« – Alors quoi ? On est en train d'instaurer une sorte de tradition, c'est ça ? je demande, mi-agacé, mi-soulagé qu'il soit revenu.
Dans la journée, j'ai pu recevoir mes amis, Pansy, Blaise, Crabbe et Goyle. Enfin, amis est un bien grand mot… Je n'avais jamais eu si peu envie de les voir. Leurs discussions sans intérêts, les derniers ragots de l'école et la voix stridente de Pansy m'ont très rapidement lassé. J'ai prétexté être encore faible et fatigué pour écourter la visite. J'ai bien vu le regard en biais de Mme Pomfresh quand j'ai sorti cette excuse minable, mais ça m'est égal. Je n'aime pas beaucoup cette femme non plus, elle est beaucoup trop avenante et maternante pour être supportable. Elle me donne la sensation d'étouffer, comme sous ces grandes couettes qui vous donnent trop chaud en quelques minutes à peine.
Après cela, j'ai passé le reste de la journée seul. Ca commence à être long, même avec les livres que Pansy m'a laissés. Alors d'un certain côté, je ne suis pas fâché d'avoir un peu de compagnie.
« – Tu aimerais ? me demande le brun, visiblement amusé par la question.
« – Dans tes rêves Potter. » Je crache, mais avec plus de malice que d'animosité.
Je n'ai pas envie qu'il parte. Je ne sais pas pourquoi.
« – Alors, ce droit de réponse ? Je suis tout ouïe.
– Mais qu'est ce qui ne va pas chez toi ? »
Je n'en reviens pas de sa témérité et de son aplomb. Ce type est dingue. Je veux dire, qui d'autre, après s'être battu pratiquement à mort avec une personne, démarre des rendez-vous nocturnes pour discuter ?
« – Rien. Tu m'as rendu curieux, tu m'a dis que tu méritais mieux que ça. Et c'est vrai… alors je t'écoute. »
Je soupire bruyamment. Je ne suis plus aussi sur de mon envie qu'il reste désormais. Il renchérit.
« – Tu sais très bien que je ne partirai pas tant que je n'aurai pas ce que je veux. »
Connaissant le tempérament borné du Gryffondor, je sais qu'il ne ment pas. Mais je n'ai pas envie de lui donner raison.
« – Je peux tout aussi bien appeler l'infirmière pour te faire disparaitre. je pointe.
– C'est vraiment ce que tu souhaites ? »
Je ne réponds pas. Comme si mes souhaits avaient jamais compté.
« – Qu'est ce que tu veux savoir au juste ?
– Pourquoi tu as essayé de tuer Katie Bell ? Ca n'a aucun sens.
– Qu'est ce qui te dit que…
– Ah, pas à moi Malefoy, s'il te plait ! » me coupe t-il agacé.
Je suis estomaqué.
« – Potter, je ne te dois rien du tout ! Dois-je te rappeler qu'il y a quelques jours à peine je serai mort de ta main si Severus n'était pas venu à mon secours. »
Je l'entends déglutir.
« – Tu ne comprends rien. Comme tu viens de le dire, j'ai failli te tuer. C'est moi qui te dois quelque chose. Tu m'as fait une demande, je te l'offre. Je t'offre mon attention, mon écoute et mon aide. Tu as l'air d'en avoir besoin. Je te promets que tout ce que tu me diras ne sera jamais répété sans ton accord. Libre à toi de faire ce que tu veux de cette proposition. »
Je fixe sa silhouette dans l'obscurité. C'est officiel, il est dingue. Mais je dois admettre que c'est tentant. Je donnerai tout pour avoir les amis qu'il a, le soutien qu'il a. Avoir une fois dans ma vie la sensation de pouvoir se confier, pouvoir goûter à ce partage unique me fait horriblement envie.
Merlin suis-je désespéré au point d'accepter de l'aide de mon pire ennemi ? Je fais un rapide tour d'horizon de ma vie. Oui, c'est bien possible. L'altercation avec Potter a au moins eu le mérite de me faire réaliser que je ne souhaitai pas mourir. Et ce n'est pas rien, mais ce n'est pas grand-chose non plus. Ne pas vouloir mourir ne permet pas de mener sa vie. Et il faudra bien que je prenne le volant de la mienne à un moment.
Je ne veux plus vivre dans un tunnel, j'ai envie d'être libre. D'une manière ou d'une autre, j'entrevois que cette offre de Potter est comme une main tendue vers de nouveaux possibles. Peut-être que les potions troublent ma capacité de jugement, mais je sens que je peux faire confiance au Gryffondor, qu'il tiendra sa parole quoi qu'il lui en coûte.
Alors je baisse les armes et je laisse tomber les digues. Rien qu'une fois… |