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au 31 Mai 21 :
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Manchester et Liverpool
Par Cloe Lockless
Harry Potter  -  Romance/Amitié  -  fr
10 chapitres - Complète - Rating : T+ (16ans et plus) Télécharger en PDF Exporter la fiction
    Chapitre 4     Les chapitres     42 Reviews    
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Le tengo rabia al silencio

BO 4 : Marie Laforêt — Le tengo rabia al silencio ("J'en veux au silence" ?) : http://www.youtube.com/watch?v=cGP2hTC3q0o

qui est une reprise de Atahualpa Yupanqui :

http://www.youtube.com/watch?v=CaBmuvJImg8

ou

http://www.youtube.com/watch?v=RmahuNO0gcM

Voilà :D

 

 

Manchester & Liverpool

________

 

4

 

 

 

Quand Ginny se réveilla pour de bon, c’était comme si elle n’avait pas dormi. Malfoy était déjà parti. Il faisait jour dehors et elle chercha autour d’elle dans l’espoir de trouver l’heure quelque part. Son sac était trop loin.

Il devait être tard, peut-être même déjà l’après-midi : la chambre paraissait déserte ; à la regarder, elle aurait presque pu oublier qu’on vivait là. Qui vivait là. D’ailleurs, elle n’était pas sûr de le savoir.

La veille, elle avait préféré coucher par terre plutôt que de risquer de croiser d’autres occupants de l’immeuble en squattant leur espèce de salon commun. Quitte à faire la clocharde, elle préférait le faire derrière une porte verrouillée plutôt qu’à tous les vents. Elle pouvait se servir de la magie dans la chambre, et après deux sorts de matelassage dont elle avait acquis une certaine maîtrise à force de bourlinguer, le sol et son sac étaient suffisamment confortables pour s’y installer. Et puis elle était près de l’appareil qui chauffait la pièce. Mais elle n’avait pas pu s’endormir avant que les sorts ne se dissipent et, à un moment donné de la nuit, Malfoy, qui manifestement ne dormait pas non plus, lui avait intimé d’une voix excédée de ramener sa fraise et sa couverture sur le lit. Il s’était pressé contre le mur et ils avaient dormi côte à côte, elle sur la couette enroulée dans sa couverture, Malfoy lui tournant le dos, lui laissant suffisamment d’espace pour qu’ils ne se touchent pas.

Le lit n’était pas grand, mais assez pour eux deux. Elle l’avait entendu partir, mais n’avait pas ouvert les yeux, et il avait dû l’enjamber pour sortir.

Et maintenant.

Elle se leva et s’habilla, dénichant des affaires propres dans son sac et de quoi prendre une douche. Ne sachant que faire ensuite et n’osant pas sortir de la pièce (ni de l’immeuble) au cas où il aurait bloqué les Alohomora sur sa porte, elle eut envie de fouiller les placards. Elle identifia un paquet de biscuits qu’elle avait déjà vu un jour et se dit qu’elle s’excuserait plus tard.

Elle s’assit au pied de la fenêtre et entreprit de regarder la pièce. Avec quelque chose à se mettre sous la dent, l’envie de mettre son nez dans les affaires de son hôte lui passait. Elle songea distraitement que, finalement, il avait dû laisser le paquet sur le bureau pour elle : il y avait d’autres choses qui traînaient dans la pièce mais rien d’ouvert, rien qui fût laissé autant en évidence. Elle ne put s’empêcher de sourire. Qui l’eût cru.

Elle se surprit à se sentir en sécurité ici. Pour la première fois depuis des mois, elle avait l’impression d’atterrir quelque part. Il n’y avait plus l’atmosphère de passage des chambres d’auberge, ni celle pesante du Terrier, où elle n’arrivait plus à rester. Ici, elle respirait enfin. C’était une table rase, et elle n’était pas seule. Peu importait combien de temps cela allait durer.

Pour la première fois même, elle eut l’impression que la guerre était d’un autre monde. Elle ne savait pas où elle était, ils étaient loin de tout, et plus elle repensait aux événements de la veille, plus elle prenait conscience du temps qui était passé depuis le printemps 1998. Bientôt, elle se remit à penser à Harry et sentit qu’elle pouvait se remettre à pleurer.

Elle retourna se coucher.

 

 

Malfoy la trouva sur l’escalier de secours, de l’autre côté de la fenêtre qu’elle avait laissée entrouverte :

« Tu n’es pas sortie de la journée ? s’étonna-t-il.

