Bonjour, bonjour!
Attention, de grandes nouveautés pour ce chapitre 4! Je suis maintenant aidée par deux fabuleuses bêta (qui sont bien plus que cela vu la qualité du boulot): Lilithc et Elberane! Lilithc a accepté de corriger mes fautes diverses et variées, d'un coup d'oeil aiguisé! Elberane a fait un travail titanesque et minutieux, sur les fautes de style et les lourdeurs du texte!
Je vos encourage bien sûr à lire sa traduction de Mental, de Sara Holmes, un bijou! Une fic super, et une traduction de grande qualité! Lilithc écrit actuellement un super fic, l'Oeil de Rê, qui vous apportera bien du plaisir si vous prenez le temps de la lire également!
Voici donc une version totalement corrigée, lue et revue rien que pour vous, veinards^^! J'en profite pour vous remercier de vos reviews.
Ce chapitre est pour Mzchoco et pour mon homme, qui se dévoue en lisant du Yaoi. (je verse une larme).
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Une matinée radieuse d'automne se levait sur Poudlard. Le temps, sec et frais, réveillait les jeunes frimousses encore un peu ensommeillées, fouettant d'un vent léger les joues des étudiants se rendant à leurs cours, faisant voltiger les feuilles jaunissantes.
La lumière diffuseentrait à flots par les fenêtres du château; elle vint même se frayer un chemin au travers des rideaux fins des lits de l'infirmerie, puis à travers les cils blonds de Draco Malfoy.
-Mmhhhphgrr....
-Ta gueule, répondit une voix éraillée.
Surpris, le propriétaire des cils blonds ouvrit les yeux complètement. L'infirmerie! Non, évidemment, il n'était pas confortablement allongé dans un Hammam en compagnie d'un bel éphèbe brun, ça c'était son rêve... Et il fallait que Potter achève de le réveiller complètement!
Il grogna de frustration et s'enroula dans ses draps, cherchant à se rendormir et à replonger dans son rêve, heureux tout de même d'avoir pensé à tirer un rideau protecteur entre lui et le balafré (qui n'avait absolument pas besoin de constater la santé irréprochable de son professeur, se manifestant glorieusement par un afflux de sang localisé).
Mais impossible de dormir: du lit d'à côté provenaient des bruits de feuilles que l'on tournait, de pages froissées tout à fait exaspérants. Un bruit récurrent, agaçant. Même son érection matinale en était retombée. Avec résignation, le regard mauvais et les yeux cernés, Draco se décida à faire face à cette foutue journée- à commencer par une explication avec Potter.
Ils avaient la chance de ne pas avoir McGonagall sur le dos dès le matin, et ils pouvaient encore mettre au point une version des faits qui leur éviterait à tous les deux de sérieux ennuis- qui le sauverait, lui, d'un renvoi!
Tirant le tissu blanc dans un bruit de tringle métallique, il fit face à son ennemi avec la ferme intention de se montrer aussi aimable, hypocrite et désolé que nécessaire pour obtenir sa coopération, et il faillit s'étrangler rien qu'au premier regard sur Potter.
D'une part, ce garçon, avec l'impudeur tranquille des Gryffondors, s'était mis torse nu et Draco ne se sentait pas à l'aise face à cette vision juste après son rêve érotique; d'autre part il portait exactement les mêmes cicatrices que lui sur le torse.
Le sectumsempra avait laissé sur le corps de Potter des traces absolument similaires aux siennes. Il resta sans voix, les fixant, halluciné. Il avait l'impression trouble de se regarder dans un miroir- c'était lui, mais différent. Lui , mais moins mince, plus musclé, plus bronzé aussi; lui avec une ligne de poils sombres descendant jusqu'au pantalon.
Draco était tellement absorbé par cette analogie, cette similitude entre eux, ce lien qu'il avait lui-même gravé sur la peau de Potter, qu'il n'avait pas remarqué à quel point son comportement, et surtout son regard, pouvaient paraître étranges.
