soir pour dîner, vous avez intérêt à réserver ... Ah ! Le client de la Vipéra est sorti, c'est mon tour. Souhaitez-moi bon courage !

 

-Faut souffrir pour être beau, grinça Ron ... Quel bavard celui-là, ajouta-t-il pour Harry quand leur voisin eut disparu dans la petite salle contiguë où œuvrait l'artiste en tatouages. Alors, qu'est-ce que tu en penses ? C'est Malfoy ou c'est pas Malfoy ? Même Justin hésite ! Le Yann en question est tellement différent du Serpentard que nous avons connu ! A part la Marque des Ténèbres, le visage dans son ensemble et la couleur des cheveux ... Tout le reste, l'allure, les expressions, la façon de s'habiller, de parler, de se déplacer ... On dirait même qu'il est plus jeune que nous. On lui donne vingt-deux, vingt-quatre ans à tout casser. Il est mince et souple comme un adolescent. Et puis ce sourire ... Avais-tu déjà vu Malfoy sourire comme ça, si franchement, si aimablement ? Pas le sourire commercial d'un serveur à un client, juste le sourire d'un gars sans histoire, heureux de vivre. Je crois que c'est ce qui me gêne le plus !

 

-Ah évidemment ! Ce Yann n'a rien à voir avec le Malfoy hautain et méprisant du temps de Poudlard. Même pas avec celui qui est arrivé chez moi le soir de mon anniversaire. Et puis il y a sa mère, la fameuse Ma ... Ici tout le monde semble le connaître depuis longtemps ... Il n'y a en lui aucune trace de magie. Je lui ai lancé discrètement un Révélatum, sans résultat ! Pas la moindre petite étincelle ! ... Il y a bien cette histoire de fugue ... Peut-être que c'est vraiment un Moldu qui aurait rencontré des Mangemorts en fuite et ils se seraient amusés à lui tatouer la Marque parce qu'il ressemblait à Malfoy ... Il y a plein de zones d'ombre dans cette histoire.

 

-Oui je crois aussi. Et puis Malfoy n'était pas gay autant que je sache ! C'était le petit ami de Pansy Parkinson. ... Enfin Justin a l'autorisation de faire une enquête officielle, officieuse plutôt. La police moldue a donné son accord du moment que c'est fait avec discrétion. On a vu ce qu'on voulait voir et on n'en sait pas plus que ce que Justin nous a dit hier. On peut rentrer. Qu'est-ce que tu dirais d'attendre l'heure du thé pour déguster avant de partir un bon Cream tea ? Tu n'y as pas encore goûté. Tu verras, c'est délicieux ... et copieux ...

 

o - o - o - o

 

Semaine du lundi 9 au vendredi 13 juillet 2007.

 

L'affaire avait semblé suffisamment sérieuse pour que Kingsley accorde à Justin une semaine pour enquêter sur ce Kerrye-peut-être-Malfoy. Le jeune Auror était pour cette mission le candidat idéal. Son visage toujours souriant, son air affable, son allure de grand gamin sans soucis le servaient beaucoup. Ses interlocuteurs ne se méfiaient pas de lui et lui parlaient sans contrainte. En quelques jours, il collecta de nombreux renseignements sur " Yann Kerrye ". Il envoyait régulièrement le résultat de ses recherches.

 

Il y avait les documents officiels, en premier lieu son acte de naissance. Le jeune homme était né le 17 octobre 1983 à la maternité de Penzance. C'était le fils unique de Jeffrey Kerrye et de Madlin Corban son épouse. Il avait donc trois ans de moins que Malfoy, qu'eux tous en fait. Il faisait en effet plus jeune qu'eux mais c'était peut-être dû à sa minceur et à sa vivacité d'allure.

 

Il avait fréquenté l'école primaire de son quartier puis le collège de la ville. C'était un bon élève, sans plus, avec tout de même un certain penchant pour la musique. Il jouait du piano et plutôt bien. Cependant, à son retour au pays " après ses voyages ", il avait perdu cette faculté, comme beaucoup de ses souvenirs.

 

Ça, c'était le guitariste de l'orchestre qui jouait les week-ends à la Sardine qui l'avait révélé à Justin sans même s'en apercevoir. Ils avaient bu quelques bières ensemble. Le musicien avait le gosier en pente et la confidence facile. Le jeune Auror avait amené la conversation sur le sujet qui l'intéressait. On lui avait dit que le jeune serveur faisait aussi partie de l'orchestre.

 

Et le guitariste avait soupiré, regrettant le " Yann d'avant et ses impros au synthé ". Maintenant, il s'était mis à la batterie mais il y était moins bon qu'aux claviers. Ah ça oui ! Dommage que son père ait contrarié sa vocation ! Il ne voulait pas d'un fils musicien. Il faisait marcher la Sardine Rieuse avec sa femme et avait refusé que le jeune homme aille au conservatoire de musique. A ses dix-sept ans, il l'avait embarqué presque de force dans son affaire.

