Chapitre 3 "L'homme naît seul, meurt seul, reçoit seul la récompense de ses bonnes actions et seul la punition de ses méfaits." Tom alluma sa baguette et détailla la caverne dans laquelle il se trouvait. Les voûtes du plafond montraient que l'endroit était un ancien caveau de famille. Les murs suintaient de mousse et de terre humide. Atlena souleva sa robe pour qu'elle ne traîne pas sur le sol boueux. Tom la suivit jusqu'à un vieil établi poussiéreux. Les objets qui se trouvaient dans cette pièce semblaient abandonnés depuis longtemps. Les livres étaient gondolés par l'eau et moisissaient. - Derrière le miroir sans reflet, murmura Altena en cherchant autour d'elle. Tom l'imita, il leva sa baguette à la recherche d'un miroir. Altena s'était approchée d'un mur et elle écartait la mousse avec les doigts à la recherche d'une ouverture qui aurait pu cacher le livre. Tom s'approcha d'une vieille armoire branlante dont le bois de désagrégeait. Il ouvrit la porte qui lui resta dans les mains, laissant tomber la planche il illumina l'intérieur de l'armoire de la pointe de sa baguette. Des fioles couvertes de poussière renfermaient des potions méconnaissables. L'une d'elles, visiblement corrosive avait attaqué le verre qui s'était brisé et elle s'était répandue dans l'armoire. La plupart des parchemins étaient illisibles, effacés, moisis ou déchirés. Tom écarta les débris d'un revers de bras, ils s'écrasèrent au sol dans un nuage de poussière. Le reste de l'armoire était sans intérêt et Tom allait abandonner quand il sentit ses doigts se poser sur un objet glacial au fond d'un tiroir. Il l'attrapa et le sortit. L'éclairant de sa baguette il l'observa un moment. C'était un petit objet long et large comme sa main. Une surface lisse qui ressemblait à un miroir était entourée de métal finement ouvragée. Mais au lieu de restituer la lumière de sa baguette, le miroir semblait l'absorber, plus il approchait la lumière de la surface de verre, plus le miroir devenait sombre. Tom repensa aux indications, le livre se trouvait derrière le miroir. Il plongea alors sa main libre dans le tiroir d'où il avait sortit le miroir. Il en tira une poignée de parchemins moisis, quelques plumes et une fiole d'encre séchée. - Il n'y est pas, dit-il soudain paniqué à Altena qui s'approchait. J'ai trouvé le miroir mais le livre n'y est pas! Altena lui prit le miroir des mains et le retourna. Elle l'examina un moment. Le dos du verre était noir et il était impossible de dire de quelle matière il était constitué tellement il était sombre. Elle approcha sa main et Tom eut un hoquet en voyant ses doigts s'enfoncer et disparaitre dans ce qui était en fait un trou. Elle entra la main entière dans le dos du miroir et ressortit précautionneusement un petit livre fin à la couverture noire. Elle le tendit à Tom qui le prit entre ses doigts, un éclat rouge d'avidité passa dans ses yeux, il avait enfin la clef. La clef de son immortalité. Il ne mourrait pas comme sa mère. Il vivrait pour toujours et régnerait. Il contrôlait les forces de la magie et bientôt grâce à ce livre, il contrôlerait le temps. Il caressa la couverture fragile qu'Altena éclairait de sa baguette. De fines marques rouges étaient dessinées sur la couverture, comme des cicatrices. Il l'ouvrit et nota que le texte était entièrement rédigé dans un alphabet inconnu. Une main bienveillante avait pourtant traduit certains mots, dont le titre "Le livre des âmes brisées, technique de création d'un Horcruxe". - Enfin, souffla-t-il, enfin l'heure est venue. Puis il éclata de rire, de plaisir, de joie, de soulagement et il attrapa Altena par les épaules et la serra contre lui. - C'est un grand jour aujourd'hui, dit-il à son oreille. Elle ne bougea pas, ni émue, ni inquiète, elle semblait indifférente à ce que Tom considérait comme une grande victoire. - Tu te réjouis peut-être un peu vite, dit-elle avec un sourire amusé lorsqu'il l'eut lâchée. Le livre est codé et ce sera sûrement difficile de le déchiffrer. - Alors il faut commencer tout de suite! s'exclama Tom dont l'enthousiasme était maintenant inébranlable. Il attrapa la main d'Altena et la coinça entre ses longs doigts effilés pour l'entraîner à la surface. Ils ressurgirent des ténèbres au centre de la chapelle, le passage se referma derrière eux. Ils sortirent à l'air libre, la neige s'était remise à tomber et tourbillonnait autour d'eux. Tom eut l'impression que la neige était aussi dans son cœur, virevoltant et tournoyant sur elle-même jusqu'à lui faire perdre l'équilibre. Soudain un mouvement imperceptible le ramena sur terre. Au milieu du cimetière quelqu'un releva la tête pour les regarder. Vladislav plongea ses yeux glacials dans les yeux vert