Mais Potter ne fit aucune réflexion sur son regard insistant, sur ces yeux qui le dévoraient. S'il trouva long ce moment d'abandon de son professeur, il ne le fit pas remarquer. Il se contentait d'attendre, à demi nu et une lettre encore à la main, que l'autre ait contemplé ce qu'il avait à voir.
Enfin Draco se reprit, réalisant subitement qu'il avait un comportement plutôt déplacé. Il en aurait rougi si les Malefoy savaient le faire.
-Tu as reçu du courrier?, lança-t-il, se reprochant aussitôt de ne trouver que des banalités à dire, alors qu'il avait une nouvelle version des faits à mettre au point avec son vis à vis.
-Mmmh. Hermione.
Il fit un effort de mémoire pour trouver quelque chose à dire sur elle, mais il ignorait même quelles études elle voulait suivre; ah, quoique, il lui semblait savoir quelque chose...
-Toujours pas avec la belette?
Victoire! Le brun avait souri.
-Si. Certaines choses prennent du temps.
Il n'avait rien d'autre à dire, et Potter retourna à sa lecture. C'était étrange. Il lui avait lancé un sort de magie noire qui avait à jamais mutilé son torse, et il ne se faisait pas descendre? Son pire ennemi était isolé avec lui et ne tentait pas de l'écorcher vif? Pas même une insulte pour la forme?
-Pourquoi... commença-t-il, cherchant encore ses mots. Pourquoi tu ne me dis rien? Je veux dire, après hier... Je pensais que tu voudrais me tuer. Tu devrais me tuer.
-Déjà, Hermione me conseille le calme. Je lui aurais bien offert une fourrure en peau de fouine, mais elle n'a pas l'air d'y tenir. Ensuite... Eh bien, si je tombe là-dedans, je ne vaux pas mieux qu'un mangemort.
Ces derniers mots en le heurtant, rendirent toute sa froideur au blond. Bien sûr! Le noble Potter tendait l'autre joue! Son visage se ferma.
-Malefoy... Non, je voulais dire... Ça s'arrêterait où? La guerre est terminée. On a failli se tuer plusieurs fois, toi et moi. On ne peut pas continuer jusqu'à ce qu'un de nous deux y passe.
Draco avala sa salive. C'est vrai que l'autre avait envoyé Ad Patres lord Voldemort, alors il ne devrait faire qu'une ou deux bouchées d'un professeur de potions.
-Et on raconte quoi à McGonagall?
-Parce que tu crois pouvoir lui dissimuler le fait que tu m'as envoyé un Sectumsempra? Faudra bien lui dire! Après, si jamais tu reste encore à Poudlard, on avisera pour se croiser le moins possible, c'est tout.
La porte de l'infirmerie les interrompit en s'ouvrant , livrant passage au professeur Slughorn. Il avait l'air plutôt ennuyé de se trouver ici,mais aussi inquiet en voyant les deux garçons si proches l'un de l'autre sans surveillance.
On n’allait pas leur flinguer un professeur, voire leur Héros, si impunément, si facilement ? Il avança vers eux aussi vite que la corpulence de son corps pouvait lui permettre, désireux d'interrompre une situation qui lui semblait pire qu'un chaudron laissé sans surveillance sur le feu, oubliant qu'il était venu à reculons.
-Messieurs, j'ai un, heu, hum! J'ai un message de la directrice pour vous...
Double coup d’œil interrogateur.
-Potter, bien qu'on ait décidé de vous dispenser de refaire les potions que vous avez détruites... Vous continuerez d'être en retenue avec monsieur Malefoy jusqu'à nouvel ordre... Je serai également là pour superviser et, hum... (le pauvre homme bafouillait, cherchant une manière pas trop abrupte d'annoncer la chose.) La directrice a indiqué que je pourrai profiter de cette occasion pour vous donner quelques leçons particulières.
