Chamane 22 : Deux lettres
A Madame Malfoy née Black Narcissa, son épouse, et à Monsieur Malfoy Draco, son fils, nous annonçons officiellement que le prisonnier Malfoy Lucius, condamné à la réclusion criminelle pour crimes de guerre, est mort à Azkaban le 10 du mois courant.
Selon les instructions du Ministère concernant les Mangemorts décédés en prison, son corps a été incinéré. Une urne contenant ses cendres vous sera remise en échange de cette lettre au bureau des Aurors. Veuillez noter qu'aucun rassemblement de plus de trois personnes ne sera toléré lors des funérailles.
Pour le Ministre, le sous-secrétaire Ignatius Whitehorn.
Suivait une signature illisible.
Narcissa et Draco s'attendaient à cette nouvelle mais la sécheresse de la lettre et les sous-entendus qu'elle exprimait leur firent tout de même froid dans le dos. Et ils furent contents tous les deux d'être partis définitivement chez les Moldus. Il leur faudrait pourtant affronter une dernière fois les regards méprisants des sorciers quand ils iraient chercher l'urne. Narcissa voulait y aller seule mais Draco s'y opposa fermement. Il se demandait s'il aurait l'autorisation de déposer les cendres de son père dans le tombeau familial situé dans le parc du Manoir.
Curieusement, aucun des Aurors présents dans le bureau ne les regarda avec mépris, personne ne fit de réflexions désobligeantes. Ils eurent sans problème la permission d'aller dans le parc de leur ancienne demeure.
« Le Manoir est toujours à vendre, dit le chef des Aurors en leur remettant l'urne toute simple, portant le nom de Lucius Malfoy et la date de son décès gravés sur son flanc. Mais le monument reste naturellement votre propriété. Quels qu'ils soient, les morts doivent reposer en paix.
Puis il ajouta à voix basse :
-Nous sommes au courant pour les épines d'oursins. Rolf Scamander et sa femme sont des amis. Merci Monsieur Malfoy pour leurs jumeaux, ce sont des bébés adorables. Vous pouvez accéder au Manoir par Cheminette, le réseau y est encore en service. Et si vous avez besoin d'autre chose … »
Draco inclina brièvement la tête. Allons, le monde n'était pas peuplé que de gens médiocres et revanchards. Cela lui mit un peu de baume au cœur. Car même si maintenant l'amertume liée à la guerre s'était estompée, le deuil qu'il ressentait avec le décès de son père était profond. Lucius Malfoy avait été son modèle et son guide. Ses théories sur la suprématie des Sangs Purs étaient désormais obsolètes mais par son éducation sévère, il lui avait donné une âme forte. Et c'était heureux car il avait eu de dures épreuves à affronter.
La tristesse de Narcissa était différente. Elle aimait son mari mais sans passion excessive. Elle ne l'avait pas vu depuis longtemps et elle s'était très bien habituée à sa nouvelle vie. Elle avait dû fouiller au fond de sa malle pour trouver une robe de sorcière mettable. Elle ne portait plus que des vêtements moldus et ils lui allaient bien. Elle avait aussi perdu cet air orgueilleux un peu constipé qu'elle avait autrefois. C'était encore une belle femme, portant bien sa presque cinquantaine. Mais la perte de Lucius était tout de même pour elle un grand chagrin. Son ancienne vie était désormais définitivement close. Et elle ne pouvait espérer garder pour toujours son fils auprès d'elle. Il trouverait un jour une épouse à son goût et la quitterait pour fonder un foyer. C'était le lot de toutes les mères. En pensée, elle accueillait déjà ses futurs petits-enfants avec bonheur. Elle était loin du compte.