 

Il y avait eu entre les deux hommes des disputes violentes et à sa majorité, Yann en avait eu marre. Il était parti à Londres. Comme son père lui avait coupé les vivres, il faisait des petits boulots et survivait comme il pouvait. Il avait donné deux fois de ses nouvelles et puis plus rien à partir de 2002. Sa mère était folle d'inquiétude. C'était elle qui l'avait retrouvé presque deux ans ans plus tard, en très mauvais état, à l'hôpital de Truro, un jour où où elle accompagnait son mari atteint d'un cancer pour une séance de chimio.

 

Mais à son retour à la maison, Yann avait bien changé. " Il avait des trous dans la tête, avait dit le musicien. Il avait oublié plein de trucs. Il avait l'air tout perdu ! On l'a tous aidé, normal, c'était notre copain, et voyez-le maintenant ! Un beau gars pas vrai ? Dommage que je sois hétéro, sinon il m'aurait bien plu ! Il a ses fans vous savez ! Y en a qui viennent à la Sardine rien que pour lui ! Mais il ne se lie avec personne en particulier. Quelques coups par-ci par-là sans doute mais pas plus ! Quand on pense que son père est mort il y a deux ans et que c'est lui maintenant qui aide sa mère à faire tourner la boutique ! Enfin c'est la vie ! Allez ! Content de vous avoir connu et merci pour les bières ! "

 

Selon son habitude, Justin avait trié et classé les informations dans sa mémoire particulière et il était parti fouiner à Truro, la capitale de Cornouailles à une cinquantaine de milles de Penzance. Il avait retrouvé l'hôpital où Jeffrey Kerrye avait été soigné pour son cancer et là, on lui avait raconté une drôle d'histoire.

 

L'infirmière en chef du service d'oncologie était une grosse dame célibataire qui sous un air rébarbatif cachait un cœur tendre. Elle adorait les histoires romantiques et lisait tous les romans fleur bleue de la bibliothèque. L'aventure de " ce pauvre Yann Kerrye " lui avait laissé un souvenir durable.

 

" Pensez, Monsieur ! Le malheureux jeune homme ! On l'avait trouvé mourant à la gare ! Amnésique et sans aucune réaction ! Il a fallu tout lui réapprendre, à bouger, à manger, à parler, même à aller à ... enfin vous me comprenez ! Pendant trois mois, les médecins ne savaient pas quoi en faire. Ils l'avaient mis dans un service psychiatrique. Heureusement, un jeune infirmier l'a pris en pitié et s'est occupé de lui. Il a commencé à récupérer mentalement et physiquement. Il était maigre à faire peur ! Mais il ne savait toujours pas qui il était ni d'où il venait.

 

-Comment Madame Kerrye l'a-t-elle retrouvé alors ?

 

-A cause de la photo du jeune homme affichée dans le Hall. C'était une idée de l'infirmier. Il disait que puisqu'on l'avait retrouvé à la gare, il devait être du pays. Et Madame Kerrye l'a reconnu en venant accompagner son mari. Le pauvre homme ! Costaud comme un docker et pourtant frappé par cette sale maladie ! Ah on en voit de drôles dans le service ! Mais quand sa femme lui a dit qu'elle avait retrouvé leur fils, il y a eu un regain d'espoir, comme un médicament miracle ! Vous savez, c'est courant ! Il n'y a pas que la chimie qui sauve les malades ! On lui avait donné six mois. Il a tenu presque deux ans, c'est fabuleux non ?

 

-Et pour Yann Kerrye alors ?

 

-Oh ! Dès que sa mère l'a vu, elle s'est battue pour lui avec une énergie incroyable. Elle lui a payé des séances de rééducation supplémentaires. Vous savez, c'est un hôpital public ici. On n'a pas les moyens. Elle venait tous les jours. Elle essayait de réveiller sa mémoire. Elle lui montrait des photos. Elle lui racontait des tas de souvenirs. Elle l'a ramené chez elle dès que ça a été possible. Une mère et une épouse admirables, voila ce qu'est Madame Kerrye ! On devrait écrire un livre sur elle ! ... Quoi ? Que voulez-vous ? Les soins en salle huit ? La première perfusion de la chimio, vous pouvez commencer, j'arrive. Au revoir Monsieur. Merci de m'avoir donné des nouvelles de la famille Kerrye."

 

La moisson était bonne pour Justin. Direction la gare. Ce fut moins facile que prévu. Les employés ne se souvenaient de rien. " Vous comprenez Monsieur, des accidents, il y en a tout le temps ici. Alors quelque chose qui s'est passé en 2003, pensez ! Allez plutôt au bureau de police ... "

 

Mais là, il y eut problème. Le chef de service ne voyait pas pourquoi il devait chercher dans ses archives pour une sorte de détective non reconnu par la police nationale, un marginal en quelque sorte. Même s'il avait une autorisation de ses supérieurs. Les faits insolites étaient consignés au jour le jour dans un registre mais ils étaient confidentiels. Pas question de les divulguer à n'importe qui ! Justin se demanda un instant s'il n'allait pas être obligé d'employer un Impérium mais tout à coup, son interlocuteur se ravisa et le regarda d'un œil nouveau.

 

"Vous êtes journaliste, c'est ça ? Vous avez l'air trop rigolo pour faire partie de la police, même de la police parallèle. Vous allez publier un article sur nos méthodes et bien sûr vous allez nous critiquer tant et plus. Je vais vous montrer, moi, Monsieur, que nous faisons bien notre travail. Qu'est-ce que vous voulez savoir ?

