Chapitre 1 Un matin de la mi-septembre, Hélène Polet se tenait au pied du lit de son fils avec une tasse de thé en guise de réveil matin. En effet, une nouvelle année scolaire débutait en ce jour et ce petit rituel s’était installé chez les Polet depuis de nombreuses années. Hélène était une maman sur-protectrice de trente-huit ans, qui avait élevé son fils seule. Elle arborait, à ce moment là, un immense et magnifique sourire qui d’ailleurs ne quittait pratiquement jamais son doux visage. Comme il n’y avait pas la moindre réaction sous la couette, elle se décida à l’appeler. « Julien », dit-elle avec douceur. N’obtenant ni mouvement, ni réponse, elle dut s’y prendre à plusieurs fois. Elle le secoua même légèrement pour qu’il réagisse enfin. « Ah ! Quoi?! Qu’est-ce qui se passe?! … Maman ? » bafouilla-t-il, avant d’ajouter : « Bon sang, je rêvais… Tu m’as fait peur ! » « Bonjour mon bébé, bien dormi ? » pouffa-t-elle, devant la mine renfrognée du jeune homme. « Si ma marmotte préférée ne veut pas arriver en retard pour son premier jour, il est temps de se lever », se justifia-t-elle. « Maman… J’ai vingt ans ! Imagine un peu si je n’avais pas passé la nuit seul, j’aurais eu l’air de quoi ? Et qu’est-ce que tu aurais fait, hein ? Dis-moi un peu », soupira-t-il. « Oh… Hé bien… J’aurais apporté deux tasses au lieu d’une? » s’esclaffa-t-elle en ressortant de la chambre. Son attitude amusa Julien, elle ne changerait jamais ! Il adorait sa mère, ils étaient très complices. Il s’imaginait d’ailleurs très bien rester vivre avec elle jusqu’à la fin de ses jours. Avec des pensées comme celles-là, il était moins surpris qu’elle le traite toujours comme un enfant. Julien Polet, était un jeune homme d’un mètre quatre-vingt, au corps athlétique sans être exagérément musclé. Il avait de belles prunelles bleu foncé bordées de cils bien fournis et une longue chevelure noire. Il rentrait en deuxième année à l’université, où il étudiait la littérature. C’était un garçon serviable et gentil, très populaire, aimé des élèves mais également des professeurs car il était respectueux et bon élève. Enfin préparé, il rejoignit sa mère qui lui servait son petit déjeuner. Il l’enlaça en lui embrassant le cou comme il savait si bien le faire. « Ce n’est pas la peine de prendre congé à chaque rentrée comme quand j’étais petit maman, je sais que tu as beaucoup de travail et je ne suis plus un bébé », lui suggéra-t-il. « Mais tu seras toujours mon bébé ! Et j’y tiens, alors laisse-moi ce plaisir », répliqua-t-elle. « Invite tes amis à dîner ce soir, comme cela vous pourrez vous raconter vos vacances en détails », changea-t-elle de sujet. « Merci maman, ils seront ravis de venir comme toujours », répondit le garçon. « Préviens Tristan que je ferai du gâteau au chocolat », gloussa la maman en lui faisant un clin d’œil. « Dans ce cas, c’est certain qu’au moins lui sera là ! Peut-être même qu’il sèchera les cours pour venir tout de suite ! » rajouta Julien, riant avec sa mère en pensant à son ami fou de pâtisseries et de tout ce qui contenait du chocolat. Ce dernier disait lui-même que s’il fallait un jour le torturer pour qu’il parle, la meilleure façon serait de l’attacher sur une chaise devant une table remplie de gâteaux en tout genre. Là, il était certain qu’il craquerait et avouerait tout ce qu’il savait, voire, ce qu’il ne savait pas ! Il remercia sa mère et se mit en route pour l’université. Il allait enfin revoir Tristan et sa sœur Lucie qui étaient partis en Italie depuis un mois, heureusement que leur ami Simon était resté, sinon il se serait senti bien seul. En tous cas, il ne s’était pas ennuyé car il n’avait pas arrêté de travailler pendant les vacances. Durant l’année, il ne travaillait que le samedi soir et le dimanche après midi dans un café-snack du centre ville mais pendant les congés, il y allait le plus souvent possible, car il tenait absolument à aider sa maman financièrement. Il n’avait jamais manqué de rien et il savait que ses études étaient onéreuses. Il était également inscrit dans un club de natation, il aimait beaucoup le sport ainsi que l’art. C’était pour cette raison qu’il avait choisi une option artistique, elle n’était pas du tout obligatoire mais il adorait ça. Son emploi du temps était donc très chargé. Julien avançait d’un pas décidé vers la cour de l’université, il avait emprunté un des petits chemins bordés d’arbres qui menaient à un immense bâtiment moderne. Des bancs étaient dispersés à divers endroits de la cour spacieuse. À la gauche de celle-ci, la bibliothèque était prolongée par les bâtiments de la section artistique, qui eux-mêmes menaient aux terrains de sport se situant à l’arrière du bâtiment