tendre de Tom. Il était appuyé contre une tombe, une longue épée à la main. Un manteau de fourrure sombre sur les épaules, ses longs cheveux blonds parsemés de flocons de neige. Son visage était dur et fermé. Ses yeux se baissèrent vers la main de Tom qui emprisonnait toujours les doigts tièdes d'Altena. Les paupières de Vladislav se baissèrent. Il se redressa et planta l'épée dans le sol à l'endroit où il se trouvait. D'un pas lourd il s'approcha des deux sorciers. Tom resserra sa prise sur le livre et lâcha la main de la jeune femme. Le comte saisit le menton de sa sœur entre le pouce et l'index et lui releva la tête pour la forcer à le regarder. Tom glissa la main sous sa robe à l'endroit où se trouvait sa baguette. - N'oublie pas, Altena, tu n'es pas libre de jouer à ce genre de jeu, murmura Vladislav en détachant chaque mot. Elle fronça les sourcils. - Si, justement, souffla-t-elle, je peux prendre les risques que je veux, puisque j'ai le choix. Il l'a regarda un moment avec colère. Puis il lâcha son menton, lança un regard de pure haine à Tom et tourna les talons. Il transplana à hauteur de l'épée qu'il avait laissée plantée dans le sol gelé. Tom se tourna vers la sorcière, elle avait l'air contrariée et triste. Il effleura sa joue du bout des doigts. - Qu'est-ce qu'il a voulu dire? demanda-t-il quand leurs regards se croisèrent. - Rien, dit-elle en secouant la tête comme pour chasser la neige, ça n'a pas d'importance, c'est de vieilles histoires. Elle marcha jusqu'à l'épée qu'elle retira du sol et leva les yeux vers la tombe où s'était tenu son frère quelques instants plus tôt. Elle caressa la pierre usée et se baissa pour chasser la neige des inscriptions. Tom s'approcha pour mieux lire les lettres fines. "Meredith Alekseïevna Serpentard née Voldemort" - C'est la tombe de ma mère, murmura Altena. - Voldemort? - C'était son nom de jeune fille. C'est joli, hein? C'est du français, ma mère était d'origine française, d'une branche des Serpentard qui vivait en France et qui s'est installée en Russie au début du siècle dernier. Je crois que le sens de ce nom est funeste. La famille de ma mère était crainte et respectée. Les deux sorciers rentrèrent au château à pas lents, Altena silencieuse et pensive et Tom en feuilletant le livre et en essayant déjà de percer le secret des symboles. Ils mangèrent tous deux dans la bibliothèque, Dana informa Altena que son frère était parti précipitamment à cheval et qu'il avait refusé de manger. Lorsqu'ils eurent terminé Dana et Moki débarrassèrent et la sorcière rechercha dans tout le château, des livres qui leur permettraient de traduire l'étrange alphabet. Elle finit par reprendre des couleurs et oublier l'incident avec son frère. La bonne humeur de Tom rayonnait dans toute la pièce, il était à l'aise et décontracté, riait avec plaisir et procédait avec intelligence pour résoudre l'énigme. A plusieurs reprises il sembla à Tom qu'elle le regardait avec insistance, mais il était bien trop occupé pour s'en soucier. La nuit tomba tôt et un vent glacial souffla à l'extérieur, ils restèrent penchés sur leurs livres jusque tard, Tom était ravi, il avait l'impression de revivre ses années à Poudlard, plongé dans des recherches. Altena commença à s'inquiéter pour son frère lorsque la nuit fut totalement tombée. Vers 22h30, n'y tenant plus, elle envoya Dana le trouver et le ramener. Dana revint les oreilles baissées en pleurant, elle finit par réussir à articuler que le comte lui avait donné l'ordre formel de le laisser tranquille et de retourner au château. Ils restèrent debout une bonne partie de la nuit. Tom parce que l'excitation le maintenait éveillé, il réussissait lentement à traduire des morceaux du texte, en combinant plusieurs anciens alphabets, plusieurs langues et les notes qu'il pensait être de Salazar. Altena demeura assise à ses côtés parce que l'inquiétude l'empêchait de dormir. Vers 2h du matin, Dana apparut dans la bibliothèque. - Monsieur le comte vient de rentrer mademoiselle. Il est... Dana ne put finir sa phrase, des bruits de pas retentirent derrière elle, Vladislav entra, son manteau de fourrure était trempé et couvert de sang, les longs cheveux était couverts de neige à moitié fondue, du sang maculait son visage et les mèches de son front. - Vlad, murmura sa sœur. Tu es blessé? Puis elle avança de quelques pas, prudemment, il la regardait d'un air très froid, presque méchant, mais elle ne parut pas s'en rendre compte. Elle posa ses mains contre la fourrure du manteau et colla son oreille contre le cœur de son frère. - J'étais inquiète, souffla-t-elle, où étais-tu? - C'est le sang des trolls, répondit-il à voix basse. Je les ai trouvé. Il referma les bras autour des