Malefoy eut un sourire victorieux, qui n'échappa pas à Slughorn.
-A vrai dire, à vous aussi, monsieur Malefoy...
-Me donner des leçons? Vous n'êtes pas sérieux, enfin, je suis un professeur!
Visiblement embarrassé, Horace Slughorn chercha à tempérer:
-Pas vraiment des leçons! Non... Des conseils...
-Je ne suis pas sûr d'avoir besoin de conseils pour refaire quelques potions! Si vous ne me pensez pas qualifié pour le poste, dites-le tout de suite!
-Non, ce n'est pas ça, je suis certain que vous pouvez le faire! C'est simplement... Pour la gestion de votre colère...
-McGonagall nous envoie un psy?!
-Un conseiller conjugal, rectifia Harry, rigolard. Moi, ça me va parfaitement. De toute façon, je ne me sentais pas en sécurité avec le professeur Malefoy...
-Pas en sécurité?! Potter, tu as fait EXPLOSER ma salle de cours pour mon premier jour!
-Tu m'as envoyé un sortilège de magie noire...
-Parce que tu m’as fait exploser un chaudron rempli d'une potion inconnue et dévoreuse de chairs en pleine figure!
-Messieurs, calmez-vous! Je suis là pour éviter que ce genre de situation ne se reproduise...
-Avec le balafré, monsieur j'attire-les-ennuis dans la même pièce?
-Espèce de crétin arrogant, si tu ne créais pas ces emmerdes, je ne pourrais pas les attirer!
-MESSIEURS!
Les deux garçons, qui s'étaient approchés et se criaient au visage sans tenir compte de la présence de l'autre professeur, se tournèrent vers lui dans un bel ensemble- même mouvement,et même colère dans les yeux.
Slughorn soupira. Si semblables. Et pourtant: un blond, le nez froncé de mépris; un brun, sa rage clairement affichée sur le visage.
-Vous voyez comme vous êtes? Toujours en train de vous battre... Déjà lorsque vous étiez mes élèves... Vous ne pouvez décemment pas servir d’exemple aux élèves de Poudlard! Vous, Potter, vous ne pouvez pas contrer si directement son autorité devant les autres... Et vous, Malefoy, vous ne pouvez en aucun cas vous chamailler avec vos étudiants, c'est indigne de votre fonction!
Potter avait ravalé sa rage, et serrait la lettre d'Hermione entre ses doigts afin de canaliser ses émotions, conscient d'avoir en effet quelques efforts à faire. Mais comme pour l'occlumencie, certaines choses lui semblaient hors de contrôle. Malefoy, lui, avait redressé la tête à l'évocation de sa dignité: il en était pétri, ce n'était pas sa faute si Potter le faisait toujours sortir de ses gonds avec son manque de respect chronique! Rogue avait bien eu raison à son sujet... Arrogant...
-Nous commencerons lundi, éluda dans un soupir le professeur Slughorn, visiblement déjà fatigué rien qu'à l'évocation de ces pénibles soirées.
-J'aimerais être dispensé de devoir aller acheter les ingrédients manquants d'ici là, intervint vivement Harry.
-Bien entendu, bien entendu, répondit distraitement le vieil homme, au grand dépit de Draco Malfoy. A lundi donc, reposez-vous d'ici là...
Rajustant sa robe sur sa bedaine naissante, il tourna les talons avec l'air d'un homme qui a accompli son devoir, mais sans le moindre plaisir. Le dernier regard qu'il leur jeta signifiait clairement: "Je ne suis plus libre de mes soirées, alors vous le serez encore moins, n'essayez même pas de vous battre encore d'ici là."
La porte claqua légèrement sur ses talons, laissant de nouveau les jeunes hommes seuls.
-Dispensé d'aller chercher les ingrédients? C'était répugnant! Tu essaies encore de passer au-dessus de mes ordres...