 

Et il fit pour la presse ce qu'il avait refusé de faire pour un collègue, même lointain. Justin repartit avec la copie d'un événement qui s'était déroulé à la gare des marchandises de Truro. Dans un wagon stationné sur une voie de garage en vue de son déchargement, on avait trouvé un jeune homme à demi dévêtu, sans papiers, en proie à une forte fièvre. On l'avait transporté aux urgences, à l'hôpital.

 

Cela s'était passé le trois août 2003.

 

o - o - o - o

 

Dimanche 15 juillet 2007, maison des Black, Grimmauld Place.

 

" Harry, qu'est-ce qui se passe ? Toi et les Aurors, vous avez des problèmes ? Vous êtes tout le temps en train de discuter tout bas. Le hibou de Justin t'a apporté plein de messages et tu me regardes à chaque fois avec un air bizarre. Gabrielle n'a rien voulu me dire. Qu'est-ce qu'il y a ? Est-ce que ça a un rapport avec les Vélanes ou avec ... mon père ?

 

Perspicace Stellane ! Elle avait bien senti qu'il se passait quelque chose. Harry n'avait pas voulu lui parler de leur découverte. Il ne fallait pas lui donner de faux espoirs. Elle avait été si cruellement déçue à plusieurs reprises ! Et puis il n'y avait aucune certitude à propos de Yann Kerrye. Juste plusieurs coïncidences étranges. Mais puisqu'elle posait la question, c'était peut-être le moment de parler. D'ailleurs elle insistait :

 

-Tu peux tout me dire tu sais. N'oublie pas que j'ai maintenant l'âge de raison !

 

Harry sourit. Stellane se redressait et lui décochait une véritable œillade de Vélane. La cérémonie avait laissé des traces. A sept ans, elle essayait de se conduire en presque adulte et cela ajoutait encore à son charme inné. Il ne savait pas toujours comment se comporter avec elle, si enfant et si séductrice à la fois. Heureusement, pour la psychologie féminine, il y avait Gabrielle ! Il décida de ne pas la décevoir.

 

- D'accord Stellane. Voila ce qui se passe. Nous avons découvert assez loin d'ici, dans le Sud du pays, un jeune homme qui ressemble beaucoup à ton père. Non, ne t'emballe pas ! Il lui ressemble mais ça ne veut pas dire que c'est lui. Je l'ai vu, Justin et Ron aussi, mais nous avons des doutes. C'est peut-être juste un sosie. Il porte un autre nom, il n'est pas sorcier et d'ailleurs, il ne semblait pas nous connaître.

 

-Mais moi je le reconnaîtrais si je le voyais ! Mon cœur me le dirait tout de suite si c'était mon père !

 

-Ecoute, nous voulons t'éviter une nouvelle déception. Justin et moi, nous allons retourner là-bas et cette fois, nous lui parlerons. Nous l'interrogerons en particulier sur le tatouage qu'il porte au bras gauche. Tu te souviens de cette marque noire sur le bras de ton père ? Le jeune homme en question a la même.

 

-Tu veux parler de la tête de mort avec le serpent ? Mon père n'en parlait jamais et il la cachait le plus souvent possible sous des manches longues. Je sais que c'était le signe de Lord Voldemort, celui de la guerre. On en a parlé à l'école en histoire de la magie. Mais mon père n'était pas un méchant homme ! Je me suis bagarrée avec un garçon de ma classe à cause de ça ! C'est vraiment un truc horrible !

 

-Voila pourquoi il est important que nous allions sur place pour vérifier. A part cette marque, un air de ressemblance et la couleur de ses cheveux, le jeune Yann est tout différent de Draco Malfoy. Peut-être qu'il s'est fait tatouer ça sans savoir ce que c'était. Les Moldus ont souvent des idées bizarres. N'aie pas trop d'espoir, Stellane. Du coup, je serai absent demain toute la journée. Gabrielle voudrait rendre visite à Ron et Hermione. Tu l'accompagneras ?

 

-Bien sûr ! J'adore la petite Rose !

 

Mais Stellane garda toute la journée un air tourmenté. Le soir, elle prit entre ses mains la photo magique de Draco et soupira. Elle était partagée entre l'espoir et la crainte. Et si l'autre, là, était son père et qu'il ne la reconnaissait pas ? Elle avait tellement changé ! Peut-être qu'il ne l'aimerait plus ! Elle n'était plus une mignonne petite fille de trois ans mais une ado pas toujours très sûre d'elle, même si elle avait des dons de Vélane.

 

Cette nuit-là, pour la première fois depuis longtemps, elle rêva de son père. Le même rêve que trois mois après sa disparition. Draco Malfoy était étendu dans un lit blanc. Il était beau. Ses cheveux d'un blond argenté étaient étalés sur l'oreiller. Il dormait d'un air paisible. Quand elle s'éveilla, cela lui parut de bon augure.

 

o - o - o - o

 

Lundi 16 juillet, début de l'après-midi, à la Sardine Rieuse.