Suivant les renseignements discrètement donnés par l'Auror, ils empruntèrent l'une des grandes cheminées du Ministère et arrivèrent directement dans l'ancien bureau de Lucius Malfoy. Mais la pièce était vide comme toutes les autres à l'intérieur de la maison. Le mobilier, les tableaux, les bibelots, tout avait été emporté par les zélés employés du Ministère et vendu à l'encan. Le hall d'entrée était froid et sombre mais la porte s'ouvrit sans peine pour les anciens propriétaires du lieu. Le parc lui aussi avait un air d'abandon. Les hautes herbes et les buissons avaient envahi les pelouses et les massifs autrefois bien entretenus. Ils durent se frayer un chemin pour arriver jusqu'au tombeau.
C'était une simple bâtisse éclairée par deux vitraux colorés. Une porte de fer forgée permettait d'entrer dans une salle carrée avec en son centre une table de pierre et une vasque vide. Les noms des Malfoy défunts qui reposaient là étaient gravés sur les murs : Abraxas, le grand-père de Draco et son épouse Primevera, les ancêtres Almerick et Druella, Onésimus et Hortensia, d'autres encore. La Famille Malfoy remontait plusieurs siècles en arrière. Cependant, le Manoir était de construction assez récente. Il avait été bâti sur les décombres d'un château beaucoup plus ancien détruit par un incendie. Le parc avait remplacé les tombes éparpillées autour. Les ossements des Anciens avaient été rassemblés dans ce tombeau et Lucius allait y prendre place à son tour.
Draco tendit sa baguette magique et prononça la formule. La dalle supportant la table glissa de côté, laissant apparaître un escalier de pierre. Draco et sa mère descendirent dans la petite salle souterraine et Narcissa déposa l'urne dans l'une des alcôves vides. Ils se recueillirent quelques minutes puis remontèrent. Le nom de Lucius s'inscrivit directement sur le mur. La dalle se remit en place avec un bruit un peu sinistre. Alors Narcissa sortit à son tour sa baguette magique. Elle ne s'en était pas servi depuis longtemps. Elle leva le bras et fit un geste circulaire en prononçant le sortilège « Florissima ! » d'une voix forte. Un gros bouquet de fleurs des champs apparut et se posa dans la vasque qui s'était remplie d'eau claire. L'air tout à coup embauma et la lumière se fit plus vive. Lucius avait été un terrible Mangemort mais les souffrances endurées à Azkaban l'avaient en quelque sorte lavé de ses fautes. Il pouvait reposer en paix parmi ses ancêtres au Sang Pur.
Ils retournèrent lentement vers le Manoir qui leur parut lugubre. Chacun d'eux espérait ne pas revenir de sitôt au tombeau des Malfoy car cela signifierait qu'il perdrait le dernier membre encore vivant de sa famille. Et Draco se disait qu'il était non seulement le dernier des Malfoy mais aussi le dernier des Black. S'il mourait sans enfant, deux très anciennes Familles sorcières s'éteindraient. Son avenir lui paraissait bien incertain. Sauf sur un point. Tout en allumant les flammes vertes dans la cheminée cendreuse, il repensa à ce qui s'était passé quand il avait ouvert la deuxième lettre qu'il avait reçu la veille. La lettre de Potter. Et pendant que Narcissa disparaissait dans les flammes puis qu'il quittait à son tour la maison de son enfance, il savait qu'il avait maintenant quelque chose d'important et d'urgent à faire. Guérir Harry.
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C'était une lettre épaisse et elle parut lourde à Draco quand il la prit en main. Il ne l'ouvrit pas tout de suite car rien que la tenir lui faisait un drôle d'effet … Potter … Voyons, depuis combien de temps n'avait-il pas pensé à lui ? Il en rêvait la nuit, ça il le savait et ça lui était agréable, mais dès qu'il se levait le matin, le Griffondor disparaissait de ses pensées. Pourtant, il savait qu'il avait quelque chose à faire pour lui mais quoi ? Ça lui échappait. Il fixait les timbres et le gros tampon de la Poste : Botswana …
Et soudain, dans sa tête, un rideau blanc se déchira. Ce fut comme un rayon de soleil qui perce le brouillard du matin. Le séjour à Ghanzi-Sa ! Tout lui revint en mémoire et il eut l'intuition, sans pouvoir en être sûr, que quelqu'un avait sciemment jeté un voile sur ses souvenirs. Mais maintenant tout était clair : Potter … Harry … était là-bas, bloqué dans la cité magique, incapable de partir à cause d'un venin sournois et jusqu'à présent inguérissable. Potter condamné à ne toucher que du bois de palmier, se nourrissant de riz et de quelques fruits et légumes, Potter à demi-nu dans son pagne de raphia, Potter le chamane, prisonnier du désert !