Harry serra les poings. Il devait lutter contre la vague de colère qu'il sentait enfler en lui, puissante, entraînant tout sur son passage, noyant sa raison, dispersantles conseils pacifiques d'Hermione, les conséquences désastreuses, balayant tout ce qui n'était pas l'instant présent, les battements de son coeur, les yeux de Malefoy, l'envie de ses poings écrasés contre le visage, l'appel d'une chair écorchée réclamant vengeance.
Il ferma les yeux, se concentrant sur sa respiration pour tenter de la calmer, le visage de Malefoy toujours hantant ses paupières fermées; il aurait voulu battre cet homme juste pour avoir enfin la paix intérieure et le voir disparaître de ses pensées; il tentait de se calmer en sachant qu'il était vain de chercher la sérénité, en sachant que même s'il quittait la pièce sans rien faire il resterait obsédé pendant des heures par la pensée de la vengeance, par l'envie de détruire ce type qui aurait voulu le tuer la veille.
Il rouvrit les yeux et tenta de voir Malefoy sous un angle neuf. Il voulait se persuader de l'innocence de ce sale con, de voir un homme avec ses faiblesses mais aussi ses qualités dans ces yeux froids, qu'il avait honnis, qu'il aurait voulu arracher.
L'autre attendait. Attendait une réponse, son éternelle et épuisante expression supérieure retroussant sa lèvre d'un sourire narquois, et il devait lutter contre son instinct qui lui commandait de bondir pour lui arracher ce masque insupportable du visage. Il préférait de loin voir Malefoy décontenancé, souffrant, montrant enfin visage humain.
En quelles autres occasions que pendant leurs disputes avait-il fait preuve de son humanité?
La mémoire lui revint d'un coup. Bien sûr. Il avait déjà vu Malefoy pleurer. Dans les toilettes, en sixième année, et lui-même avait failli le tuer... Malefoy n'avait pas dû penser plus de bien de lui, en cette occasion. Il devait également être une sorte de monstre à ses yeux.
Alors la compassion le remporta sur la haine qu’il ressentait. La compréhension de quelque chose de plus profond que leurs querelles. Il se mit à la place de l'autre; il éprouva de l'empathie.
De la sympathie?
Peut-être qu'ils pourraient cohabiter dans ce château, finalement. Peut-être que ce n'était pas impossible.
Mais pour le moment plus d'efforts étaient hors de sa portée. Alors Harry fut lâche pour une des premières fois de sa vie. Il se leva de son lit de malade, récupéra sa baguette, et sortit de l'infirmerie sans même s'inquiéter d'être entièrement guéri, sans attendre d'avoir consulté madame Pomfresh.
Il fuit.
Loin de l'Autre, mais le conservant tout de même dans chacune de ses pensées. Gravé sur son torse, la marque du Sectumsempra le brûlait.
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Draco Malefoy était perplexe. Comme toujours avec ce foutu Gryffondor, il avait pu lire à peu près tout ce qu'il se passait dans la cervelle du brun rien qu'en regardant ses expression faciales.
C'est certainement ce qui l'horripilait le plus dans ce garçon. Cet étalage honteux d'émotions. Il n'avait jamais dû apprendre la pudeur.
C'était absolument gênant.
A chaque fois, il imaginait ce que dirait son père en voyant autant d'indécence, aussi peu de retenue, une naïveté aussi grande. Comment avait-il pu offrir ses pensées sur un plateau à tout le monde et vaincre Lord Voldemort? Mystère.
Mais il n'était pas certain d'aimer ce qu'il avait lu sur la bouche qui s'était décrispée, sur les yeux verts qui s'étaient adoucis, sur les traits peu à peu détendus et presque emplis de pitié, de miséricorde. Le sauveur se prenait pour un saint?
Un Malefoy n'avait pas besoin de pitié! Comment avait-il osé interrompre un échange verbal qui s'annonçait si plein de promesses de cruauté? Potter s'était défilé! Il n'en revenait toujours pas; d'habitude on pouvait toujours compter sur le balafré pour une petite bagarre.
