– Ax ! Ax ! Réveilles toi !

– Grummmph…

L'inspecteur Fairfox ouvrit une paupière étonnamment lourde et essaya de diriger son regard vers la voix qui l'appelait. Rien de ce qu'il voyait autour de lui ne lui semblait familier. Il laissa donc ses yeux se refermer : "Tant pis, je me démerderais plus tard."

– Oh ! Axel, debout, on à du boulot !

Nombre d'insultes se mélangeaient dans la tête d'Axel, jusqu'à ce qu'il se souvienne où il était, dans un flash.

– Dyme ! Laisse-moi dormir, on bossera plus tard !

Axel ne se décida à bouger que lorsqu'il senti un petit choc à l'arrière de sa nuque, petit choc provoqué par un gobelet lancé par Dyme. En levant la lourde masse qu'était devenue sa tête, il foudroya du regard son assistant, hilare.

Il se leva difficilement de sa chaise, et aperçu furtivement son reflet dans un miroir. Les plis des feuilles du dossier sur lequel il s'était endormi étaient imprimés sur ses joues et son front, et sa chevelure rouge feu ressemblait à une barbapapa qui aurait connu des jours meilleurs.

Il préféra ne pas se préoccuper de son apparence déconfite et se glissa derrière Dyme, qui se débattait sur son ordinateur avec des dizaines de fenêtres ouvertes. Il avait l'air satisfait de lui malgré les cernes violets  qui encadraient ses yeux.

– Regarde Ax, je crois que j'ai quelque chose !

Il afficha une sorte de programme, où les prénoms des deux victimes ainsi que les surnoms trouvés sur les corps étaient inscrits.

–  J'ai pris les lettres du prénom de Braig et celui de Xigbar, et toutes les lettres sont les mêmes, mit à part le X. Et c'est la même chose pour Dilan et Xaldin ! Tu penses que c'est important ?

– Oui, Dyme, c'est possible. Ca a donné quelque chose de concret ?

– Et bien, en fait, non…

L'inspecteur regarda son assistant, l'air dépité.

– T'as passé plus de trois heures devant ton écran juste pour ça ? Baaah ça sert à rien, je me recouche, compte pas sur moi pour t'aider. Après l'heure, c'est plus l'heure.

Il était plus de 3 heures du matin, et Axel était exécrable. L'affaire devenait de plus en plus sombre, et à chaque fois qu'un élément nouveau apparaissait, il se noyait dans le flot des doutes, et finalement disparaissait. Alors, même si la découverte de Dyme était intéressante, Axel n'arrivait pas à se réjouir. Il voulait juste se reposer, prendre du recul, ou avoir du nouveau.

Il zigzagua entre les meubles du petit appartement de Dyme et s'allongea par terre, entre le canapé et la cithare, appuyée contre le mur. Contemplant le plafond, il poussa un profond soupir. Il écoutait le bruit des touches de l'ordinateur, qui agissait sur lui comme une berceuse.

– Si tu trouves quelque chose d'important, réveilles moi. Je suis désolé, c'est pas mon heure.

Dyme lui adressa un sourire, et se mit à fredonner doucement. Axel ferma les yeux, et se sentit tout de même heureux d'avoir un assistant tel que lui, qui n'avait pas sa fainéantise. Il ne tarda pas à s'endormir, légèrement apaisé.

Pour finalement se réveiller à peine trois heures plus tard, recroquevillé contre les pieds du canapé. Le soleil matinal frappait violement ses yeux, et il se redressa en grognant. Dyme fit son apparition, souriant, caféiné, et gonflé à bloc.

– Debout Ax', on a du nouveau au bureau !

En se grattant la tête, l'inspecteur se leva difficilement, et tituba vers le gobelet fumant posé sur le bureau. En le buvant avec délectation, il demanda à Dyme de lui expliquer ce qu'il y avait de nouveau.

– Le boss à appelé sur ton portable il y a environ une demie heure, et m'a expliqué qu'un jeune homme est venu déclarer la mort de son père, qui d'après lui, aurait été victime de notre tueur. Le type nous attend au cabinet.

Il n'en fallait pas plus à l'inspecteur pour se réveiller. Il avala son café d'une traite, en se brûlant la moitié de la langue, et se dépêcha vers la porte de l'appartement. Dyme, un sourire aux lèvres, attrapa son manteau, et emboîta le pas à son ami.

Les deux hommes se suivirent en voiture jusqu'au cabinet. L'inspecteur avait fumé sa cigarette matinale en chemin, tant son excitation était grande.