Il devait le délivrer, c'était ça qu'il devait faire ! Et pour cela, il fallait que Potter guérisse ! Maître Dlima et d'autres guérisseurs faisaient tout leur possible et Maître Ndiapo s'était lancé dans des recherches approfondies. Mais il savait … il était sûr … que lui aussi pouvait trouver un remède miracle ! Il avait rapporté trois épines d'oursins pour faire des essais ! … Où les avait-il rangées ? Comment cela lui était-il sorti de la tête ? Il ouvrit l'enveloppe d'un geste rapide. Plusieurs feuillets couverts d'une écriture serrée un peu brouillonne s'en échappèrent. Ses yeux sautaient de lignes en lignes et son cerveau travaillait en même temps et au même rythme.
« Cher Draco, lut-il, ( et l'emploi de son prénom accompagné du mot cher ne le choqua pas.)
Ces quelques mots pour te dire que je vais bien et que les recherches avancent tout doucement ...
(Quelques mots qui s'étaient drôlement prolongés, mais il vit que la lettre avait certainement été écrite en plusieurs fois )
Ici à Ghanzi-Sa, les guérisseurs font surtout des essais avec le jus des mirabilis. Quand j'en bois, je ne sens presque plus de brûlures si quelqu'un me touche. Ils le mélangent avec d'autres liquides où ils ont fait macérer des épines bouillies. Ce n'est pas très bon à boire et jusqu'ici, il n'y a guère de résultats, sauf parfois des crampes d'estomac.
( Il faut sûrement utiliser de l'extrait d'épines pour l'effet contraire mais je doute que les faire bouillir soit une bonne idée. Ce n'est pas assez puissant pour tuer le principe actif. )
Maître Ndiapo prépare plutôt des onguents à étaler sur l'endroit où j'ai été piqué. Son idée, c'est que le venin qui est entré par là doit ressortir par le même endroit. Il prépare des échantillons qu'il m'envoie par Uuuiu. La petite chauve-souris n'arrête pas d'aller d'un lieu à l'autre. Ne t'inquiète pas, j'ai donné à Boréa assez d'argent pour qu'elle rachète des mouches sèches, la bestiole adore ça. Gammla m'a expliqué dans un message que son père écrase un œuf d'oursin et mélange la bouillie avec soit du miel, soit de la cire de palme. Je l'applique sur la blessure, il y a chaque fois un peu de sang qui sort de mon bras mais c'est tout. Le dosage n'est pas encore au point …
(J'utiliserais plutôt les œufs en absorption, pas en cataplasme. Le fennec et les oiseaux les mangent pour être immunisés … )
Je vois bien que d'un côté comme de l'autre, ils font des efforts mais les résultats tardent à venir et je trouve le temps long …
La première partie de la lettre s'arrêtait là. Et Draco ressentit un petit – un minuscule ! - pincement au cœur. Le temps long … Oui sans doute ! Il se disait aussi que les guérisseurs travaillaient chacun de leur côté. Chaque coterie voulait probablement être l'inventeur de la Potion Tue-Oursin comme autrefois Severus Snape avait été le créateur de la Potion Tue-Loup ! Ah ! les rivalités entre sorciers ! Cela existait depuis le commencement des temps ! … La suite de la lettre se trouvait sur une autre feuille.
