Letters, No Letters
Si Draco Malfoy n’avait pas reçu sa lettre...
genre : romance
yaoï
by Scrat
(note : Une version developpée de cette histoire devrait être postée un de ces quatres)
* * *
Draco s’empara de sa valise et fit un signe formel de la main à ses parents sur le quai. Puis il se faufila à l’intérieur du wagon. Il se retourna à plusieurs reprises pour vérifier que ses parents étaient bel et bien partis. Puis il fit demi-tour et se heurta de plein fouet à un autre élève, un garçon vêtu de nippes trop grandes et aux cheveux débraillés.
- Oh. pardon ! s’exclama ce dernier.
Draco renifla et haussa les épaules sans répondre. Et sous le regard ébahi du jeune homme qu’il venait de heurter, il ré-ouvrit la porte du train et redescendit sur le quai qu’il venait de quitter. Le train siffla, se mit en marche et Draco le regarda s’éloigner. Une drôle d’amertume coulait dans sa gorge. Il avait été choyé toute sa vie, adulé, présenté en exemple. Ses parents avaient toujours été fiers de lui et son onzième anniversaire avait été grandiose. Grandiose, oui. Mais ni son père ni sa mère n’avait jugé utile de s’assurer qu’il avait bien reçu sa lettre d’admission pour Poudlard.
Draco était lâche. Et il s’était surpris le matin même à prendre sa valise pour rejoindre la voie 9 ¾, C’était plus facile finalement de faire cela. De faire croire à ses parents qu’il était en chemin pour l’école de sorcellerie, et de se retrouver seul, plutôt que de leur avouer la monstrueuse vérité: Il n’avait pas la capacité de faire de la magie.
* * *
Draco ôta prudemment sa robe de sorcier et la plia sur une chaise. Son regard s’arrêta un instant sur le calendrier clouté au mur. Dans deux jours, il aurait 15 ans. Il inspira profondément et s’installa dans son vieux fauteuil. La pièce était miteuse et les luxueuses affaires de Draco tranchaient avec le décor. Cinq ans plus tôt, il avait pris une navette pour venir ici, puis il avait loué cette chambre. Miss Fits était une vieille acariâtre, si désagréable que plus personne ne fréquentait son établissement. En voyant les gallions scintillants de Draco, elle ne s’était pas interrogée sur son âge et lui avait simplement laissé prendre une chambre.
Au début, le garçon s’était senti déprimé. Et puis, il s’était organisé. Il devait réussir à faire croire à ses parents qu’il allait bel et bien, années après années, à Poudlard, afin d ‘y suivre sa formation de sorcier.
Tout avait commencé comme cela. Installé dans l’auberge de Miss Fits, seul client régulier, il avait commencé à bricoler, à fabriquer de faux papiers, à s’inventer de faux amis dont il parlait dans des lettres bien réelles. Il s’était renseigné sur les méthodes de notation, sur les bulletins. Il avait tenu l’illusion jusqu’aux vacances de Noël, terrorisé à l’idée d’être découvert. Mais pas une fois, son père ou sa mère ne lui avait demandé de montrer de quoi il était capable. Ils s’en fichaient. Ils étaient fiers de lui. Une fierté d’apparence. Une fierté qu’ils affichaient, car ils se devaient d’être fiers de leur fils.
Mais ils s’en fichaient.
Le monde de Draco avait volé en éclat, et c’est sans rien leur avoir avoué qu’il était revenu à Pré-au-lard, au terme des vacances.
Et cela avait duré, duré. Mentir était facile. Bientôt, Draco était devenu un pro de la contrefaçon et pouvait en deux semaines, préparer tous les faux papiers, les fausses lettres qui permettraient d’étayer ses mensonges de l’année. L’ennui l’avait gagné et il s’était mis à explorer d’autres domaines. Un but s’était dessiné sous ses pas. Il ne pouvait vivre comme un cracmol. Comme un moldu. Alors s’il n’avait pas de magie en lui, il la créerait lui-même. Petit à petit, il avait lu des livres, réuni du matériel et sa chambre d’auberge s’était transformée en laboratoire. Il fallait connaître le lieu par coeur pour se faufiler jusqu’au lit. Draco cherchait, travaillait, inventait. Il n’avait que 15 ans mais il avait déjà mis au point plusieurs menues inventions, capable de simuler la magie. Il travaillait cette année là sur un projet de réacteur afin de pouvoir faire voler un balai.
Mais ce jour là, Draco se laissa retomber dans son fauteuil sans jeter un oeil à son fourbi. La peur l’avait quitté depuis longtemps déjà . Et à cet instant pourtant, il la ressentait. Il la sentait couler dans ses veines comme un mauvais vin, lui vrillant la tête, lui tordant l’estomac. Et ce n'était pas agréable.
Pas agréable du tout.
Il crispa son point et le déplia à plusieurs reprises dans un effort vain pour se calmer. C'était la faute du garçon brun. « Le garçon du train » songea Draco. Il l'avait nommé ainsi le jour où ils s'étaient heurtés dans le train. Il l'avait revu de loin. Souvent. Il avait commencé à l'observer surtout depuis ses 13 ans. Le garçon du train était tout ce qu'il n'était pas. Avec le temps, sa fascination avait grandi, comme si plus l'affection et l'estime qu'il avait pour ses parents s'échappaient, plus il avait besoin de les mettre en quelqu'un d'autre. Et c'était tombé sur lui. Le garçon du train.
