Le noir se dissipa autour de moi pour me laisser dans une bulle douce et chaude, baignée de lumière orangée. Je devais être au paradis, rien ne me faisait mal à première vue, et il faisait chaud. Malgré tout, la peur m'envahi, et je n'osais pas ouvrir les yeux, de peur de me retrouver dans un endroit qui ne ressemblait pas à mon imaginaire. J'écoutais ce qui se passait, l'oreille tendue, à l'affût du moindre signe qui me dirait ou je me trouvais. Dans un endroit à proximité du mien, j'entendais des pas.

Ils se rapprochèrent de mon paradis, et quelques secondes après, j'entendis le déclic d'une serrure. Ainsi donc, le lieu même de la félicité éternelle est composé de pièces et de portes ?

"Quand est ce que tu va te réveiller Roxas ?"

Un frisson me parcourut. J'aurais reconnu cette voix entre mille. C'était A. J'attendis que les pas repartent, et j'ouvris les yeux.

Tout d'abord, ce fut la lumière qui m'ébloui, puis quelques instants après, je retrouvais une vue convenable et j'observais mon environnement. J'étais dans une chambre, peinte en orange, en rouge, et agrémentée de doré. Une guitare décorée de flamme était posée contre un coin. Sur les murs, des photos de plusieurs personnes riant aux éclats étaient accrochées, y compris au dessus du lit dans lequel j'étais allongé.

Je me levais, et fis un tour dans la pièce. Sur le bureau, les mêmes images que le dossier 8 x 13 s'étalaient. L'une d'entre elle, celle ou A et moi mangeons joyeusement une glace, était marquée de nombreuses pliures blanches, qui montraient qu'elle avait été emmenée partout. En jetant un œil à la fenêtre, je vis une plage au loin, surmontée de falaises que fouettait la mer.

Falaises ?

Tout me revint en tête : la voix de A, l'obsession, la chute, ma persuasion de la mort… J'étais donc vivant !

Je me rendis compte que je n'étais plus habillé que d'un caleçon, et que je n'avais aucune trace de mes vêtements. J'ouvrais un placard au hasard, et tombais sur une multitude de jeans sombres. Je cherchais dans tous les autres placards, armoires, et commodes que je trouvais, mais ce n'était que les vêtements d'un autre, et pas l'ombre d'une de mes chaussettes.

Les pas reprirent dans la pièce d'à coté, et je ressentis le stress monter dans ma gorge. La porte s'ouvrit, et entra dans la chambre un jeune homme torse nu à l'expression étonnée, à la peau mouillée, sûrement à la suite d'une douche, habillé d'un simple jean, en train de se frotter les cheveux à l'aide d'une serviette. Un jeune homme mince et musclé, aux cheveux rouge feu et aux yeux vert émeraude.

"A…"

"Roxas, tu es réveillé !"

Il était enfin là, A, avec son beau visage, sa voix, son amitié et sa protection. Sans le vouloir, les larmes coulèrent le long de mes joues, avec le soulagement qui inondait en même temps mon corps. Je me sentis nu, sans défenses, mais protégé et surtout, je ne me sentais plus seul. Mes yeux ne pouvaient le quitter, et malgré ma vision troublée par les larmes, je ne voyais que lui, la brillance de ses yeux et l'intensité de ses cheveux.

Il fit quelques pas vers moi, et je ressentis la chaleur que son corps dégageait. Ma cicatrice se mit à chauffer agréablement.

Il passa sa main, d'une finesse rare pour les mains d'un homme, dans mes cheveux, avec un sourire non dissimulé.

"J'ai bien cru que tu ne te réveillerais pas Rox ! Tu m'as fait peur !"

"Heu…"

A me parlait comme si nous étions meilleurs amis depuis des années, mais moi, je ne connaissais même pas son nom entier. Malgré les photos qui montraient bien que nous avions été amis, peu être dans une autre vie, mais je ne me rappelais de rien. Il me parlait, avec son beau sourire, et je n'étais même pas capable de lui répondre. Il avait l'air si heureux, et pour rien au monde je n'aurais voulu faire du mal à la seule personne qui avait fait attention à moi et qui sûrement, m'avait sauvé la vie. Pourtant, je me décidais à lui poser la question qui me démangeait la langue.

"Dis-moi, heu, A… Où suis-je ?"

"Comment ça Rox, tu ne te souviens pas de chez moi ? Ca doit être la chute, tu ne te rappelle probablement plus de grand chose… Dis moi, comment je m'appelle ?"

Un nœud se serra dans le creux de mon ventre et ma gorge. J'allais lui briser le cœur, mais pourtant, il apprécierait peu être ma franchise… C'était un dilemme serré.

"Pour tout t'avouer, je ne me souviens que de la première lettre de ton prénom, alors je t'appelle A…"

Je détournais les yeux avant même de lui parler, tellement j'avais peur de lui faire du mal. Mais je l'entendis rire alors je me risquais à le regarder. Son sourire illuminait son visage et je me sentis soulagé.

"Ho Rox ! Dans ce cas, je vais jouer avec toi. Je vais tout faire pour que tu te souviennes de moi, avec toutes mes habitudes, et on verra bien ! Si dans quatre jours tu ne te rappelle toujours pas, je te dirais tout."

Il n'était finalement pas du tout énervé et il continuait à sourire. Il me fit un clin d'œil, et mon cœur se mit à chauffer autant que ma cicatrice dans mon dos. Je voulais plus que tout me rappeler son nom, lui qui ne me semblait vraiment pas méchant. Je trouvais le courage de lui parler en soutenant son regard, ce qui s'avérait difficile tant ses yeux me fascinaient. Je lui demandais où étaient mes vêtements, et il m'apprit qu'ils étaient dans la salle de bain, sur le sèche linge.

Il me proposa d'aller moi-même prendre une douche, car depuis les deux jours où je dormais, cela me ferais du bien. Il me guidait jusqu'à la pièce, sa main sur mon épaule. Il émanait de son corps entier une chaleur étonnamment douce. Je m'étonnais à vouloir qu'il me serre dans ses bras chauds, pour effacer ma solitude qui m'avait bercé si longtemps dans un hiver sans fin.

Effrayé par mes propres idées, je remerciais A pour son hospitalité, attendais qu'il sorte de la salle et me glissait sous la chaleur accueillante de la douche.