« J'ai oublié de te dire de ne pas te tracasser avec les vêtements de soie. Dès que j'en ai parlé à Maître Dlima, il l'a dit à Maître Félaro qui est aussitôt allé à Gaborone pour m'en acheter. Il y a quelques boutiques de luxe dans la capitale. Les sous-vêtements sont très agréables à porter. Les pyjamas et les chaussettes aussi. Ça c'est un véritable plaisir. Par contre pour les vêtements, il a eu du mal semble-t-il. Il est allé dans un magasin chinois et il m'a rapporté une tunique rouge brodée, fermée sur le côté par des brides nouées, et un pantalon noir assez large. Je n'ai pas osé lui dire que c'était un costume féminin. Il me va bien quand même et comme personne d'autres n'en porte ici, ça n'a pas d'importance …
( Merlin ! J'aimerais bien voir ça ! Potter déguisé en Chinoise ! Il ne lui manque que le grand chapeau de paille ! Mais c'est vrai. J'avais promis de m'occuper de ses vêtements en arrivant à Londres et j'ai totalement oublié ! Comment est-ce possible ? )
Et à propos de soie, Maître Dlima l'utilise aussi pour filtrer les décoctions …
( Ça oui, c'est une bonne idée. On utilisait de l'étamine de soie autrefois quand on faisait fondre les cristaux d'azurite avec de l'extrait d'hellébore pour fabriquer la potion de Scarribour. Si je veux préparer un remède pour Harry, il me faudra toutes sortes d'ingrédients et du matériel qu'on ne trouve que sur le Chemin de Traverse … Hmmm ! Es-tu prêt à faire une chose pareille, Draco Malfoy ? Et pour Potter en plus ? )
… Je peux maintenant assister aux cours des Maîtres guérisseurs. Ah oui ! Maître Félaro m'a rapporté aussi plusieurs paires de gants blancs en soie, des gants de dame pour les cérémonies. Ça fait bizarre mais c'est pratique. Avec ça, je peux prendre des notes et toucher les ingrédients quand ils ne sont pas trop salissants. J'apprends toute une pharmacopée nouvelle. Tu serais sûrement plus à l'aise que moi pour les préparations mais finalement les bases sont les mêmes. Certains produits africains remplacent ceux qu'on utilisait. Il n'y a pas de sang de salamandre dans leur potion de Régénération mais du sang de tritonus nigerius, un triton de rivière noir et jaune tout gluant. Leurs yeux de scarabées pour traiter la chute des cheveux sont gros comme des billes. On ne se sert pas de la belladone. Dommage, j'en connais encore toutes les propriétés. Par contre, il y a du gingembre dans presque tous les élixirs, seule la dose est variable …
( Mais c'est qu'il deviendrait savant le Potter ! A vivre chez les Moldus, j'ai oublié beaucoup de choses. Il me faudrait le livre des potions de septième année pour me remettre à niveau. Il y avait toute une partie consacrée aux piqûres et morsures. Pour les animaux aquatiques, les méduses-sirènes, les crabes de feu, les silures à dents de scie, les … mais oui ! les oursins de mer ! Il faudrait creuser de ce côté-là … Hola ! Malfoy ex-Serpentard ! Tu vas vraiment passer tes soirées à potasser tes anciens cours pour les beaux yeux de Potter ? Les beaux yeux de Harry … Hmm … )
… Etrangement, poursuivait le Griffondor, leur contrepoison principal n'est pas le bézoard,. Pourtant ici, on élève des chèvres mais elles n'ont pas de pierre dans leur estomac. Chaque guérisseur a dans son sac une noix verte qui neutralise les poisons et fait vomir. Malheureusement, c'est inefficace pour moi. J'ai essayé, j'ai été malade pendant toute une nuit. Je me demande si les sorciers africains connaissent la recette du Polynectar ou de la Felix Felicis …
( Felix Felicis ! Voilà ce qu'il me faudrait ! Juste une goutte et j'aurais la chance de découvrir le remède miracle ! Mais c'est introuvable sur le marché. Je me souviens que le professeur Slughorn savait la préparer. Qu'est-ce qu'il est devenu ? Etonnant en tout cas que Potter s'intéresse aux potions. Ce n'était pas son fort autrefois. Il faut dire que le professeur Snape lui en faisait voir de toutes les couleurs ! )
… Enfin heureusement que j'ai ça pour m'occuper car j'ai beaucoup de temps libre. Avant que tu viennes, je vivais dans une espèce de brume comateuse. Un des Maîtres guérisseurs était même étonné que j'en sois sorti. J'ai dit que c'était dû à ta présence. Il a hoché la tête. A ses yeux tu es un puissant sorcier. Reviens vite, ô grand manitou, ta réputation de marabout n'est plus à faire
Draco sourit mais il était songeur. Il avait déjà parcouru quatre feuillets. Il en restait deux. Potter devait vraiment s'ennuyer pour écrire autant !