principal. Sur la droite, se trouvaient des distributeurs de boissons et friandises à proximité d’une des entrées du campus. Les retrouvailles de chacun étaient bruyantes, cris et rires animaient toute la cité. Amusé, Julien observait ce spectacle lorsqu’une tornade lui tomba dessus. Lucie, sa meilleure amie, véritable boule d’énergie à l’allure de garçon manqué, les cheveux courts teints en brun. Elle était bien entendu accompagnée de Tristan, son frère jumeau. Ils avaient la même taille, un mètre soixante-dix environ et les mêmes yeux d’une couleur rare, bleus tirant vers le mauve. Ils se ressemblaient beaucoup physiquement, tout en ayant un caractère complètement différent. Tristan était calme et posé, contrairement à sa sœur. Ses cheveux blonds dorés, légèrement ondulés lui arrivaient sous les épaules, son corps et les traits de son visage étaient fins et délicats. Lucie suivait les mêmes cours que Julien à l’exception de l’option artistique, qui était le seul cours qu’il partageait avec Tristan. Ce dernier étudiait la psychologie. Il ne ratait d’ailleurs jamais l’occasion de les faire marcher, en leur disant que pour pouvoir se pencher sur des cas aussi désespérés que les leur, il n’avait pas eu le choix. « Juuliiiennn ! Comme tu nous as manqué, alors ces vacances ? Combien de cœurs as-tu encore brisés ? » s’exclama Lucie. « Elle dit ça mais elle aussi s’est trouvée un chéri en Italie ! » rétorqua Tristan avant que son ami ait pu répondre. « Je me disais aussi ! J’ai effectivement flirté un peu mais rien de bien sérieux, vous me connaissez… Et toi Tristan, toujours sage comme une image ? » questionna Julien. « Exactement ! On s’est juste amusés en soirée comme on le fait parfois, en échangeant nos rôles. Elle Tristan et moi Lucie, on a bien ri mais évidemment sur la plage pas moyen de tricher, c’est même pas drôle. C’était quand même de très bonnes vacances, dommage que Simon et toi n’ayez pas été là, ça aurait été parfait », expliqua le jumeau. « C’est vrai que ça serait super de pouvoir une fois partir à quatre. Cela dit, faites gaffe quand même avec ce jeu, vous pourriez un jour tomber sur un dingue qui n’apprécierait pas la plaisanterie… » les mit-il en garde, avant d’ajouter, « À part ça, ma mère vous invite à souper ce soir. Elle a même précisé qu’elle ferait du gâteau, vous venez ? » « Clair que je viens !! » répondit un Tristan très enjoué. « J’en étais sûr… » Pouffa Julien, avant d’éclater de rire avec Lucie, sous le regard faussement boudeur de son frère. « Quoi ? Tu ne comptais pas dire oui peut être ? » ronchonna-t-il. « Mais si, mais si, on te taquine… » rit-elle. « J’appellerai Simon pour lui demander de venir et je confirmerai à ma mère que tout le monde sera là », conclut Julien. - « Bon, c’est pas tout ça mais il est temps que j’y aille, vous deux aussi d’ailleurs, on se rejoint à la cafétéria à midi ? » lança Tristan. - « Ok à plus ! » répondirent-ils en cœur. Une fois installés, les élèves constatèrent qu’ils avaient un nouveau prof principal, l’ancien avait apparemment pris sa retraite. Ils ne savaient pas encore ce que ce nouvel enseignant valait, mais d’après les regards pétillants des filles de la classe, il ne faisait aucun doute qu’il commençait avec un sérieux atout dans sa manche. Car, il fallait le dire même si c’était assez honteux de l’avouer, pour la plupart, ce n’était pas vraiment le cours en lui-même le plus important, mais le capital sympathie du prof. Et un physique agréable était toujours le bienvenu. - « Bonjour à tous, je m’appelle François Nelson. Cette année, c’est moi qui vous enseignerai la littérature ainsi que l’histoire. Je vous souhaite à tous une bonne rentrée et j’espère que cette année sera bénéfique à chacun d’entre vous », dit-il en guise de présentation. Quelques filles firent des commentaires comme quoi elles seraient prêtes à prendre des cours d’un autre genre avec un prof tel que lui, ce qui le fit sourire légèrement mais il coupa rapidement court à ces réflexions pour commencer son cours. Julien trouvait qu’il avait réagi juste comme il le fallait, mettant fin à ces bavardages inutiles pour montrer son autorité, tout en souriant pour dire qu’il était amusé malgré tout. Cet enseignant arrivait à peine qu’il était déjà pratiquement accepté. L’année s’annonçait intéressante. Après que la matinée soit passée à une vitesse fulgurante, Julien et Lucie se confortèrent dans leur première impression, la façon d’enseigner de ce prof était vraiment très intéressante. Ils en étaient ravis. Les deux amis n’étaient pas du genre à juger un enseignant sur son physique. De ce fait, ils avaient été inquiets car certains professeurs donnaient leurs cours comme des