 

Harry et Justin étaient attablés dans un coin discret du pub. Ce n'était pas Yann Kerrye qui leur avait apporté leurs bières. Justin s'était renseigné. Trois jeunes serveurs dont Yann se relayaient au bar pendant la semaine. Du côté de l'auberge, il y avait aussi trois serveuses, plus en cuisine un chef cuisinier, deux commis et un apprenti. Le personnel de la Sardine était à la hauteur de sa renommée.

 

Ma Kerrye dirigeait l'établissement d'une main ferme. Personne n'avait intérêt à négliger son travail. Elle voyait tout et avait la remarque critique facile. Il lui avait fallu beaucoup d'énergie et de courage pour succéder à son mari quand celui-ci avait été emporté par la maladie mais elle s'en était tirée avec les honneurs.

 

Sa vie n'avait pas été facile. Fille d'un simple marin-pêcheur, elle avait commencé à travailler à dix-sept ans pour aider sa famille. Femme de ménage, caissière, serveuse de restaurant, elle avait enchaîné les durs boulots. A vingt-cinq ans, elle avait été embauchée à la Sardine Rieuse. Jeffrey Kerrye l'avait tout de suite trouvée à son goût et elle était vite tombée amoureuse de ce grand costaud, capable de coups de gueule tonitruants mais aussi d'attentions délicates.

 

Ils s'étaient mariés et deux ans plus tard Yann était né. C'étaient des années de bonheur. Mais après plusieurs fausses-couches, Ma avait compris qu'elle ne pourrait pas avoir un deuxième enfant. Elle avait reporté toute sa tendresse sur son fils unique et toute sa vaillance sur la bonne marche de l'établissement. Jeffrey s'occupait du pub et elle de la partie restauration.

 

La Sardine Rieuse avait une clientèle fidèle et diversifiée, aussi bien au pub où on venait se divertir et faire la fête le week-end, qu'à l'auberge où il fallait réserver à l'avance pour déguster les fameuses assiettes de la mer concoctées par le chef. Froides en entrées et en salades ou chaudes en plat principal, elles faisaient les délices des connaisseurs.

 

La bonne idée de Ma Kerrye avait été de recruter un chef cuisinier qui avait acquis des bases solides dans un restaurant connu mais dont l'esprit créatif était bridé par des traditions culinaires anciennes. C'était une sorte de poète et il savait mêler avec génie et parfois avec audace les goûts, les odeurs et même les couleurs des nombreux produits de la mer et de leurs accompagnements. C'était simple et raffiné, délicieux au palais et agréable à la vue, copieux et pourtant léger à la fois. On venait de loin pour déguster la spécialité du jour.

 

Harry et Justin s'étaient promis de rester jusqu'au soir et de dîner à l'auberge mais pour le moment, ils attendaient l'arrivée de " Yann Kerrye " qui était de service cet après-midi. Cette fois, ils avaient des questions à lui poser. L'affaire n'avait que trop duré. Le jeune homme avait-il quelque chose à voir avec Draco Malfoy ? Justement, il arrivait vers eux, tout sourire. Il s'assit à leur table.

 

" On m'a dit que vous vouliez me parler ? ... Oh mais je vous reconnais ! Vous n'êtes pas d'ici mais vous êtes déjà venus à la Sardine. Vous, dit-il en désignant Justin, vous avez demandé des renseignements sur moi. Timothée, le vieux pêcheur, m'en a parlé et aussi d'autres personnes. Et vous, ajouta-t-il en désignant Harry, vous étiez accompagné l'autre jour par un grand roux qui semblait intéressé par mes tatouages. Qui êtes-vous et que me voulez-vous ?

 

Le jeune homme était observateur. Il ne dit pas qu'il avait remarqué Justin à cause de son allure gamine et aussi qu'il avait un peu flashé sur Harry. C'était son type d'homme, brun aux yeux clairs, le sourire un peu timide, l'air franc et réservé à la fois. Ces deux clients n'avaient fait que passer et maintenant ils étaient de retour et avaient demandé à le voir. Qu'est-ce qu'ils voulaient au juste ? Cela avait-il un rapport avec ... le temps d'avant ?

 

-N'ayez aucune crainte, dit Harry. Nous ne vous voulons aucun mal. Nous recherchons un ancien camarade d'école et il se trouve que vous lui ressemblez. Voici sa photo. Jugez par vous-même.

 

-Mais c'est moi ! s'exclama Yann en regardant le cliché moldu de Draco. Enfin non, ce n'est pas moi, je ne connais pas cette photo. Désolé, c'est sans doute un sosie. Qui est-ce ? Dans quelle école étiez-vous ?

 

-Les noms de Draco Malfoy et de Poudlard vous disent-ils quelque chose ?

 

-Absolument rien ! ... Draco ? Quel drôle de prénom ! Un été, nous avons eu à la plonge un jeune Roumain qui s'appelait Dragomir. Votre ami est-il étranger ?

 

-Non, il est du Withshire. Mais si nous sommes venus vous voir, ce n'est pas seulement à cause de cette ressemblance. Il y a aussi plusieurs coïncidences troublantes. Par exemple, notre camarade avait sur le bras gauche le même tatouage que vous, celui que vous avez dissimulé aujourd'hui sous un bracelet de cuir.