Enfin, je ne suis pas trop à plaindre, continuait-il. Je rencontre beaucoup de gens maintenant que je peux m'habiller. Ils voient que je vais mieux et ils ont l'air contents. Je reçois aussi des visites. Un jeune adolescent nommé Iméo est venu de ta part pour me couper les cheveux et les coiffer. « En souvenir du passé » a-t-il précisé. Il le fait par magie, sans toucher ma tête, comme cette dame l'avait fait le soir de la fête. C'est sa mère. Elle m'avait donné un collier pour ma coiffure. Mais Iméo est content de venir. En même temps, il me raconte les potins de la cité. Etonnant comme les nouvelles vont vite ici ! Dommage que ses belles coiffures ne durent qu'une journée, le lendemain, je suis de nouveau tout ébouriffé.
Ama Zié, la Gardienne des abeilles, m'a envoyé son fils Faron porteur d'un petit pot de miel de palme. Son frère a grimpé dans l'arbre mais il n'a pas pu en prendre plus sinon les abeilles sauvages auraient eu faim. Je suis un peu ennuyé. J'aurais voulu lui donner quelque chose en échange du miel, faire un troc, mais il n'a pas voulu. Selon sa mère, c'est la cité qui prend en charge la nourriture du chamane. Et pour une fois qu'il peut manger quelque chose de bon ! C'est vrai, je me suis régalé ! Crois-tu que tu pourrais apporter des petits cadeaux à distribuer quand tu reviendras ? Des trucs bien de chez nous, des dragées surprise de Bertie Crochue ou des choco grenouilles par exemple ? Mais je ne voudrais pas t'encombrer.
Madibo aussi vient me voir, il me parle de toi …
Draco ne pouvait pas deviner à quoi pensait Harry quand il avait écrit le nom du jeune danseur … Le Griffondor revoyait le baiser échangé entre eux la veille de son départ … Etrangement, maintenant ça lui semblait normal. Cela provoquait encore en lui une bouffée de chaleur mais ça le faisait aussi sourire avec une indulgence amusée. Il se demandait quel effet cela faisait d'être embrassé par un homme et parfois, la nuit, il rêvait que Draco … Mais cela restait flou dans sa tête. Il attendait avec impatience le retour de l'ex-Serpentard, il savait que ça le rendrait heureux mais il n'osait pas aller plus loin. D'ailleurs, s'il tentait un rapprochement, il se ferait sûrement repousser avec mépris …
… Il me raconte aussi sa vie, disait la lettre. Il n'est pas seulement cueilleur de noix et danseur, il est surtout apprenti bâtisseur. Il étudie auprès d'un Maître la bonne façon de construire des cases, leur implantation par rapport au vent et au soleil, l'emplacement de la cheminée qui détermine tout le reste, le matériau à utiliser pour monter des murs solides, le tressage et la pose des cloisons et du toit, et surtout les formules magiques qui font de ces cases, en apparence petites, des maisons extensibles. Sa vocation lui est venue quand il a compris qu'il était un agile grimpeur et qu'il n'avait pas le vertige. Il a encore des années d'études pratiques devant lui mais il est fier de ce qu'il fait. Il m'a aussi confié qu'il avait un ami, un des chanteurs qu'il appelle Mona. C'est un garçon séduisant et …
La suite de la phrase aurait dû se trouver sur la feuille suivante mais Potter passait tout de suite à autre chose.