Après tout, peut-être que le sectumsempra l'avait bien entamé. Il sentit quelque chose se contracter dans son estomac à cette pensée. Il ne se souvenait que trop bien de ce que ce sort faisait ressentir, et il ne put retenir la nausée qui monta en lui pour avoir pensé cela ,alors même que le ventre doré de Potter, strié des marques si familières, lui revenait à l'esprit.
Déchiré, éprouvant lui-même des sentiments mitigés- il rêvait, ou il regrettait d'avoir amoché l'autre binoclard?-, il se serait donné des gifles d'impuissances.
Depuis quand était-il incapable de se tenir à une unique ligne de conduite, à une seule pensée? Depuis quand les choses étaient devenues si complexes avec Potter?
Jetant un œil au lit abandonné, aux draps encore chauds du corps meurtri, il aperçu un petit bout de papier chiffonné à côté de l'oreiller.
La lettre de Granger. Il l'avait oubliée sur son lit.
Il était presque certain qu'elle parlait de lui. Il vérifia rapidement que personne n'entrait dans l'infirmerie, la saisit et quitta lui aussi les lieux en la fourrant précieusement dans sa poche.
Direction les cachots: après tout, il avait des cours à préparer... Et une missive à lire.
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Harry,
En effet, il était temps que tu répondes, je commençais à me demander si tu n'avais pas mangé toutes tes plumes en sucre... Je suis heureuse d'apprendre que tu as Ginny et Dennis avec toi, mais je ne suis pas certaine que leur soutien soit celui dont tu aies besoin en ce moment.
Tu ne devrais pas appeler Malefoy un mangemort, Harry. La guerre est terminée, et j'ai peur de voir là un signe de l'influence amère de ceux qui ont perdu des proches. Aujourd'hui plus que jamais il est important d'apporter ton soutien à Malefoy, si tu tiens à défendre les valeurs pour lesquelles nous nous sommes tous battus- je sais que ce sera difficile, que Malefoy est parfois insupportable, mais personne d'autre ne l'aidera. Sa vie va devenir un enfer.
Je pense que ceux qui, avec des intentions pures, ont lutté à tes côtés et ont dû payer cher le prix de la liberté ont déjà commencé à oublier les valeurs qui étaient les leurs. Dennis a perdu un frère. Ginny aussi. Cela change tout pour eux.
Je sais à quel point tu leur es attaché, mais je sais aussi de source sûre qu'un vraie chasse aux anciens mangemorts est ouverte. Tu devrais voir ce que subit Zabini à l'université.
N'oublie pas que même si vous avez failli vous étriper, Malefoy et toi, il t'a également sauvé la vie au manoir Malefoy; n'oublie pas que tu as sauvé la sienne dans la salle sur demande. Je t'en prie, Harry, considère ma demande, prends-la au sérieux.
Ron demande si tu pourras l'accompagner voir les Canons de Chudley aux vacances de Pâcques. Parles-en à MacGonagall...
Amitiés,
Hermione
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Harry était descendu directement dans la Grande Salle; ce n'était pas le lieu idéal pour être au calme, mais il espérait ne pas avoir raté l'heure du petit déjeuner, désireux de parler avec Ginny.
C'était sa petite amie, et il n'avait pas encore pu lui parler d'un seul des nombreux événements survenus cette semaine. Il ne voulait pas laisser d'écart se creuser entre eux. Et puis, quelque part au fond de sa tête, trottaient encore les paroles de Hermione: de cela aussi il voulait parler avec Ginny, il voulait vérifier sa position réelle concernant les mangemorts... et plus particulièrement Malefoy.
Il poussa la lourde porte en bois massif et constata avec soulagement la présence de nombreux élèves en train de se disputer les dernières saucisses, raclant les fonds de porridge, vidant les dernières gouttes de jus de citrouille.
