Inspiré par la chanson "Luna" des Têtes Raides.
Juin 2013.
________________________________________________________________________________
Marc est resté très digne. Il n’a pas pu empêcher les larmes d’embuer ses yeux ni des tremblements d’agiter sa voix, mais il s’est levé et a prononcé un discours quand ce fut son tour. Il a parcouru l’assemblée du regard, ses yeux se sont arrêtés sur Rachel, la meilleure amie de Léonore, qui pleurait, l’air à moitié ravagée. Au fond il a vu Solange et Jean, assis bien droits sur leur chaise, presque pétrifiés. Il ne les avait jamais aimés, et Léonore non plus n’avait pas beaucoup d’affection pour ses parents, mais il n’a pu s’empêcher de les détailler un peu. Il y avait ses propres parents, aussi, et Marc s’est dit que ça faisait longtemps qu’il n’avait pas eu la sensation d’être le gamin qu’il fallait soutenir et encourager. Il y avait d’autres personnes, qu’il connaissait plus ou moins, ou pas du tout. Ca représentait une assez grande assemblée. Il a remercié tout le monde d’être venu et il a remercié le hasard qui lui avait fait rencontrer Léonore même si maintenant c’était fini. Le reste, il l’a gardé pour lui.
Ensuite il a écouté les discours d’autres gens qui aimaient sa femme.
Et puis du temps s’est écoulé et après ça il y avait juste une tombe un peu plus neuve que les autres dans le cimetière. Marc est resté là debout à attendre, les gens partaient peu à peu et il recevait d’un mouvement du visage les condoléances de certains, ou refusait rapidement les propositions de ceux qui lui offraient de les accompagner. Ce fut un peu long – il avait son temps. Mais au bout d’un moment il n’y eut plus personne que lui.
Il s’est calmement approché, la vue un peu brouillée, puis il a lu l’épitaphe. Léonore Voulzet, 6 mai 1981 – 14 août 2012. Alors il a ouvert la bouche et il a hurlé sa détresse en un long cri.
« Léonooooooooooooore… »
Jusqu’à ce que sa voix se casse et qu’il s’écroule, enfin, sous les pleurs.
C’était une belle journée d’août, il avait 32 ans, et soudain tout le temps qu’il avait devant lui, tout le temps qu’il avait pour rester là à pleurer, et puis le temps qui viendrait ensuite, tout ce temps lui fit peur. Il ne savait pas trop ce qu’il allait devenir, maintenant, et il savait que ce serait long avant que dans sa propre tête treize ans de souvenirs cessent de le torturer. |