automates ce qui était particulièrement soporifique, surtout pour les matières principales. Ce n’était pas le cas de Monsieur Nelson mais l’année commençait à peine, il était encore un peu tôt pour le juger. Julien et Lucie rejoignirent Tristan pour déjeuner et racontèrent leur matinée respective. Lucie, toute excitée comme à son habitude, s’empressa de dire à son frère qu’ils avaient un nouveau prof super canon. Elle ne cessa pas de vanter ses mérites pendant tout le repas, ce qui fit sourire son frère. Tristan se disait que sa sœur resterait décidément toujours aussi passionnée. Le professeur Nelson avait vingt-six ans, une coupe courte classique de cheveux châtains-blonds qui lui retombaient sur le front, et de grands yeux verts. Il avait les traits du visage assez fins mais n’était pas efféminé pour autant. Il était marié, certaines curieuses le lui avaient demandé. Il se croyait tiré d’affaire en leur répondant que oui, mais c’était vraiment mal connaître certaines. Elles n’arrêteraient pas leur drague intensive pour ce qui n’était qu’un détail à leurs yeux. Leurs anciennes connaissances vinrent les retrouver à la fin du repas. Les filles en profitèrent pour faire savoir à Julien qu’elles viendraient l’encourager à l’entraînement de natation, le mercredi et vendredi soir comme l’année précédente. Elles ne voulaient pas rater l’occasion d’admirer le beau Julien en maillot de bain. Lucie ne se gêna pas pour taquiner son ami à ce sujet. Avant de se séparer pour retourner en cours, Tristan fit savoir à Julien que lui aussi continuerait à venir l’encourager. « Oh, alors toi aussi tu en as après mon corps ! » s’amusa Julien qui riait toujours avec Lucie. Cette remarque ne plut pas du tout à Tristan, il savait pourtant que son ami plaisantait mais il se sentit blessé. « T’es trop con Julien ! » rétorqua ce dernier, en les quittant sur ces derniers mots. « Qu’est-ce qui lui prend ? Je rigolais… » demanda Julien, surpris. « Laisse tomber, ce soir il aura oublié », répondit Lucie, avant de l’entraîner vers la salle de cours. En fin d’après midi, Julien, Hélène et les jumeaux discutaient dans le salon en attendant Simon qui n’était pas encore arrivé. Simon était le voisin de Julien depuis pas mal d’année déjà, ils avaient tout de suite sympathisés. Ils habitaient chacun une petite maison de lignée dans un joli petit quartier assez animé, non loin du centre ville. Tristan et sa sœur quant à eux vivaient dans une grande villa dans les quartiers aisés. Simon était un grand sportif, il fréquentait d’ailleurs une école supérieure de sport. Il disait toujours qu’il voulait enseigner le sport aux adolescentes, histoire de les voir en petite tenue tous les jours, ce qui bien entendu lui valait à chaque fois de se faire traiter de pervers par Lucie. Il avait les yeux noisette et des cheveux courts marron très indisciplinés, pas un pour aller dans le même sens. Lucie et lui passaient leur temps à se chamailler mais ils s’adoraient, lui en était amoureux depuis longtemps mais il était bien trop fier pour l’avouer. Une fois arrivé, il salua tous le monde avec son enthousiasme habituel : « Salut les plus beaux ! » Après un bref coup d’œil à ses amis, il railla « Ha non ! Pardon, je ne t’avais pas vu Lucie… » « Salaud ! C’est comme ça que tu me dis bonjour après qu’on ne se soit pas vu pendant un mois ! » grogna-t-elle pendant que les garçons riaient. « C’est vrai ça, c’est la plus jolie notre Lucie », complimenta Hélène, en donnant une petite tape sur le dessus de la tête de Simon. Un peu de solidarité féminine que diable ! « Merci Hélène, heureusement qu’il y a au moins quelqu’un qui voit clair ici », se rengorgea Lucie en clignant des paupières pour plaisanter. « Celui qui répond à cette provocation sera privé de dessert ! » informa la maman de Julien. « Je n’ai rien dit ! » se précipita Tristan, ce qui fit redoubler leur rire à chacun. Ils passèrent une soirée très agréable, heureux de toujours être aussi proches, de véritables amis, inséparables et conscients de la chance qu’ils avaient. Hélène s’amusait à les appeler les mousquetaires, elle trouvait que Lucie ferait un super D’Artagnan, Julien Athos, Tristan Aramis et Simon Portos. À chaque fois Simon faisait bien remarquer qu’il n’était pas gros et Lucie trouvait toujours une petite remarque bien cinglante pour l’ennuyer. Aucun d’entre eux n’avait jamais eu de relation sérieuse et ils redoutaient tous un peu le jour ou cela arriverait, de peur que ça ne les éloigne, ils se promettaient que rien ne les séparerait mais en même temps ils savaient que c’était inévitable. Aucun d’entre eux ne se doutait que cette année allait chambouler leur existence à tous. À suivre… |