 

-Oh, fit Yann en rougissant légèrement, le crâne et le serpent ... Je n'en suis pas très fier. C'est très laid. Parfois, j'ai même l'impression que le serpent bouge. Mais ce genre de dessin est assez courant dans certains milieux. Malheureusement, je ne me souviens ni de quand il date, ni de qui me l'a fait. Quand vous avez pris vos renseignements, on a dû vous dire que j'étais en partie amnésique. Cela fait partie des choses que j'ai oubliées.

 

-Mais vous êtes sûr de vous pour tout le reste ? Vous êtes bien Yann Kerrye, le fils de Ma, la patronne de la Sardine ? Vous saviez jouer du piano avant et maintenant vous n'y arrivez plus.

 

-Attendez ! Qu'est-ce que vous insinuez par là ? Que je pourrais être votre Draco je ne sais plus quoi ? Je m'appelle bien Yann Kerrye, aucun doute là-dessus. Ici tout le monde me connaît. Ma mère est à côté à l'auberge, vous pouvez l'interroger si ça vous chante ! Vous voulez voir des photos de famille ? J'en ai toujours sur moi.

 

Il sortit de sa poche arrière un portefeuille et étala quelques clichés.

 

-Voici mon père et ma mère, Jeffrey et Madlin Kerrye. Mon père est mort il y a deux ans. Ici nous sommes tous les trois pour mon douzième anniversaire. Là, c'est moi à quinze ans et là, je suis avec mes trois amis d'enfance, les musiciens de l'orchestre. Qu'est-ce qu'il vous faut de plus ?

 

-Hé bien, il y a cette histoire de date. On vous a trouvé à la gare de Truro, dans un wagon de marchandises en provenance de Londres, le 3 août 2003, n'est-ce pas ? Vous étiez mal en point. Sans doute étiez-vous là depuis plusieurs jours. Notre ami a disparu le premier août 2003, dans une gare de Londres. C'est tout de même bizarre, non ?

 

Le jeune homme avait l'air décontenancé, gêné même. Que pouvait-il répondre ? Il ne se souvenait de rien. C'était sa mère qui lui avait tout raconté. Elle venait le voir à l'hôpital ... Elle l'aidait dans sa rééducation ... Elle lui avait même réappris assez rapidement à lire et à écrire ... Elle lui parlait de son enfance, de son adolescence ... Elle lui disait tout le temps : Tu te rappelles ? ... Il répondait oui pour lui faire plaisir ... Et puis il avait fini par y croire ...

 

Mais qu'est-ce qui lui prenait ? Qu'est-ce que c'était que cette histoire absurde ? Il n'y avait pas de doutes à avoir ! Il était Yann Kerrye et pas autre chose ! Ces deux-là le faisaient ch... l'ennuyaient avec leurs questions idiotes ! Ils venaient bouleverser sa vie alors qu'il avait enfin retrouvé son équilibre ! Qu'ils aillent au diable ! Il se leva et dit d'un ton froid :

 

-En voilà assez ! Je ne comprends rien à vos insinuations. Allez voir ma mère si vous voulez raconter d'autres conneries. Mais numérotez vos abatis ! Elle n'est pas tendre quand on s'attaque à moi ! Je ne veux plus vous revoir à la Sardine ! Dehors !

 

Il voulait les persuader de leur erreur sur la personne. Ce fut le contraire qui se passa. Son air outragé et son ton coupant ressemblaient tellement à ce que Malfoy aurait pu exprimer autrefois que leur opinion fut faite. Yann Kerrye était Draco Malfoy. Il le niait, bien sûr, c'était normal. Mais c'était ainsi.

 

-Il ne ment pas, dit Justin en sortant de pub.

 

Jusque là, il n'avait presque rien dit, se contentant d'observer et d'écouter la conversation. Il ajouta :

 

-Qu'est-ce que tu en penses ? Un sortilège d'amnésie sans doute ? "

 

o - o - o - o

 

Le même jour, après l'heure du thé.

 

Curieusement, l'entrevue avec Ma Kerrye ne fut pas aussi difficile qu'ils l'avaient imaginé. Justin avait même proposé à Harry de jeter discrètement un sortilège Tranquillitas pour détendre l'atmosphère si l'affaire tournait au vinaigre. Ce ne fut pas nécessaire. Bien sûr, au début, la patronne de la Sardine les prit de haut quand ils entrèrent dans son bureau à l'arrière de l'auberge. Son fils l'avait prévenue de la venue des deux " fouineurs " et elle n'était pas femme à se laisser impressionner.

 

Elle n'était pas très grande mais se tenait très droite. Elle portait une robe noire à parements blancs. Ses cheveux abondants étaient coiffés en chignon, ils étaient blonds mais pas du même blond argenté que ceux de son " fils ". Elle avait sur son visage un air d'autorité naturelle. C'était visiblement une femme énergique. D'ailleurs il lui avait fallu de la force pour supporter les nombreux coups durs qui l'avaient frappée tout au long de sa vie.

 

Elle commença par affirmer que Yann était bien son fils. Le ton était sec et la voix bien timbrée. Mais Justin qui l'observait attentivement vit tout de suite qu'elle avait peur.

 

" Vous mentez, dit-il simplement sans élever la voix.

