– Vous êtes sérieux chef ?

– Je suis très sérieux Fairfox. Vous êtes un très bon élément, et je suis sûr que cette affaire est dans vos cordes.

 L'inspecteur était intérieurement ravi, mais il se demandait également pourquoi une affaire du genre lui tombait dessus, aujourd'hui, tout de suite, maintenant. Jamais on ne lui avait donné de telles responsabilités.

 – Chef, vous êtes sûr que c'est un tueur en série ?

– Si s'en est pas un, je me rase la tête. Croyez-en mon expérience, je les flaire à des kilomètres. Mais vous verrez bien par vous-même. On va voir ce que vaut "l'intuition Fairfox".

 Le directeur fit volte face, et sans un mot, sorti de son bureau. Axel se posait désormais beaucoup de questions. Est-ce que cette affaire était une sorte de piège ou de test ? Si oui, son chef réellement était le sadique qu'il semblait être. Si non, il était ravi, et plus pressé que jamais de commencer.

Désireux de combler son stress, il retourna dans le couloir et fit couler son troisième café de la journée.

 Il retourna dans son bureau, avala son café d'une traite, et attrapa son manteau. Avant de sortir, il griffonna un mot destiné à Dyme, le colla sur l'écran de l'ordinateur, et se pressa dans le couloir. Il fit un détour vers le comptoir d'Aerith, où il récupéra l'adresse de la victime : "Ouah, le chef à fait vite !".

Quand il sorti enfin sur le parking, il s'appuya contre sa voiture et alluma une nouvelle cigarette. Une cigarette : Axel était fatigué. Deux cigarettes : il était stressé. Il resta quelques minutes à l'extérieur, puis démarra sa voiture en trombe. La maison de la victime était située à peine à dix minutes du cabinet, et l'inspecteur fut très rapidement sur place.

Deux véhicules de police étaient déjà garés devant la petite maison. Axel sorti de sa voiture et commença son travail. Il observa quelques instants la petite demeure blanche, entourée d'autres, toutes semblables, sans aucun doute construites dans les cinq dernières années. Il passa à pas lents dans le jardin, et emprunta la porte d'entrée. "Homme, dans les 40 ans. Vit seul." Son intuition commençait à jouer son rôle.

Dans ce qui semblait être le salon de la victime, deux collègues de l'inspecteur relevaient des empreintes et cherchaient des indices. Au centre de la pièce, au pied d'un fauteuil, gisait le corps, trempé de sang.

Axel s'approcha et retint un haut-le-cœur. Il avait l'habitude des photos sordides, mais la vue de ce corps mutilé et l'odeur insoutenable qui l'accompagnait était insupportable. Il s'attarda quelques instants sur les détails encore visibles du cadavre : le corps était celui d'un homme, avec de longs cheveux noirs grisonnants. Le visage était marqué de cicatrices, et l'œil droit était recouvert d'un cache-œil noir. Sur le front, un net impact de balle s'affichait clairement comme cause de la mort. Le détail le plus marquant cependant, se situait au niveau du torse de l'homme : là où aurait dû se trouver le cœur, il n'y avait plus qu'un trou béant. La plus grande partie du sang qui avait coulé sur le sol semblait venir de là. En se penchant légèrement et en s'empêchant une seconde fois de vomir, Axel constata que le cœur avait bien été extrait.

 – Ah, inspecteur Fairfox, vous êtes là.

Axel se retourna et se retrouva face à face avec le chef de la police scientifique, qui travaillait souvent en collaboration avec son cabinet. Le jeune homme qui l'accompagnait le regarda quelques secondes, puis, semblant se rappeler de quelque chose, sorti une feuille de papier et déclama à toute vitesse :

 – Alors, euh… La victime s'appelle Braig Hunter. Il avait 42 ans. C'est un ancien journaliste qui travaillait à l'étranger. Il semble que la cause de la mort soit un coup de feu, tiré dans la tête, et qu'on ai extrait le cœur après. Et euh, on n'a pas retrouvé de lettre d'explication qui prouverait un suicide, mais par contre, sur son corps, on a découvert ça.

