2 jours avant l'épidémie

De bon matin, les deux femmes étaient parties faire leur randonnée hebdomadaire. Elles marchaient d'un bon pas depuis déjà une heure.

Cette fin de printemps laissait éclater ses dernières fleurs de saison, les oiseaux gazouillaient à qui mieux mieux, les abeilles voletaient autour des randonneuses. De-ci, de-là, des lapins baguenaudaient, et des écureuils fuyaient en grimpant aux arbres. Victoire se dit qu'il lui manquait la présence de sa chienne Reina qu'elle avait confié à ses voisins.

Alors qu'elles continuaient leur chemin tranquillement, de légers bruits de feuilles et d'animaux les mirent en alerte. D'instinct, Victoire se mit devant sa mère, la main sur son poignard de chasse. Elle regretta de ne pas avoir pris sa machette, voir son glock. Elles continuèrent à marcher mais le bruit quoique léger se faisait encore entendre. S'arrêtant de nouveau, Victoire s'orienta vers un épais bosquet, un pas, puis deux. Le bruit d'une légère respiration et la vue d'une pointe l'arrêta d'un coup. Un gars aux yeux bleus plissés l'avait dans la ligne de mire de son arbalète. Elle ne bougeait pas.

Un grand éclat de rire se fit entendre.

- Tu t'es fais avoir frangin !

- De quoi, tu parles, Merle, elle est paralysée par la peur ! Regardes-là ! Répondit le plus jeune.

- Darylounet, baisses les yeux !

L'arbalétrier jeta un coup d'œil puis releva la tête à s'en faire craquer les cervicales.

- Eh ouais, Daryl, la frenchie te tient par les couilles.

En effet, Victoire pointait son poignard vers les parties génitales de son adversaire. Elle lui fit un grand sourire moqueur en le regardant droit dans les yeux et s'adressa à lui.

- Bien... tu pourrais penser que je risque plus que toi car ton carreau est sur mon front et qu'appuyer sur la gâchette m'enverrait "ad pâtres".

Il lui répondit en marmonnant un grave "yep" !

- Hélas, pour toi, ton frère a une mauvaise vue.

- Qu'est-ce tu veux dire ? Demanda Daryl.

- Qu'à la vérité, mon couteau est non seulement pointé vers ton artère fémorale mais je l'avance millimètre par millimètre depuis que je te parle.

- Et ?

- Comme je devine que ton casier judiciaire est aussi plein que le mien en France est vierge... mais que... malgré tout... ma nationalité et mon passé militaire me desserviraient plus sûrement si je te tuais... Donc, je te propose que nous abaissions nos armes respectives ensemble ! D'ac' ?

Il opina de la tête.

- Un...

- Deux... Répondit-il

- Trois ! Finit-elle

Ils laissèrent tomber leurs bras le long du corps tous les deux dans un bel ensemble. Un nouvel éclat de rire de Merle les fit sursauter. Eugénie intervint alors.

- Viens ma grande, laissons ces... "messieurs" continuer leur chasse !

Alors que sa mère reprenait le chemin de randonnée, Victoire la suivit non sans se retourner pour dévisager une dernière fois les deux hommes. Son regard s'attarda néanmoins sur le plus jeune lui tirant un sourire intéressé.

1 jour avant l'épidémie

Pour elles ne savaient quelles raisons, les deux femmes n'arrivaient pas à quitter la région.

C'est ainsi qu'elles étaient allées avec leur car/camping-car jusqu'à Atlanta pour visiter ce haut-lieu de la guerre de Sécession. Évidemment, comme la plupart des villes américaines, les parties historiques de la ville étaient portion congrue.

Elles n'y restèrent donc pas plus longtemps que la matinée et prirent la direction de Augusta. Là, il leur fut plus facile de trouver des vestiges du passé sécessionniste de la région.

Elles décidèrent d'y passer la nuit.

Le Jour de l'épidémie

Couchées particulièrement tôt, les deux femmes se levèrent à l'aube. Une fois prêtes, elles prirent la route de Louisville.

C'est alors que la TV du Comté leur montra des choses incroyables qui se passaient non seulement en Géorgie mais aussi dans tout le pays. L'écran plat de leur camping-car montrait des images crues et sanglantes de personnes tuées et agressées. D'autres personnes dépenaillées et hagardes attaquaient les pauvres victimes.

Alors quelles approchèrent de Swainsboro, elles prirent la direction de la gargote où elles avaient mangé quelques jours auparavant.

C'est par le fusil du proprio qu'elles furent accueillies. Les reconnaissant et leur trouvant un air tout à fait normal, il les fit entrer. Victoire lui posa alors la question fatidique.

- Mais qu'est-ce qu'il se passe, bordel ?

- Je ne sais pas des gens mordent et tuent d'autres gens. C'est trop bizarre !

N'en apprenant pas plus, les deux femmes attendirent que les gens à l'extérieur aient fini de courir dans tous les sens pour rejoindre leur véhicule.

Une fois, au volant, la mère interrogea sa fille.

- Que fait-on ?

- On rejoint un port... n'importe lequel et on se paye un bateau... et un marin pour rejoindre le pays !

- Tu es sûre ?

- Oui ! Je suis sûre !

Elles prirent alors la direction de la Côte Est sans se douter qu'elles étaient suivies.