Il sourit en se dirigeant vers la table des Gryffondors : Daphné Greengrass était encore attablée avec Dean Thomas, sa jolie petite main posée sur l'épaisse cuisse du garçon, tous deux souriant. Hermione avait certainement exagéré; jamais l'école n'avait vu les maisons se mélanger autant, comment pouvait-on soupçonner une sombre et sordide histoire de chasse aux mangemorts quand on voyait ces deux-là manger tranquillement?
-Salut, Dean, Daphné, lança-t-il en prenant place à leurs côtés. Vous n'auriez pas vu Ginny?
-Désolé, vieux, elle est partie y'a déjà un bout de temps...
Harry acquiesça et se servit une part de tarte à la mélasse. Quitte à être là, autant manger. Il découvrit qu'il était affamé-les émotions de la veille?
L'absence de sa petite amie l'ennuyait tout de même. Décidément, le sort s'acharnait contre son couple! Il s'apprêtait à mordre généreusement dans la pâtisserie quand une voix stridente l'interrompit.
-HARRY! Tu sauras jamais quoi...
- Dennis, ça ne peut pas attendre un petit peu? Je suis vraiment mort de faim, et en plus en retard pour mes cours...
-Mais Harry, c'est super important, tu sais que Slughorn organise une fête ce week-end pour les membres de son club?! On a reçu un hibou ce matin!
-Oui, c'est absolument génial...
Il engloutissait sa part à toute allure, se donnant l'impression d'avoir été transformé en Ron Weasley.
-Mais on peut emmener la personne de notre choix! Harry, je suis trop content de t'avoir trouvé avant Ginny, j'étais sûr qu'elle te l'aurait proposé...
-Dennis, tu es censé emmener une cavalière... (une pluie de miettes tombait sur sa robe de sorcier à chaque parole). Et puis tu sais, moi, les soirées de Slughorn...
-Mais tu ne peux pas rater celle-là!
Les yeux du gosse étaient suppliants. Harry se servit quelques toasts qu'il enduit d'une couche très épaisse de crème, complètement indifférent.
-Il disait dans son hibou qu'il ne pourrait plus nous recevoir en semaine, et MacGo déteste qu'on se réunisse les week-ends! C'est une de tes dernières chances d'y aller...
-Crois-moi, je vais suffisamment voir Slughorn cette année... Et puis si j'y vais, ce sera sûrement avec Gin'.
Dennis eut l'air déçu.
-Bon, je suppose que je vais inviter Romilda Vane, alors.
Il tourna les talons sous les yeux amusés de Dean et de Daphné, qui ajouta de sa petite voix flûtée:
-Tu devrais te dépêcher, Harry, si tu veux trouver Ginny avant les cours... Tu sais, je crois que Michael Corner aimerait bien aller avec elle à la petite sauterie de Slughorn.
-Y'en a qui ont pas peur, marcher sur les plates-bandes du survivant!, rit Dean en dévoilant ses belles dents blanches.
Harry, soudain aussi blanc que les dites dents, reposa son toast, les remercia du conseil et fila hors de la grande salle en direction des dortoirs. S'il se dépêchait un peu, il aurait une chance de prendre sa carte du Maraudeur et de voir un peu Ginny avant les premiers cours.
Il lui restait environ une demi-heure.
Dépassant des élèves qui traînaient le long de couloirs, prenant quelques raccourcis créés par l'éboulement de certains murs, il arriva échevelé devant la Grosse Dame, haletant:
-Feuilles d'automne!
Le passage s'ouvrit. Il bondit, reprenant sa course jusqu'aux dortoirs des garçons. Vides. Ouvrant sa malle, il en sortit la carte.
-Je jure solennellement que mes intentions sont mauvaises.
Mais ou était Ginny? Il fouillait des yeux les petits points surmontés de noms, certains se superposant, s'emmêlant; il s'attardait et perdait un temps fou à regarder ces amas de noms, et décida de regarder ceux isolés.
Alors il la trouva.