… Boréa vient régulièrement pour apprendre l'anglais. Elle a trouvé du travail et elle est vraiment heureuse d'être restée ici. Elle a une excellente mémoire. En fait elle connaissait pas mal de mots mais elle ne savait pas les prononcer et les assembler. Elle a fait des progrès remarquables. En son nom, Maître Félaro a fait un troc avec le vieux sorcier de son village. On lui a versé un dédommagement qui lui permettra d'avoir une servante. Et la cité lui a racheté, en échange de deux chèvres, le fameux livre que Boréa aimait feuilleter. Il doit y en avoir un exemplaire à la bibliothèque de Poudlard. C'est une ancienne version illustrée du grimoire d'un nommé Honorius, un truc qui mélange magie blanche avec des recettes de potions et magie noire avec invocations des démons. Il est en assez mauvais état. Les relieurs ont entrepris de le restaurer. Du coup, Boréa se sent en dette vis à vis de la cité mais le savoir qu'elle apporte compense largement ce fait. Elle a vraiment un pouvoir étonnant sur les animaux.
( Le grimoire d'Honorius ? Mais c'est un trésor ce livre-là ! Bien sûr, il y a toute une partie qui maintenant semble ridicule mais quelques recettes de potions, d'onguents et de préparations restent valables. La Pervenchère ou Aiguise Méninges, c'est de lui. Le professeur Snape nous en avait fait préparer en cinquième année. Londubat avait fait exploser son chaudron et bien sûr Potter avait raté la sienne ! )
… J'ai aussi reçu une visite bizarre, continuait la lettre. Un conducteur de carriole taxi, Riad, est venu me voir. Tu le connais, c'est lui qui t'a conduit chez la Gardienne des abeilles. Il voulait savoir si je pouvais « désenvoûter » un quartier de la ville où avait vécu un sorcier blanc maléfique. J'ai pensé à Voldemort. Tu m'en avais parlé un soir. Riad dit que le sort peut être rompu parce que l'eau est revenue dans le puits et il pense aussi que c'est à un sorcier anglais de le faire. Aucun Maître de la cité ne connaît le contre sortilège. Mais je t'avoue que je ne me sens pas la force de lutter de nouveau contre le Lord Noir même en fantôme. Riad a été très déçu quand je lui ai dit que je pouvais guérir les gens mais pas les maisons. Puis il a ajouté une chose étrange « Oui, pour lutter contre une malédiction pareille, il faudrait au moins être deux. Peut-être que Maître Draco pourrait le faire avec vous ? » Je n'ai rien répondu, je ne pouvais pas m'engager pour toi. Il reviendra sûrement à la charge quand tu seras de retour. Je voulais te prévenir. Mais surtout que ça ne t'empêche pas de revenir bientôt.
Ama Saé et tous ceux que tu connais t'envoient leurs salutations. Quand ils sont su que je t'écrivais une lettre, ils m'ont prié de te dire que la cité sera heureuse de te revoir et qu'il y aura une fête pour ton retour. La distillation des Mirabilis est presque terminée. La « potion magique » nouvelle sera prête. Ne nous fais pas attendre trop longtemps. En même temps que cette lettre, j'envoie un courrier au Ministère de la Magie pour leur dire que tout va bien et que je serai bientôt de retour à Londres. ( Enfin je l'espère ! ) A bientôt.
En bas de la feuille figurait le signature : Harry Potter. Machinalement Draco la retourna. En haut de la page restée blanche, il y avait juste quelques mots « Tu me manques, ne m'oublie pas. » Ça sonnait comme un appel au secours. Du moins, c'est comme ça que Draco le ressentit.
Il envoya une réponse quelques jours après puis il commença ses préparatifs.
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