épaules frêles de sa sœur et la serra contre lui. - Excuse-moi, dit-il après un silence. J'avais juste peur que... Il ne put pas finir sa phrase. - Aucune malédiction aussi stupide ne me tuera, répondit Altena d'une voix plus forte et plus assurée que son frère. Je suis bien plus puissante que la vieille folle qui a fait cette prophétie et bien plus douée que la plupart des sorciers. La famille des Serpentard ne faiblira pas, je ne vois pas quelle raison pourrait me faire choisir une mort aussi absurde. Vladislav recula d'un pas et regarda sa sœur en la tenant pas les épaules. Il l'observa quelques instants, d'un regard profond et perçant. Tom se senti envahi d'une émotion qu'il connaissait bien, la convoitise. Il détestait qu'il la touche, qu'elle soit avec lui. Il avait beau être son frère, il n'avait pas le droit de poser les mains sur elle. Il regarda la sorcière et se dit qu'elle faisait désormais partie des pièces de sa collection, le médaillon, la coupe, la couronne, un réceptacle du sang de Serpentard. Car elle était une relique elle aussi, un merveilleux objet de collection, elle était plus intelligente que la plupart de ses serviteurs. Eux le suivaient servilement en rêvant de pouvoir ou de reconnaissance, ils étaient animés de stupides ambitions, laides et basses. Elle ressemblait à une princesse, digne et impérieuse, elle l'avait bien plus aidé en une journée que certains de ses acolytes en dix ans. Et elle était du même sang que lui alors il la garderait à ses côtés. Vladislav déposa un baiser sur le front d'Altena, gratta la tête de Dana et sortit sans accorder un regard à Tom. - De quelle prophétie vous parliez, demanda Tom lorsqu'elle fut de nouveau assise à côté de lui. Altena soupira. Elle resta silencieuse un moment. - Quand j'étais enfant, nous fêtions Noël tous les ans en compagnie de toute notre grande famille. Mon père invitait tous les Serpentard avec qui nous avions gardé contact en Russie, mais aussi certaines familles d'Europe. L'année de mes sept ans, une vieille tante qui disait avoir des talents de devin et que mes parents n'appréciaient guère, fit une prophétie. Ses yeux sont devenus blancs et sa voix a changé, elle a dit : "Par une nuit de pleine lune sur les rives d'une eau morte, Altena héritière d'Iselda, par son cœur guidée fera le choix de sacrifier sa vie à l'homme qui l'aimera." Inutile de préciser que mon père était tellement furieux qu'il l'a renvoyée chez elle dans l'heure. Mais la malédiction demeure, selon cette prophétie je suis condamnée à mourir par amour. Pour cette raison, j'ai toujours refusé de rencontrer des garçons de mon âge, je ne suis pas allée à l'école pour sorciers de Russie, j'ai eu des précepteurs. Je reste chez moi avec mon frère et je me méfie des hommes. - C'est bête, dit Tom pensif, en plus la prophétie dit que c'est toi qui fera ce choix. C'est un choix totalement stupide, mourir pour quelqu'un et par amour. Je n'imagine pas de faire une chose pareil, c'est même la dernière chose dont je sois pas capable je crois. Il y a tellement de causes moins fade et moins éventée que l'amour. Alors mourir pour ça... Ca ne te ressemblerait pas, tu as l'air déterminée et combative, tu n'es pas du genre à te laisser tuer. Si c'est ce qui alarme ton frère c'est un idiot. Il devrait avoir plus confiance en toi. Altena sourit. - Non, c'est pas ça. Nous veillons l'un sur l'autre depuis la mort de nos parents, je suis sa seule famille proche et il est ma seule famille proche. Tom sourit, de son plus beau sourire. - Non je suis là moi aussi. Il y avait mis tout son savoir-faire, le sourire, l'inclinaison du regard, le ton doux et chaud, l'expression à la fois amusée et confiante, et le résultat fut bien meilleur qu'il ne l'eut espéré. Altena baissa les yeux et rougit très légèrement. Tom fut satisfait et rassuré, cette fille ne devait pas disparaître de sa collection, il comptait la ramener en Angleterre avec lui, et personne ne l'en empêcherait, pas plus son frère possessif que des prophéties stupides. Il referma le petit livre à la couverture noire et se leva en le serrant contre lui. - On continuera demain, dit-il en réponse au regard interrogateur de la jeune fille. Il est très tard. A l'instant où il disait ça, la pendule de la bibliothèque sonna trois coups. Tom rejoignit sa chambre, et se coucha après une toilette rapide. Il s'endormi sans mal et ses rêves furent peuplés d'objets magiques renfermant des parties de son âme, des sauvegardes qui le maintenaient en vie pour toujours. L'une d'elle était une jeune femme vêtue de velours, aux boucles blondes et aux yeux bleu glace. Le sang des Serpentard coulait dans ses veines. A suivre... Ecriture achevée le 01/09/2009 |