 

Elle resta muette un long moment. Son visage se décomposait peu à peu. Il refléta soudain un tel chagrin qu'ils en furent choqués. Elle s'assit, baissa les yeux, croisa les mains sur son bureau et murmura :

 

- Je savais que ce moment arriverait un jour ou l'autre mais j'espérais toujours ... Non Yann n'est pas mon fils. Asseyez-vous, l'histoire que j'ai à raconter est longue et difficile à croire. Mais elle est vraie. Quand vous l'aurez entendue, je pense que vous comprendrez mes raisons et que vous ne me jugerez pas trop mal.

 

Harry et Justin se regardèrent puis prirent place en face d'elle. Ils étaient surpris de ce brusque revirement. Mais ils sentaient qu'elle portait depuis trop longtemps le poids de son mensonge. Elle avait besoin de parler, de se justifier. Elle reprit en les fixant tour à tour :

 

-Vous avez vu Yann. Mon véritable fils aurait vingt-quatre ans, lui en a peut-être plus, peut-être moins, on ne peut pas savoir, mais son esprit est celui d'un jeune adulte à peine mature, d'un grand adolescent plutôt. Il manque totalement de références. Il a perdu tous ses souvenirs. Il a fallu tout lui réapprendre. Pensez que quand on l'a découvert dans ce wagon de marchandises, il était inerte, il avait juste les yeux ouverts. Il ne bougeait pas, il poussait de petits cris quand il avait faim ou mal. Il ne supportait que les aliments liquides. Il était comme un bébé qui vient de naître.

 

Harry regarda Justin avec consternation. Nott avait jeté sur Malfoy un sortilège d'oubli très noir, digne du Mangemort convaincu qu'il était.

 

-A l'hôpital, les médecins ne savaient pas quoi faire à part l'alimenter et soigner sa forte fièvre. Quand ils l'ont considéré comme guéri, ils l'ont pris pour un débile profond et l'ont placé en psychiatrie, oui, avec les fous ! Le pauvre enfant dépérissait à vue d’œil.

 

-Mais personne n'avait pas essayé de l'identifier ?

 

-L'enquête n'avait pas abouti. La police ne s'était pas donné beaucoup de peine d'ailleurs. Visiblement, il n'était pas mineur et il n'était recherché par personne. Les policiers pensaient même que sa famille avait tout simplement voulu s'en débarrasser ! Mais vous, vous aviez signalé la disparition de votre ami ?

 

-Oui, mais avec du retard, avoua Harry avec gêne.

 

Les Aurors avaient d'abord concentré leurs recherches sur le monde sorcier. Puis ils avaient enquêté dans le Londres moldu et ses environs. Ce n'est que plus tard qu'ils avaient étendu leurs investigations dans tout le Royaume Uni puis à l'étranger. Jamais ils n'avaient imaginé pareil scénario. Pour eux, Malfoy avait disparu en sortant du Chaudron Baveur. Volontairement ou non. Son amnésie était un élément totalement nouveau.

 

-Les signalements ont dû se croiser ou se perdre, reprit-elle. Tant de gens disparaissent de nos jours ! Toujours est-il que le pauvre enfant était proche de la fin. Il n'avait plus que la peau et les os. Il lui en est resté quelque chose d'ailleurs, il n'a jamais été bien gros et il n'a guère grandi non plus. Heureusement, il y a eu Cyprien.

 

-Le jeune infirmier qui s'est occupé de Malfoy, dit Justin à Harry. Je lui ai parlé à l'hôpital de Truro. Un chic type !

 

-Vous pouvez le dire, reprit Ma Kerrye. Sans lui, Yann serait mort. Le pauvre enfant avait des escarres aux deux coudes, il souffrait beaucoup. Quand Cyprien le soignait, il lui parlait doucement. Il avait remarqué que Yann ... pardonnez-moi si je continue à l'appeler ainsi ... que Yann essayait de parler aussi. Alors il s'est occupé de lui et l'a aidé à se sortir de son état apathique. Quand les progrès ont été sensibles, il a alerté les médecins et il s'est débrouillé pour le faire entrer dans un autre service plus adapté. C'était trois mois après son admission.

 

" Juste au moment où Stellane a rêvé de lui, pensa Harry. Y a-t-il eu entre eux une connexion par la pensée ? Les jeunes enfants sont capables de choses extraordinaires, incroyables même ! Elle a rêvé de son père endormi dans un lit blanc ... "

 

-L'enquête pour l'identifier n'avait rien donné et il n'avait aucun souvenir, poursuivait Ma Kerrye d'une voix sourde. Une amnésie totale d'après les médecins. Cyprien a eu alors l'idée de le photographier et d'afficher son portrait dans le Hall de l'hôpital avec un avis de recherche. Je ne l'ai vu qu'en décembre, en accompagnant Jeffrey pour une séance de chimiothérapie. J'ai aussitôt remarqué la ressemblance avec mon fils. J'ai demandé à le voir. Au début, j'ai vraiment cru que c'était Yann. J'étais si heureuse ! J'ai annoncé la bonne nouvelle à mon mari. Aussitôt, il s'est senti mieux. Le bonheur fait des miracles, vous le savez. Jeffrey avait tellement de remords d'avoir obligé Yann à travailler avec nous au lieu de continuer sa musique !