Accompagnant le geste à la parole, le jeune homme tendit une pochette plastique dans laquelle avait été déposé un morceau de papier. Axel le leva au niveau de son visage et pu lire, malgré les tâches de sang :

 "Xigbar. No 2. L'Archer."

 Axel remercia le jeune homme d'un signe de tête, s'éloigna de quelques pas et se mit à réfléchir. Son cerveau marchait à plein régime. Pour lui, la présence du numéro 2 sur le mot impliquait la présence d'un numéro 1, d'un autre mot, par conséquent d'une première victime, et donc d'un tueur en série. La mutilation et la disparition du cœur était sans aucun doute le mode opératoire du tueur. Ainsi, il ne serait pas très difficile de retrouver cet amateur de chair fraîche.

Mais le nom de Xigbar sur le papier laissait l'inspecteur perplexe. La victime se nommait Braig Hunter, et non pas Xigbar. Axel esquissa un sourire, satisfait d'être confronté à une affaire qui allait certainement l'occuper pendant plus d'une journée.

 Bien décidé à éclairer sa lanterne, Axel demanda aux hommes présents les indices qu'ils avaient découverts. Il apprit donc que la balle qui avait causé la mort était issue du fusil Uzi retrouvé dans la chambre de la victime, et que le cœur, selon le médecin légiste, avait été retiré très soigneusement, en dépit des grosses quantités de sang perdues. Il demanda aux photographes une copie des photos prises sur la scène de crime et récupéra le bref rapport de ses collègues.

D'un coup d'œil, il chercha dans la petite pièce ce qui pourrait ressembler de près ou de loin à du café. Finalement, comprenant qu'il n'en trouverait pas, il s'efforça d'aider ses collègues et se mit à chercher des indices. Malheureusement, il était totalement inutile et préféra rentrer au cabinet, pour faire ce qu'il faisait de mieux : fouiner.

Il abandonna la petite maison, entra dans sa voiture et retourna sur son cabinet.

Après son habituel signe de tête destiné à Aerith, il entra dans son bureau et alluma son ordinateur. Il entra dans son programme de recherche, tapa le nom de Braig Hunter et se mit à lire. M.Hunter était effectivement un ancien journaliste, qui travaillait dans les pays  en conflit. Selon le fichier, il avait perdu son œil après avoir faillit mourir pendant une expédition. Depuis, il travaillait pour différents journaux locaux, de chez lui. Il vivait seul, et n'avait jamais été marié. Il n'avait ni femme, ni enfant, ni famille proche. Cependant, Axel ne trouva aucune information liant Braig Hunter à un certain Xigbar.

Cependant, l'inspecteur était confiant. L'arme du crime avait été retrouvée directement, et des empreintes allaient surement faire leur apparition très bientôt. Il espérait seulement ne pas avoir à faire à un meurtrier trop tatillon.

 Sur un nouveau papier, il gribouilla le nom de Braig Hunter et le colla à nouveau sur l'écran de l'ordinateur. Selon lui, Dyme saurait quoi en faire.

 Il quitta son bureau et se dirigea vers celui des archives. Attrapant une quinzaine de dossiers ayant pour thème les morts liées à des chiffres, il espérait trouver un lien avec son affaire et son fameux numéro 2. Il revint vers son bureau, ouvrit plusieurs dossiers en même temps, et se mit à chercher.

Deux heures plus tard, l'inspecteur n'avait rien trouvé qui, de près ou de loin, puisse se rapprocher de son enquête. Aucun crime n'était lié avec un "No 1". On lui avait transmit les photos et les indices retrouvés sur la scène de crime, mais plus il cherchait, moins il s'y retrouvait. Il n'y avait, contrairement à ses espérances, aucune empreinte nulle part, ni sur le papier retrouvé sur le corps, ni sur le fusil. Des échantillons de sang étaient en train d'être analysés, et le corps était entre les mains du médecin légiste. Mais Axel le savait, rien de tout cela ne lui serait utile. Il lui manquait un élément essentiel.

Mais pourquoi donc avait-on tué ce pauvre homme ?