Aux cachots.
Avec Draco Malefoy.
-Mais qu'est-ce que c'est que ces conneries...?, murmura-t-il pour lui-même, incrédule.
Encore lui? Toujours lui! Toujours sur son chemin! Fouillant à nouveau dans sa malle, il sortit une copie de l'emploi du temps de Ginny, qu'elle lui avait donné en début d'année. Elle avait cours avec Trelawney, ce matin-là; on ne pouvait imaginer un endroit plus éloigné des cachots, hormis la tour d'astronomie.
Alors que faisait-elle avec son vieil ennemi? Et si elle avait appris ce qu'il s'était passé et avait décidé de le venger?
Ou pire, et si Malefoy continuait leur petite querelle par le biais de sa petite amie? Il ne le laisserait pas embêter Ginny, tout professeur qu'il était. Hors de question que l'autre la mêle à ça.
Il serait toujours temps d'aller en cours l'après-midi; après tout, il devait prendre le temps de se remettre du sort qu'on lui avait lancé... Il roula le parchemin dans sa poche, après avoir pris le temps de murmurer "Méfait accompli", prit sa cape d'invisibilité et sa prépara à traverser à nouveau le château au pas de course, déterminé à tirer cette histoire au clair.
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-De toute façon, on ne pouvait pas s'attendre à mieux venant d'un mangemort comme toi!, ironisait Ginny, sa baguette tendue vers le professeur de potions qui avait gardé en apparence son calme, malgré la pâleur de son teint.
Harry, qui voyait la scène depuis l'ombre du couloir, sortit discrètement sa cape d'invisibilité et s'en enveloppa avant d'entrer dans la salle à pas prudents.
-Cette affaire ne vous regarde pas, mademoiselle Weasley. Je vous prierai de quitter cette salle.
Elle ricana. Elle tournait le dos à Harry, il ne pouvait voir que sa chevelure flamboyer, jeter des ombres rouges sur les traits calmes de Malefoy.
-Maintenant tu me vouvoies?
-Les choses ont changé.
-Rien n'a changé... Si McGonagall est suffisamment aveugle pour le croire, moi je ne le suis pas!
-Quel dommage qu'elle ne vous consulte pas avant d'employer ses professeurs!
-Je sais que tu as attaqué Harry hier. Slughorn me l'a appris quand je suis allée le voir ce matin... Il nous avait envoyé un hibou très intéressant disant qu'il ne pourrait plus recevoir les membres de son club les soirs de semaine... Et tu oses dire que tout a changé?! Mangemort un jour, Mangemort toujours!
Le blond soupira.
-Bien que je trouve très... Touchante la manière dont vous défendez votre petit ami, je n'ai plus rien à vous dire. Vous devriez aller en cours.
-Je ne défends pas Harry! S'il est trop stupide pour se défendre contre toi, c'est son problème! Mais une fois que tu te seras lassé de lui, tu vas attaquer qui? Les enfants nés de Moldus? Les sang-mêlé?
Harry ouvrit des yeux ronds. Hermione n'avait pas vraiment tort: si les Serpentard étaient acceptés, les anciens Mangemorts avaient droit à un traitement à part. La fureur déformait les traits de Ginny, et la main qui tenait sa baguette tremblait lorsqu'elle murmura:
-C'est pour Fred...
Harry n'eut que le temps de bondir sur son bras afin de dévier le sortilège. Ginny poussa un cri de surprise strident, cherchant autour d'elle, paniquée de ne pas voir qui avait fait cela. Malefoy n'avait pas bougé d'un cheveu.
Avant qu'elle n’ait l'idée de recommencer, il ôta sa cape. La compréhension frappa le visage de la jolie rousse, puis ses traits se tordirent de colère; il crut qu'elle allait le stupéfixer.
-Gin...
-TRAITRE!! Tu nous as abandonnés!
-Quoi?! Ginny, je...