 

Elle s'arrêta, les fixant de ses yeux sans larmes. Depuis longtemps, elle ne pouvait plus pleurer. Sa respiration se faisait sifflante. La douleur devait broyer sa poitrine. Elle poursuivait pourtant son récit sans faiblir.

 

-A cette époque, grâce à Cyprien, Yann était en rééducation. Il était resté couché longtemps et ses muscles avaient fondu. En plus, il ne mangeait pas suffisamment. La nourriture dans les hôpitaux est correcte mais sans plus. Alors je venais le voir tous les jours. Je lui apportais des bons petits plats. Je lui parlais, je lui racontais sa jeunesse. Je me suis souvenue qu'il aimait lire et je lui ai apporté ses livres préférés. Au début, il déchiffrait tout juste les textes mais ses progrès ont été rapides. Pareil pour l'écriture. La première fois que je lui ai donné un bloc de papier, il avait du mal à tenir le stylo à bille et ses lettres étaient celles d'un enfant de cinq ans. Une semaine après, il écrivait parfaitement et c'est à ce moment-là que j'ai commencé à avoir des doutes. Avant, son écriture était brouillonne, à peine lisible quelquefois. Après, elle était régulière, légèrement penchée vers la droite, élégante même.

 

"Il lui a fallu tout réapprendre, pensait Harry. C'est peut-être pareil pour la magie. Il ignore qu'il est sorcier. S'il réussit un sortilège, ça le convaincra peut-être. Parce que là, il est assez remonté contre nous et il ne va pas nous croire sur parole."

 

-C'était le 2 février. Il faisait dehors un froid de loup. J'avais apporté des crêpes farcies au crabe avec une mayonnaise aux herbes comme notre cuisinier sait si bien la faire. Yann avait les cheveux longs attachés dans son cou par un élastique. J'avais remarqué qu'ils étaient plus clairs qu'avant mais quelquefois, les malheurs font blanchir les cheveux. Plusieurs mèches s'étaient échappées. J'ai pris une brosse et j'ai commencé à le recoiffer. J'ai cherché derrière son oreille gauche la petite cicatrice qu'il s'était faite à cinq ans en tombant de vélo mais elle n'y était pas. J'ai compris ce jour-là que ce jeune homme n'était pas mon fils. Mais je n'ai rien dit. Vous comprenez pourquoi ?

 

- L'état de votre mari s'était beaucoup amélioré, répondit Justin. L'infirmière en chef de l'hôpital me l'a dit.

 

-Oui, c'était merveilleux. Il reprenait des forces. Il s'occupait de nouveau du bar de la Sardine. Et quand au mois d'avril, Yann a pu rentrer à la maison, il lui a réappris toutes les ficelles du métier, enfin il lui a montré plutôt que réappris, mais moi seule le savait. Ils s'entendaient bien, il y avait entre eux la complicité qui existe entre un père et son fils quand ils s'aiment et se respectent. Alors qu'avant, ils se disputaient sans arrêt. Au point qu'un jour, Yann en avait eu marre et qu'il était parti pour Londres en emportant ses petites économies. C'était le 25 novembre 2001. Je m'en souviens comme si c'était hier. Et je ne pouvais rien faire. J'aimais tendrement Yann mais j'étais aussi très amoureuse de mon mari. J'étais partagée entre mes deux amours et ça me rendait très malheureuse. Du coup, l'apparition de ce jeune homme blond qui ressemblait tant à mon fils me semblait miraculeuse.

 

L'évocation de ses souvenirs l'avait ragaillardie. Elle se redressa et poursuivit:

 

-Nous avons été heureux pendant un an et demi. La Sardine marchait bien, Après la chimio et la radiothérapie, mon mari allait beaucoup mieux. Yann se trouvait bien dans sa nouvelle vie. On regardait l'avenir avec espoir. Mais le bonheur ne dure jamais longtemps. Je suis payée pour le savoir. Jeffrey a fait un malaise, la maladie l'a repris et l'a tué en six semaines. Un nouveau choc pour Yann qui reste fragile. Et voilà que vous débarquez, avec vos têtes de mauvaises nouvelles. Qu'est-ce que vous comptez faire ? Me le prendre ? L'emmener avec vous ? L'arracher à une vie où il a retrouvé un peu de tranquillité ?

 

Elle s'était levée. De nouveau elle avait l'air énergique et sûre d'elle. Elle les défiait du regard. Le moment de doute et de faiblesse était passé. Elle était prête à défendre " son fils" avec bec et ongles s'il le fallait.

 

Justin et Harry étaient bien embarrassés. Ils comprenaient les raisons de Ma Kerrye, la situation avait un côté dramatique qu'ils n'avaient pas prévu. Mais si " Yann " était Draco Malfoy, il fallait lui proposer une alternative et ensuite, ce serait à lui de faire son choix.

 

-Madame Kerrye, reprit Harry, loin de nous l'idée de faire le moindre mal à ce jeune homme qui a déjà beaucoup souffert. Mais il a un père et une mère et il a surtout une fille qui attend son retour depuis quatre ans. Vous ne pouvez pas l'empêcher de revoir ses vrais parents. D'ailleurs, peut-être que le choc lui fera retrouver la mémoire ! Il faut essayer et nous avons besoin de votre aide. Mais je peux vous promettre une chose. Si après avoir rencontré son autre famille, Yann ne retrouve pas la mémoire et préfère revenir ici, il sera libre de le faire. Cela vous convient ?