- Si, regarde, je suis dehors.

Il leva les yeux au ciel :

- Tu sais très bien ce que je voulais dire.

Elle arbora une moue renfrognée.

- J’avais peur de ne pas pouvoir re-rentrer.

- Je t’avais laissé la clé.

- … Ah.

- …

- Et tu aurais fait comment, toi, si j’étais partie ?

- Ce sont mes sorts, je sais les défaire.

- Donc j’avais raison de penser que tu avais mis des sorts.

- … Si tu veux. »

Il sortit sur la passerelle métallique et s’assit sur le rebord de la fenêtre, les jambes étendues devant lui. La vue n’avait rien de grandiose ; un ou deux étages plus bas, ç’aurait même été un peu étouffant. Mais il régnait sur la cour un silence étrange, fait de rumeurs sourdes et de sirènes étouffées, distantes, qu’il n’y avait pas dans le monde sorcier, un souffle omniprésent qui lui semblait venir des hélices grises sur les toits et les murs, qu’elle comptait depuis tout à l’heure.

« Et tu manges des fois ? demanda-t-il.

- J’ai dormi toute la journée, dit-elle.

- Ah.

- Mais maintenant j’ai faim.

Il sourit :

- Depuis le temps que j’hésitais à prendre un animal de compagnie. Tu me tombes du ciel.

Elle lui jeta un petit regard assassin. Mais après tout, elle ne pouvait pas prétendre à beaucoup plus que cela. Elle se rembrunit.

Il roulait des cigarettes sur ses genoux, un rictus satisfait aux lèvres. Ses gestes lui évoquaient de lointains cours de Potions.

- Combien de temps est-ce que je peux rester ?

Il réfléchit quelques instants avant de répondre.

- Comme tu veux. Tu ne me gênes pas. Pas encore en tout cas.

- Désolée d’avoir débarqué comme ça… Je ne savais pas où aller.

- Je serais mal placé pour te faire des reproches.

Elle leva les yeux vers lui. Il croisa son regard et haussa un sourcil.

- Tu ne me diras rien…, dit Ginny.

- Qu’est-ce que tu veux que je te dise ?

Elle soutint son regard ; puis rouvrit la bouche :

- On survit ?

Sa question sembla le prendre au dépourvu. Il écarquilla les yeux. Puis il détourna la tête et se mit à rire.

- Ouais, la preuve…

Il rangea ses cigarettes dans un paquet mal en point et se mit à manipuler le briquet comme s’il hésitait ; ses doigts transis par l’air froid vibraient.

- Harry était furieux de ce qu’ils ont fait à ton père.

Il rangea le briquet.

- Je sais… »

En un mouvement trop rapide pour elle, il s’était redressé et enjambait le montant de la fenêtre pour retourner à l’intérieur. Elle le suivit avant de risquer de le perdre de vue et crut mourir d’inanition. Elle resta coite quand il la prit vivement par le bras pour l’aider à se redresser, une fois à l’intérieur, et lui emboîta docilement le pas jusqu’à la cuisine.

Le second soir, elle passa la nuit par terre.

 

 

Ils n’avaient aucun cours ensemble. Il avait peut-être assisté au premier cours de Sortilèges – elle se souvenait de l’impression bizarre de ce premier cours, toutes les têtes qui n’auraient pas dû être là et les quelques unes qui n’y étaient pas ; la tension insupportable qui rejetait Malfoy de toutes ses forces…

Oui, il était là en début d’année. Elle l’avait occulté. Il s’était fait oublier. Il n’était pas revenu en cours un jour. On hésitait entre le mettre à Azkaban ou le laisser vivre, on voulait le foutre dehors mais leurs procès avaient duré des mois, des mois, des mois. Ne pas créer de précédent. Ne pas acquitter ce fils de Mangemort-là. Ne pas créer de conflit public avec le héros du monde sorcier. Elle ne savait plus qui de Harry ou elle refusait d’en parler. Ils avaient bien d’autres chats à fouetter que le futur d’un Serpentard à moitié repenti, tout aussi proche de leurs vies soit-il. Mais elle ne comprenait pas pourquoi Harry se ruinait la santé à défendre Narcissa Malfoy et par extension toute la famille, même si elle avait menti pour lui et que sans doute ils ne méritaient pas tout ça.

Elle croyait comprendre à présent. Il était très important que Malfoy ne soit pas condamné. Pour que cela s’arrête… Non. Elle ne comprenait toujours pas.