Quand ils entrèrent dans le cabinet, Axel remarqua tout de suite le jeune homme assit sur une des chaises de l'accueil, près du comptoir d'Aerith. Il s'approcha de lui, se présenta brièvement et l'invita à le suivre. Il fit un léger détour près de la secrétaire, qui lui donna le dossier correspondant au meurtre.

Une fois dans leur bureau, Dyme se précipita sur son ordinateur, l'inspecteur Fairfox s'installa en face du jeune homme, dont le visage rougi par les larmes était dissimulé derrière une mèche de cheveux bleu sombre.

– Jeune homme, vous êtes venu nous demander de l'aide sur la mort de votre père. Nous sommes là pour vous aider. Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce qui s'est passé ?

Il leva les yeux, renifla doucement, et entama son récit.

– Et bien, je suis rentré de la faculté hier soir, vers 19 heures, et j'ai trouvé mon père mort, dans le salon. J'ai tout de suite deviné qu'il s'agissait de ce tueur, quand j'ai vu que son cœur avait disparu. La porte d'entre était fermée, alors je ne sais pas du tout comment il a pu rentrer dans la maison. Je ne sais pas non plus comment il l'a tué, mais je veux vous aider à le trouver, et à le faire payer.

L'inspecteur feuilleta rapidement le dossier, et leva un sourcil interrogateur.

– Vous vous appelez bien Ienzo Hetzel, n'est ce pas jeune homme ?

– Oui, inspecteur.

– Et si je ne me trompe pas, votre père se nomme Even Mendel. Quel est votre lien de parenté réel ? Si vous voulez nous aider, il ne faut rien nous cacher.

Ienzo rougit légèrement, puis avoua que la victime était son père adoptif. Il l'avait toujours considéré comme son vrai père, même s'ils ne portaient pas le même nom. La situation était très difficile, et Axel comme Dyme se sentaient très gênés par la tristesse du jeune homme. L'inspecteur s'en voulait plus particulièrement du ton peu amène qu'il venait d'utiliser. Il lança un regard embarrassé à Dyme, et posa une main compatissante sur l'épaule d'Ienzo, geste qu'il s'autorisait rarement.

– Ne vous inquiétez pas. Nous prenons les choses en main. Je me vois cependant dans l'obligation de vous demander de rester à la disposition du cabinet, il est possible que nous ayons de nouveau besoin de vous.

Le jeune homme leva son visage, et Axel fut touché de la détermination et la tristesse qui brillaient dans le fond de ses yeux. Il hocha légèrement la tête, et se leva. L'inspecteur le suivit, et lui tendit sa carte.

– Si vous vous souvenez de quoi que ce soit, ou si vous avez besoin de quelque chose, n'hésitez pas.

Il lui lança un dernier regard compatissant, et le laissa partir. Il fut récupéré par Aerith, qui le raccompagna en douceur.

Axel s'assit de nouveau à son bureau, les yeux plantés sur le dossier encore fermé. Après un massage des tempes, il ouvrit enfin la chemise de papier et découvrit le même corps mutilé que les deux autres, à un détail près : ce corps si n'avait aucune autre marque que celle de sa poitrine béante. La lecture des premières conclusions des médecins laissèrent l'inspecteur perplexe. Selon les légistes, l'homme était mort empoisonné au cyanure de potassium. Cela l'avait foudroyé en quelques heures.  Ses lèvres étaient violettes, quelques gouttes de sang avaient coulé le long de sa bouche. Au fond de sa gorge, on avait retrouvé le papier habituel, sur lequel était inscrit :

" Vexen. No 4. Le savant glacial."

L'inspecteur nageait dans les incompréhensions. La victime était un scientifique éminent, qui travaillait sur la génétique. Aussi, il semblait étrange qu'il se soit empoisonné. Il n'y avait toujours aucune trace du tueur, mis à part la petite trace de piqure qui tachait le bras gauche de l'homme. C'est de là que les médecins avaient conclu la cause de l'empoisonnement.

Dyme leva les yeux vers Axel, et lui lança un sourire. Les deux hommes pataugeaient dans cette affaire et perdaient peu à peu l'espoir de trouver un indice.

Comme une coïncidence, une silhouette se dessina derrière la porte du bureau. Ansem Mueller entra dans la pièce, suivit d'une jeune fille brune aux yeux asiatiques.

– Fairfox, Baez ! J'ai quelque chose pour vous. Cette jeune fille a été contactée par le tueur, elle a des choses à vous dire.