 

-Et puis, ajouta Justin un peu maladroitement, le vrai Yann va peut-être réapparaître. Lui aura conservé tous ses souvenirs. Nous ferons des recherches à Londres. Je connais beaucoup de monde et notre police a des moyens particuliers d'investigation. Nous vous aiderons autant que nous le pouvons.

 

Le visage de Ma Kerrye se ferma. Elle eut soudain l'air furieux.

 

-En quatre ans vous n'avez pas été foutus de retrouver votre Draco et vous voulez retrouver mon Yann ? Foutaises ! Mon vrai fils est mort, j'en suis presque sûre. Vous allez me prendre l'autre et je vieillirai seule. Seigneur ! Pourquoi est-ce que les malheurs tombent toujours sur les mêmes ?

 

-Qu'est-ce qui vous fait dire que votre fils est mort ?

 

-Il m'a donné deux fois de ses nouvelles. A Noël de cette année-là et en février 2002. La deuxième fois, il y avait une adresse au dos de l'enveloppe. Je lui ai envoyé une lettre avec un chèque pour l'aider. Elle m'est revenue avec la mention " destinataire inconnu ". Un peu plus tard, j'ai reçu la visite de policiers. Ils enquêtaient sur l'incendie criminel qui avait ravagé un squat où vivaient des immigrés, des gens sans ressources, des jeunes sans domicile fixe. Vous vous en souvenez peut-être ? On en a parlé à la télé. C'était le 28 février 2002.

 

-Désolé, Madame Kerrye, répondit Harry. Je ne m'en souviens pas.

 

-Encore une date maudite pour moi ! La veille, j'avais envoyé ma lettre justement à l'adresse de ce squat. C'était une vieille bâtisse insalubre. Le feu avait pris dans l'escalier de bois et s'était propagé aux deux étages en quelques minutes. Tout avait brûlé. Les gens qui logeaient au rez-de chaussée et au premier avaient pu sortir de la maison en feu. Il y avait des blessés mais par la suite, on avait retrouvé quatre corps carbonisés dont deux n'avaient pas pu être identifiés ...

 

Justin et Harry avaient le cœur serré. Pauvre Ma Kerrye ! Tant de malheurs ! Pourtant elle ne pleurait pas et sa voix restait ferme.

 

-Il manquait un jeune homme blond. Les autres squatteurs ne connaissaient pas son nom, tout le monde l'appelait Yaka. C'était le surnom de mon fils dans sa jeunesse. Y a qu'à faire ci, y a qu'à faire ça, c'était son refrain. Le facteur avait montré ma lettre aux policiers. Ils venaient voir si nous pouvions identifier une des victimes. Mon mari était absent. Je ne sais pas pourquoi je leur ai menti. Sans doute pour entretenir l'espoir de Jeffrey qui ne se pardonnait pas la fugue de son fils. Je leur ai dit que mon fils m'avait téléphoné le lendemain du drame pour me rassurer. Ils n'ont pas insisté. Au début je me répétais que Yann avait pu échapper aux flammes ou qu'il était absent du squat ce jour-là. Mais les mois ont passé, je n'ai plus eu de nouvelles. Maintenant, je ne crois plus à son retour, ça fait trop longtemps. J'ai perdu mon mari. J'ai reporté tout mon amour sur Yann. Il m'aime aussi et vous voulez me le prendre ? Jamais ! Sortez Messieurs. Nous n'avons plus rien à nous dire.

 

Ils se levèrent, saluèrent et se dirigèrent vers la porte. Harry comprenait la situation et pensait que pour le moment, le mieux était de d'attendre. Il reviendrait à la charge une autre fois. Ma et Yann Kerrye auraient le temps de réfléchir, de discuter entre eux, de digérer l'histoire. Ils changeraient peut-être d'avis d'eux-mêmes.

 

Justin aurait bien suivi son instinct premier qui était d'utiliser la magie et d'embarquer Yann / Draco sans lui demander son avis. Mais sous ses dehors espiègles, c'était un Auror sérieux et responsable, qui n'agissait jamais hors la loi. Il ne dit rien et s'apprêta à partir sur l'échec de leur mission. Au moment où il posait la main sur la clenche de la porte, la voix de Ma Kerrye les arrêta.

 

-Revenez lundi prochain. Je parlerai à Yann. Je n'ai pas le droit de décider pour lui. Il ira avec vous et ensuite il choisira. Mais prenez toutes vos précautions pour qu'il n'ait pas à souffrir par votre faute. Je ne vous le pardonnerais jamais. Allez maintenant. Vous pouvez faire une croix sur le tian de topinambours aux langoustes de ce soir. Je ne veux plus vous revoir avant une semaine.

 

Elle se tenait bien droite derrière son bureau, le visage impassible. Une femme forte, digne et fière. A considérer avec estime et respect. Ils s'inclinèrent et obéirent.

 

o – o – o – o

 

A suivre.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 
 
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