Et ce jour là, au bout de 5 ans d'observation assidue, le garçon lui avait parlé. Oh pas grand chose, presque rien. Draco était assis à l'auberge des trois balais, le nez dans le plan du nouveau réacteur qu'il concevait, corrigeant ses erreurs, les sourcils froncés.. Et puis une voix l’avait interpellé.
- Je peux m’asseoir ?
Draco avait levé les yeux et s’était noyé dans deux lacs verts. Si tant est qu’un lac puisse être vert.
Le garçon du train était là, devant lui, encore plus beau qu’il ne l’avait cru. Le jeune blond avait simplement approuvé d’un hochement de tête. Le garçon brun avait bu sa bierraubeurre en regardant partout autour de lui, l’air curieux. Draco s’était retenu de rire plusieurs fois.
- Tu n’es pas élève à Poudlard ? avait il finalement demandé le jeune homme brun.
Draco avait cligné des yeux. Il vivait seul depuis longtemps désormais, mais le peu de rencontre qu’il faisait était toujours au manoir Malfoy, et il était sur d’une chose : Aborder ainsi les inconnus n’était pas poli. Mais le garçon avait l’air sincèrement intéressé et Draco n’eut pas la force de l’envoyer paître.
- Non. Je travaille chez moi.
- Ah bon ?
Le regard vert continuait à le scruter. Il y avait de l’innocence dedans, mais pas seulement, une touche plus dure aussi. “Il a des cicatrices dans les yeux” pensa Draco, tout en sachant que la chose n’était pas possible. Et sans qu’il sache pourquoi, il lui avait dit. Il avait prononcé les mots qu’il n’avait jamais osé dire.
- Je ne peux pas faire de magie. Je suis un cracmol. Les cracmols ne vont pas à Poudlard.
L’autre l’avait dévisagé et soudain, avait éclaté de rire.
Draco avait haussé un sourcil. Il ne voyait pas ce qu’il y avait de drôle.
- Est-ce que par hasard tu te moques de moi ?
Le garçon du train s’était essuyé les yeux, surpris de la colère du jeune homme blond.
- Non.
Il n’avait pas cherché à expliquer son rire, ni à adoucir sa réponse. Il avait détourné les yeux aussi innocemment qu’il les avait posés sur Draco. Fou de rage, le jeune homme s’était levé, avait pris sa cape et avait quitté les trois balais au pas de course pour se réfugier chez Miss Fits.
Sur son fauteuil, il ressassait cette conversation et l’intolérable colère, l’intolérable frustration qu’elle lui procurait. Il bouillait littéralement.
Puis subitement, il se remit debout. Il était seul. désespérément seul. Et pour la première fois, cela lui pesait. Il avait toujours réussi à tricher, à truander, et son honnêteté le mettait hors de lui, mais en même temps, il s’en voulait d’être parti. Le garçon du train. Il devait s’excuser. Pour la première fois de sa vie, il sentait le besoin de présenter ses excuses à quelqu’un et ce besoin consumait sa chair, comme se consume un adolescent de 15 ans : de la pointe des cheveux, à la pointe des ongles, du coeur aux couilles.
Il sortit aussi précipitamment de sa chambre qu’il y était entré et dévala les escaliers. Puis il se figea sur le pas de la porte. Adossé au mur d’en face, le garçon du train semblait l’attendre.
Draco se raidit, hésita, méfiant. Puis il fit un pas vers l’autre. Le brun se passa une main dans la nuque, soudain un peu gêné.
- Je voulais juste te présenter mes excuses. Tu sais pour avoir ri. Mais tu es parti tellement vite... J’ai juste réussi à te suivre de loin et une fois là, je n’ai pas osé entrer.
Draco esquissa un sourire, amusé. Encore une première.
- Je ne me moquais pas de toi. C’est juste que le seul cracmol que je connaisse est le concierge de Poudlard. Et je me disais qu’il n’y avait pas de règle visiblement... Tu es heu.. son opposé.
Le garçon du train rougit brutalement et Draco lui sourit plus franchement.
- Tu veux entrer dans l’antre d’un cracmol ?
Aussi étrange que fut cette rencontre, le garçon accepta et ils montèrent. Draco expliqua à son convive la raison du désordre et parla de ce sur quoi il travaillait depuis 5 ans. Au bout d’un moment, l’autre ré-éclata de rire. Et cette fois Draco ne se vexa pas
- Tu es comme Batman en fait
- Qui ?
- Oh. Un justicier moldu. Contrairement aux autres super-héros il n’a pas de pouvoir. Mais il est suffisamment brillant pour créer ses propres gadgets afin de compenser. Et au final, je trouve qu’il a beaucoup plus de mérite que les autres. Il n’a pas de “don” à l’origine et il les surpasse tous.
Draco ne répondit rien. Leurs regards restèrent accrochés un long moment. Puis le garçon du train murmura:
- J’ai peur un peu... Es-tu bon ? Es-tu méchant ? Comment t’appelles-tu ?
- Draco. Et toi ?
- Harry.
|