Mais, tandis qu’elle regardait Malfoy lui montrer le fonctionnement des appareils de cuisine, l’absurdité reprenait du sens. Ce n’était plus le monde tel qu’ils l’avaient connu.

Une dynamique de fantômes s’installa : ils évoluaient dans le même espace, se croisant souvent, sortant parfois en même temps errer dans les rues de la banlieue ou du centre ; rien ne les attaquait. Elle élut rapidement domicile secondaire dans la cuisine plutôt que la chambre. Ç’avait été un ballet étrange d’observer les gestes habitués mais néanmoins réticents de Malfoy près des objets moldus : il savait faire des pâtes, il savait réchauffer des plats sans magie, même s’il affichait toujours un froncement de sourcils mécontent. Il ne se servait en fait que très peu de la magie. Dans la chambre, ils s’éclairaient d’un lumos qu’elle lançait le plus souvent elle-même, mais c’était comme s’il n’en avait pas besoin.

Ils finirent par trouver ridicule qu’elle dorme par terre et il fallut agrandir magiquement le lit sans faire sauter les plombs de tout l’immeuble. Ça passait. Elle apprit qu’il avait crevé de faim pendant un temps, que c’était un ami de Beth qui lui avait filé son bail, qu’il avait rencontré Beth dans le bus :

- Dans le bus ?

- Oui. Elle a un faible pour les petits blonds à l’air brisé. Je cite.

Ginny le regarda d’un œil rond se retenant maladroitement de pouffer. Il lui jeta un regard lui intimant de se passer de commentaires.

- Vous avez couché ensemble ?

Il leva les yeux au ciel.

- Non.

Elle finit par savoir où il disparaissait pendant la journée, mais ça ne l’aida pas beaucoup et ne lui donna pas non plus envie de chercher à travailler ici ; au lieu de cela, elle se mit à passer du temps au pub où Draco se rendait tout le temps et potassait des livres de cuisine que Beth lui trouvait, même si elle n’essayait aucune des recettes et s’en tenait à ce qu’elle savait déjà faire. Faire semblant de s’intéresser aux images lui suffisait amplement.

Quant à Draco, elle le soupçonnait de s’accrocher à sa présence : montrer qu’il pouvait se permettre d’entretenir quelqu’un. Une espèce de fierté enfouie – nostalgie des privilèges ? Ils n’en parlaient jamais. Ils n’en avaient pas besoin. De toute façon, ils ne voulaient plus y penser.

 

 

Le bruit étouffé de la douche emplissait la chambre, se mêlant aux rais de lumière pâle qui filtraient entre les lames des stores. Un biscuit pas très bon à la main, Ginny arpentait la pièce, ouvrant par vague curiosité les tiroirs de la commode. Lorsqu’elle trouva au fond de l’un d’eux une baguette de sorcier, elle fronça les sourcils. La baguette dont Draco se servait était posée sur la commode, plus claire et familière que l’autre ; elle la souleva et la fit tourner entre ses doigts, se rendant soudain compte de ce qu’elle devait avoir dans les mains. Elle revoyait Harry s’en servir, cet été-là, après la guerre, avant qu’il n’aille s’en acheter une autre au cours de l’automne ; il ne s’était jamais servi de la nouvelle, ou en tout cas elle n’y avait pas fait attention, et plus elle regardait le fin morceau de bois, plus elle était persuadée qu’il l’avait encore à Noël.

Le bruit d’eau cessa. Elle reposa la baguette et s’adossa à la commode.

Quand Draco sortit de la salle de bain, il lui lança un regard interrogateur ; elle récupéra la baguette pour la pointer vers lui, calmement.

« Depuis quand est-ce que tu l’as ? demanda-t-elle.

Il tendit la main pour la lui reprendre.

- Depuis Noël de l’année dernière. Il me l’a envoyée par hibou.

Ginny serra les dents machinalement.

- C’était la mienne, tu sais, rappela-t-il.

- Je sais.

Comment l’oublier.

- Tu as eu droit à un mot ? finit-elle par demander.

Draco la regarda un instant avant de faire « non » de la tête :

- Il ne sait pas écrire. »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Rec : Pour les Drarrystes en quête d’action et anglophones, j’ai trouvé le jumeau spirituel (jumeau démoniaque) de ma fic – pour l’ambiance, le détail, le regard de Draco sur Harry… Et puis brillamment écrit *-* Cigarettes will kill you de femmequixotic : http://archiveofourown.org/works/64719  Rating : 18+, bien comme il faut.

 

 

 
 
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