-Tu croyais qu'il suffisait de tuer Voldemort et de te reposer sur tes lauriers? Tu croyais que tu pouvais laisser courir des fous dangereux librement? Si ma mère n'avait pas tué Lestrange, tu l'aurais fait, Harry? REPONDS!
Draco écoutait la conversation d'un air dégoûté. Il se recula, s'effaça, il semblait ne plus vouloir participer. Harry était décontenancé et ne pouvait plus répondre, ses lèvres étaient sèches et comme collées entre elles. Un traître?
-Il t'a aveuglé, ou quoi? Il porte la marque des ténèbres! Il te lance un sort mortel, et tu ne réagis toujours pas? Tu ne tiens plus à protéger cette école? Il n'y a pas eu assez de morts?
-La guerre est terminée, c'est fini, il n'y a plus de morts... Je t'en prie, écoute-moi...
La rousse abaissa sa baguette. Elle arborait alors le même masque dégoûté que Malefoy.
-Tu me donnes envie de vomir. Tu laisses le travail inachevé. Tu ne vas pas au bout de tes convictions. Je te croyais d'une autre trempe. Alors, c'est ça, le grand Harry Potter... Voilà comment tu venges Fred, souviens-toi, Fred, ton ami! Mon frère! Voilà comment tu récompenses Dobby, Colin, Lupin, Tonks, Sirius, Severus, Dumbledore! Voilà comme tu leur montres ton amour!
-Ginny...
Il secoua la tête, incrédule.
-Ginny, je t'en prie, tu te trompes de cible... Ceux qui devaient payer l'ont fait.
-Alors c'est pour ça, que tu es venu? Pour le défendre! Tu défends Malefoy contre moi!
Harry prit une inspiration. Il devait assumer ses choix, ses convictions, il devait faire ce qui était juste. Aussi difficile que ce devait être.
Ce n'était pas Malefoy qui avait fait cette guerre. Il n'était pas un tueur, cela même Dumbledore l'avait dit. Il n'avait pas eu le choix. Et quand il l'avait eu sous les yeux, dans le manoir Malefoy, il ne l'avait pas dénoncé.
S'il s'était comporté comme un trou du cul, s'il lui avait lancé un sort la veille encore, ça n'avait rien à voir avec cette foutue guerre. C'était entre eux.
-Oui. Ne l’approche plus. Tu peux faire passer le message autour de toi. Le premier qui le touche me retrouvera sur son chemin.
-Alors tu peux me dire adieu.
Elle leur jeta un dernier regard, un regard fou, un regard de haine pure, un regard qui rappela brutalement à Harry, comme un coup de poignard au cœur, le regard de Belatrix Lestrange. Et elle tourna les talons. Harry était de nouveau seul.
Il sentit son cœur tomber dans sa poitrine, le calme retomber autour de lui, et il prit conscience du silence qui l'entourait.
Il fixait encore la porte par laquelle était sortie Ginny, sentant son monde s'écrouler, une page entière de sa vie rayée, froissée, déchirée. Une larme coula.
Et une main, une main chaude, une main fine et pâle, une main qui pour la seconde fois de sa vie s'avançait vers lui, se posa sur son épaule et le ramena à l'instant présent.
Pour rien au monde il n'aurait voulu que cette main ne quitte son épaule. Cette main était son tout dernier appui. Son tout dernier soutien. Alors pour continuer à profiter de sa chaleur diffuse, il ne bougea pas, il ne parla pas. Il se contenta d'écouter la respirationdu blond derrière lui.
Ce qui lui semblait être des heures embaumèrent cet instant. Une éternité.
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Merci à vous d'avoir parcouru ce nouveau chapitre! Je vous dis à très bientôt pour la suite. Les chapitres seront postés un peu moins régulièrement, car j'ai à présent le bonheur d'avoir deux Bêtas, mais seront d'une qualité supérieure!
Merci encore à Lilithc et Elberane pour leur travail :)
N'hésitez pas à reviewer!
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